SHA
Comme elle s’y attendait, les archives municipales de Wallündrill étaient dans un grand bâtiment, vaste et aéré. A l’image de l’ensemble des bâtiments, celui-ci était tout en longueur, avec une série d’étages concentriques s’articulant autour d’un vaste puits, les rangées de livres se trouvant sur les flancs, des escaliers permettant de descendre. La bibliothèque de Wallündrill comprenait de nombreux ouvrages. C’était une ville très culturelle, en raison de sa position centrale. Au croisement de plusieurs grandes routes commerciales, Wallündrill brassait de nombreuses cultures et civilisations différentes. Outre une richesse économique, il en résultait une richesse culturelle qu’on pouvait ressentir le long des murs. Dans sa forme humaine, Sha s’avançait, les badauds ne la reconnaissant pas, mais levant les yeux, soit troublés par son imposante poitrine, soit marqués par ses yeux jaunes. Elle n’y fit pas attention, ayant d’autres soucis en tête, et se dirigea vers la section des archives municipales, ouvertes au public pour celles qui dataient de plus d’un siècle, conformément à la loi en vigueur dans la cité.
Sur place, elle chercha donc les informations relatives à la carrière de Wallündrill, et trouva l’un des registres concernant cette dernière. Concrètement, les archives comprenaient une série de dossiers regroupant différentes feuilles, ordonnances, décrets, ordres, rapports... Quantité de choses pompeuses, qui intéressaient les historiens, les académiciens, et les Déesses. Elle maintint le registre entre ses mains, écartant les pages. Tout était classé par année, et elle avait trouvé l’année de fermeture de la carrière à l’aide d’un catalogue. Il existait plusieurs registres par années, dépendant de l’activité législative, et elle comprit que ce registre-ci ne contenait pas les informations qu’elle recherchait. Soupirant légèrement, elle le reposa, et en ouvrit un autre, tournant les pages. Un rapport sur le nombre de biens vendus au marché... Un décret autorisant un navire à appareiller plus rapidement... Une ordonnance prévoyant la prochaine réunion du Conseil municipal... Rien de bien pertinent, rien de vraiment utile, mais elle ne se découragea pas, et continua à tourner les pages, jusqu’à tomber sur l’ordonnance qu’elle recherchait. Un sourire victorieux éclaira fugacement son visage en voyant que l’ordonnance ordonnait la «
clôture temporaire de la carrière 11 pour instruction ».
*
Bon, j’ai trouvé ce que je cherchais... Passons au reste, maintenant.*
Conservant le registre avec elle, elle alla vers un autre secteur de la bibliothèque : l’aile magique.
MILKA
Il connaissait le koshchey. Il n’avait jamais eu, jusqu’à présent, le malheur de tomber en personne sur l’une de ces créatures infernales, mais il en connaissait la légende. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que ce monstre était à la hauteur de sa légende. Une véritable monstruosité, qui s’avançait vers eux. La main sur le fourreau, Milka avait brandi son épée, prêt à se battre, prêt à donner jusqu’à sa vie s’il le fallait.
*
N’oublie pas l’essentiel !*
Il se rappela cet ordre de bonne sagesse, et attrapa un morceau de chocolat. Dans un combat, il ne fallait jamais négliger la préparation psychologique, indispensable. Il mordit donc dedans, et sentit un frisson de plaisir le traverser. C’était si bon, le chocolat... Milka releva alors la tête, prêt à intervenir, à aider Kiriko, mais vit que cette dernière, faisant fi de sa présence, avait attaqué de front le monstre !
«
Gente dame ! » s’exclama Milka.
Il courut pour l’appuyer, et la vit vainement tenter de trancher les pattes du koshchey. Sa carapace était bien trop résistante, et la lame rebondissait contre les pattes du monstre. Impossible de le blesser ! Milka s’élança également vers le monstre, mais ne fit pas long feu. L’une des pattes du monstre le frappa sur le ventre, le faisant décoller du sol. Volant comme une fusée, Milka s’écrasa à l’entrée de la galerie, roulant sur le sol, lâchant son épée, finissant à plat ventre. Il secoua la tête, ayant mal au ventre. Cette créature avait une puissance exceptionnelle. Il se redressa lentement, toussant douloureusement, ses poumons ayant souffert, et vit que Kiriko optait également pour une retraite stratégique. Milka récupéra son épée, se retourna, et décampa également, pensant à inspirer, à expirer, et à relever les jambes. Derrière eux, le koshchey faisait trembler le sol en les poursuivant, ses énormes pattes faisant trembler Milka.
Ne pas se retourner. Surtout, ne pas se retourner ! Milka suivait ce sage conseil en continuant à cavaler le long de la galerie. Les tentatives de Kiriko furent vaines, ne ralentissant même pas le koshchey. Ce n’était pas une machine à tuer pour rien. Milka et Kiriko parvinrent à un embranchement, et le Chevalier du Chocolat vit une sortie, à gauche. Une petite faille dans laquelle eux pourraient se glisser, mais où le koshchey serait bloqué.
«
Par ici, gente dame ! » s’exclama-t-il en la prenant brièvement par le poignet.
Il la laissa passer la première, galanterie oblige, et la suivit rapidement, le koshchey les traquant. L’abominable créature fonça vers le petit trou, et ses griffes à l’avant de sa tête, qui lui servaient à attaquer, jaillirent dans le conduit, déchirant la cape de Milka, arrachant un morceau de cette dernière. Il se retourna, et rampa en arrière, tandis que le koshchey cherchait à forcer le passage, pulvérisant le solide mur, faisant tomber de la poussière. Reculant en arrière, Milka ne vit pas que le sol s’abaissait en pente, et poussa un hurlement en tombant la tête la première. Son armure le protégea de nombreuses éraflures, et il s’affala en plein sur Kiriko, s’écrasant lourdement sur elle dans une autre sombre galerie.
«
Uffff... »
Il s’écarta de Kiriko, et entreprit de se relever, couvert de poussière. C’était une galerie particulièrement sombre, et il eut à peine le temps de respirer qu’il entendit des bruits de combat au loin.
«
Décidément, ça n’arrête jamais... J’espère que vous n’avez rien, gente dame. »
En tout cas, elle était un coussin très confortable ! Mais ça, Milka n’aurait jamais osé le lui dire, ayant bien compris que la sorcière était assez hargneuse. Il ne voulait pas la froisser. Il s’avança lentement, constatant, avec un certain soulagement, qu’il n’avait rien de cassé, et se rapprocha des bruits de combat. Il percevait les vibrations, indices significatifs qu’un koshchey était en train de se battre, et constata également, en se rapprochant, qu’il affrontait... Atil ! Ce dernier, enveloppé de feu, tournoyait dans les airs, balançant des boules de feu sur le koshchey, l’affrontant dans une autre grande galerie, sans que ce dernier n’arrive à répliquer.
«
Haha, tocard, nullard ! Raté ! Encore raté ! Prends ça dans ta gueule, tronche de cake ! »
Les jets de feu d’Atil semblaient surtout agacer le koshchey, plus que réellement l’endommager.