[FINI] Alliance rouge [Tinuviel Lastrim]

Harmonie tenta de la rassurer, de la réconforter, de faire perler l’optimisme sur les propos fatalistes et défaitistes de la vampire. Rayne n’avait jamais lu Hegel. Si elle l’avait fait, elle aurait peut-être trouvé dans la conception hégélienne de l’héroïsme un écho à ses propres pensées. La lutte entre ce qu’on désignait communément comme le « Bien », et ce qu’on désignait comme le « Mal », ne pouvait avoir de fin, car la destruction de l’un signifierait la chute de l’autre. Le Bien se définissait par rapport au Mal. Tant qu’un individu aurait un jour la capacité d’aimer, il aurait aussi celle de haïr. Par extension, tant qu’un héros existerait, il existerait toujours un anti-héros. C’était la dualité de la vie, et Rayne le savait. Si Kagan et toute son engeance n’existaient plus, elle-même n’existerait plus. Elle n’avait aucun autre but dans la vie. Elle était une guerrière, infiniment plus proche de l’univers de Kagan, des vampires, que de celui des humains. Fonder une famille, être une femme à la maison, ou travailler dans un bureau, ne la satisferaient jamais. Ce n’était pas son moule. Elle appartenait à l’univers des ténèbres, de la force brute, de la violence, de la rage et du chaos. Elle était façonnée dans le même moule que Kagan, que Nefarious, et, le jour où tous ces individus disparaîtraient, elle n’aurait plus qu’à disparaître, elle aussi.

La Valkyrie revenait encore sur sa proposition. L’aide du harem pouvait s’appliquer partout, que ce soit pour obtenir des renforts, des armes, ou des informations. Revenant sur des pensées plus rationnelles, plus matérielles, Rayne eut un léger sourire.  Obtenir des informations sur Kagan... Quoique... Ce harem était bien mystérieux. Peut-être que Tinuviel pourrait faire mieux qu’elle ? Que Severin ? Ce n’était pas impossible. Terra n’était pas leur monde natal, et on disait des elfes qu’ils pouvaient vivre des millénaires, que le temps ne les altérait pas. Tinuviel, partant de là, devait bien mieux connaître Terra que la Dhampir. Peut-être pouvait-elle réellement retrouver Kagan. Mais, quant à faire partie du harem... Rayne ne savait pas. Hier, elle aurait dit « NON » sans hésiter, mais, maintenant... Elle n’aurait pas dit « OUI », mais son « NON » manquerait de conviction. Ce harem était superbe, beau, élégant, rassurant, et ses membres avaient l’air très agréables et sympathiques, tout en étant fortes et redoutables. Rayne essayait de se convaincre que cet endroit n’était pas fait pour elle, mais... Elle n’arrivait pas à se dire en quoi. Ou, plutôt, elle se voilait la face. Au fond d’elle, elle savait très bien pourquoi elle se refusait au bonheur, et pourquoi elle préférait la crasse et le charcutage de vampires à la vie que Tinuviel lui offrait.

« Je vais aller voir Tinuviel, lâcha la Dhampir. C’est elle qui m’a forgé cette armure, donc je suppose qu’elle est la mieux concernée pour m’apprendre à la maîtriser. »

Rayne sourit alors à Harmonie.

« Quand tu veux pour une prochaine fois... »

Elle s’écarta ensuite, se rendant vers l’infirmerie. Elle allait de surprise en surprise ici, à tel point qu’elle se demandait si elle ne devait pas parler à Tinuviel de sa seule piste concernant Kagan. Oui, Rayne n’était effectivement pas totalement bredouille, mais sa piste s’était arrêtée avec la mort de Zala X’Ora. Sa piste concernait une énigmatique famille de démons, un clan dont elle avait croisé deux membres il y a quelques temps, au Château-Lerouge, en compagnie d’un Inquisiteur. L’un de ces individus, Suzy, lui avait expliqué que Kagan s’était présenté à eux pour rejoindre leur clan, mais apparemment sans succès. Cette famille se composait de vingt-six membres, se dissociant entre eux par des lettres de l’alphabet gravés par la magie sur leur front. Elle en avait croisé deux, mais n’avait rien pu obtenir de plus. Severin avait utilisé les données tekhanes, nombreuses et biens fournies, pour obtenir des informations sur ce mystérieux clan, les « Vingt-Six », mais n’avait rien obtenu. Absolument rien. En ce sens, la piste des Vingt-Six était au point mort, et Rayne avait prévu de se rendre à Nexus, afin d’obtenir des informations sur « Suzy », la vampire démone.

*Peut-être que Tinuviel a un jour entendu parler d’eux ? Elle a l’air de tout savoir sur Terra...*

Rayne, toutefois, en doutait. Elle finit par rejoindre l’infirmerie, et frappa poliment à l’entrée. Elle savait que Tinuviel était une elfe rouge, une elfe de passion, et elle l’imaginait mal restée allongée dans un lit tranquillement, à côté d’une belle infirmière. Mieux valait s’annoncer. Attendant ainsi plusieurs secondes, Rayne ouvrit la porte, et lança :

« Désolée d’avoir mis si longtemps, je... J’essayais mes nouvelles armes. Ce que tu as fait est très impressionnant, Tinuviel, et tu as pour cela ma gratitude. »

La Walkyrie ne disait pas cela uniquement pour rassurer la Dhampire, non, elle était à peu prêt sur que  dut résultat de cette lutte.  Elle  avait confiance en la jolie rousse mais elle serait la seule à pouvoir décider de son destin.   Il y avait cependant un point qui inquiétait l’ancienne  vierge d’Odin.  Un point qui risquait un jour d’être  un problème à la fois pour la dhampire et pour les autres.  Le jour ou elle devrait déposer les armes, cela risquerait d’être dur.  Si dur qu’elle pourrait peut être avoir  du mal à ne pas les reprendre.    Cependant, si jamais elle trouvait quelqu’un sur qui compter, cela serait moins dur pour elle.  Enfin, c’était sans doute son avis.
La walkyrie eut un léger sourire lorsque  la dhampire lui dit qu’elle allait effectivement voir l’elfe.  C’était sans doute le meilleur moyen qu’il ne lui arrive rien.  Finalement et la Walkyrie en avait en partie confiance,  cette jeune femme lui ressemblait car sa vie aurait put être la même qu’elle. Une vie uniquement dut au combat encore et encore.    Oui, ce genre de vie n’était pour personne et finalement elle n’était pas malheureuse d’avoir quitté cette vie.   Elle se contenta d’un petit sourire déposant une bise sur la joue de la jeune femme.

-Bonne chance,  et je serais prête pour ma revanche. D’ici la, j’aurais encore progressé.   Va y maintenant et n’oublie pas que tu as des gens sur qui tu peux t’appuyer.

Elle la laissa partir, sachant que désormais Tinuviel était sans doute la seule qui pourrait faire quelque chose pour elle.
Lorsque La dhampire se présenta à la porte,  Elfe était tranquillement allongé dans son lit.  Même si cela n’était pas dans ses habitudes pour une fois elle ne pouvait que restait dans ce lit.  Alors oui, elle pourrait s’en servir pour autre chose, cependant  elle n’en avait pas envie… Il y avait des sujets qui étaient à son avis prioritaires comparait à son état qui au fond n’était qu’un peu de fatigue.
Elfe  lui fit signe d’avancer, sa voix était encore relativement audible mais il fallait  cependant  s’approcher pour l’entendre correctement, cela étant dut à  la profonde fatigue de l’elfe.
-Je sais que mon état n’est pas très présentable mais qu’importe.  Je suis heureuse que mes enchantements te plaisent. J’espère cependant qu’il n’y a pas eut d’effets secondaires.  Après tout, le verredragon n’est pas une matière que j’ai l’habitude de manipuler et concernant les écailles de dragons…  Je préfère ne rien dire. Car les résultats sont toujours étranges…

Elfe  avait de profondes cernes, cependant elle semblait bien éveillée. Elle était d’ailleurs impatiente d’avoir le retour de  ses petites améliorations.   Eruru, Lorna et Horo, elles  restaient au chevet de leurs maitresses.   Elles devaient également s’assurer qu’elle ne tenterait pas de sortir de ce lit avant qu’elle ne soit dans un meilleur état.  Ce qui prendrait sans doute un peu de temps.  Heureusement que l’elfe était de très bonne constitution et que l’énergie et l’amour  prodiguée par ses amantes réalimentaient ses  batteries en énergie magique et physique. 

