Comme un char dans un magasin de porcelaine... Euh... Hein ? [RP Abandonné...]

Ludya ne semblait pas comprendre dans quelle situation il se trouvait actuellement, si bien qu'il la ralentissait en lui demandant périodiquement quelques précisions alors qu'ils étaient en train de se diriger vers le portail. Ce que voulait Lucy, c'est seulement se barrer de ce monde sans causer plus de remous, et surtout le plus vite possible avant de se faire choper par les agents du SHIELD. Ils ont déjà failli l'avoir une fois, et elle se sentait plus que vulnérable dans ce monde à cause de cette organisation. En somme, il fallait pas traîner !

Une fois sur Terra, elle ne se détendit pas pour autant. Elle se rappelait que Ludya était nu, et au vu de l'hyper-sexualité de ce monde, il ne fallait pas rester dans les rues à cette heure aussi tardive de la nuit. Un guet-apens est toujours envisageable dans les bas-fonds de Nexus, surtout pour essayer d'attraper une créature unique. La diclonius devait rester constamment sur ses gardes, ne pas se faire avoir par un piège grossier ou quelque chose du genre. De plus, certains esclavagistes avaient des comptes à régler avec elle, ce qui faisait qu'elle n'était pas forcément en sécurité ici. Mais elle l'est plus que sur Terre en tout cas.

Lucy entendit Ludya parler, mais ne comprit pas là ou il venait en venir, et supposa qu'il disait cela uniquement pour se rassurer, jusqu'à ce qu'il ajoute :

Luuuucie... C'est moi où ça a l'air aussi dangereux que l'autre cotée ici ?

La diclonius soupira. Elle hésitait entre lui dire tout maintenant ou de le rassurer pour qu'il la suive dans un endroit plus sûr. Finalement, elle fit un peu des deux :

C'est pas assez sûr pour se balader seul en tout cas. Mais là où on va, tu seras en sécurité et tu auras le temps de réfléchir à ce que tu veux pour la suite.

Elle ne doutait pas que l'Ordre accepte de l'héberger pendant un temps, eux qui accueillent les esclaves fraichement libérés. Après tout, Ludya pouvait être considéré comme un ancien esclave, un ancien sujet de laboratoire. De plus, cela ferait pour eux une nouvelle recrue potentielle.

Ah oui au fait, moi c'est Lucy et pas Lucie.

...pour eux. La jeune diclonius avait encore du mal à se dire qu'elle faisait partie intégrante de l'Ordre de la Croix du Sud maintenant, même après avoir mené plusieurs escarmouches avec eux. Amélie et elle ont rejoint l'ordre depuis presque un mois maintenant après tout, et pour l'instant, s'en aller n'était pas à l'ordre du jour.

Finalement, Ludya et elle arrivèrent après quelques minutes de marche au repaire de l'Ordre de la Croix du Sud. Elle s'arrêta devant la porte et regarda l'ancien prisonnier toujours nu comme un ver.

Des questions ?

Rhââââ, tu pourrais pas apparaître DEHORS pour une fois ?!!

Toussant à en cracher  ses poumons, Dirzan continua de pester contre son collègue démoniaque pendant une poignée de secondes.

Oh, la ferme… J’ai d’autres chats à fouetter, j’ai pas envie de me prendre la tête avec toi aujourd’hui.

Alors évite de surgir de nulle part dans un PUTAIN DE NUAGE DE SOUFRE DÉGUEULASSE !!!

Ouais ouais, j’y penserai…ou pas.

Adoptant son apparence humaine, Talok prit une chaise à côté du semi-dragon et s’assit. Dirzan le foudroyait du regard, et si ses yeux avaient été des revolvers Talok ressemblerait maintenant à une passoire.

Préviens-moi quand tu seras calmé, ‘Zan, j’ai un truc à te dire. Et ça pourrait être important.

Pour commencer arrête de m’appeler  comme ça. Maintenant je t’écoute.

