Ouvrage à trois [Shenji]

Le sommeil arriva comme un rideau noir et recouvrit Shenji qui eut à peine le temps de s’en rendre compte. Il attendit le rêve avec une certaine impatience. Mais ce qu’il entendit ne fut pas pour le réjouir, loin de là. Oscillant probablement entre le sommeil et l’éveil, il entendit la voix de Peeter. Une voix étouffée, lointaine, comme au travers d’une bulle de verre. Que se passait-il ? Quelque chose ne fonctionnait pas ? Difficile de comprendre les paroles exactes, mais parmi les mots prononcés étaient reconnaissables il y avait « latence », « trop long » et « rien ».

Les doigts qui pianotent sur un clavier. Comme papa quand il avait une inspiration soudaine et qu’il s’enfermait dans son bureau pour martyriser ses pauvres touches dans le but de mettre par écrit une bonne idée. Mais cette fois c’était différent. Il ne s’agissait en aucun cas d’une bonne nouvelle. Shenji entendit même Stella demander s’il était toujours vivant. Il aurait bien aimé lui répondre, mais il se sentait trop lourd pour ne serait-ce qu’ouvrir un œil. C’était entre les jumeaux que ça se passait, il était condamné à attendre sans bouger…

Pourtant, il s’en rendit compte après un moment, il les voyait. Ses yeux étaient certainement fermés puisqu’ils ne savaient pas s’il était vivant, mais il arrivait à voir la pièce dans laquelle il était. Les frère et sœur, l’écran qui se brouillait… Il aurait dû comprendre que quelque chose n’allait pas, mais le propre des rêves est  justement de faire passer pour logique quelque chose qui ne l’est pas. Ainsi l’adolescent se contenta du simple constat qu’il y voyait quelque chose. Certes, c’était tout aussi flou que les paroles, mais il voyait.

Les minutes passèrent, infinies. Puis, alors que le garçon proposait de renoncer, sa sœur vint retirer les électrodes. Mais la situation devint des plus étranges lorsqu’elle commença à se déshabiller. Était-ce normal ? Était-ce une sorte de…coutume de chez eux, de s’excuser pour un échec de cette façon ? À la réaction de Peeter, probablement pas.

"Qu’est-ce qu’elle fait ? Qu’est-ce que je fais ? Comment je dois réagir à ça ?"

Alors que Shenji commençait à paniquer un peu, Stella enleva le casque, lui permettant de se réveiller. Et comme toujours quand il fait face à une situation qui le dépasse, le jeune mangaka se réfugia derrière son personnage… Le Phénix Bleu était une sorte de projection idéalisée de son auteur, le moyen idéal de retranscrire ses propres aventures sans passer pour un abruti. Et chaque fois que Shenji perdait pied, il se mettait dans la peau de son personnage pour savoir quoi faire.

Le Phénix Bleu avait été piégé. On l’avait drogué et dépouillé de presque tous ses vêtements, puis jeté au coin d’une rue. Là, endormi et presque nu, il était vulnérable, à la merci du premier venu. Ou de la première venue, comme cette succube. Un camouflage magique lui donnait l’apparence d’une humaine, elle aussi très peu vêtue. Voyant le pauvre homme sans défense, elle décida de s’en prendre à lui pendant son sommeil forcé. Cependant, alors qu’elle entamait son jeu démoniaque, la drogue cessa de faire effet et le jeune magicien reprit ses esprits. Il se rendit très vite compte que quelque chose n’allait pas, et son premier réflexe fut de mettre de la distance entre lui et son agresseur avant de perdre sa lucidité. Comme il n’avait pas le temps de réfléchir il utilisa le premier sort qui lui vint à l’esprit, celui qui lui avait valu son surnom : les flammes du Phénix.

Le Livre ! Shenji avait pris son Livre, il pouvait utiliser ses sorts ! Toutefois pas question de brûler Stella, son attitude avait beau être troublante elle ne méritait pas d’être blessée pour ça. Tant pis, il allait devoir faire sans, il ne connaissait aucun sort de repoussement. Il ouvrit les yeux et, le plus vite possible car dans ce genre de situation on perd rapidement le contrôle de son propre corps (à en croire les rares mangas hentai qu’il avait lus), il prit Stella par la taille pour la forcer à rouler avec lui en bas du lit. Ce fut donc son tour d’être au-dessus d’elle, une main tenant le poignet de la jeune fille et l’autre par terre, juste à côté de sa poitrine.