-Dit moi, y a-t-il des choses qui ne vont pas sur les enchantements que j’ai fais ?  Des choses qui pourraient être dangereuses ? Enfin je te demande cela parce que je ne veux pas te faire prendre de risque.  Il y en aura déjà assez comme cela.

[HRP – Si je peux me permettre, le lien menant à l’image de Lorna est HS. Ou alors, c’est mon navigateur qui craque !]

La propriétaire des lieux semblait effectivement épuisée. Pour enchanter les armes de Rayne, elle avait vraiment du se dépenser, mais le résultat était à la hauteur de ce qu’elle avait fait. En levant ses bras, Rayne pouvait sentir une force irradier des lames. Elle n’avait plus rien à voir avec ce qu’elle était avant de venir ici. Ses lames étaient désormais emplies d’une virulente puissance. Tinuviel lui parla justement de ces dernières, lui expliquant que le verredragon produisait souvent des résultats inattendus, tout comme la magie dragonique. Pour être honnête, Rayne n’y connaissait pas grand-chose en enchantements, mais elle savait que le verredragon, outre être un acier d’une excellente qualité, était aussi une très bonne base pour les enchantements. Sur Terra, il ne fallait pas tenir compte que de la résistance de l’arme, de sa capacité à trancher les armures, de son poids, ou de sa maniabilité ; il fallait aussi tenir compte de la magie. C’était l’éternelle opposition entre l’acier nain, extrêmement solide et tranchant, mais peu apte aux enchantements, et l’acier elfique, léger, élégant mais n’ayant pas le tranchant des armes naines, tout en pouvant permettre de nombreux enchantements.

Rayne savait que le verredragon était un acier de qualité, qui coûtait cher. Pour s’en procurer, elle avait du dépenser beaucoup d’argent, mais Severin avait estimé qu’il était nécessaire de refaire son équipement quand ils avaient fui la Brimstone en s’installant sur Terra. Il n’était pas question de rester avec son vieil acier qui commençait à s’oxyder, et qui était très endommagé depuis son affrontement contre Kagan.

Sortant de ses pensées, Rayne s’avança dans la belle infirmerie. Les lits étaient propres, l’ensemble très vivant. Trois belles femmes entouraient l’elfe. Trois Terranides, mais Rayne aurait été incapable de dire à quelle sous-espèce elles appartenaient. Elle n’en savait pas encore assez sur Terra pour ça, mais elle avait pu remarquer qu’il y avait, dans ce harem, une proportion élevée de femmes-félines. Un fantasme de Tinuviel ? Ou était-ce que ces créatures étaient généralement celles qui souffraient le plus sur Terra ? Sans doute un hasardeux mélange des deux... Dans tous les cas, Rayne s’approcha de Tinuviel, et donna quelques explications :

« Les enchantements sur les armes m’ont l’air efficaces, même si je n’ai pas encore eu l’occasion de les essayer. En revanche, pour ce qui est de l’armure... Je crois qu’elle produit d’étranges réactions avec mon sang de vampire. L’armure renforce de manière notable toutes mes capacités, et augmente mon agressivité. Oh, ne t’inquiète pas, ça ne me donne pas envie de sauter à la gorge de tout ce qui bouge, mais... Disons que ça me rend encore plus offensive que d’habitude... »

Ce qui était peu dire, étant donné que Rayne était déjà, par nature, une femme avec un style de combat très offensif. Elle reprit donc :

« Je crois aussi que cette armure inhibe ma douleur... C’est comme si je ne la ressentais plus, comme si mon système nerveux se déconnectait, ou était bien plus lent à réagir. Quand j’enfile l’armure, ma peau se met aussi à changer. Elle... Elle noircit, et des symboles incompréhensibles se forment sur mon corps. Plus je combats, plus ces symboles sont pressants, se mettant à luire, et j’ai l’impression qu’ils me rendent encore plus forte... C’est anormal, non ? »

Rayne n’en savait rien, mais, vu les réactions d’Harmonie, ce n’était sûrement pas prévu. Elle espérait qu’il n’y aurait pas d’effets secondaires imprévus, que cette armure ne serait pas une sorte de cadeau empoisonné. L’armure lui serait en effet extrêmement utile quand elle reverrait Kagan, ou un membre des Vingt-Six. Elle tint donc à préciser :

« En tout cas, l’armure me rend singulièrement plus forte. J’ai réussi à vaincre Harmonie... Je ne pense pas que j’en aurais été capable si rapidement sans cette armure... Voire même en être capable tout court... »

Dans le fond, c’était même un peu effrayant.

Elfe malgré son état de fatigue important  écouta avec une attention toute particulière ce que la jeune femme venait de lui dire.  Il fallait qu’elle trouve  la source de ces problèmes mais surtout les solutions qui conviendraient pour que la Dhampire n’ait aucun problème.  Autant dire que cela s’annoncerait complexe.  Il faudrait sans doute faire de nombreux tests,  de nombreux combats même si elle n’était pas réellement en forme pour cela. 
Rayne lui expliqua tous les problèmes, le fait que  l’armure  augmente l’agressivité de la jeune dhampire, le fait  que celle-ci inhibe sa douleur et que plus étrange encore, elle puisse modifier la couleur de peau de la jeune femme.  Elfe  avait besoin de se lever pour pouvoir mieux réfléchir, elle avait beau vouloir faire plaisir à ses petits trésors, elle n’en pouvait déjà plus de rester allongée comme cela.   Elle se leva donc, titubant avant de faire un pas, puis un second alors que ses amantes  venaient la convaincre de retourner se battre, chose qu’elle évita d’un simple mouvement de main.
Ce mouvement les stoppèrent dans leurs élans et elle en profita pour leurs dirent malicieusement.
-J’ai passé l’âge d’être surveillée comme une gamine, même si j’avoue que vous êtes les nounous les plus sexy que j’ai eu.

Elfe Bien que debout devait cependant  être accrochée à quelque chose pour pouvoir tenir debout. Cependant cette position était déjà mieux que la précédente.  Elle  marmonna durant une dizaine de minutes dans sa langue natale, l’elfique.  Cela n’arrivait que peu souvent et cela voulait dire que l’elfe  était dans un état de concentration telle qu’elle ne prêtait plus attention à la langue qu’elle utilisait.


Elle  se demandait si… Oui, cela était possible, il pouvait éventuellement rester quelques résidus , cela liée à l’essence draconique et l’essence même de la vampire avait sans doute provoqué un mélange détonnant.  Elle-même, à l’époque ou elle avait eut son armure avait eut de mal.  Enfin, elle allait devoir expliquer à la vampire ce qui c’était passé et ce qu’elle allait devoir faire pour apprendre à  ne pas succomber à l’armure.
Les premiers mots furent en elfiques avant de reprendre  la langue commune.
-Désolé. Un petit  souvenir, cela m’arrive quand je suis fatiguée, bref.  Donc je pense savoir d’où vient le problème.  La première chose est que le cuir provient d’un drake noir.  Hors, ils sont connus et reconnus pour leurs sauvageries, leurs  agressivités.  Hors,  je pense qu’il restait encore des micros gouttelettes de sang qui ont sans doute dus se mêler au tient.    De plus, les dragons  et leurs cousins drakes  ne sont pas des créatures ordinaires, tu dois le savoir.   Un dragon même mort, continue à pouvoir influer ceux qui se servent d’eux. 

Elle prit quelques secondes pour respirer,  elle ne pensait pas qu’elle était faible à ce point là. Même discuter lui demandait une énergie qu’elle n’avait pratiquement pas.  Elle soupira, las de son état et continua.

