Le stadium de Seikusu était beaucoup plus rempli que ce matin, où il n’y avait que quelques tentes et vans ici et là abritant les fans venus des autres provinces du Japon. La police encadrait étroitement le rassemblement, par le biais de multiples barrières et autres patrouilles. Les parkings entourant le stade étaient noirs de voitures, de bus, de camionnettes, et d’autres véhicules. Avec sa voiture, Félicia en aurait eu pour des heures dans les bouchons, mais, fort heureusement, elle avait choisi de prendre sa moto, filant le long des ruelles et des petites rues de Seikusu, une ville qu’elle commençait à connaître, afin d’éviter les obstacles et les bouchons. C’était un festival de rock international, et il y avait des fans venant même de pays éloignés. Un beau regroupement. On tablait sur des milliers de personnes. La musique avait toujours eu le don de réunir les foules, encore plus que des meetings politiques. Il y avait de nombreux hélicoptères et des équipes de journalistes survolant la zone. Félicia arrêta sa moto à l’arrière du stadium, dans un coin un peu plus tranquille.
Elle portait sa combinaison noire moulante en cuir, et descendit de la moto. Aoki était avec elle, et Félicia l’embrassa sur les lèvres, comme pour l’encourager. La Chatte Noire avait choisi de prendre sa moto, et quelque chose lui dit qu’elle avait bien fait, vu les circonstances.
« Je vais nous ouvrir un passage, Aoki, attends ici... »
Rentrer dans le stadium serait plus difficile que ce matin, car il y avait plus d’agents de sécurité. Félicia avait donné à Aoki un petit sac à dos, qu’elle récupéra. L’agile jeune femme escalada ensuite le grillage sans problème, puis atterrit de l’autre côté, dans une sorte d’allée de service, avec de gros tuyaux filant le long du sol, et de gros blocs métalliques abritant probablement des centres électrogènes, ou des machins de ce genre (Félicia n’était guère une spécialiste). Elle ouvrit son sac à dos, et en sortit des pinces coupantes, puis les utilisa pour sectionner le grillage, tout en restant attentive, veillant à ce qu’aucun vigile ne s’approche trop. Elle ouvrit ensuite ce dernier, offrant ainsi à Aoki un passage.
Les deux femmes étaient parties rapidement de son appartement, après leur conversation. Pas de prolongations, même si Aoki lui avait offert de délicieuses promesses pour un succulent match-retour. Félicia la laissa passer de l’autre côté, puis s’avança la première. Elle remonta le long de l’allée, jusqu’à s’approcher d’une porte de service, évidemment verrouillée. Piochant encore dans son sac à dos, la Chatte Noire en sortit un jeu de rossignols, et l’utilisa sur la serrure. En tant que cambrioleuse experte, il était essentiel de savoir forcer des serrures. Félicia aurait tout à fait pu être serrurière, si elle n’aimait pas ce frisson, cette excitation qui remontait le long de son corps à l’idée de violer l’intimité d’une personne, et, surtout, de prendre des risques. La porte s’ouvrit rapidement, et le duo fila dans un couloir de maintenance.
On pouvait entendre les vibrations du public se trouvant au cœur du stade. L’excitation était à son comble, et, cette fois, il n’y eut aucun vigile malade pour les attaquer. Félicia rejoignit rapidement un escalier de maintenance. Elle dirigeait leur petit duo, et se dissimula dans un coin, en laissant un vigile passer. Il parlait dans son talkie-walkie, s’adressant à d’autres vigiles, en courant rapidement. Elle le laissa partir, puis s’enfonça dans un couloir éclairé.
*Barry, Barry,... Où es-tu ?*
Félicia opta rapidement pour trouver un déguisement qui leur permettrait de s’avancer tranquillement dans le stadium, et fit signe à Aoki de s’abriter dans une salle de maintenance... Un placard à balais, en somme.
« Attends-moi là, ma puce, je vais aller assommer quelques vigiles. »
Ce qu’elle allait faire n’était pad très orthodoxe, mais, de base, s’infiltrer dans un stade ne l’était pas. La Chatte Noire embrassa une nouvelle fois Aoki sur les lèvres, puis sortit, et se déplaça bien plus rapidement, maintenant qu’elle était seule. Elle ne tarda pas à trouver une patrouille de deux vigiles.
« Reçu, Central... Non, pas de fans à signaler dans ce coin... »
L’homme referma sa radio, puis se rapprocha d’un distributeur.
« Merde, soupira l’autre, ’me dis pas que tu as encore soif !
- On va patrouiller toute la nuit ici, alors je crois que j’ai bien droit à mon soda... »
L’autre vigile soupira, mais, au moins, Félicia évita le classique des toilettes. Elle se tenait dans leur dos, et bondit rapidement sur eux. Son genou heurta la nuque du vigile se tenant en retrait, l’envoyant s’étaler sur le sol. Surpris par le bruit, l’autre se retourna rapidement, mais pas assez vite. Félicia, après avoir assommé le premier, fit une roulade, puis se catapulta à l’aide de ses jambes arrières, et s’écrasa sur l’homme. Il n’eut que le temps de pousser un bref hurlement de surprise. Son corps heurta le distributeur, puis il se reçut un coup à hauteur de la nuque, qui l’envoya dormir. Le temps lui étant limité, Félicia se dépêcha de retrouver Aoki, puis l’amena devant le distributeur.
« Aide-moi à les traîner dans le placard ! »
Fort heureusement, personne d’autre ne vint les déranger, et, une fois les deux loustics dans la pièce, Félicia entreprit de les déshabiller.
« On va enfiler leur tenue... Tu peux te mettre en sous-vêtements, si tu veux. »
La combinaison de Félicia était suffisamment moulante pour lui permettre d’enfiler l’uniforme d’agent de sécurité par-dessus. Elle vissa la casquette sur son crâne. Il faudrait vraiment tomber sur quelqu’un d’observateur pour remarquer la supercherie... Autrement dit, quelqu’un qui vérifierait leur badge. Félicia attacha les deux hommes l’un à l’autre, à l’aide d’un ensemble de chiffons et de serviettes se trouvant dans la pièce, puis, ne pouvant s’en empêcher, elle embrassa à nouveau Aoki.
« T’es sexy en agente de sécurité... Encore un peu, et je me verrais bien faire avec toi le classique de la policière voulant punir la voleuse incorrigible... »
L’un de ses jeux préférés avec Spidey... Qui sait, c’était peut-être une piste à tenter... Pour la suite. Pour l’heure, les deux femmes étaient déguisées en agents de sécurité... Des agents de sécurité féminins. En soi, ça n’avait rien d’impossible, mais Félicia savait qu’il allait falloir éviter les questions indiscrètes.
« Allez, on trouve ce Barry, et on le fait parler... »
Pendant ce temps, dans l’entrée de service du stadium, une grosse voiture s’approchait du portique de sécurité, et s’y arrêta. C’était une épaisse berline aux vitres noires fumées. C’était l’entrée de service pour les musiciens et les chanteurs, et on pouvait voir de multiples camions dehors, où tout le matériel avait été déchargé depuis ces derniers jours. Un vigile, surpris, s’avança vers la voiture. La vitre du chauffeur coulissa, et, avant même que le vigile ne puisse poser la moindre question, l’homme lui montra sa carte.
« Je...
- Nous voulons voir M Wheeler. Immédiatement. »
La carte appartenait au Kōanchōsa-chō, aussi connu sous le sigle AISP (Agence d’Investigation de Sécurité Publique)... Les services secrets japonais.