Son calme était tout  relatif et on voyait qu’il avait encore envie d’étrangler le démon. Démon qui n’en avait clairement rien à cirer et qui prit tranquillement ses aises. Il joua du bout des doigts sur la table, et d’un mouvement un peu brusque manqua de renverser la chope de Dirzan, riant quand ce dernier la rattrapa avec un juron.

Viens-en au fait ou je t’étripe.

D’accord, d’accord. Voilà : y a du monde qui arrive. Tu as entendu parler de Lucy, la diclonius qui nous a rejoints il y a un petit moment ? Eh bien elle nous ramène quelqu’un. Ils vont pas tarder à arriver, genre deux minutes.

Dirzan termina sa chope, attendit quelques secondes puis reprit la parole, cette fois vraiment calmé :

D’accord, je vais préparer une autre chambre, au cas où.

Et peut-être de quoi manger, j’ai pas l’impression qu’ils l’aient fait en chemin.

Ça marche. Quoi d’au…

Il s’interrompit brusquement pour couvrir son visage et ne pas avoir à tousser une nouvelle fois. Il écarta du mieux qu’il pouvait la fumée noire.

TALOOOOOK !!!!!

Pendant ce hurlement de frustration il fermait les yeux, aussi ne vit-il pas la porte s’ouvrir.

Alors Lucie s'inquiète quand même pour moi ! Elle laissera pas un Abyssian tout seul !

Il se mit alors à sautiller un peu partout. La diclonius allait le rabrouer pour pas qu'il attire trop l'attention sur lui, mais elle tiqua sur un détail. "Abyssian". C'est quoi ça ? C'est sa race ? Ou alors autre chose ? Elle ne lui en fit pas part. Ils auront tout le temps de s'y attabler une fois en sécurité, c'est pourquoi elle lui rappela son nom. Il réagit notamment en arrêtant de se faire repérer en sautillant de partout, mais il semblait ne pas pouvoir contenir sa curiosité et demandait tous les trois mètres un renseignement sur une chose ou une autre. Lucy resta silencieuse tout en réfléchissant à son problème d'Abyssian.

Une fois arrivée à destination, après qu'elle lui ait demandé s'il avait encore des questions, il lui demanda quand il allait manger. Mais pas aussi explicitement, car il semblait ne s'être nourri qu'avec des nutriments injectés directement dans son estomac. La diclonius sentit son ventre se nouer : il n'avait donc jamais goûté à la nourriture ? Il fallait y remédier au plus vite. Car quand elle avait redécouvert la nourriture, Lucy s'était senti revivre. Elle avait eu droit au même traitement que Ludya pendant une décennie. Sauf qu'elle connaissait le plaisir de manger. Elle lui sourit doucement :

Tu veux prendre des forces hein ? Tu vas voir, y'a bien mieux qu'un tuyau planté dans ton ventre. Je t'en dis pas plus pour l'instant, c'est une surprise.

Bien qu'elle soit une piètre cuisinière, elle pourrait quand même lui préparer quelque chose de nourrissant. Et de pas mauvais elle l'espérait.

Maintenant que je suis libre... Tu crois que je vais pouvoir... Rentrer chez moi un jour ?
Chez toi...

Instantanément, Lucy mit "Abyssian" en parallèle avec le "Chez moi". Cela voudrait donc dire qu'il vient d'ailleurs, d'une autre planète ou alors d'un autre monde... Et que les humains l'ont capturé ou quelque chose du genre.

Putain... fit-elle pour elle-même.

Elle le regarda d'un air désolé, comme si elle ne pouvait rien changer à cette situation.

Ludya, je... ça j'en sais rien. Je ne sais pas d'où tu viens, ni comment tu as fais pour venir et pour te faire choper par les humains... On... Viens, on va en parler à l'intérieur.

Elle ouvrit la porte, tombant immédiatement sur un hurlement d'une voix inconnue.

TALOOOOOK !!!!!
Eh ? s'exclama-t-elle, surprise, avant d'être envahie par un nuage de souffre et de recracher ses poumons.