- Une armure en peau de dragon à sa propre volonté. Quoi que l’on en dise.  Elle tentera de t’influencer.  Cela à des avantages, mais également des inconvénients.     La seule chose que je peux te dire, c’est que si tu veux apprendre à maitriser ton armure,  tu devras lui faire comprendre que c’est toi qui mène la danse.  Entraine-toi encore et encore. Et apprends à la maitriser  à te servir de sa colère quand tu le souhaite et non pas quand elle le veut.   Pour cela, le mieux, c’est encore de renforcer ton esprit  et quand tu te bas, refuser au maximum son aide.   Petit à petit tu y arriveras de mieux en mieux.  Et lorsque tu y arrive totalement,  c’est à ce moment là que tu la maitriseras enfin. Mais cela pourrait être long.  Il m’a fallut vingt ans pour y parvenir. 


Elle ne voulait pas décourager Rayne,  cependant  de part sa nature, cela ne devrait pas être trop un problème pour elle.  Dut moins, elle l’espérait.

Tinuviel était effectivement très affaiblie. Rayne le réalisa encore mieux quand cette dernière tenta difficilement de se relever, et de s’extirper de son lit. Elle tremblait comme une feuille. Difficile de voir en elle cette redoutable femme qui avait osé affronter un dragon. L’enchantement d’armes était-il si épuisant ? Rayne n’en savait rien, mais il fallait croire que si. L’elfe rouge avait sa fierté, et être traitée comme une assistée semblait visiblement lui déplaire. Ses belles infirmières la laissèrent donc, tandis qu’elle se mit à baragouiner dans un idiome obscur, que Rayne interpréta comme de l’elfique.

*Ces accents mélodieux, cette espèce de chanson implicite... Ça ne peut être que de l’elfique.*

La langue était effectivement mélodieuse et charmante. Une bien curieuse mélopée. Rayne se demandait ce que l’elfe rouge fichait, jusqu’à ce que cette dernière ne revienne à la réalité, et ne lui explique ce qui arrivait avec son armure. De ce que Rayne comprenait, l’armure avait été utilisée avec les écailles d’un Drake noir. Elle se retint de demander ce qu’était un Drake noir ; Severin avait probablement du le lui expliquer, ou lui donner des livres pour se documenter, mais il était très rare que Rayne s’y plonge pour obtenir des informations. Il devait probablement s’agir d’un dragon, sans doute celui que Tinuviel avait réussi à tuer hier. D’après Tinuviel, l’âme du Drake continuait à vivre dans cette armure, à travers le sang du dragon, sang qui réagissait avec le sien quand elle enfilait l’armure.

Pour contrôler l’armure et ses effets, Rayne devait donc contrôler sa rage et sa colère, tout en refusant, lors du combat, l’aide de l’armure. Tout ceci était un petit peu obscur pour Rayne. L’armure la rendait plus forte. Refuser son aide était stupide. Ce serait se conduire en lâche. L’armure n’était qu’un objet, une armure. Rayne en contrôlerait aisément les effets. De plus, si les effets étaient en question consistaient juste à accroître son agressivité et à inhiber sa peur, elle n’avait décidément aucune raison de les refuser, bien au contraire. Il ne se passait en effet pas une journée sans que Rayne ne prenne le temps d’analyser mentalement son combat contre Kagan, et les raisons de son échec. Car, même si elle avait vaincu son père, ce dernier avait survécu. Ce combat était donc un échec.

Elle avait traversé un gratte-ciel ravagé par les forces de Kagan et de sa fille déchue, Ferril, passant par le toit pour finalement réussir à rejoindre le trône de Kagan. Le combat avait été terrifiant, mais Rayne, même si elle n’osait pas le dire, avait manqué d’agressivité dans ce combat. C’était comme ça qu’elle l’interprétait. Kagan l’avait dominé au début, et ce n’est que quand elle avait fait parler sa rage et sa fureur qu’elle avait réussi à prendre le dessus. Revenant au présent, elle eut donc un léger sourire, et se rapprocha de Tinuviel, déposant un baiser sur le coin de ses lèvres.

« Je vois... Ne t’en fais pas pour moi, je contrôlerai cette armure. Je m’entraîne chaque jour, et je suis une Dhampir. Personne ne me contrôlera. »

Vingt ans, ça risquait d’être long... Et Rayne ne pouvait pas se permettre d’attendre autant. Dans vingt ans, Kagan risquait d’avoir recouvré ses forces, et elle ne pouvait le permettre.

« Quant à toi... J’admire ta bravoure, mais tu as l’air de ressembler à une feuille... Je ne pourrais sans doute jamais assez te remercier pour ce que tu as fait pour moi. Même les plus grandes guerrières doivent savoir qu’il y a un moment pour se battre et un autre pour se reposer. »

L’elfe était c’était vrai en sale état,  ses muscles se tétanisaient au moindre effort et pourtant, elle continuait à être debout, luttant avec peine contre la gravité. Elle  n’allait cependant pas laisser un petit moment de fatigue lui casser les pieds.  Elle soupira,  c’était compliqué pour elle d’être dans une position de faiblesse aussi flagrante mais elle n’avait pas le choix, elle devrait juste ravaler sa fierté et  attendre sur le lit que la fatigue soit moins forte.  Elle espérait juste que la vampire n’en fasse pas qu’à sa tête.  Elle avait un peu cerné la personnalité de la vampiresse et elle devait être comme elle, une véritable tête brulée.  Un tempérament qu’elle adorait, car mine de rien et si ses amantes l’avaient obligées à s’assagir, elle restait une jeune femme ayant un caractère de feu.  Elle n’était pas pyromancienne pour rien non ?
Oui, elle avait beau savoir que ce n’était pas bien, cette femme lui rappelait elle, il y a quelques années.  Elle  savait donc qu’elle ne pourrait pas attendre des années.  Ainsi, elle allait lui faire un entrainement particulièrement  intensif pour pouvoir lui donner un coup de main. Elfe était peut être présomptueuse, cependant  elle pensait pouvoir  faire qu’en quinze jours elle   maitrise son armure dans les grandes lignes. 
Elfe soupira doucement en écoutant la jeune femme. Elle dormir ? Et bien il était probable que non,  la jeune femme ne la connaisse pas si bien que cela. Elle eut juste un sourire avant de lui dire.

-Pour dormir, il faudrait que ma journée soit fini.  Je vais me reposer mais avant écoute ce que je vais te dire.   Je pense que je te connais assez pour savoir que tu  n’attendras pas vingt ans pour tuer ton père.  Je vais donc te dire quelque chose.  QUINZE JOURS.  Voila le temps qu’il me faudrait pour pouvoir t’apprendre à maitriser globalement ton armure.  Assez pour pouvoir combattre ton père sans pour autant prendre trop de risque.   Tu auras ensuite tout le temps pour te débrouiller toute seule.  A toi de voir si tu as encore quinze jours.   A, sache que je ne te ferrais pas de cadeau pour que tu avance dans les temps ? Nous somme d’accord ? 

Si la dhampire acceptait, elle en baverait.  Elfe lui en ferrait voir de toutes les couleurs,  de jours comme de nuit.  Elle la haïrait sans doute à la fin cependant elle serait  prête elfe en faisait le serment.  Mais pour l’instant, elle se laissa  tomber sur le lit soupirant doucement. Elle avait besoin de repos malheureusement pour elle.  Pourtant les événements ne lui laisseraient aucunes secondes de répit. Elle allait besoin de chaque secondes mais Rayne avait raison. Elle ne pourrait pas  continuer comme cela si elle ne pouvait pas dormir un peu.  Elle soupira doucement avant de dire à Rayne, alors qu’elle-même était allongée sur le lit.

-Reviens ce soir, dans ma chambre, je devrais être un peu plus en forme et on commencera ton entrainement. Enfin, si tu le veux n’est ce pas ?

Quinze jours... Quinze jours pour se former, et apprendre à utiliser son armure. Rayne fut tentée de refuser l’offre. Elle comptait partir rapidement, pas s’éterniser. Aussi agréable soit ce harem, Kagan n’y était pas. Elle n’avait donc aucune raison d’y être. Ceci dit, si elle partait, ce serait pour aller vers Nexus, et pour errer dans la ville.

