Tara mena donc le quatuor le long du désert, avançant le long de dunes ensablées. Le temple était, comme l’Amazone l’avait prédit, assez éloigné. Tara n’était pas une Amazone qu’il fallait craindre, mais les autres sœurs se méfiaient assez d’elle. Elle avait un comportement assez violent et un certain penchant pour la cruauté et le sadisme. Elle venait d’un clan de sauvages particulièrement cruels et arriérés, qui pratiquaient des sacrifices humains odieux en hommage à des Dieux païens et cruels. Tara avait prouvé qu’elle était digne d’être une Amazone, mais elle portait dans son sang un héritage lourd, une vie faite de cruauté, où les enfants tuaient leurs aînés pour prouver leur valeur aux puissants. Un tel lignage ne s’effaçait pas rapidement.
Le temple fut bientôt en vue. L’antique structure était à moitié ensevelie sous une couche de sable, et un léger vent faisait remuer ce dernier. Une tempête de sable était-elle en approche ? Sélène le craignait. Retrouver le chemin vers le camp était délicat en temps normal, mais, avec une tempête de sable, c’était tout simplement suicidaire. Il leur faudrait s’abriter dans ce temple, et cette perspective ne réjouissait guère Sélène. Le groupe fit le tour du temple en ruines. Il y avait plusieurs entrées possibles. L’entrée principale, pour commencer, était à moitié ensevelie et obstruée par des débris. On pouvait néanmoins passer par là, mais le choix de Tara semblait se porter sur une ouverture latérale à la droite du temple. Ici, un escalier s’enfonçait dans le sol, dans une espèce de galerie au toit ouvert.
«
Je ne perçois pas d'activités démoniaques dans le coin, pas de traces non plus, signala le Père.
Je n'ai jamais vu cette écriture auparavant on dirait un mélange de plusieurs systèmes émanant de créatures humanoïdes animales. Si il y a des démons, ils seront surement à l’intérieur. »
Le Père parlait de stèles et de gravures à l’entrée. En écartant un peu les grains de sables, on pouvait voir des hiéroglyphes, et de curieux signes. C’était une calligraphie très particulière. Et le vent, lui, continuait à se lever, sifflant de plus en plus fort.
«
Une tempête de sable approche, nota Pirène.
-
Les démons sont dans les profondeurs du temple, expliqua Tara.
Ils se terrent comme des rats. »
Sélène ne disait rien, observant la stèle. Elle ne comprenait pas ce langage, mais il était curieux d’avoir un temple dressé au milieu de nulle part. Elle aurait pu comprendre, si l’édifice se situait près de l’oasis, mais il n’y avait rien d’autre que du sable ici. Pourquoi avoir construit un temple ici ? Et comment expliquer la présence de lierre sur les murs, parfois ? Il y avait des choses qui lui échappaient.0 Le sable, entre-temps, devenait de plus en plus agressif.
«
Je mettrais ma main à couper que ces démons sont liés à ce temple... -
Que suggères-tu ? demanda Pirène.
-
Si ce temple était destiné à un peuple, il aurait été placé près de l’oasis. Pourquoi mettre un temple ici, loin de tout ? -
Peut-être pourriez-vous remettre votre conversation à plus tard, mes sœurs, suggéra alors Tara.
La tempête approche ! »
Tara sauta alors dans le couloir en contrebas, et avança vers la petite porte... Avant de s’arrêter, interloquée.
«
Qu’est-ce que ça veut dire ? »
L’Amazone semblait surprise, et Sélène, en s’approchant, vit qu’il y avait juste devant elle une sorte de mur qui s’était refermé, bloquant le passage. Tara promenait ses mains, cherchant un bouton, un levier, un interrupteur caché, mais ne vit rien. La surface était lisse, hermétiquement fermée. Elle se retourna vers les autres, et tâcha de s’expliquer.
«
Je suis sortie du temple par ce passage... Et il n’était pas fermé ! »
Le sable sifflait de plus en plus fort, agressif. Rester ici trop longtemps serait dangereux. Ce que Tara était en train de dire, c’était que
quelqu’un avait sciemment refermé la paroi derrière elle, probablement pour l’empêcher de passer. Il ne restait donc plus que la porte principale, et le groupe se dépêcha d’y aller. Ce dernier était ouvert, et elles purent entrer dans une grande pièce poussiéreuse, sombre, avec plusieurs fissures et trous le long des murs, et sur le sol. Le paysage était relativement austère. Il y avait des carcasses d’immenses statues dans les coins. Le hall était concentrique, avec douze statues, qui étaient à chaque fois endommagées, ou même tout simplement détruites. Il y avait au fond de la pièce un petit escalier qui montait vers des étages supérieurs. Les rebords de la pièce formaient une espèce de pointe, confirmant la forme pyramidale du temple. Les Amazones et le prêtre s’avançaient lentement quand Sélène perçut du mouvement. Elle brandit son épée, et vit alors, juste devant le groupe, quelque chose descendre rapidement, avant de s’arrêter à quelques centimètres au-dessus du sol.
«
Qu’est-ce que c’est que ce truc ?! s’exclama Pirène, la main sur la garde de son épée.
-
C’est un pendu ! »
Sélène grogna, et vit qu’il s’agissait d’un homme décharné, en sang. Il était mort depuis longtemps, comme en témoignait l’absence de peau sur sa tête. On commençait à voir des os, et il n’avait plus d’orbites. Le plus troublant, toutefois, était le massage se trouvant sur son torse. Il était en langue commune, et Sélène put distinctement le lire, car il était assez simple :
« PARTEZ »
Elle eut un léger sourire.
«
Je crois que ce temple dissimule bien des mystères... »