Comprenant qu'il avait dû se téléporter ailleurs, elle ne s'épuisa pas la voix à lui hurler dessus, mais rentra à l'intérieur, et se mit à mouliner le vent avec ses vecteurs tel un ventilateur pour faire sortir l'épaisse fumée nauséabonde en moins d'une dizaine de secondes. Une fois qu'elle eut arrêté de tousser, elle leva les yeux et vit un homme inconnu avec des ailes de chauve-souris et des cornes sensiblement plus grandes que les siennes à quelques mètres d'une table où se trouvait une chope. L'intérieur ressemblait énormément à un bar classique de Terra, mais il s'agissait en réalité d'un refuge pour les esclaves fraichement libérés. L'Ordre de la Croix du Sud, ceux qui sont venus la chercher sur Terre. La diclonius maugréa :

Lui je vais me le faire un jour...

Elle s'adressa ensuite à l'inconnu :

'lu. Plus tard les questions, j'ai à faire. Installe-toi, finit-elle à l'attention de l'Abyssian, comme il se dénommait lui-même.

Elle se dirigea ensuite vers les cuisines afin de lui préparer un plat.

Lui je vais me le faire un jour...

Et elle était loin d’être la seule à penser ça… Personne n’aimait les téléportations intempestives de Talok, mais tout le monde rongeait son frein en attendant le moment où c’est le chef qui craquerait et le foutrait à la porte. Sauf que ça ne risquait pas d’arriver de sitôt : Talok était  bien trop utile à l’Ordre. Du coup Raphaël n’avait d’autre choix que de le garder, en essayant tant bien que mal de lui faire arrêter ses conneries.

Une fois la fumée dissipée, c’est-à-dire après une petite minute, Dirzan vit la porte ouverte et les deux personnes entrer. Le simple fait qu’ils aient pu passer la porte signifiait qu’ils étaient de l’Ordre, ou au moins l’un des deux, donc il devait s’agir de Lucy. Ils ne s’étaient jamais rencontrés mais on lui en avait un peu parlé, vu qu’elle était là encore il y a deux jours et que lui était de garde aujourd’hui.

Il y a d’ailleurs une nuance à apporter au terme « de garde » : personne ne monte vraiment la garde, mais il faut toujours quelqu’un dans la salle commune, au cas où. Et cette fois, c’était Dirzan qui s’y collait. Ça ne le dérangeait pas outre mesure alors tout le monde y trouvait son compte.

Bonjour. Pardon pour la…mauvaise surprise.

L’inconnu se faufila dans le porte-manteau sans la moindre gêne, puis alla ouvrir le placard où se trouvaient les armes pour les situations d’urgence. Autant dire qu’elles ne servaient jamais… Mais la créature ne regarda même pas les armes, sursautant plutôt en découvrant son reflet dans le miroir. Le semi-dragon se demanda d’ailleurs brièvement qui avait remis le miroir dans le placard, vu qu’il n’y était plus la dernière fois qu’il était passé.

'lu. Plus tard les questions, j'ai à faire.

Politesse zéro ? Elle commençait plutôt mal la Lucy. Mais bon, si elle avait vraiment « à faire », elle avait une excuse. Son compagnon par contre était assez amusant, singeant la diclonius à outrance. Même si son doigt sur la bouche lui était propre…

'Lu. Plus tard les questions !

Il alla alors s’asseoir sous une table. Il était décidément très drôle et Dirzan se retenait de rire, chose visible uniquement par son petit sourire. Et puis la première question partit, plus que surprenante :

Dis monsieur, tu sais où ça se trouve la planète putain ?

Euh… C’est pas mon domaine, l’astronomie, mais je crois pas que celle-là existe.

Il remarqua du coin de l’œil la diclonius partir vers la cuisine. Nope ! En trois pas il était juste derrière elle, une main sur son épaule.

Tu permets ? J’ai pour instruction de ne pas laisser les gens entrer là, sinon on se fait tous engueuler après. Vous avez faim ? Je vous prépare un truc.