*Traquer Kagan me prendra encore probablement des mois, et je le poursuis depuis des années... Suis-je vraiment à quinze jours près dans ma lutte ?*

Non, naturellement. D’autres raisons poussaient Rayne à ne pas vouloir prolonger son séjour dans le harem. La bonne humeur ambiante du coin était dangereuse, car elle risquait de la contaminer. Elle en tenait pour preuve son agréable nuit avec Lyrinda. De manière incroyable, Rayne avait dormi à poings fermés, ce qui était assez rare chez elle. A l’image des vampires, elle n’avait pas grand besoin de dormir, mais, si ce fait était déjà rare, le plus étonnant était qu’elle avait passé une nuit où elle n’avait ni rêvé, ni cauchemardé. Ses nuits étaient généralement entrecoupés de cauchemars sinistres où elle voyait et revoyait sans cesse la mort de sa mère. L’aveu de sa propre faiblesse, de sa propre impuissance.

Si elle avait l’occasion de consacrer deux semaines à devenir puissante, Rayne ne comptait pas passer à côté. Sa colère et sa motivation ne faisaient aucun doute, mais elle devait faire attention à sa fierté et à son orgueil vampiriques. Elle n’était pas invincible, ce que les évènements au Château-Lerouge lui avaient sévèrement rappelé. Elle ne ferait pas les mêmes erreurs que son père sur ce point-là. Elle hocha donc lentement la tête, alors que Tinuviel l’invitait à la rejoindre ce soir dans sa chambre, et précisa :

« Je ne vais pas rejeter une formation spéciale... Mais sache que j’ai déjà été entraînée par la Brimstone, alors... Inutile de me ménager. »

Les entraînements de choc de la Brimstone étaient éprouvants. Une nourriture infecte, des combats perpétuels, peu d’heures de sommeil... Une bonne partie des candidats humains craquaient, mais Rayne avait réussi. Elle était la plus jeune agente de la Brimstone, et probablement la meilleure que la Brimstone ait jamais eu. Elle avait réussi à éclipser la légende du Triumvirat par ses prouesses au combat. Elle doutait que l’entraînement de Tinuviel soit utile... Rayne se dit donc que, si elle n’apprenait rien d’ici quelques jours, elle partirait.

Sur ces entrefaites, elle quitta l’infirmerie, et laissa Tinuviel. Sa journée fut essentiellement consacrée à de l’exploration et à du repérage, que ce soit du harem ou des environs. Le harem était plutôt grand, et bien organisé. En cas d’attaque, il avait de quoi soutenir un siège. Il lui manquait des murs solides. Si l’ennemi déployait de l’artillerie, il y aurait du dégât. Quoiqu’il en soit, l’ensemble était assez majestueux, très impressionnant. Dehors, elle retrouva plusieurs des femmes qui l’avaient aidé lors du siège : Iona, l’Ange guerrière, qui patrouillait fièrement dans le ciel, mais aussi Kalla, qui patrouillait dans les environs, effectuant de grandes chevauchées pour s’assurer qu’aucun monstre ou aucune bande de pillards ne venaient les attaquer. Le harem était assez isolé, mais n’était pas pour autant dans une zone vierge de monde. Les montagnes et les grottes alentours dissimulaient bien des menaces silencieuses et sourdes, et constituaient aussi un très bon entraînement. Rayne le réalisa en suivant Iona et Megane, et en affrontant un immense ver des sables.

*Je n’aimerais pas être leur ennemie* s’était-elle dit.

Rayne passa en somme sa journée dehors, s’éloignant du harem. Elle chevaucha avec Kalla, sous le regard d’Iola, formant une patrouille qui longea la gorge d’une montagne pour atteindre une grotte. Iona expliqua à Rayne que des pillards s’étaient réfugiés là-dedans, mais avaient été attaqués par des gobelins. Depuis, leur corps avait pourri, et avait donné naissance à de redoutables plantes-carnivores, des Ékinoppyres. Kalla lui expliqua que les Ékinoppyres poussaient sur les restes d’individus particulièrement cruels, ce qui laissait supposer que ces pillards faisaient partie d’un ancien clan de raiders, des violeurs, meurtriers, dépeceurs, et esclavagistes en puissance. Les corps n’avaient pas été brûlés par les gobelins. Rayne fit preuve de son talent en cisaillant les Ékinoppyres.

Après ce combat, Rayne avait bivouaqué en bas du dédale, tandis que le soleil commençait à se coucher. Kalla l’avait aidé à rejoindre le harem. Une bonne journée. Rayne n’avait pas trop perdu son temps, et avait pu constater qu’elle était pleinement remise du combat contre Zala. Elle rejoignit donc rapidement la chambre de Tinuviel, traversant les couloirs et montant les escaliers jusqu’à atteindre la porte d’entrée.

Elle frappa, et entra.

L’elfe eut donc le temps de se reposer,  pour dire vrai elle s’endormit pratiquement  une ou deux minutes après le départ de la dhampire, plongeant dans un monde sans rêve.  Le rêve elfique, n’était pas vraiment un sommeil comme celui des humains, il permettait c’était vrai de reprendre des forces, mais celui-ci pouvait durer plusieurs jours sous la forme de transe méditative.   Elfe les avaient cependant abandonné, dormant tranquillement sur ses deux oreilles, alors qu’elle rêvait sans doute à  ses futurs orgies. 
Elle ne se réveilla que quelques heures plus tard, les sentiments de ses petits amours ayant  permit à ce qu’elle puisse récupérer quelques forces.  Elle n’aurait pas de quoi lancer de sortilège, cependant cela lui permettait de rester sur ses pieds et de pouvoir commencer l’entrainement de la dhampire.  Elfe était sur que non, elle n’aurait pas vécut d’entrainement comme ceux qu’elle allait lui proposer,  cependant celui-ci était  différent de ce qu’elle avait vécut jusqu’à présent.  Le but était de dominer en partie la colère de l’amure pour éviter qu’elle ne  succombe à l’instinct de celle-ci.

Elle  prit donc le temps qui lui restait pour s’occuper des amantes qui elles, ne pouvaient pas partir comme Kella, Ionna ou les autres.   N’étant pas des guerrières,  l’elfe savait qu’elles ne pouvaient pas partir seules dans le désert, chose qui d’ailleurs ne les intéressait pas vraiment.  L’elfe se contenta de passer du temps avec elles, discutant de tout et de rien,  le but étant surtout de  prendre de leurs nouvelles,  être sur que tout ce passait bien et qu’il n’y avait aucun problème.   Quand elle fut sur que tout aller bien,  elle prit le temps d’aller donner un coup de main en cuisine avant de  remonter voir Krystal, histoire d’être sur que les comptes étaient corrects.  Encore une fois la furry   se plaignait de la basse quantité de réserve en liquidité et encore une fois,  elfe dut lui  prouver que non et que c’était elle qui se faisait des idées.   Pour finir l’elfe  se dirigea vers  Lyrinda,  en effet,  elle savait qu’il y avait entre elle et la dhampire une relation naissante,  elfe proposait donc à l’elfe noir si la vampire était d’accord  qu’elles dormiraient ensembles.
Elfe noir, se contenta d’un sourire.  Certes, drow et elfe étaient des ennemis héréditaires,  cependant elfe n’était pas idiote  et puis elfe avait entièrement confiance en la jeune femme.  Elle savait que ce serait dure pour la jeune femme mais bon.  Elle devait lui apprendre cela aussi. 
Finalement, elle  se dirigea vers sa chambre, puisque c’était le lieu de rendez vous.  Elle  savait que la dhampire n’y serait pas avant quelques temps, ce qui lui laisserait le temps de mettre en place les premiers exercices.  Vu l’état de  fatigue de l’elfe, il ne s’agirait pas d’exercice de  combat mais d’exercice  visant à dominer ses émotions.  Le but étant de triompher de la peur,  de la colère et de la solitude.  Aujourd’hui, elfe lui apprendrait à se mettre en condition pour ces exercices.
L’elfe placa une bougie au milieu de la chambre avant que la porte.  Elle prit doucement la main de la jeune femme, la conduisant au milieu de la pièce au niveau de cette bougie.  La flamme était entrain de se  tortillait,  preuve que la magie de feu de tinu était à l’œuvre. 

