Je relance un peu le sujet sur les adaptations parce que ça fait écho à un débat (enfin, une discussion plutôt) qu'on avait eu avec des amis de ma promo. En France, les spectateurs avaient été très choqué de voir une mise en scène de Hamlet dans laquelle le rôle-titre était tenu par un noir (la mise en scène était anglaise, et le cast aussi, du coup), et on trouvait ça absurde de s'insurger de ce choix et ce parti-pris de mise en scène, parce que si on regarde les rôles possibles au théâtre pour les comédiens noirs dans les grands classiques occidentaux, à part Othello, il n'y a pas grand chose. Quand bien même l'action est censée se dérouler il y a plusieurs siècles en royaume de Danemark, rien n'empêche un acteur noir, blanc, jaune, arc-en-ciel, turquoise de jouer ce rôle. En particulier un rôle classique (ou dit classique) puisqu'il est déjà connu de tous (le personnage, pas ses répliques, on est d'accord) et que de toutes façons lorsque l'on va voir une telle pièce, on va moins voir le récit, l'histoire, que la nouvelle proposition, interprétation de l'oeuvre. Lors, en quoi est-il si choquant de voir un acteur noir jouer un rôle qui, dans l'imaginaire collectif, est plutôt celui d'un blanc ?
Ceci étant, j'avais émis cet argument que ce qui s'applique au théâtre n'est pas forcément applicable au cinéma. En effet, imaginez un instant un biopic sur Mandela dans lequel l'acteur du rôle principal serait un blanc. Le problème du cinéma - qui est en fait, à mon sens, un cruel manque de liberté - c'est qu'en dépit de sa large marge de manoeuvre, le cinéma de part sa nature même vise un idéal réaliste beaucoup plus fort qu'au théâtre et dès cet instant la liberté d'interprétation des personnages est limitée.
Une chose tout de même m'interpelle : si on comprend aisément que cet idéal réaliste soit d'autant plus fort dans le cas de films historiques, de biopic, etc, je doute qu'il soit applicable de la même façon dans le cas des fictions. S'il est acquis qu'une fiction, fondée sur une oeuvre littéraire quel que soit son support (j'entends par là BD, roman, etc), entre et ancre ses personnages dans l'esprit de son public, l'adaptation me paraît malgré tout plus libre car elle obéit à des exigences d'imagination, et non à des exigences réelles. Je m'explique : si l'on avait un acteur blanc jouant Mandela, cela serait sans doute beaucoup plus choquant que si on avait un Harry Potter noir. Si Harry Potter est identifié par tous comme un petit garçon blanc, rien, pourtant, ne l'empêche d'être un garçon noir, ni dans son histoire personnelle, ni dans le récit dramatique, etc. En revanche la réalité du personnage de Mandela empêche absolument un acteur blanc de le jouer : si Mandela fut celui qu'il fut, c'est avant tout parce qu'il était noir et ôter au personnage cette caractéristique physique serait finalement enlever son histoire au personnage.
Quoi qu'il en soit, je crois que le public (qu'il soit français, américain, ou quoi ou qu'est-ce) devrait se souvenir qu'une adaptation cinématographique de toute oeuvre n'est jamais qu'une interprétation, un choix, un parti-pris d'un producteur, d'un réalisateur ou d'un scénariste, etc. Est-ce que les fans de Choderlos de Laclos ont crié au scandale quand Les liaisons dangereuses ont été adapté à l'écran et ont mis de côté le côté purement et uniquement épistolaire du roman ? Oui, je prends un exemple extrême, mais certains débats concernant des adaptations me semblent très proches de cet exemple.
20:30
J'ai faim.
J'ai fini mes partiels.
Demain j'ai mon audition.
On y est presque !