Sur ce il entra, lui, dans la cuisine. Si Lucy le suivait elle se ferait mettre dehors jusqu’à ce qu’elle se lasse, et elle se lasserait forcément avant lui. Dirzan trouva, par ce qu’il aimait appeler un miracle, un plat déjà prêt, avec un petit mot indiquant qu’il pouvait l’utiliser s’il avait la flemme de cuisiner. Merci la chance… Il restait  juste à passer ça au four.

Cela fait, il revint dans la salle commune et s’accouda au comptoir pour observer Lucy et son compagnon.

Bon… Et maintenant, on peut poser des questions ? On a une dizaine de minutes avant que ce soit prêt, on fait les présentations en attendant ? Moi c’est Dirzan.

Dis monsieur, tu sais où ça se trouve la planète putain ?
Hein ?

Surprise de l'entendre parler ainsi, Lucy se retourna sur-le-champ lorsqu'elle entendit cette réplique, lançant un regard intrigué à Ludya. Par quelle magie avait-il déduit que "Putain" était une planète ? Cependant, elle se garda bien de répondre, laissant l'homme ailé se débrouiller avec ça pendant qu'elle s'occuperait de... De...

J’ai pour instruction de ne pas laisser les gens entrer là, sinon on se fait tous engueuler après. Vous avez faim ? Je vous prépare un truc.
C'est...

Elle n'eut même pas le temps de commencer sa phrase qu'il l'avait déjà arrêtée et qu'il s'était engouffré dans le cuisine. Elle resta là, immobile pendant quelques secondes, muette sous la surprise avant de se dire que ce serait toujours mieux que si c'était elle qui faisait la cuisine. C'est pourquoi elle rouvrit la porte uniquement pour lui dire Quelque chose de rapide ! avant de faire demi-tour et d'aller voir Ludya, planqué sous une table. Un sourire, chose rare chez elle, éclaira son visage lorsqu'elle le vit ainsi. Il semblait avoir tout à apprendre, y compris le principe de s'asseoir sur une chaise correctement. Elle s'approcha de la table jusqu'à ce qu'il ne puisse voir plus que ses jambes et la souleva avec deux vecteurs, lui enlevant ainsi son "toit". Elle le regarda dans les yeux et lui fit d'un air amusé :

Ben qu'est-ce que tu fous là-dessous ? Tu crois que ça va te cacher ?

Elle s'assit sur une chaise en face de lui et l'invita à faire de même. Une fois qu'il fut assit, elle reposa la table et y posa ses bras croisés. Elle pouvait enfin prendre le temps de le dévisager en pleine lumière. Ludya semblait clairement pas humain, bien moins qu'elle en tout cas au niveau de l'apparence. Sa peau est brune et ressemble plus à du cuir qu'à de la peau, il possède la musculature d'un catcheur professionnel, une longue queue, pas de sexe apparent et un morceau de métal incrusté dans sa poitrine. Et plus, il possède une force totalement hors du commun pour avoir balancé ainsi un tank. Pour Lucy, il s'agissait d'un être fascinant. Et surtout en danger. Il ne fallait surtout pas qu'il retourne sur Terre, ni même qu'il sorte d'ici avant d'avoir apprit les bases de la vie en société. Mais le plus important est...

Tout à l'heure, tu m'as parlé d'un tuyau qu'on t'enfonçait dans ton nombril et tu te sentais plus en forme. C'est une méthode barbare et dégueulasse qu'il faut oublier. Aujourd'hui, tu vas manger pour la première fois, et tu vas devoir le faire une ou deux fois par jour pour que tu restes debout. Tu vas voir, c'est beaucoup plus agréable.
Bon… fit la voix de l'inconnu derrière elle. Et maintenant, on peut poser des questions ? On a une dizaine de minutes avant que ce soit prêt, on fait les présentations en attendant ? Moi c’est Dirzan.
Lucy, lui annonça-t-elle en se retournant, et lui c'est Ludya. Il a passé toute sa vie entre les mains de scientifiques sur Terre. Je l'ai croisé alors qu'il essayait de se faire la malle et je lui ai donné un coup de main. En gros, il doit tout apprendre. Même à manger, si tu vois ce que je veux dire.