« Qu’est-ce que tu fiches…? »

Rouge de gêne, déboussolé, il voulait une explication, puis que tout ça s’arrête et qu’ils reprennent leurs tests normalement. Et honnêtement, sa plus grande crainte à cet instant précis était que Peeter décide de s'en mêler.

La succube, surprise par le feu céruléen qui fondait vers elle, ne chercha même pas à s'esquiver. Les flammes surnaturelles, maintenues par la volonté du Phœnix, l'encerclèrent . Coupée de toute retraite, elle sembla hésitante et impuissante. Pourtant, au travers du rideau ardent, de sa silhouette démoniaque émanaient une aura de luxure perfide… et malgré la distance qui les séparaient en apparence, le magicien devait avoir toujours l'impression qu'elle était toujours collée à lui. Sans qu'il la touche, il sentait encore la douce chaleur et les reliefs de son corps, et un parfum enivrant et intense se fraya un chemin jusqu'à ses narines.

Stella avait été renversée sans trop de difficulté par la prise de l'adolescent, et se retrouva bientôt sous lui. La position n'était en elle-même pas particulièrement déplaisante, mais la jeune fille paraissait passablement troublée d'avoir été repoussée avec tant d'assurance. Son visage rougi sur lequel collaient ses longs cheveux blonds, humides de sueur, ne cachait rien cependant de l'émotion qui l'habitait toujours. Elle détourna les yeux, comme pour s'excuser :

« Je pensais que tu en aurais envie » lâcha-t-elle, dans un souffle désolé. « Tu avais l'air intéressé par les filles. Mais... tu préfères les garçons, pas vrai ? »

Elle parlait à voix basse, mais son ton était légèrement rauque et véhiculait encore du désir. Il était manifeste que la manœuvre ne l'avait pas calmée du tout – c'était peut-être même le contraire. Comme pour corroborer ce fait, sa main libre vint discrètement s'aventurer dans son propre sous-vêtement, alors que ce qui s'y passait, et où s'exerçait la pression de ses doigts ne laissaient pas de place au doute. Un gémissement passa presque par inadvertance la barrière de ses lèvres.

Bientôt, Shenji put sentir la pression se voulant rassurante de la main de Peeter qui se posa sur son épaule. Celui-ci se tenait derrière lui.

« Excuse… C'est un moyen d'évacuer la frustration… On a une activité cérébrale très supérieure à la moyenne et…
– Bon sang, Peeter, arrête de chercher des excuses ! On est jeunes, juste, on s'amuse. Puis il m'a dit qu'il te préférait toi, profite.
– D'accord, alors, euh, Shenji… si c'est vrai, essaie de te détendre, peut-être, ça peut être sympa quand on y pense… »

La nature du contact qu'exerçait l'inventeur sur le haut du corps de l'adolescent changea : délicatement, et rejoints par ceux d'une deuxième main, les doigts commencèrent à descendre le long de son buste, l’enserrant et le caressant. La douce étreinte s'accentua lorsque Peeter pencha son propre corps contre celui de Shenji, son visage venant se blottir contre son cou, mêlant leurs deux chevelures claires. Le geste était tendre et assez lent mais déterminé et inexorable. Bientôt, il arriverait jusqu'à ses hanches, et tenterait alors, l'air de rien, d'emporter avec lui le dernier habit qui restait au jeune mangaka.

« On t'oblige à rien... C'est juste une expérience comme une autre. Moins dangereuses que la plupart des autres, d'ailleurs ! Tu étais curieux, non ? »

Le jumeau était aussi bouillant que sa sœur. Il paraissait légèrement plus maître de lui-même (après tout, lui n'avait pas commencé à se masturber), mais ce n'était sans doute qu'une impression. Il était simplement un peu moins impulsif qu'elle et fonctionnait davantage dans la conciliation, mais son désir n'était pas inférieur, et n'en altérait pas moins ses raisonnements.

Shenji sentait son cœur tambouriner dans sa poitrine, à cause de la surprise peut-être, mais surtout de cette situation…à la fois gênante et excitante. Stella… Elle était là, à sa merci, presque nue, et visiblement elle avait envie de lui… Pourquoi n’en profiterait-il pas ? Pour une première expérience, il aurait pu tomber pire, n’est-ce pas ?

"Non ! Elle n’est pas dans un état normal, je n’ai pas le droit de profiter d’elle de cette façon ! Ce serait m’abaisser au niveau des gens que je punis."

Oui, il avait bien fait de la repousser. N’est-ce pas ? Il valait mieux que ça, il était le justicier, pas le criminel.

Même immobilisée, encerclée par les flammes bleues, la démone continuait d’exercer son influence sur sa victime qui peinait à lui résister. Après tout, il restait humain, et cette créature était très attirante… Au bord de craquer, il parvint à détourner le regard et à reprendre laborieusement contenance.