-Puisque tu es avec nous pour quelques temps, j’ai demandé à Lyrinda si elle voulait bien t’accueillir et puisqu’elle est d’accord,  tu peux dormir avec elle si le cœur t’en dis.     Bien, en attendant nous allons  nous préparer pour l’exercice d’aujourd’hui.

Elle  eut juste un sourire,  ce serait un exercice simple mais pourtant essentiel.  Le but étant de ne  pas se déconcentrer,  d’avoir l’esprit fixé sur cette flamme,  de ne pas laisser  l’esprit  partir.   Pour l’instant ce serait simple,    mais avec la peur, cela serait bien plus difficile.

-Bien, vient t’assoir à coté de moi.  Tu vois,  l’exercice d’aujourd’hui va être simple.  Tu devras juste  te concentrer sur cette flamme.  Si tu y  arrive,  alors on passera à la suite demain.

Car oui, le lendemain serait bien plus difficile, bien plus usant.   Elle eut juste un sourire, attendant que la Dhampire se prépare.  Si jamais elle échouait à ce simple exercice,  alors elle ne donnait que peu de temps à la dhampire avant que l’armure décide à sa place.
Elle commencerait bientôt à tenter de la maitriser.  Et alors,  cela serait plus compliqué pour elle.  Bien plus compliqué.

La chambre de Tinuviel était plongée dans une relative pénombre. L’obscurité ne dérangeait pas Rayne. Ses pupilles vampiriques étaient tout à fait capables de voir dans la nuit, à la manière des elfes, ces derniers étant nyctalopes. L’éclairage de cette chambre changeait en tout cas plutôt bien du contenu du harem, qui était assez éclairé. Du moins pour les couloirs. Généralement, les chambres et les salons étaient à l’atmosphère des harems : sans être sombres, ils étaient légèrement éclairés, avec des lumières tamisées permettant de renforcer la sensualité qui suintait des murs. Ici, il n’y avait qu’une légère bougie, vacillante, dont la haute flamme anormale témoignait qu’elle était alimentée par la magie. Rayne comprit donc assez rapidement qu’il ne devait pas s’agir là de l’éclairage normal de cette pièce, mais probablement de sa première épreuve.

*Est-ce que je dois éteindre cette flamme ? Ou l’entretenir ?*

Surprise, Rayne suivit Tinuviel près de la bougie. L’elfe rouge lui parla alors de Lyrinda, et Rayne eut un léger sourire. Dormir encore avec elle n’était pas pour la déranger. Lyrinda avait indéniablement un certain charme. Outre le fait d’être d’une beauté renversante, elle était aussi une marginale. Les Drow étaient rejetés des autres espèces. Personne ne les aimait, et Lyrinda, dans un sens, était sur ce point comme Rayne : abandonnée des deux mondes. Comment ne pas s’attacher ? Tinuviel avait du le sentir.

Elle s’assit lentement à côté de l’elfe, sans rien dire, tandis que cette dernière lui expliqua ce qu’elle avait à faire : se « concentrer sur cette flamme ». Rayne en fronça les sourcils, sceptique. Avait-elle bien compris ? Qu’est-ce que ça voulait dire ? Elle regarda la flamme dansante. Elle était d’une lueur presque hypnotique, comme n’importe quelle flamme. Rayne la regarda silencieusement pendant quelques secondes. S’agissait-il d’une épreuve mystique ? D’un test quelconque ?

*C’est quoi, ces conneries ? En quoi regarder une saloperie de flamme est-il instructif ? Est-ce de l’humour elfique ?*

Rayne bougonna, impatiente. Allait-elle passer quinze jours à rester le cul vissé sur un fauteuil en observant une bougie ? Elle attendit plusieurs autres secondes, se demandant si quelque chose allait se passer, si cette bougie ne dissimulait pas quelque chose. Il y avait sans doute un sens caché à trouver ici, une devinette, une énigme digne de ces vieux films de samouraïs, mais Rayne se contenta d’hausser les épaules, et de regarder Tinuviel, lâchant un simple mot qui, à lui seul, résumait tout ce qu’elle pensait :

« Et ? »

En quoi regarder une flamme l’aiderait-elle à maîtriser son armure ?

Elfe se contenta d’un seul sourire, la réaction de la Dhampire devant l’épreuve de la bougie  était  normale.  Cela lui rappelait même de vieux souvenir,  en effet,  elle-même à l’époque avait trouvé cette épreuve totalement débile et inutile.  Pourtant avec le temps et le recule elle avait comprit le pourquoi de cette épreuve.  Elle allait donc pouvoir  le transmettre aujourd’hui à la Dhampire. 
Il ne s’était pas passé une quinzaine de seconde que déjà la dhampire se montra impatiente,  l’elfe  ne lui en tient cependant pas rigueur,  elle-même n’avait pas tenue plus de dix secondes la première fois.  Cependant  et contrairement à elle, l’elfe pour gagner du temps serait obligée  de sauter de nombreuses étapes.  Cela risquait d’être éprouvant pour la vampire,  d’être même dangereuse.  Mais c’était le prix à payer pour gagner ce temps qui lui était si précieux.  Elle  s’avança donc  vers la jeune femme,  avant de lui dire.

-  Quinze secondes…   Enfin, je vais t’expliquer.  Cette flamme  est deux choses.  Elle symbolise pour l’instant ta concentration.  Elle menace  à chaque instant de s’éteindre mais également  elle est vacillante.    Cependant  elle permettra bientôt à ton esprit d’éviter les ténèbres.  De ne pas te laisser dévorer  par eux  car cette lumière  bien que faible deviendra de plus en plus forte.     Je sais que pour l’instant  c’est énigmatique.  Mais pour l’instant concentre-toi sur elle.   

Elfe , fit de même, se concentrant sur la bougie.  Autours des deux femmes, l’ambiance de la pièce se faisait de plus en plus sombre  et    dans l’ombre  des murmures  commençaient à  apparaitre.   Des murmures qui devaient de plus en plus proches,  de plus en plus  forts  aussi.   On pouvait maintenant distinguer des bruits de pas dans l’ombre  alors qu’il n’y avait personne dans  la chambre.  C’était  finalement comme si l’ombre elle-même avait  une vie,  une essence  propre.  Une essence qui tentait  de se rapprocher  de la lumière pour la dévorer  elle  et ceux qui se trouvait sur son chemin.

Voila l’épreuve,  le but était de matérialiser ses ombres,  et de toujours rester concentrer sur la lumière de telle façon à ce que celle-ci ne s’éteigne pas.    Au bien sur,  si la dhampire  n’y arrivait pas l’elfe  supprimerait  les illusions que provoquait la bougie.   Car pour l’instant cela n’était que des illusions.   Cependant le but final de l’épreuve était de  triompher d’ombre belle et bien réelles.  D’ombre dangereuse  et avide de lumière.  Un peu  comme cette armure était  avide  de la part de lumière de la dhampire.

Elfe  ne bougeait plus,  elle ne respirait d’ailleurs presque plus,  seul  une respiration venait se perdre de temps en temps  dans la pièce alors que celle-ci était de plus en plus sombre et que les ombres se rapprochaient de plus en plus.  Il était probable que la jeune femme  si elle n’avait pas encore perdue toute sa concentration,  le fasse bientôt,  quand les ombres  commenceraient à l’entourer.   A ce moment, elfe serait  prête à les chasser,  mais pour l’instant elle laissait faire.

Tinuviel lui donna de plus amples explications sur cette flamme. De ce que Rayne en comprit, la bougie symbolisait sa concentration, et elle devait s’y accrocher comme à une bouée de sauvetage, tout en devant se méfier des ombres. En clair, Rayne n’avait absolument rien compris, mais, comme ce n’était visiblement pas un canular, elle décida de se concentrer sur la bougie. La flamme vacillait toujours, et Rayne grommela, en essayant de ne penser à rien d’autre. La longue flamme remua alors moins, tressautant bien moins, et finit même par se tenir droite... Jusqu’à ce que Rayne perçoive un mouvement sur sa gauche.