Directe et sans aucun tact, telle était la manière de Lucy. Elle n'a jamais fait dans la dentelle et elle ne comptait pas commencer aujourd'hui, surtout au vu des circonstances.

L’une des premières choses qu’on apprend quand on entre dans l’Ordre par la porte des affranchis, c’est que tout le monde a le droit de dire et faire toutes les conneries qu’il veut. Donc le coup de la planète Putain, c’en était simplement une parmi tant d’autres. L’imitation débile et exagérée aussi. Mais il y avait une chose qui était facilement remarquable : il ne faisait pas ça par choix. C’était plus qu’évident pour Dirzan, l’inconnu ne faisait qu’imiter la seule personne qu’il avait à disposition. Il suivait un modèle comme un enfant parce qu’il ne savait pas encore comment agir. Et ça, c’était parfaitement compréhensible.

Lucy, par contre, était comme chez elle. Elle était libre depuis longtemps, si ce n’est depuis toujours. Donc Dirzan avait le « droit » de la remettre à sa place s’il en ressentait la nécessité. Et inversement… Telles étaient les règles tacites de l’Ordre de la Croix du Sud. Personne ne les avait écrites nulle part, mais tout le monde les connaissait et les appliquait.

[…]oir, c'est beaucoup plus agréable.

Alors, aujourd'hui je vais manger ! Et aujourd'hui, je vais pas manger des Barbares et des dégueulasses. Lucy a trop des mots comiques que j'ai jamais entendus. Je garde les précieux mots de Lucy, putain ! Je retiens hihi.

Quel était le début de la conversation ? Il s’en foutait. Ce n’était pas son problème. Pour l’instant, en tout cas. Après si l’un des deux voulait lui raconter il n’allait pas non plus se boucher les oreilles. Là, tout de suite, il s’intéressa plutôt à la réponse à sa question. Lucy et Ludya. La chieuse et le gamin.

Ils iront loin, ces deux-là…et vite. Non, franchement, il est marrant ce p’tit gars.

Il a passé toute sa vie entre les mains de scientifiques sur Terre. Je l'ai croisé alors qu'il essayait de se faire la malle et je lui ai donné un coup de main. En gros, il doit tout apprendre. Même à manger, si tu vois ce que je veux dire.

Ding, erreur ! L’attitude de Ludya ne collait pas avec le discours de sa compagne de route. Dirzan hocha la tête, pensif. Le nouveau avait sûrement son mot à dire dans l’histoire, sinon il n’aurait pas fait cette tête-là. Ou alors il était seulement vexé de ne pas avoir pu parler lui-même sans être coupé. Dirzan le regarda dans les yeux et sourit.

Eh bien enchanté. Ludya, dis-moi… C’est pas possible que tu saches vraiment rien faire et que tu aies zéro connaissance. Tu me donnes ta version de l’histoire s’il te plaît ?

Il profita du temps de réponse pour venir s’asseoir sur une chaise à la table à côté de la leur, face au dossier de la chaise, accoudé sur ce dernier. Ses ailes se déplièrent et s’étendirent tranquillement pour ne pas être trop ankylosées. Bah ouais, y a des muscles et des nerfs là-dedans, faut pas croire !

Et évidemment, Dirzan, pas satisfait de l'explication sommaire de la diclonius, posa la question fatidique à Ludya, à savoir de lui dire tout ce qu'il savait. L'abyssian, quant à lui, semblait enchanté de pouvoir raconter son histoire à l'homme chauve-souris, mais Lucy n'avait pas du tout la tête à cela. Après tout, il faisait nuit noire, et elle a passé une journée un peu éprouvante. Elle s'intéressa un peu au début de son histoire avant de totalement décrocher et de se perdre dans ses pensées. Que serait-il devenu si elle n'avait pas été là ? Comment aurait-il franchi les barrages ? Certainement en détruisant tout et en fonçant dans le tas, faisant fi des conséquences. Car après tout, il avait bien détruit un tank, avec des personnes dedans qui n'ont très certainement pas survécu. Ce n'était pas que leur mort la touchait particulièrement, mais cela allait accentuer les recherches à l'encontre de l'ancien prisonnier. Et un jour, forcément il serait tombé sur plus fort que lui, sur plus puissant et plus déterminé, et il se serait fait abattre ou capturer une nouvelle fois.

