Terka était une élève travailleuse mais très discrète. Quand elle venait en cours, c’est-à-dire tout le temps, elle écoutait le plus attentivement possible sans prononcer un mot de tout le cours. On ne l’entendait pas, sauf au moment de l’appel, et c’est à peine si on la voyait. Elle faisait en quelque sorte partie du décor.
Aussi, lorsqu’en sortant de cours elle vit une lettre de son professeur posée dans son casier, elle avait toutes les raisons du monde de s’inquiéter. Qu’avait-elle fait qui puisse attirer l’attention du professeur ? Et surtout, pourquoi ne l’avait-il pas convoquée de la manière habituelle, à savoir par le biais du secrétariat ? Que pouvait-il bien lui vouloir ?
"On se calme, frangine. Il veut peut-être juste une discussion officieuse, et c’est pour ça qu’il emploie des moyens officieux de te convoquer."
Terka soupira. Andizia, qui en ce moment était dans le même corps qu’elle, avait sûrement raison. Mais quel pouvait bien être le sujet de cette discussion officieuse ? Elle jeta un regard rapide sur le côté et le vit. Il la regardait. Vérifiait-il qu’elle lisait sa lettre ? Elle hocha la tête pour signifier qu’elle avait lu et qu’elle viendrait.
Et de fait, au moment du rendez-vous, elle était là. Terka était toujours ponctuelle, le moindre retard la rendait malade. Elle s’inclina poliment devant son professeur et obtempéra quand il l’invita à s’asseoir. Il expliqua qu'il n'avait pas l'intention de la réprimander. Cependant, Terka fronça malgré elle les sourcils. « Quelques points » ? Que voulait-il dire ?
"À ton avis ? Il ne peut rien te reprocher côté boulot ni côté respect, c’est forcément ton attitude générale qui ne lui va pas."
Un point pour Andizia, encore une fois. Terka se doutait qu’un jour son attitude lui causerait des soucis.
-Me suis-je mal comportée ? Je fais mon possible pour n’offenser personne…
Un éclair de génie traversa alors son esprit.
-Mais peut-être est-ce justement à cause de ça que vous m’avez convoquée, sensei ? Je sais que le fait que je ne parle jamais ne plaît pas beaucoup.
Terka, d’un côté, était rassurée. Si elle avait vu juste, alors il lui suffirait de fournir son explication habituelle pour que le professeur ne lui pose plus de questions. Mais d’un autre côté, si elles s'était trompée, sa remarque risquait d’être mal perçue.