De simples aventures sexuelles, la discussion faillit déborder sur l’évolution des espèces et des civilisations. C’était en effet un autre tout débat que de pronostiquer sur l’avenir. Considérer que les humains dépasseraient un jour les dieux, c’était flatteur pour l’ego des humains, mais c’était un raisonnement bien trop poussé pour Alice. Avant de songer à gouverner Terra, il lui fallait déjà réussir à diriger cette petite terre qu’on appelait Sylvandell, et qui, un jour, serait son royaume. Terra n’était pas dans ses préoccupations. Tinuviel expliqua toutefois qu’elle comptait manger et prendre une douche.
« Oh, bien sûr, bien sûr, répondit rapidement Letterfinlay. Garçon ! Allez, allez, veuillez conduire notre invitée dans les bains, et lui préparer de quoi se restaurer. Vous n’avez pas mangé depuis plus d’une journée, après tout. »
Tinuviel devait sûrement avoir un corps fatigué, et, même si faire l’amour semblait conseillé comme méthode curative pour elle, c’était un exercice qui, en tant que tel, nécessitait d’être endurant. Pour repousser le virus, l’organisme de Tinuviel avait du s’épuiser. Elle se retira du canapé, toujours aussi nue, invitant Letterfinlay et Alice à commencer sans elles. La Princesse en rougit légèrement, et se releva. Le serviteur que Letterfinlay avait appelé fit signe à l’elfe de le suivre, la regardant brièvement, une brève lueur de désir dans le regard. Il resta fort heureusement assez professionnel. Alice resta debout pendant quelques secondes, regardant le départ des deux femmes, jusqu’à ce que le Baron soupire légèrement.
« Je ne m’attendais pas à te revoir dans de telles circonstances, Alice… glissa-t-il.
- Moi non plus, Olivier, répondit Alice, l’appelant par son prénom. Mais nous avons au moins l’occasion de nous revoir… »
Ils marchèrent, montant un escalier, grimpant vers la chambre du baron.
« On m’a dit que ton entourage proche s’était adjoint d’une nouvelle personne, Alice… Cette femme qui a attaqué un dragon… Cirillia, je crois… »
A son nom, Alice baissa les yeux. Parler de Ciri’ n’était pas une chose très intelligente, sachant combien cette femme agissait de manière paradoxale sur la Princesse. Elle éluda rapidement ce sujet d’interrogations, jusqu’à ce que Letterfinlay atteigne ses appartements. Un délicieux feu brûlait dans l’âtre. En tant que noble, Letterfinlay logeait dans une belle et grande chambre, son lit étant près d’un bureau. C’était un grand lit à baldaquin, et, depuis les fenêtres, on pouvait voir les jardins du manoir. Les jardins s’articulaient à l’entrée d’un grand lac, et on voyait, au loin, une série de montagnes escarpées éclairées par le soleil. La neige avait tout peint en blanc, et Alice les observa silencieusement.
« Je te connais depuis que tu es toute petite, Alice, poursuivit le baron. Je me souviens encore quand tu t’amusais avec les autres garçons du village en leur balançant des boules de neige à la figure… »
Dans les jardins, de jeunes enfants prenaient en effet des boules de neige pour s’attaquer dans une longue et tumultueuse bataille, rappelant naturellement à Alice des souvenirs. Elle l’avait fait, jadis, pendant des années, et avait déjà arrosé une fois par mégarde un baron. Un sourire amusé de dessinait sur ses lèvres. Sans pouvoir se l’expliquer, elle se mit en tête d’imaginer Ciri’ se recevoir une boule de neige dans la figure. Sans doute voudrait-elle la tuer, ou l’étouffer sous la neige… C’était donc une expérience à tenter. Elle se retourna, contemplant Olivier, qui avait retiré son manteau et ses gants. Il avait de longs doigts fins et délicats, et les réchauffa dans l’âtre de la cheminée. Elle se rappela à nouveau sa séance avec lui, et se mordilla les lèvres. Olivier alla s’asseoir sur un fauteuil. Dieu, qu’elle le trouvait beau… Il y avait une forte part de subjectivité là-dedans. Elle l’avait effectivement connu quand elle était petite. Letterfinlay était alors un écuyer, qui était devenu baron quand elle avait environ dix ans, parvenant à réussir toutes les épreuves imposées par son père pour prendre le pouvoir. Le Roi avait confirmé cette position, envoyant des lettres et des cachets pour la publier. Coureur de jupons avant d’être baron, sa nouvelle position n’avait fait que le confirmer là-dedans.
« Mon Dieu, Alice, tu es vraiment une femme magnifique… je comprends pourquoi ton père t’a tant surprotégé, et continue à te protéger…
- Toute la protection de mon père ne m’a pas sauvé hier… objecta Alice, faisant la moue.
- C’est parce que tu l’as rejeté… Tu as congédié ce monstre qui t’accompagne, cette espèce de brute en puissance…
- Hodor n’est pas une brute, ni un monstre ! siffla Alice.
- C’est ce que mes hommes ont consigné dans leurs rapports, pourtant… Je crois surtout que tu ne réalises pas à quel point tu rends fous les autres… »
La Princesse rougit une nouvelle fois, secouant la tête.
« Je…
- Ce n’est pas un défaut, loin de là. Bien au contraire, Alice… Tu sais, ton père parvient à diriger par l’exemple, par la force, en montrant à ses hommes qu’il n’est pas un faible, ni un couard. Mais toi, ma belle, tu ne peux compter, ni sur ton courage, ni sur ta force. Je te connais suffisamment pour savoir que ce sujet t’a toujours complexé, mais tu dois maintenant commencer à réaliser que tu disposes d’une force bien plus grande que celle de savoir manier une épée.
- Mon corps ? lâcha cette dernière, sceptique.
- Ta beauté, oui… Avoir un soldat puissant, c’est une bonne chose. Avoir un soldat puissant qui se bat pour une cause, c’est encore mieux. Tu connais le dicton, non ? ‘‘La foi soulève les montagnes(/i]’’ ? En se débarrassant du contexte religieux, tu comprendras que ta beauté incitera bien des hommes et des femmes à faire l’impossible pour toi. Ton bilan en tant que pré-Reine s’annonce assez bien, pour le moment. Ce chevalier errant qui s’est battu pour toi au tournoi… »
Gauvain. Le pauvre avait voulu la demander en mariage, et elle en rougit légèrement, se rappelant de ce moment. Le baron s’était rapproché d’elle, et retournait caresser la tête d’Alice, au niveau de sa joue, promenant ses doigts dessus. Un sourire amusé éclaira les lèvres d’Olivier.
« Tu t’es beaucoup renseignée à mon sujet… nota-elle.
- Je me renseigne toujours sur ce qui mérite qu’on s’y intéresse, répliqua-t-il, charmeur, se rapprochant d’elle.
- Au moins, tu sais parler aux femmes…
- Oh, je crois qu’il n’y a pas que ça que je sais faire… »
Il la prit par les mains, la soulevant lentement. Yeux dans les yeux, Alice sentit son cœur battre faiblement dans sa poitrine, alors que l’homme allait l’embrasser, posant ses lèvres sur les siennes, lui offrant un baiser merveilleux. La Princesse en ferma les yeux, goûtant à la salive de cet homme. Ses lèvres étaient toujours aussi belles et attirantes, délicieuses. Son menton était bien rasé, et, même s’il était bien moins doux que celui de Tinuviel, elle s’amusa à jouer avec les résidus de poils, frottant son menton sur le sien, très légèrement, continuant à l’embrasser, titillant ses lèvres avec sa langue.