Immédiatement, sa tête se tourna, et la flamme vacilla à nouveau. Il n’y avait personne... Elle avait pourtant cru voir quelque chose. Grommelant, Rayne tenta à nouveau de se concentrer sur la flamme, comprenant qu’elle avait affaire à un tour magique. Elle entendit à nouveau des bruits, des mouvements, et des formes, et tâcha de les ignorer. Ce n’était que des illusions, des ombres. Il n’y avait pas à en avoir peur. Elle se concentra sur la flamme, qui cessa de vaciller. La lumière l’aveuglait, et les ombres continuaient à danser, prenant progressivement forme.

Une sourde angoisse se mit à naître dans le cœur de Rayne. Une boule se forma lentement dans le creux de son ventre, et elle serra les poings, voyant de nouvelles ombres danser, commençant à prendre forme. La maudite magie parlait, et des illusions se formaient. Elle entendait une porte claquer, et les ombres prenaient la forme de flammes noirâtres, de pas précipités. Lentement, la flamme se mit à trembler, et Rayne serra les poings. Elle pouvait se remémorer la scène sans avoir besoin de cette infernale flamme dansante. Et, à chaque fois qu’elle regardait les murs, elle ne voyait que l’obscurité, et, à chaque fois qu’elle reposait ses yeux sur la flamme, il lui semblait que les murs prenaient forme, et se mettaient à danser.

Serrant les dents, elle tenta de ne pas tenir compte. De ne pas s’intéresser à ces flammes noires, à cette forme silencieuse et menaçante qui la contournait, et fondait sur le lit, à ces craquements qu’elle croyait entendre, à ces gémissements inaudibles, à cette main qui se tendait inutilement dans le ciel, comme pour appeler à l’aide, comme pour implorer qu’un ange quelconque vienne l’aider, non pas en la sauvant, mais en mettant fin à ses jours pour que ses souffrances cessent. Il lui semblait que des échos résonnaient dans ses oreilles. Le corps de Rayne se mit à trembler lentement, et la flamme tremblait de même. Elle sentit quelque chose picoter ses yeux, la brûler, alors qu’elle serrait les poings. Les ombres prenaient la forme de maisons en feu, de corps regroupés au centre d’un village massacré. Un immense charnier qui perçait à travers la danse du feu. Ses yeux se fermaient et s’ouvraient, lentement et douloureusement, alors que les ombres dessinaient le visage angoissé d’une femme ayant un chignon serré sur la tête, et qui se tordait de douleur, incapable de retenir ses larmes.

Elle rouvrit alors les yeux, et sentit sa rage l’envahir, comme un ultime rempart avant de laisser place à sa souffrance. Une larme s’était creusée sur sa joue droite, glissant de son œil, et elle renversa du pied la bougie. Magie ou pas, cette dernière s’éteignit.

« ASSEZ ! » hurla-t-elle en renversant la bougie.

Redressée, Rayne était furieuse, et les ombres étaient parties. Son regard haineux se porta alors sur Tinuviel. Elle l’attrapa, et la plaqua contre le mur, vociférant :

« Où est-ce que tu veux te mener, avec ta PUTAIN DE MAGIE DE MERDE ?! s’exclama-t-elle. A toutes ces conneries de psys’ sur le caractère autodestructeur de la vengeance ? Cet enfoiré a massacré ma mère sous mes yeux, et a brûlé tout un village ! Ma rage m’a permis de survivre à tout. Elle a été le moteur qui m’a permis de surmonter toutes mes blessures, et de continuer à brandir mes lames ! Je tuerai cet enfoiré, et personne ne m’en empêchera ! Tu veux me faire éviter les ténèbres ?! Je suis née dans les ténèbres, j’ai grandi avec elle. Partout où j’ai été, il n’y avait que mort, désespoir, et chaos. Ma fureur est ma seule amie sur le champ de bataille ! »

Rayne relâcha alors Tinuviel, et se dirigea vers la porte.

*Cette mascarade a suffisamment duré ! Il est plus que temps que je te retrouve, mon père, et que je te montre ce que signifie l’amour filial pour moi.*

Honnêtement,  elfe n’avait pas spécialement envie d’être à la place de la jeune femme en ce moment,  l’expérience des ombres étaient une chose particulièrement dure  à vivre  car c’était une confrontation   sans détours avec nos plus grandes peurs.   Cependant,  c’était la seule et unique manière de faire  pour que la jeune femme  progresse assez vite.
Elle aussi était concentrée sur sa propre flamme,  mais cela ne l’empêchait pas  de pas ressentir les ombres la frôler  elle  aussi.   La suite fut cependant bien plus intense,  les ombres étaient entrain de prendre forme.  Chose que l’elfe n’avait jamais  vu,  du moins pas à ce stade.  En générale,  cela ne se produisait que lorsqu’on en était à la dernière étape de cette épreuve.  Pas maintenant,  c’était bien trop tôt.     Pour être honnête, cela ne rassurait absolument pas  l’elfe mais elle comprenait mieux désormais pourquoi l’armure réagissait de cette manière avec la jeune femme.   Les dragons noirs  et donc les drakes noirs sont des créatures  des ténèbres.   Elfe réalisa donc son erreur,  elle n’aurait jamais dut prendre ce genre de cuir, déjà intimement lié à cela pour elle.  Cependant cette erreur était déjà faite,  elle devait donc la réparer.
Elfe fut coupé par une main sur sa gorge, une main qui la serrait alors qu’elle était plaquée contre un mur.   Elle savait qu’il ne servirait à rien de tenter de se libérer.  Elle attendit donc que la jeune femme la repose d’elle-même ce qui allait venir.   Cependant elle avait bien entendue la jeune femme et  elle avait une autre idée en tête. 
Elfe voyant que celle-ci  se préparait à sortir,  érigea  avec les quelques rares forces qu’il lui restait une barrière de flamme   empêchant la dhampire de sortir.  Elfe tremblait comme une feuille, épuisée,  ne pouvant pratiquement plus tenir debout, mais cela n’affectait en rien sa détermination et cela pouvait se lire dans ses yeux.  Rayne ne pourrait pas sortir, pas encore.  Honnêtement, elle se moquait de prendre un coup, elle ne la laisserait pas aller se battre comme cela.

-Je ne te laisserais pas partir.  Tu ne tiendrais pas cinq minutes avant de sombrer dans la folie si tu te servais de ton armure contre ton père.    De plus, tu crois que Kagan, serait assez stupide pour ne pas se servir de cette faiblesse contre toi,  si tu es dans cet état pour quelques ombres,  je me demande ce que tu deviendras quand tu le verras en vrai.  Je peux te citer au minimum  quinze manière pour te faire revire  cette scène encore et encore, sans que ce ne soit une vue de ton esprit,  la question est, est ce que tu seras assez forte pour résister à ce spectacle ?

Elfe haletait,  elle avait besoin de reprendre son souffle, cette muraille de flamme l’épuisée, cependant elle devait faire en sorte   que la jeune femme l’écoute.  Elle s’avança,  titubant, avant de lui mettre une gifle magistrale[/i].
-On choisi de vivre dans les ténèbres ou la lumière.  Et si la haine et la seule et unique chose qui te pousse à vivre, alors ne t’étonne pas qu’un jour tu finisses par ne plus être que l’ombre de toi-même.   Finalement, tu seras comme celui que tu voulais tuer, c’est triste à dire, mais c’est la vérité. 

Elfe devait lui faire prendre conscience  que si elle ne parvenait pas à se maitriser, elle pourrait basculer.  Elle savait en plus que la jeune dhampire ne pourrait que lui donner raison.  Elle avait quand elle avait porté l’armure en drake noir sentit toute cette agressivité.  Certes, pour l’instant elle avait le contrôle.  Mais que ce passerait il si elle le perdait.  Elfe en tant que mage rouge, connaissait la puissance des sentiments, partie intégrante de sa source de magie.  Elle avait  apprit à les canaliser avec Task et à les maitriser avec son peuple.  Au fond,  elle comprenait que les deux  manières de faire ne devaient pas être rivales mais se compléter. 
Elle ne devait pas cacher ses sentiments, car les sentiments sont la forme la plus puissante et la plus brutes d’énergie,  cependant si elle n’apprenait pas à les dompter, cela risquait de se retourner contre elle  et l’elfe en était sur  cela serait le cas.   