-Oh, je vois. Mon pauvre garçon, tu aurais dû me le dire, que tu avais peur des femmes…

Avec un sourire qui seyait tout à fait à sa race, elle claqua des doigts.

Shenji, qui s’était redressé jusqu’à être à genoux et s’apprêtait à se relever, fut interrompu par la phrase troublante de Stella. La réponse franchit ses lèvres avant de passer la barrière de sa conscience :

« J’en sais rien, peut-être… Il faut essayer pour savoir. »

Comme s’il n’attendait que ce signal, Peeter vint derrière lui. Le jeune mangaka ne put réprimer un frisson. La loi de Murphy lui arrivait en pleine gueule, bon sang ! Figé, il ne réagit pas à temps, et déjà son camarade était collé à lui.

Avant que le Phénix n’ait pu répliquer, une créature répondit à l’appel de la succube. À première vue, il s’agissait d’un humain. À peine plus âgé que le magicien, il était totalement hypnotisé, ça ne faisait aucun doute. Le pauvre ne devait même pas se rendre compte qu’il venait se plaquer contre le dos du Phénix et commençait à le caresser… Ce dernier n’osait pas réagir de  peur de lui faire du mal. À contrecœur, il dissipa son sort et ferma les yeux. Pouvait-il encore se défendre ?

-Aller jusqu’à impliquer quelqu’un d’autre… Je reconnais bien là les manières des démons, murmura-t-il.

Bien loin d’avoir le courage et la maîtrise de soi de son personnage, Shenji était plutôt au bord de la panique.

« Non, s’il te plaît, Peeter… »

Ses yeux se baissèrent alors sur la main de Stella, qui s’affairait à un endroit…disons particulier. Les dernières parcelles de résistance mentale qu’il avait conservées explosèrent en mille morceaux. Ses joues étaient brûlantes, et si le jumeau masculin ne le tenait pas il se serait sûrement jeté sur sa sœur. Après tout, pourquoi pas ? Même le Phénix Bleu n’avait pas de solution, alors pourquoi ne pas simplement se laisser faire ? Certes, il n’avait de base pas vraiment d’attirance pour les garçons, mais ça ne pouvait pas être si radicalement différent, si ?

« Une expérience…? Bon, si c’est pour la bonne cause… »

Piégé dans ce rêve qui devenait de moins en moins contrôlable, Shenji se laissa aller. Sans qu’il s’en rende compte, les deux plans, celui-ci et celui du Phénix, commencèrent à se mélanger, créant un décor des plus étranges où se mêlaient la pierre terrane et les meubles de la chambre des jumeaux.

Le prétexte de la science tel qu'énoncé par Shenji parut bon aux jumeaux, pour autant qu'ils aient encore besoin d'un prétexte. Comme Peeter l'avait suggéré, leurs cerveaux évacuaient la tension intellectuelle avant tout, et ils étaient à présent moins en train de réfléchir que de ressentir. Mais aucun des deux n'était réellement intéressé par l'autre – pas plus qu'une personne aurait été intéressée par son propre corps, du moins – et tous leurs désirs communs se concentraient sur le jeune mangaka uniquement.

« Juste… calme… d'accord ? » murmura Peeter à son oreille.

Ses doigts continuaient leur course avec une grande douceur, appréciant tous les les reliefs du torse, puis bientôt du ventre de l'adolescent. Arrivé jusqu'à sa taille, ils accentuèrent leur pression, sans faire bouger le sous-vêtement. Ses mains convergèrent vers son aine, cherchant à caresser, en presque aveugle, un élément anatomique évident. Toutefois, à peine l'eurent-elles frôlé qu'elle se retirèrent soudain, et la chaleur dans son dos se fit plus distante.

Stella gémit de frustration :

« Hmm, Peeter, dépêche toi. Tu nous tortures. »

La jumelle avait toujours sa silhouette un peu maigre de jeune fille, mais sa peau était d'un beau rouge grenat, et deux petites cornes noires émergeaient à présent de sa tignasse blonde. Ses yeux étaient devenus aussi rouges que son épiderme, et brillaient d'une lueur à la fois envoûtante et pourtant étrangement humaine. Plus surprenant encore : depuis le bas de sa colonne vertébrale s'agitait une queue fine et lisse à l'extrémité pointue. Elle paraissait préhensile car elle s'enroula autour du poignet de Shenji, dirigeant sa main vers son entrejambe dont elle retira ses propres doigts.