Elle mit la main devant sa bouche pour cacher un énorme bâillement de fatigue. Il n'avait toujours pas arrêté de parler, et discutait maintenant des expériences difficiles qu'il avait eu à subir. Bof, après un bon repas et une bonne nuit de sommeil, il arrêtera de se lamenter sur sa situation passée et commencera à voir les avantages de sa situation présente. Et puis, il était plus en forme qu'elle lors de sa sortie. En effet, elle avait eu du mal à marcher, et avait dû s'aider de ses vecteurs pour se déplacer correctement, alors que lui avait été capable de détruire une véritable machine de guerre moderne moins d'une heure après sa libération. Sous ses airs de gamins à cause de son manque d'éducation se cachait un redoutable combattant. Elle en était persuadée. Et...

...Lucie...

Elle tiqua. Une fois de plus, il a mal prononcé son nom, ce qui commence à fortement l'agacer. Elle capte aussi son regard vers elle, mais le plus intriguant est son énorme sourire.

...c'était super bien.
Hein ? Euh, oui, super bien... acquiesça-t-elle, l'air totalement à coté de la plaque, comme si elle n'avait rien écouté de la conversation, ce qui était dans le fond totalement vrai.

De quoi pouvait-il bien parler ? De sa libération ? De la destruction du char ? De...

Pis... Et puis vous, vous savez quoi ? Vous vous cacher dans une porte qui amène ici toi et Lucy vous viendez de l'espace vous aussi ? Pourquoi toi t'as des ailes ? Pourquoi Lucy à des bras qu'on voit pas ? Et surtout... Est ce que je peux en avoir moi aussi ?

Des questions, encore des questions... C'était sa journée décidément. Tout ce que voulait Lucy actuellement était qu'il mange un morceau et qu'elle puisse enfin aller se reposer. A vrai dire, la fatigue s'était abattue sur elle telle la misère sur le pauvre monde, et bien qu'elle ne soit pas humaine, elle a aussi ses limites. Et là, elle venait de les atteindre. Réprimant un second bâillement, elle lui fit :

Je t'ai dit qu'on est passé dans un autre monde Ludya. Autre monde, autres règles. Je t'expliquerai ça demain car là je suis un peu crevée je dois l'avouer... C'est pas encore prêt ? finit-elle à l'attention du cuistot du jour.

Ouaip, les ailes, ça impressionne quand on n’a pas l’habitude. Après les quelques secondes normales d’ébahissement, Ludya commença un long, long monologue explicatif :

uh, ah oui Je sais... Hmmm. Je sais les chiffres ! Compter on m'a appris... Je sais que la journée fait 24 heures... Je sais aussi un peu lire, mais pas très vite... Un petit peu écrire. […]C'est vrai je sais... j'ai pas l'air très malin quand je parle, faut pas me prendre pour complétement bête... Parce que quand Lucy dit des trucs ou toi quand tu parles je vois bien comment faut faire pour un pti peu mieux parlée. […]

Dirzan écoutait avec une attention mitigée. Il ne s’endormait pas, non, mais il avait quand même du mal à suivre tellement l’Abyssian se perdait dans ses propres paroles. Il regarda distraitement sa queue  pendant une petite minute, sans cesser d’écouter d’une oreille.

"Pourquoi j'ai demandé son avis, déjà ?"

[…] toute ma vie dans les murs et dans le sol ! Ca faisait très mal ce qu'ils font tu sais.

What ? Dans les murs et dans le sol ? Mais ils lui avaient fait quoi, les types de la Terre ?!

Menteurs, menteurs, Tricheurs, MENTEURS ! Tout le temps me piquer avec des aiguilles ! Tout le temps m'obliger à travailler et puis courir aussie, des heures jusqu'a fatiguer puis soulever des trucs lourds aussi et savoir si je suis plus fort qu'hier ou la semaine d'avant et ça jusqu'a complétement fatigué le soir et puis me faire mal avec des armes toujours plus douleur, toujours plus fort !

