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Bon, il faut bien passer par là… -
Finement observé » plaisanta Nariko.
La porte s’ouvrit lourdement en grinçant, donnant sur une zone particulièrement sombre. Nariko s’avança lentement, fronçant les sourcils. Impossible d’y voir quoi que ce soit. Elle pesta, et se décida à se servir encore une fois de son épée, n’ayant aucun élixir avec elle, ni aucune torche. La lame d’Heavenly Sword se mit à briller, s’illuminant dans l’obscurité. Un ajout qui leur serait indispensable. Nariko s’avança en tête, la lame dans son fourreau, émettant un halo bleuté autour d’eux. La crypte était sombre, silencieuse. On entendait l’écoulement des eaux, mais, au moins, il n’y avait pas cette puanteur atroce. On sentait plutôt une forte odeur de renfermé. De nombreuses galeries étaient obstruées par des éboulements. Nariko vit plusieurs tombeaux et sarcophages abîmés, détruits. Des squelettes pourrissaient dans des cercueils partiellement ouverts. On n’enterrait pas le commun des mortels dans les cryptes. Il devait s’agir d’une ancienne famille de nobles, appartenant à la longue et interminable histoire de Nexus.
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Kaï n’aime pas cet endroit. Il y fait sombre et lugubre, intervint alors la jeune femme.
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Nous sortirons bientôt de là, Kaï », promit Nariko.
Naturellement, le plus tôt serait le mieux. Avec tous ces éboulements, se perdre était difficile. Il y avait peu d’embranchements, et elle vit également que plusieurs pièces avaient été emmurées. Mieux valait ne pas se demander ce qui avait du se passer là-dedans. Elle avait vu à la bibliothèque des volumes entiers sur les souterrains de Nexus. A eux seuls, ils formaient une véritable ville, avec ses codes, ses lieux, ses menaces, ses parias. Égouts, catacombes, cryptes, grottes souterraines, anciennes mines, oubliettes des donjons... Il y avait de quoi se perdre. Nul doute que des vampires et des goules devaient rôder dans ces lieux, se nourrissant de la chair des cadavres, d’un sang putride et infect, qui vous faisait perdre la raison. La guerrière regardait craintivement autour d’elle, ayant l’impression que des milliers de yeux les observaient.
Les révolutionnaires leur avaient dit qu’il y avait des brouxes. Ces vampires se tapissaient dans l’ombre, redoutant la lumière du jour. Rien de religieux là-dedans ; les brouxes erraient tellement dans l’obscurité que des lumières vives leur brûlaient la rétine. Mais cette crypte avait l’air très ancienne, et devait donc avoir son lot de goules en tout genre. Kaï était de plus en plus nerveuse, reniflant dans le vide.
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Kaï sent une odeur... »
Nariko sentait aussi l’odeur... La pourriture des corps, les cadavres en décomposition... Probablement des révolutionnaires... Et, alors que le trio s’avançait, elle entendit également des bruits... Des grognements, de la chair qui claque, arrachée... Elle n’eut pas besoin d’intimer le silence à Kaï et à Alastyn, celui-ci s’imposant de lui-même. Nariko s’avança lentement, près d’un embranchement sur la droite. Il menait dans une grande pièce sombre avec, au fond, un escalier permettant de sortir. L’escalier, malheureusement, s’était effondré sur lui-même. Plusieurs goules se trouvaient là, dévorant les cadavres. Les goules étaient énormes, et Nariko reconnut sans hésitation des
graveirs, de puissantes goules à la peau rouge, relativement grandes.
Elle les observait lentement, sans bouger. Les graveirs étaient accroupies sur le sol, dévorant les cadavres, arrachant les bras. Ils n’avaient pas encore perçu la présence du trio, trop occupés à dévorer les cadavres. Il y avait néanmoins d’autres menaces que les graveirs. Au-dessus du trio, une forme avançait silencieusement dans l’obscurité, voûtée contre le plafond. Elle était indiscernable, de longues ailes l’enveloppant, la dissimulant dans la pénombre. Quand elle baissait la tête, on pouvait furtivement voir deux yeux rouges observant les trois proies. Nariko, de son côté, se retourna vers les deux autres. Les graveirs étaient visiblement affamés. Elle avança alors lentement, évitant l’embranchement, mais, au bout de plusieurs mètres, elle déchanta en réalisant que ce couloir était bloqué. Le seul passage était donc par la pièce avec les graveirs, où il y avait d’autres couloirs.
La guerrière se retourna, décidée à rebrousser chemin, quand le monstre attaqua. Il tomba juste derrière Nariko, et sa grande forme noirâtre l’enveloppa. Nariko n’eut pas le temps de réagir qu’elle sentit des crocs froids se rapprocher de sa gorge, tout en entendant un grognement. Le monstre frappa vite, mais Nariko avait de bons instincts. Elle sentit les dents s’enfoncer en elle, mais sa tête partit en arrière, frappant celle du monstre. Il poussa un couinement, et Nariko, en fléchissant les genoux, put se retirer. Elle avait mal au cou. Du sang s’échappait de cette zone, mais la blessure n’était que superficielle. Le monstre était un redoutable noctule.
Le noctule était un vampire redoutable, un prédateur nocturne particulièrement puissant. Outre ses longues griffes, ses dents pointues, il pouvait aussi envoyer des ondes sonores particulièrement puissantes, qui pouvaient désarmer quelqu’un. Nariko s’écarta, prudente. Fort heureusement, les crocs d’un noctule n’étaient pas empoisonnés, mais il avait de très belles dents. Le noctule grogna, et Nariko sortit son épée de son fourreau... Avant de voir ce dernier lâcher une puissante attaque sonore. Elle fendit l’air, et frappa Nariko, l’envoyant sur le sol, tandis que ses oreilles se mirent à bourdonner. Le noctule bondit alors vers Nariko, ses longues griffes en avant, mais Nariko roula sur le sol, l’évitant en se relevant.
Entre-temps, entendant les bruits, les graveirs s’étaient redressés, et, sortant de leur repas, commencèrent à sentir la chair fraîche. Ils s’approchèrent lentement, leurs lourds pas résonnant dans cette pièce sombre et silencieuse.
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La situation est sensiblement en train de se compliquer...* nota Nariko.