-Je ne te demande pas, d’oublier ta rancœur,  ta haine  et ton désir de te venger,  je te demande juste de te maitriser, d’être capable de garder ton calme, car sans lui tu  agiras comme Kagan veut.  Maintenant à toi de voir,  tu es libre de partir  je ne te retiendrais pas.

Elfe baisa sa rambarde de flamme car la dhampire était la seule à pouvoir choisir ce qu’elle souhaitait faire.  Rester ici ou bien repartir ?

La sortie lui fut refusée. Rayne s’arrêta en voyant un mur de feu se dresser entre elle et la porte. Offrant son dos à Tinuviel, elle écoutait cette dernière parler, jusqu’à ce que l’elfe la force à la regarder, et ne la gifle. Cette claque, à vrai dire, fut totalement indifférente pour Rayne. Elle souffrait déjà. De ces souffrances silencieuses, latentes, qu’on ne pouvait pas guérir avec un baume, des pommades, ou avec de l’entraînement. Celles qui marquent, et qu’on ne peut pas oublier. Son regard furieux fixait Tinuviel, comme si elle voulait la tuer, l’égorger sur place. L’idée la caressa brièvement. Quiconque se mettrait entre elle et sa vengeance ne pourrait encourir que sa rage. Tinuviel ne ferait pas exception.

Le rideau de flammes baissa, et elle tourna lentement la tête. Il lui était maintenant possible de sortir, et elle se retourna à nouveau, marchant vers la porte.

*Tu te prends pour qui, Tinuviel ? Ma mère ? Garde tes conseils de psy’ à deux balles pour toi, enfonce-toi les dans le cul, et ne reviens plus me faire chier. Ma colère est tout ce que j’ai, c’est ma force.*

Ce ne fut néanmoins pas ce qu’elle dit. Une joute verbale ne la tentait pas, et, dans le fond, elle devrait plutôt la remercier. Son petit tour de magie lui avait aidé à se rappeler des choses importantes. Avant cela, elle avait, il est vrai, hésité, eu des doutes. Ce harem était tellement accueillant... Les ombres lui avaient rappelé ses promesses, ce qu’elle avait juré à la nuit tombante en tenant le cadavre de sa mère. Sa vie n’était pas de croupir dans un harem à chasser des pillards et des vers de sables. Elle était sur la route, à errer sans fin. On lui avait imposé cette vie, et elle l’avait accepté. Il était trop tard pour revenir en arrière. Merci, Tinuviel.

Sur le pas de la porte, elle s’arrêta, et tourna légèrement la tête. Cette elfe était aussi têtue qu’arrogante, mais Rayne n’avait maintenant plus aucune raison de rester, surtout si c’était pour attendre ces conneries de psy’ sur l’importance des sentiments, et sur les dangers de la vengeance. Dire qu’elle deviendrait comme son père, c’était insultant. Elle, elle n’avait jamais massacré des villages entiers pour le simple plaisir de voir ce qu’une fille formée dans la haine deviendrait face à une fille formée dans l’amour. Il avait accordé à certaines de ses filles l’amour d’un père, comme Ephemera et Ferril, et à une autre la haine, Rayne.

« Merci pour ton hospitalité. Tu peux garder l’armure. Je n’en ai pas besoin. »

L’armure renforçait ses capacités, mais, si c’était pour lui faire perdre la raison, elle lui était inutile. Elle considéra également ses lames dhampirs, et les dégrafa, les faisant tomber sur le sol.

« A vrai dire, garde ça aussi. Je n’ai pas besoin de ces gadgets magiques aux effets imprévisbles. J’ai vaincu Kagan sans eux, je recommencerai. Et je l’achèverai. »

Les lames tombèrent bruyamment sur le sol, et Rayne sortit alors. La magie... Une belle saloperie, à bien y réfléchir. Rayne n’en avait pas besoin. Et elle n’en voulait pas. La magie avait toujours des effets pervers, et, de plus, elle ne voulait pas se sentir redevable envers Tinuviel, ou que cette dernière croit qu’elle ait une dette envers elle. Rayne était libre comme l’air. Et sa fierté n’était pas quelque chose à négliger.

Elfe se contenta de laissait faire la jeune femme,  elle lui avait promis de ne pas la retenir et elle tiendrait promesse, cependant  le geste  que la jeune femme fit, lui fit prendre conscience qu’elle sous estimait  grandement la fierté de la jeune femme.  Finalement,  elle était aussi fière qu’elle et cela expliquait peut être pourquoi  cette confrontation faisait des étincelles.    Pourtant,  elfe réalisait  de plus en plus qu’au fond, il était probable qu’elle se ressemble énormément  si jamais la situation avait était différente.   Car si elle, elle avait eut pas mal de malchance au départ, elle avait fini par voir le destin lui sourire au bout de quelques temps.   Ce serait peut être le cas pour Rayne un jour.  Cependant l’elfe venait de comprendre qu’elle ne pourrait pas la convaincre  d’abandonner son idée de vengeance.   Cependant il lui restait encore une petite carte à jouer avant de rendre les armes.

Elle  récupéra les deux armes  et l’armure de la dhampire, la laissant sortir.   Cependant  avant que celle-ci ne soit  hors de porter de la voix de l’elfe.  Elle prit le temps de lui dire.

-  Tu sais,  je suis sans doute une  piètre  prof, ainsi qu’une  elfe fière et arrogante,  cependant je ne suis pas une voleuse. Ces armes ainsi que cette armure sont à toi,  de plus le verredragon est le genre d’acier que l’on ne trouve pas facilement.   Enfin,  je voulais te dire deux choses.  La première est que je n’aurais pas dut dire, ni faire ce que j’ai fait et dit  et pour cela, je te présente  mes excuses. 

Entendre l’elfe s’excuser était une chose rare,  exceptionnel même car même si elfe du soleil ne voulait plus entendre parler de son héritage,  elle avait été éduquée comme cela.  Pour les elfes,  les autres races, quelques elles  soient  ne sont que des races inférieurs.  Cette éducation expliquait en partie  la fierté de l’elfe mais il y avait aussi  le fait  que cette fierté fasse partie de son caractère. 
Elfe  en vint donc au second point.   Elfe  se dirigea vers une commode de la chambre avant de fouiller dans un tiroir et d’en tirer un petit écrin.   Il y avait dans cette boite un petit cadeau que l’elfe souhaité offrir à Rayne à la fin de son entrainement.  Cependant, puisqu’elle avait décidé de partir maintenant,  autant le lui donner maintenant. Elle s’avança  avec peine  vers la dhampire qui n’avait pas changé de regard,  elle était furieuse contre elle, cela pouvait se comprendre d’ailleurs.  Cependant il était probable que même si elle ne lui pardonne pas, elle lui en veuille un peu moins.
Elfe sorti un petit pendentif et le glissa dans la main de la jeune femme avant de lui dire.

-Puisque la magie n’est pas ton truc,  je pense que ceci  te sera plus utile.  C’est un porte bonheur, il  te portera chance et  je pense que tu en auras  plus besoin que moi.
Ce pendentif était vraiment une magnifique pièce,  il s’agissait d’un bloc unique d’argent,  finement ciselé.  Le motif, sinueux, s’entremêlé sur  lui-même  créant  ainsi une œuvre unique et splendide.   Il ne représentait  rien,   n’était absolument pas magique  et surtout, il semblait particulièrement ancien.
- Je ne te demande pas de m’aimer,  je ne te demande même pas de me respecter,  je te demande juste de le prendre pour mettre toutes les chances de ton coté.    Je connais mes amantes  et Lyrinda m’en voudrait si jamais je ne te donnais pas toutes les cartes pour survivre.  Elle semble t’apprécier et le fait qu’elle n’ait pas voulu de tuer  me fait penser qu’elle  voudrait te revoir entière.

