Limma avait droit à un traitement de faveur. Elle avait droit à l’une des chambres les plus luxueuses, alors que, normalement, les fraiches recrues dormaient dans un dortoir commun. Cependant, Mélinda n’oubliait pas que la démone était particulière, et que l’esclave abritait en elle une femme sur laquelle elle ne pouvait se fier. Cette dualité amenait à un luxe de précaution, et elle savait que Xia serait satisfaite de dormir dans une chambre de reine... Bien plus que dans un lit commun, en tout cas. Le choix de Mélinda était donc calculé, et elle pouvait sentir le plaisir et l’incompréhension dans les yeux de Limma. Vu son passé, elle ne devait en effet pas croire à sa chance d’avoir une telle chambre rien que pour elle. Et pourtant... Elle se remit de ses émotions, et affirma vouloir faire la Maîtresse. Il n’y avait même pas besoin d’être une vampire pour voir à quel point Limma était heureuse, comblée, et curieuse.
«
Très bien... Alors, suis-moi... »
En chemin, Mélinda expliqua à Limma que Ligie la sirène était très curieuse, mais aussi farouche. Elle avait beaucoup souffert. Si les pêcheurs l’avaient capturé, c’est parce qu’elle se laissait mourir dans l’océan. Sa famille natale avait été massacrée par de redoutables prédateurs aquatiques, des requins géants. Après cet épisode sinistre, Ligie avait erré dans l’océan, jusqu’à ce que des pêcheurs la capturent. Mélinda avait réussi à l’acheter à un marché aux esclaves. Elle lui avait valu une petite fortune, mais elle tenait absolument à avoir une sirène près d’elle.
Les deux femmes marchèrent pendant quelques minutes jusqu’à entrer dans une grande pièce parfumée, où, malgré les odeurs d’encens, on pouvait sentir une odeur de poisson. Il y avait un grand bassin au centre. Il s’agissait d’une espèce de piscine, et la sirène n’était pas encore là. Il y avait quelques gardes, d’autres esclaves, et les servants, qui portaient des seaux remplis de poissons.
«
Ligie ne devrait plus tarder... »
Il y eut quelques murmures en voyant Limma. Les filles étaient de grandes pipelettes, et Mélinda s’approcha des seaux. Il y avait du saumon frais, car Ligie raffolait de saumon. Vivre dans cet endroit, quand on avait connu l’immensité de l’océan, n’était pas toujours très simple pour la sirène, mais, au moins, elle ne risquait pas de tomber sur un Mégalodon. Elle avait fini par s’habituer à cette vie, et adorait enrouler des femmes dans sa queue, et les presser tendrement, leur tête filant entre ses seins.
«
Elle ne devrait plus tarder... L’odeur de poisson l’attire à des kilomètres à la ronde... »
Mélinda ne tarda pas à percevoir le délicieux sang de Ligie approcher. Une autre raison pour laquelle elle avait décidé de la prendre était justement que le sang d’une sirène était très bon, et qu’elle adorait que Ligie la serre fort, très fort, dans sa queue, et qu’elle mordille ensuite son cou, absorbant son merveilleux sang. Quelques secondes plus tard,
Ligie finit par apparaître. La moitié de son corps jaillit hors de l’eau, éclaboussant plusieurs filles, et elle remua ses longs cheveux, avant de se mettre à tourner en rond dans l’eau, et par s’accrocher au rebord.
«
Pffffiiouuh, j’ai faim !! »
Voilà qui était honnête et rapide. Sans attendre, l’un des hommes sortit un saumon par la queue, et le déposa sur le carrelage, autour du bassin. Ligie le prit entre ses mains, et mordit dedans. Elle mangeait même la peau du poisson, la trouvant délicieuse, juteuse, et appétissante. Mélinda croisa les bras, se rapprochant lentement d’elle, et, quand Ligie la vit, son visage s’éclaira, et elle s’écarta du poisson déchiqueté.
«
Oh, Madame Mélinda ! Tu veux que je t’enroule dans ma queue ? Ou goûter à mon sang ?! »
Elle était enjouée, comme à chaque fois qu’elle voyait la vampire. Elle n’arrivait pas à l’appeler «
Maîtresse », et, après des années, la sirène avait au moins à placer le mot «
Madame » devant son prénom.
«
Ton offre est tentante, Ligie, mais je voulais te présenter quelqu’un... Une jeune femme qui vient juste d’arriver, et qui était curieuse de te voir. -
Ah... »
La curiosité de Ligie était attisée, et Mélinda s’écarta un peu, laissant le passage à Limma.
«
Ligie, je te présente Limma... Et, Limma, je te présente Ligie, ma sirène. »
Elle accentua le «
ma », signe qu’elle était très fière de sa possession. Ligie hocha la tête de surprise, clignant des yeux, puis fronça les sourcils.
«
En... Enchantée, Limma... »
Ligie était une sirène, et les sirènes ressentaient des choses que les humains ne ressentaient pas. En d’autres termes, Ligie ressentait la présence de Xia, et cette présence, une forme puissante, forte et dangereuse, l’intimidait légèrement.