Kibata Hamike était un homme tout à fait ordinaire et sans intérêt. Un bon mètre quatre-vingt dix, les cheveux blancs immaculés, les yeux tels deux émeraudes vous fixant, un visage fin et élongé. Il était beau, certes, mais ne faisait pas l'unanimité, bien loin de là. Beaucoup de filles le trouvaient trop plat et trop fin. En effet, il était plutôt maigre, bien qu'il fasse régulièrement du sport. Toutes les trois ou quatre nuits en réalité. En effet, Kibata était, depuis maintenant plus de deux mois, un Gantzeur à part entière. En d'autres termes, il tuait des extra-terrestres pour le compte d'une énorme boule noire et d'un humain à l'intérieur, sans pouvoir s'en aller. En fait, il pourrait bientôt quitter le programme Gantz. Mais nous n'allons pas parler de cette histoire aujourd'hui.
Elle était arrivée dans sa classe il y a deux semaines. Elle venait d'une autre ville, ou quelque chose de ce genre. Il n'avait pas trop écouté ce qu'elle disait. A vrai dire, il avait été, dès le début, subjugué par sa beauté. Sa voix claire et envoutante, ses cheveux blonds volants au vent, son visage fin et délicat, ainsi que sa gentillesse apparente. Tout l'avait séduit, dès le premier regard qu'il avait eu sur elle. Elle ne l'avait apparemment pas remarqué, heureusement pour lui. Si elle lui avait fait la remarque dès le premier jour, il se serait enterré sous un parterre de dénégations et de mensonges, s'enfonçant dans une espèce de timidité relative. Pendant deux semaines, il l'avait observé, presque sans le vouloir. Il ne la suivait pas intentionnellement, mais ses pas le conduisaient de temps à autres à l'endroit où elle se trouvait. Il s'installait alors, souvent à quelques mètres à peine d'elle, se donnant du courage pour aller la voir, pour aller engager la conversation avec elle. Mais c'était peine perdue. Il n'arrivait tout simplement pas à surmonter sa peur. Sa peur du ridicule, encore une fois. Toutes ses anciennes histoires d'amour s'étaient brutalement terminées, le rendant toujours ridicule. Il avait été la risée de son groupe d'amis, qui l'avaient littéralement exclu de leur cercle. Il en avait été profondément affecté. Depuis, il traînait souvent seul, ou quelquefois avec son frère, qui lui reprochait son manque d'initiative. Certes il n'avait pas beaucoup d'expérience, mais il considérait que son frère, adepte des histoires courtes, était encore pire que lui. Il pouvait briser des cœurs sans même s'en rendre compte, alors que lui avait été toujours attentif aux sentiments de sa compagne, bien que celles-ci ne lui aient pas rendu.
Aujourd'hui, ils étaient en classe. Kibata se trouvait à trois places derrière elle, comme toujours. Il suivait le cours d'une oreille, sachant déjà la majorité de ce que le prof disait, et n'ayant pas de difficulté particulière en cours. Il pouvait se le permettre, et il le savait. Ses pensées étaient tournées vers cette fille qui, décidément, l'obsédait de plus en plus. Il n'arrivait pas à dégager cette obsession, et il savait bien que c'était totalement néfaste. S'il restait ainsi, un futur contact avec elle s'avérerait très compliqué, car cela augmenterait sa timidité. Mais il n'arrivait tout simplement pas à se concentrer sur autre chose que cette longue crinière blonde qu'il voyait tomber jusqu'à ses jambes. Elle n'était pas très grande, mais cela n'ôtait rien à sa beauté naturelle. C'était ce genre de filles qui n'avaient pas besoin de maquillage pour être belle. Un véritable ange.
Le prof annonçait la fin de son cours. Kibata commença à ranger ses affaires, sans se presser, et sortit. Il entendit quelqu'un l'appeler. Il se retourna. Il s'agissait de son frère, à cinq mètres derrière lui. Il lui disait de ne pas oublier ses affaires pour ce soir. Ils savaient tout deux de quoi il en retournait, et pourquoi Kibuto n'avait rien précisé. Il s'agissait de se préparer pour la mission de Gantz qui aurait lieu cette nuit. S'il en parlait autour de lui, sa tête exploserait immédiatement, et il n'avait pas tant que cela envie de mourir. Pas maintenant en tout cas. Perdu dans ses idées et ses souvenirs de ses précédentes missions où il avait vu une bonne centaine de personnes mourir les unes après les autres, son épaule percuta celle d'une autre personne. Pas violemment, juste assez pour les déstabiliser. Cette personne devait être à l'arrêt.
Excusez-moi, je ne vous avais...
Ses yeux émeraudes rencontrèrent ceux, encore plus bleus que des diamants, de celle qui obsédait ses pensées et avait conquis son cœur seulement par sa prestance.
...pas vue...
Il resta bouche bée. Décidément, le destin voulaient qu'ils se rencontrent. Se reprenant assez vite, il lui dit d'une voix qu'il voulait le plus naturel possible :
Nous n'avons pas été présentés. Je m'appelle Kibata, enchanté de te rencontrer... ?
Sa phrase appelait une réponse. En clair, il lui demandait son nom. Savoir comment l'appeler, cela pourrait être un bon début.