Shizuka flotta sur un petit nuage toute la journée. Elle quitta le Temple de la Lune après un agréable séjour dans l’onsen, encore toute embrumée par sa nuit, et manqua bien dormir dans le bain chaud. Elle s’était affalée contre l’épaule de son amour, sa tête glissant peu à peu sur ses seins, jusqu’à ce que l’Ange Nora vienne les réveiller, et ne leur dise qu’Hinata était attendue pour un conseil quelconque. Shizuka lui avait auparavant confié que Chikaku aimait beaucoup les animaux en peluche, et qu’elle avait déjà un lapin rose, un ourson, et que, si Hinata voulait lui faire plaisir, il faudrait lui acheter un petit panda en peluche. La guérisseuse, elle, avait peur, que voir Chikaku ne produise en Hinata un effet inverse, que le plaisir de voir une petite fille ne lui rappelle ses propres disparitions... Néanmoins, il était trop tard pour faire marche arrière. Shizuka quitta donc le Temple de la Lune, après un dernier bisou envers Hinata, et commença par se rendre auprès du secrétariat du Temple, afin de recevoir une attestation médicale à faire valoir à l’académie. Tandis qu’elle sortait du Temple, marchant le long des beaux jardins, avant de rejoindre les belles rues matinales d’Edoras, Shizuka rêvait, dans un autre monde. Hinata, la Princesse, était amoureuse d’elle... Elle avait passé une journée formidable, inoubliable, qui était passée vite, tellement vite... Impossible de croire qu’elle était déjà au lendemain. Elle aurait voulu que cette soirée ne se termine jamais, que cette nuit soit éternelle, qu’elle fasse continuellement l’amour à Hinata !
*Ohlàlà, j’ai encore du mal à croire, j’ai embrassé ses fesses... Mon Dieu, j’ai embrassé les fesses de la Princesse d’Edoras ! Et... Je les ai même mordues ! Ohlàlà, je vais mourir d’une crise cardiaque...*
Elle rougit furieusement, mais la honte était incapable de durer longtemps, tant elle avait été heureuse. Cette nuit avait été magnifique, et Shizuka, en marchant vers l’Académie, souriait benoîtement, attirant parfois quelques regards curieux. Elle n’avait pas dormi de la nuit, mais elle ne se sentait pas du tout fatiguée. Une terrible excitation agitait encore son corps. Elle aurait chanté en pleine rue si elle le pouvait, et, dans un conte pour enfants, on l’aurait probablement vu en train de se déhancher, de tourbillonner sur le sol, attirant à elle tous les passants et tous les curieux, dans une danse frénétique en sorte d’ode à la vie et à tout ce qu’il y avait de beau dans la vie. Shizuka, en réalité, n’avait jamais été aussi heureuse, et elle mettait au défi quiconque de trouver quelqu’un de plus heureux qu’elle en ce moment ! Hinata l’aimait. Hinata l’aimait, l’aimait, l’aimait ! Elle aurait voulu le hurler, le crier sous tous les toits ! Amoureuse, Shizuka était amoureuse, et cet amour était comme une vague irrépressible, traversant et balayant tout sur son passage. La jeune fleur bleue était heureuse, oh, tellement heureuse ! Hinata était clairement l’amour de sa vie !
Shizuka rejoignit l’Académie, déposa son attestation, puis prit sa journée, et retourna chez elle. Mamoru, son père, était parti aux rizières depuis longtemps, et Aiko travaillait aussi. Quant à Megumi, elle gronda volontiers Shizuka, car, en son absence, elle avait dû s’occuper de Chikaku... Mais Megumi comprit rapidement que quelque chose s’était passé.
« Père était mort d’inquiétude, mais Aiko a été au Temple de la Lune, et on lui a dit que tu veillais toute la nuit sur le chevet de la Princesse. La Princesse était si malade que ça ?
- Euh.... Je... »
Non, pas vraiment, c’est juste qu’elles avaient fait l’amour comme des folles ! Mais, et bien, ce n’était pas facile à dire. Shizuka se mordilla donc les lèvres, s’excusa, puis passa la journée à s’occuper de Chikaku... Ce qui l’amena à faire une sieste avec elle, Chikaku confortablement lovée dans ses bras. Aussi excitée qu’elle soit, Shizuka réussit à dormir une petite heure, et, quand elle se réveilla, elle dut s’efforcer de prendre son souffle. Mamoru venait de rentrer, et, comme à chaque fois, il exigeait de pouvoir embrasser chacune de ses filles.