« Je te laisse explorer ? Si je gémis… c'est plutôt bon signe. »

Sous le tissu trempé, son intimité était bouillante et ruisselante, palpitante et gonflée, tapissée d'un duvet clair et doux mais assez dense. Les mains libres, l'inventeuse faite succube passa ses mains dans le dos de l'adolescent et le rapprocha d'elle. Sa poitrine, toujours couverte, entra en contact avec les pectoraux du mangaka, ce qui ne la motiva que davantage à le serrer contre elle. La tâche qu'on lui avait confié, dans cette position, n'était pas vraiment aisée…

« C'est encore trop facile… Tu me laisses expérimenter, moi aussi, dis ? »

Elle ne lui laissa pas vraiment le temps de répondre. De ses lèvres entrouvertes, d'un carmin plus sombre que le reste de son visage, et duquel ressortaient une rangée blanche de petites dents pointues, émergea une langue vermillon. Lèvres et langues qui fusèrent à la seconde suivante à la rencontre de celles de Shenji. Le muscle buccal lui lapa d'abord la lippe supérieure, avant de chercher à en forcer les barrières et à atteindre sa consœur. La salive de la démone, qui ne manquait pas de se mêler à celle de son partenaire, avait un léger goût, doux et sucré.

Mais il sembla qu'il s'agissait seulement d'une distraction car, alors qu'il devait être concentré sur autre chose, la queue fourchue de la jumelle pénétra par surprise dans le caleçon de l'adolescent. S'accrochant à l'élastique qui le serrait sur ses hanches, elle le tira vers le bas, juste assez pour ce qui devait dépasser dépasse. Puis elle s'enroula de nouveau, mais cette fois, pas autour de son poignet…

La pression qu'exerçait l'appendice caudal, malgré sa surface presque parfaitement lisse, était plutôt ferme. Elle fut bientôt complétée par un lent mouvement de haut en bas. Peeter, lui, ne s'était pas re-manifesté.

« D'accord... »

Calme ? Non, il ne l’était pas. Pas du tout. Son cœur battait la chamade, il avait trop chaud, et surtout, il avait de plus en plus de mal à concentrer ses pensées sur autre chose que cette fille qui se masturbait sous ses yeux. Ça, plus Peeter qui venait le titiller avant de s’écarter sans prévenir…

Stella était attirante. Ses cheveux blonds, sa peau rougeoyante, ses yeux de braise… En y réfléchissant bien ça n’avait aucun sens, mais Shenji n’était tout simplement pas capable de réfléchir et ça ne lui posait donc aucun problème. Sa main amenée vers le sous-vêtement de la jeune fille s’y glissa avec douceur, timidement. Ses doigts parcouraient cet endroit invisible à ses yeux pendant que la succube l’attirait contre elle. Pour éviter de se tordre le poignet il retourna tout son bras et se laissa aller contre Stella, faisant tout de même attention à ne pas lui faire mal.

Alors que la démone l’embrassait, le jeune homme commença lui aussi à changer. Si son physique était globalement le même que celui de son personnage, il restait néanmoins quelques différences visibles, comme les quelques centimètres qu’il gagna en s’allongeant. L’autre différence majeure était son tatouage. Dans son dos un dessin se traça progressivement, couvrant jusqu’au haut de ses bras. Le motif final représentait un phénix. Un tatouage inspiré de celui de Fye, un personnage de Tsubasa Réservoir Chronicle, bien que différent de celui-ci sur plusieurs points, qu’il n’est pas utile de préciser ici. Ce tatouage, c’est ce qui permettait au jeune magicien d’utiliser ses pouvoirs.

L’attention du Phénix Bleu était totalement accaparée par ce baiser. Son premier baiser… Quel dommage qu’il se fasse dans ces circonstances si étranges. Mais pendant qu’il s’abandonnait entièrement à ces sensations qu’il découvrait, la queue de Stella n’était pas restée inactive… Le contact contre son membre déjà éveillé lui arracha un soupir. C’était tellement…non, c’était indescriptible. Tout le vocabulaire du mangaka partait en fumée devant cette situation nouvelle.

Répondant à un instinct primaire qu’il ignorait jusque là, l’adolescent quitta la passivité de l’ignorant pour tenter une initiative. Ses lèvres quittèrent celles de la succube pour venir caresser son cou, et descendirent explorer son corps peu à peu, toujours avec une certaine timidité, jusqu’à rencontrer un premier obstacle. Alors il remonta vers son cou, mais de l’autre côté. Sa main, elle, se mit à tirer doucement sur le morceau de tissu qui entravait ses mouvements pour en débarrasser sa propriétaire.