Le simple fait de voir Sanguilia était toujours pour Sha une source de désir et d’envie guère chaste. Il y avait des femmes qui, comme ça, dégageaient naturellement un
sex appeal très élevé. Au sein du culte de Sha, c’était par exemple le cas de Kiriko, dont la vue suffisait généralement à mettre en émoi la Déesse des Sorcières. Ici, c’était cette autre femme sombre, cette Déesse ténébreuse et envoûtante, bestiale et sauvage. Elle la vit approcher du cercle, et ressentit, encore une fois, l’envie de lui faire l’amour. Sha tenait beaucoup de ces Déesses érotiques et perverses qui ne vivaient que pour le plaisir sexuel. Elle représentait la sorcellerie, et les sorcières, contrairement à certains mythes, n’étaient pas de vieilles peaux étripées qui ignoraient tout du sexe. Il fallait plutôt se rapprocher de la belle sorcière ténébreuse pour comprendre comment Sha fonctionnait. Les sorcières avaient généralement une bonne libido, et, dans la mesure où elles invoquaient volontiers des incubes et des succubes pour satisfaire leurs pulsions, on pouvait mieux comprendre pourquoi la luxure fascinait tant Sha.
Sanguilia se colla brièvement contre elle, le temps d’un baiser, et de brèves caresses intimes. Les trois femmes restèrent ensuite collées.
«
Allons-y... Finissons-en avec ce mage, et savourons ensemble notre victoire... »
Les sorcières de Sha et les mages de Sanguilia se mirent en marche, et Asilia, se tenant au centre du cercle, ferma les yeux, afin de guider sa mère et l’autre Déesse. Le voyage eut lieu assez rapidement, mais il fut, pour Asilia et pour Sha, un peu plus long. Étant une puissante sorcière, Sha protégea en effet leur corps dématérialisé à travers la forêt. Elle était dans ce monde magique, cette dimension virtuelle, où temps et espace ne fonctionnaient pas de manière normale. Elle sentait les puissantes barrières magiques de Zaäzel, et comprit que le mage était à la hauteur de son arrogance. Ses barrières étaient puissantes, et l’Ombre comprit assez rapidement qu’elles n’y arriveraient pas. C’était comme une espèce de jeu vidéo en deux dimensions où elle devait éviter des pièges magiques mortels, en protégeant son groupe. Ces bombes étaient attirées par elles, et les barrières magiques restreignaient les pouvoirs magiques de l’Ombre.
Cette dernière n’avait pas le choix, et décida d’attirer à elle les bombes, de manière à protéger Asilia et Sanguilia, et pouvoir ainsi plus facilement les repousser, et avancer. Ce combat dura pour elle une éternité, mais, dans la ligne réelle du temps, il ne s’écoula que quelques secondes. Elle affrontait la magie de Zaäzel, et ce dernier était très puissant ici. Sha voyait les attaques magiques se multiplier, et finit par perdre la bataille.
Asilia, de son côté, se réveilla lentement, et cligna des yeux, en voyant sa Mère... Mais sans savoir l’autre Déesse. Elle se redressa, tournant la tête de droite à gauche, surprise. Où diable était-elle donc passée ? Fermant les yeux, Asilia essaya de capter sa présence... Mais arrêta assez rapidement.
«
Sa magie est partout... »
Elle parlait de Zaäzel, naturellement. Elles étaient devant sa tour, au sommet de sa puissance. Asilia leva la tête. Comment rentrer ? Dans ses souvenirs, il y avait une porte quelque part, mais il allait falloir contourner, car elles étaient du mauvais côté. La nymphe battait lentement des ailes, lévitant à quelques centimètres au-dessus du sol. Un doigt posé sur ses lèvres, elle regardait à droite et à gauche... Et nota alors que sa mère semblait perturbée. Elle se retourna vers elle, et comprit qu’elle devait être inquiète pour l’autre Déesse. La nymphe retourna près de sa mère, et la prit dans ses bras, se blottissant contre elle, afin de lui faire un câlin.
«
Ne vous en faites pas, je suis sûre qu’elle va bien. Cette téléportation était difficile. Il faut terrasser ce mage, Mère ! »
Asilia sentit alors une présence magique sinistre derrière elle, et se retourna... Avant de voir le vieux mage au sourire maléfique. Zaäzel ! Il était apparu devant les femmes, par le biais d’une projection astrale.
«
Tu vas découvrir le prix de la trahison, petite nymphe, siffla l’homme.
Je suis heureux de vous accueillir en mon humble demeure, puissante Déesse, rigola alors Zaäzel en se tournant vers Sanguilia, faisant une espèce de grotesque courbette.
Vous êtes inquiète pour l’autre Déesse, n’est-ce pas ? -
Où est-elle ?! s’exclama Asilia, qui restait toutefois derrière sa mère, terrorisée par la simple présence du mage.
-
Elle est tombée, expliqua tranquillement Zaäzel,
et je vais m’abreuver de sa magie. Puis je prendrais ta force, Déesse... Avec vous deux, j’aurais assez d’énergie pour porter un coup fatal envers l’Olympe ! -
Tu mens ! -
Faites-vous plaisir, et laissez-vous mourir, ce sera plus rapide... »
Zaäzel disparut alors, et Asilia n’eut pas le temps de dire quoi que ce soit qu’elle perçut du mouvement derrière elle. Elle se retourna à nouveau, et écarquilla les yeux d’horreur en voyant des arbres avancer ! Zaäzel envoyait sur elles ses plus puissants gardiens forestiers : de redoutables
Tréants ! Des hommes-arbres massifs, immenses, puissants, qui avançaient lourdement. Un Tréant tendit sa main vers Asilia, et son doigt s’étira, formant un long tentacule en forme de branche d’arbre. Asilia l’évita de justesse, en donnant un coup d’ailes sur sa gauche, mais sentit la branche lui érafler la joue, faisant coller de son sang. Elle se reçut sur le sol, et envoya un sort de feu vers l’un des Tréants, mais elle vit sa boule de feu disparaître en plein vol. Elle écarquilla les yeux.
«
La Tour absorbe notre magie ! »
Ce serait d’autant plus regrettable que la magie de Feu était le seul point faible des Tréants. Si près de la tour, Asilia comprit que les deux femmes étaient tombées dans une espèce de traquenard magique. Asilia ne pouvait être d’aucune utilité, car elle était avant tout une magicienne.
Et qu’était-il donc arrivé à Sha ?