« Nous ne t’avons pas vu cette nuit... Est-ce que tout s’est bien passé au Temple de la Lune, Shizuka ?
- Oh... Euh... Oui, oui...
- Alors... Tu l’as vu? La Princesse ?! »
Shizuka rougit jusqu’aux oreilles, et préféra filer vers la cuisine, tenant encore Chikaku dans ses bras. C’était généralement Shizuka qui faisait la cuisine, et elle lui tendit Chikaku. Son père la prit entre ses solides mains, la voix pleine d’espoir.
« Je... Euh... Oui, je l’ai vue...
- Oh... Ma petite fille a vu la Princesse... C’est magnifique, oh, c’est magnifique ! »
Mamoru en avait presque les larmes aux yeux, et Aiko se rapprocha, bras croisés.
« Est-ce que tu as réussi à lui parler de notre situation d’endettement ?
- Aiko ! C’est la Princesse, et elle é&tait malade, on... On ne peut pas juste venir comme ça chez elle et exiger d’elle qu’elle...
- Si, justement, on le peut ! Nous sommes ses sujets, pas ses esclaves, non ?! Tu trouves ça normal que 95% de tes bénéfices finissent directement dans les taxes d’Edoras, juste parce que tu es un homme ?! Si ça continue comme ça encore une saison, on devra vendre la...
- On ne vendra pas la rizière, Aiko ! »
Mamoru avait une voix bourrue, et la seule hypothèse de vendre la rizière l’énervait. Il haussa le ton un peu trop fort, ce qui fit que Chikaku, effrayée, se mit à pleurer.
« Oh, pardon, ma puce, Papa a haussé la voix un peu trop fort. Pardon, pardon, pardon ! »
Il couvrit Chikaku de baisers. Mamoru avait fait pleurer toutes ses filles avec sa voix forte, et Shizuka se mordilla les lèvres. Depuis quelques semaines, Papa et Maman ne cessaient de se disputer. La saison n’était pas terrible, et les taxes edorassiennes avaient encore augmenté, à destination des exploitations ayant des propriétaires ou des gérants masculins. L’idée était de contraindre ces gens à abandonner leur propriété en faveur de leurs femmes, mais Aiko avait toujours refusé, arguant que c’était l’héritage patrimonial de Mamoru. C’était une nouvelle manière de punir les hommes pour le putsch au Temple de la Lune...
Shizuka fit la cuisine, puis se rapprocha ensuite de la table, tout nerveuse. Sa famille avait progressivement compris qu’elle leur cachait quelque chose, et, pendant ce temps, l’heure approchait... Hinata devait être en route. Shizuka respira bruyamment, et Mamoru finit par aborder le sujet :
« Qu’est-ce qui t’arrive, Shizuka ? Pourquoi le repas n’est pas encore prêt ?
- Je... Euh... J’ai quelque chose à vous dire... »
Toute rouge, elle baissa la tête, entortillant ses doigts. Le temps se mit à passer, avant qu’elle ne finisse par lâcher la phrase tant attendue, d’une toute petite voix, faible :
« Je... Je sors avec que... Avec quelqu’un... »
Bon Dieu, ce qu’elle avait chaud ! Elle se mordilla les lèvres, en ayant envie de devenir une petite souris. Sa phrase amena un silence circonspect autour de la table. Mamoru cligna des yeux, et lui posa ensuite la question tant attendue :
« Mais... Euh... On la connaît ? »
Pour toute réponse, Shizuka hocha la tête de haut en bas... Et, au même moment, on appuya sur la sonnette.
La porte d’entrée donnait directement vers le salon. Surpris, Mamoru tourna la tête. Qui cela pouvait-il bien être ? L’homme se redressa, et marcha pesamment vers la porte, tandis qu’Aiko, sourcils froncés, observait sa fille. Shizuka, elle, savait très bien de qui il s’agissait, et son cœur était en train d’hurler dans sa poitrine. Sa main se posa sur la poignée de la porte, et il la fit coulisser, puis...
« Oh mon Dieu ! »
*BOUM !*
Mamoru venait de tomber en arrière, s’écroulant sur le sol...