Avant de vous parler de Laura, laissez moi vous raconter l'histoire de son peuple :
Aphrodite n'avait jamais aimé les Sirènes de la Grèce antique, ces êtres hideux mi-femme mi-oiseau ; elle n'avait donc dans un premier temps pas jugé nécessaire d'infliger à Terra la présence de ces créatures meurtrières dénuées de toute sensualité.
Son opinion sur la question changea quand, vaguement lassée de ses lectures japonaises, la déesse se plongea dans le roman de Hans Christian Andersen ( oui, "La petite Sirène" ). Quelle lecture poignante ! Quelle tension érotique palpable se dégageait implicitement de chaque page, dans ce récit où la mort côtoyait l'amour à tout instant. Troublée par ce récit, elle sentit qu'il manquait quelque chose au monde qu'elle avait créé : des êtres pour lesquels la passion et la mort seraient inextricablement liés ; des êtres pour lesquels l'amour ne pourrait jamais être banalisé, car menant sans cesse à une fin tragique. Alors elle créa les Sirènes : de séduisantes femmes au corps terminé d'une queue de poisson, vivant sous les eaux, animées par un farouche besoin d'aimer et d'être aimées par les hommes. Elle leur donna le pouvoir de changer leur queue en pair de jambes lorsqu'elles se trouvaient hors de l'eau, ainsi que celui de faire perdre la raison aux hommes par leur chant. Enfin, pour achever son œuvre elle les frappa toute de la même malédiction, qu'elle énonça ainsi :
"Lorsqu'une Sirène s'unit à un homme, cet homme doit mourir avant que 24 heures ne soient écoulées. Si le délai n'est pas respecté, la Sirène est dissoute et son corps retourne à la mer dont elle est issue."
Alors les Sirènes commencèrent leur terrible et magnifique office : attirer les marins égarés, les pécheurs isolés et les touristes insouciants dans leurs bras, avant de les éliminer. Une Sirène peut se déplacer sur la terre ferme comme bon lui semble, cependant elle est par nature trop attachée aux grandes étendues d'eau pour y demeurer longtemps.
Revenons-en à nos moutons :
Laura naquit dans les remous de l'océan un jour de pluie. Les Sirènes naissent de nulle part, un beau jour, au milieu des eaux. Certaines d'entre elles disent que leur nombre est constant, et que lorsqu'une Sirène meurt, une Sirène nait. Chacune d'entre elles serait donc le fruit du sacrifice d'une autre, qui n'aurait pu se résoudre à tuer son amour.
Les pleurs d'une Sirène nouvellement née ne tardent jamais à être entendus par ses semblables, qui recueillent la petite et l'élèvent en communauté. Dès leur plus jeune âge, ces jeunes filles apprennent à accepter et apprécier leur nature. Les Sirènes ont en effet une idée particulière de la valeur de la vie : si elles considèrent presque les femmes humaines comme leurs égales, elles donnent aux hommes un statut particulier ; "Les hommes sont faits pour l'amour, ma petite Laura. Il ne faut pas se sentir coupable de tuer un homme, car il est de son destin d'aimer et de mourir, comme il est de notre nature de séduire et de tuer, encore et encore, jusqu'à tomber amoureuse et que notre corps soit rendu à la mer" répétait souvent Hélèna, qui s'était occupé d'une grande partie de l'instruction de la jeune Laura, avant qu'une véritable amitié ne se tisse entre elles lorsque celle-ci commença à prendre de l'âge.
Le crédo répété par Hélèna était admis par la plupart de ses consoeurs, qui n'avaient de toute manière pas d'autre moyen de trouver un sens à leur nature étrange. Car il est vrai que la plupart des Sirènes souffrent de regrets et de culpabilité à chaque meurtre, et qu'aucune d'entre elles ne peut connaitre l'amour au sens où nous les humains l'entendons. Aussi, piégées par la fatalité de leur existence, les Sirènes sont des êtres oscillant constamment entre la frivolité et la mélancolie, du moins lorsque leur besoin de sensualité est apaisé.
Laura ne dérogeait pas à ces règles ; durant quelques décennies elle vécut parmis les siennes, montant régulièrement à la surface pour attirer un homme dans ses filets. D'une nature plutôt timide, elle ne se mêlait qu'avec modération à ses semblables, privilégiant souvent la solitude et les longues journées passées avec son amie Hélèna, pour qui elle nourrissait des sentiments qu'elle avait du mal à cerner. En réalité, aucune Sirène n'avait jamais pensé qu'il était possible de tomber amoureux d'une autre Sirène. Et pourtant, en une dizaine d'année, cette idée se développa et s'installa dans un coin de la tête de Laura ; "Et si j'étais différente ? Si je pouvais aimer une femme au lieu d'un homme ? Si je pouvais aimer sans avoir à tuer ?". Plusieurs années durant, elle tourna et retourna cette idée dans son esprit, sans pour autant oser s'éloigner des coutumes de son peuple.
Un jour, son amie monta seule à la surface et disparut, comme tant d'autres avant elle. Détruite et esseulée, Laura rumina son chagrin pendant plusieurs jours. Peu de choses la retenaient encore parmis son peuple ; alors poussée par le déséspoir, elle se jeta à corps perdu dans la réalisation de son projet fou ; vivre une histoire d'amour avec une femme ( bien qu'elle n'ait pas vraiment idée de la manière dont elle pourrait s'y prendre ), et peut être se libérer de sa nécessité de tuer.
Elle se rendit donc sur la terre ferme pour la première fois de sa vie, plongée dans un monde inconnu et sans véritable idée de ce qu'elle recherchait, mais sans un regard en arrière.
Voici donc un petit état des lieux concernant notre héroïne et sa situation :
Les chants de Sirène de Laura ont le pouvoir d'hypnotiser la plupart des hommes ; soit dans le but de les attirer vers elle, soit dans celui de les plonger dans un profond sommeil. En réalité une Sirène peut également influencer les hommes de différentes manières, transmettant toutes sortes d'émotion uniquement par le chant, bien qu'elle en ait rarement l'utilité.
Bien que ces chants soient inopérants sur les femmes, Laura n'est pas sans ressource dans sa recherche de l'amour lesbien, puisqu'elle est comme toutes les sirènes d'une beauté hors du commun. Son physique est celui d'une jeune femme, bien qu'elle ait plus de 40 ans ; elle est assez grande ( 1m75 ) et sa silhouette fine aux courbes féminines a de quoi faire tourner les têtes. Elle est dotée d'un visage doux à l'air calme, entouré de longs cheveux noirs et lisses, sur lequel on peut souvent voir poindre la peine ou la joie. Il est beaucoup plus rare de la voir rire, les Sirènes n'ayant généralement pas un sens de l'humour très développé. Ses joues pâles ont une forte tendance à virer au rose, ce qui a tendance à trahir certaines de ses émotions, alors même que ses expressions se voudraient impassibles. Ses mouvements gracieux et son air mélancolique lui donnent parfois l'air d'appartenir à un autre monde ( ce qui est le cas ). Lorsqu'elle est sous sa forme aquatique, elle arbore une longue queue de poisson grise aux reflets bleutés à partir de la taille.
Note1 : Son prénom se prononce à l'Allemande ( LAORA ), et notre petite Sirène est pointilleuse sur ce détail.
Note2 : Ceci est une doublette