Ça, donc. D’accord. Il allait falloir faire très attention avec celui-là. Il en avait visiblement vu des vertes et des pas mûres, le pauvre.

Blablabla, blablabla… Le monologue se termina enfin et Ludya posa des questions. Auxquelles Lucy préféra couper court par un « Je t'ai dit qu'on est passé dans un autre monde Ludya. Autre monde, autres règles. Je t'expliquerai ça demain car là je suis un peu crevée je dois l'avouer… »

Puis elle demanda si le repas était prêt. Dirzan étouffa un bâillement et se leva.

J’vais voir ça, normalement ça devrait être bon…

Il alla voir dans la cuisine et revint rapidement, un plat chaud dans les mains. Il le posa sur la table, ainsi que des assiettes et des couverts, et servit une grosse part à chacun des deux arrivants. Puis il se rassit.

Bon appétit. Et pendant que vous mangez je prends mon tour de parole. Ludya, quoi qu’on t’ait fait là-bas, tu peux être certain que c’est terminé, on ne te le fera plus jamais. Promis. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Lucy t’a amené ici j’imagine. Bon, je vous laisse, j’étais censé aller préparer une chambre.

Le semi-dragon se leva, encore, et passa la porte de l’escalier qui menait au premier étage. Les deux autres avaient donc entre cinq et dix minutes seuls.

Sentant le débit de parole de Ludya baisser petit à petit, Lucy décida de l'interrompre assez vite pour ne pas y passer des heures :

Bref, tu sais des choses, mais rien de la vie.

Elle demanda ensuite à Dirzan pour le repas, qui répondit qu'il était certainement prêt. Pendant le temps où l'homme ailé était dans la cuisine, les yeux rubis de la diclonius se plantèrent dans ceux de Ludya, et il pouvait y voir la fatigue due à une longue journée. Mais il fallait qu'elle lui parle avant le lendemain, qu'elle lui dise ce qu'elle a sur le cœur. Même s'il a les réactions d'un gamin, c'est une personne qui, comme elle, sort d'un long isolement pendant lequel il a certainement été torturé moralement voire physiquement, et elle ne pouvait pas s'empêcher de compatir à ses douleurs. De plus, elle voulait s'excuser pour son comportement dans la forêt, et cela elle devait le faire loin des oreilles indiscrètes. Non, elle ne voulait pas avouer son moment de faiblesse aux autres membres de l'ordre, sauf peut-être à son amie, et elle doutait encore de l'attitude à avoir en face de lui. Sentant le mal de crâne poindre, elle lui fit :

Quand tu seras en haut, passe me voir dans la chambre 15 s'il te plaît, il faut que je te parle.

Elle ne lui en dit pas plus, car Dirzan revint avec deux assiettes bien garnies.

Ah euh, nan merci, j'ai déjà mangé moi, l'informa-t-elle.
Ludya, quoi qu’on t’ait fait là-bas, tu peux être certain que c’est terminé, on ne te le fera plus jamais. Promis. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle Lucy t’a amené ici j’imagine. Bon, je vous laisse, j’étais censé aller préparer une chambre.

Lucy n'en rajouta pas plus. Tout ce qui le devait avait été dit dans cette phrase. Elle le laissa partir, se retrouvant désormais seule face à Ludya. Elle savait qu'elle pouvait lui parler maintenant, mais elle ne le ferait pas. Elle avait un peu honte de ce qu'elle devait lui dire, et elle ne pouvait pas le faire dans un endroit où une personne pouvait débarquer à tout moment. C'est pourquoi elle décida d'aborder un sujet plus terre-à-terre, et surtout un peu plus urgent sur le moment.

Tu sais comment manger ?

Elle était prête à l'aider et à lui montrer ce qu'il allait devoir faire pour se nourrir, au moins la première fois. Car après tout, elle se sentait un peu responsable de lui pour une raison qu'elle n'arrivait pas à déterminer.