Elfe la laissa finalement tranquille.  Elle n’avait plus grand-chose à dire et elle lui avait promis  qu’elle la laisserait partir après lui avoir dit  deux choses ce qui était maintenant le cas.   Elle n’allait pas plus retarder la Dhampire si celle-ci  voulait partir.  Cependant,  elfe espérait qu’au moins elle dise au revoir à Lyrinda.  Celle-ci avait beau être une drow,  elle avait beau être une femme solitaire  et le plus souvent manipulatrice.  Elfe rouge était cependant convaincu que malgré tout, l’elfe noir ait une certaine sympathie pour la jeune dhampire ce qui était un véritable exploit. Voila, il était maintenant temps pour elle de dire au revoir à la belle rousse.    Dire, qu’elle lui donnait son objet le plus précieux…

-Je ne te retiendrais pas plus.  Bonne chance pour ta quête  et si jamais tu as besoin d’aide,  n’oublie pas que nous t’aiderons.  Même si je sais que  notre relation fut assez mouvementée,  je t’ai promis un coup de main et je t’aiderais si jamais tu m’appelle.

Sur le couloir, Rayne avançait rapidement, tendue et nerveuse. Sans ses lames, elle allait devoir rapidement espérer de trouver un portail, d’autant plus qu’elle ignorait où elle se trouvait. Sur ce point, toutefois, il lui suffirait de contacter Severin. Son vieil ami veillerait, et, dans la mesure où il avait accès aux satellites tekhans, il serait tout à fait en mesure de lui dire précisément où elle se trouvait. Tinuviel lui parla alors, et Rayne s’arrêta, lui tournant le dos en fermant les yeux. N’en avait-elle pas assez ? Ne voyait-elle pas dans quel état la Dhampir se trouvait ? Cette dernière tremblait sur place. Les ombres, cette infernale magie, lui avaient fait revivre de plein fouet un évènement qu’elle n’avait jamais pu oublier. Un évènement qui était à la fois sa force et sa faiblesse. Sa force sur le champ de bataille, sa faiblesse quand elle était au repos. Comment avoir l’esprit apaisé et songer au futur quand on avait de tels démons dans la tête ? Aucune thérapie, aucun sort de magie blanche, rien ne viendrait la guérir. C’était son blocage, sa croix qu’elle trimballait sans arrêt.

*Pourquoi, Tinuviel ? Pourquoi insister ainsi ? Pourquoi continuer à t’attacher à moi ? Il n’y a rien à sauver en moi... Comment pourrait-on m’aimer ? POURQUOI EST-CE QUE TU INSISTES ?*

Elle avait envie d’hurler, de lui hurler dessus, de la frapper, mais elle sentait ses forces l’abandonner, alors qu’une ligne mince et ténue se brisait en elle. Tinuviel s’excusait, ce qui, en temps normal, aurait sans doute du la marquer, mais la laissait plutôt totalement indifférente. Qu’est-ce qu’elle en avait à foutre, de ses excuses ? Croyait-elle qu’elles feraient revenir à la vie sa mère ? Qu’elles lui ôteraient les soupirs de plaisir et les gémissements plaintifs qu’elle avait entendus ? Le soupir langoureux de son père quand il avait joui en elle, les larmes qu’elle avait poussé, cette impression surréaliste d’être dans un horrible cauchemar en voyant le village brûlé, en voyant les corps regroupés sur la place publique, et ceux qui hurlaient dans les villages ? Croyait-elle que de simples mots pourraient guérir la douleur qu’elle avait reçu quand ses cheveux avaient pris feu et que ses mains avaient noirci alors qu’elle avait essayé d’ouvrir la porte condamnée de l’église pour permettre aux autres villageois emmurés à l’intérieur de sortir ?

Elle lui offrit alors quelque chose. Rayne regarda l’objet, absente, ailleurs, ne sachant plus où elle était. Son esprit se déconnectait et se fracturait. Elle écoutait Tinuviel parler, mais sans vraiment comprendre. Dans sa tête, sa voix était couverte par le feu. Elle ferma les yeux, une grimace de rage déformant ses traits. Les bébés pleuraient, les femmes gémissaient, le bois craquait et les piliers se brisaient, entraînant l’effondrement des misons. Il n’y avait aucun rire maléfique dans tout ça, aucune voix revancharde qui l’avait marqué, rien d’autre que des hurlements, des toussotements, et des mains qui tentaient inutilement de forcer sur la porte.

*Taisez-vous ! TAISEZ-VOUS !!*

Rayne ne se sentait pas bien. Elle avait inexplicablement chaud, et sentit Tinuviel poser quelque chose dans sa paume. Une clef ? Une amulette de protection ? Un talisman elfique ? Elle l’ignorait. Elle entendit vaguement parler de « Lyrinda », la Drow avec qui elle avait fait l’amour cette nuit. Elle essaya, elle essaya vraiment, de se forcer à repenser à elle, de se replonger dans cette délicieuse nuit. Cette chaude nuit où le feu avait crépité dans l’âtre, étirant leurs reflets, où les doigts crochus de la Drow s’étaient plantés dans sa peau, la faisant hurler. Elle avait perdu la vue, mais, en contrepartie, elle avait un talent inné avec ses doigts. Elle lui avait dit qu’elle l’étoufferait si elle n’arrivait pas à la satisfaire. Typique d’une Drow. Mais, dans cette vision, le feu grossissait, le feu de la cheminée enflait, et elle entendait à nouveau les pleurs du bébé, et le père qui, sentant la fin proche, avait sorti son pistolet. Une balle. Le coup de feu avait résonné, et elle n’avait jamais su sur qui il avait tiré. Lui ? Sa femme ? Leur enfant ?  Ce coup de feu avait été le prélude et la fin de tout. Mourir par asphyxie était très désagréable. Les poumons étaient en feu, on pleurait, on se tortillait sous la douleur. Il n’y avait là rien de très bon.

Les doigts de Rayne se dérobèrent, et le pendentif de Tinuviel tomba lourdement à terre. Elle avait les yeux clos, fixant le sol, se sentant emportée par une vague, un torrent inaltérable. Elle se mit à parler, n’arrivant plus à ouvrir les yeux. Sa vision était trouble, floue. Maudite sois-tu, Tinuviel. Toi, ton harem, tes amantes, et ta générosité insupportable. Maudite sois-tu, oui. Car, à cause de toi, Rayne avait senti sa rage partir, ne laissant plus que ce qui motivait cette fureur : sa souffrance. Rayne ressentait de curieux picotements aux joues, et une douleur insupportable au cœur. Elle pleurait, et ceci ne lui était pas arrivé depuis cette nuit noire, quand elle s’était réveillée sous la pluie, dans un village calciné, jonché de débris, et que la porte de l’église s’était écrasée.

« Je... Je n’ai pas pu les sauver... réussit-elle à dire. Ma mère... Mais aussi les villageois... Eux... Coincés dans l’église, piégés par une porte coincée... Le sens de l’humour de mon père... Le foyer de Dieu... Le dernier refuge des superstitieux et des croyants... »

Elle ne regardait rien, ni personne, et ne pensait à rien. Dans sa tête, elle voyait les flammes danser, et le gémissement du bébé, ces petits cris hauts perchés. La chaleur lui faisait mal, et ils tapaient contre la porte.

« Ils hurlaient pour qu’on les libère... Et ce bébé... Ce bébé qui hurlait... Et ensuite... Ils se sont... »

Un sanglot traversa ses lèvres, mais elle ne voulait pas finir là. Pas maintenant. Quelque chose en elle la poussait à vouloir se confier, à vouloir le dire, l’exprimer, le cracher.

« J’ai tenté d’ouvrir la porte... Vraiment... J’ai hurlé, j’ai pesté, mais les barres étaient solidement clouées et brûlantes... Mes cheveux ont pris feu à cause des cendres, mais, même malgré ça, alors que je ne voyais rien, je continuais à tenter d’ouvrir la porte. Mes mains ont noirci, et la douleur ainsi que les vapeurs ont fini par avoir raison de moi... Ça, et les coups de feu... Ils... Ils se sont tous suicidés... Et je n’ai rien pu faire... »

Ce fut presque machinalement que Rayne alla se coller contre Tinuviel. Elle enfouit sa tête contre son épaule, et fit ce qu’elle n’avait jamais fait, et qu’elle ne referait sans doute pas avant longtemps.

Elle pleura.