Nouvelle rencontre [Pv ~> Marine]

Elle lui prit la main et se releva, puis ils se dirigèrent tout deux vers la sortie. Elle fut la première dehors, lui embrassant une dernière fois du regard ce petit restaurant : une chose était sûre, il reviendrait manger ici à l’occasion. Dans la rue, il ne faisait pas réellement froid, contrairement à ce qu’il aurait pensé. Ils marchèrent en silence, côte à côte, jusqu’à arriver devant l’immeuble de Marine. Dos à lui, elle s’excusa une énième fois, prétextant qu’elle lui avait gâchée la soirée : elle était bien loin de la vérité. Il fut ravie de l’avoir rencontré.

« Détrompe toi, j’ai passé une très bonne soirée. Tu ne m’as absolument pas blessé, c’est juste que je suis un peu … spécial ? »

Il sourit. Elle était surement incapable de comprendre. Après tout, des personnes avec des ailes dans le dos, elle ne devait pas en avoir croisée souvent. Elle se retourna et le remercia de la soirée passée : dans un certains sens, c’était plutôt à lui de la remercier. Subitement, le visage de Marine se rapprocha, et un doux et chaud contact se posa sur sa joue : ses lèvres. Le rouge lui monta une nouvelle et dernière fois aux joues. Il posa le bout de ses doigts sur l’endroit embrassé.

« Merci encore »

En guise d’au revoir, il eut droit à un magnifique sourire. Il lui fit un signe de tête, et tourna les talons, prêt à repartir. Il fit deux pas mais se stoppa aussitôt. Il fit demi-tour et à son tour, il posa ses lèvres sur la joue de la jeune femme.

« Et voilà, on est quitte à présent – il lui fit un clin d’œil avant de continuer – Et n’oublie pas, ma proposition pour le lycée tient toujours. Et si tu as besoin d’aide, n’hésite pas, je serai ravie de te donner un coup de main. Pense juste à moi, je saurai où te trouver … »

Il la regarda une dernière fois, histoire d’avoir son visage gravé au fond des yeux, et partit vraiment, lui faisant un signe de la main …
Il était heureux : il avait passé une très bonne soirée et en plus de ça, il semblait qu’il avait trouvé une amie. Quoi demandait de plus ? Néanmoins, cet état d’esprit disparut presque aussi vite. Demain, il devrait aller au lycée. Quelle chance !! Il reprit donc sa route en direction de son appartement …

Alors que Marine allait s’en aller à son tour, Kei revint sur ses pas et déposa un baiser sur sa propre joue. La jeune femme en fut surprise.

« Et voilà, on est quitte à présent. Et n’oublie pas, ma proposition pour le lycée tient toujours. Et si tu as besoin d’aide, n’hésite pas, je serai ravie de te donner un coup de main. Pense juste à moi, je saurai où te trouver … »

Elle n’eut même pas la présence d’esprit de lui dire au revoir ou d’agiter la main à son tour. Elle le regarda disparaître au bout de la rue. Elle se sentit seule tout d’un coup. Elle se dirigea alors vers son hôtel et vers sa chambre. Elle monta les deux étages et ouvrit sa porte. Grâce au ciel, Kei lui avait ramené son portefeuille sinon elle ne saurait pas où elle aurait dormi cette nuit.

Elle se déshabilla et alla se doucher. Elle espérait que l’eau tiède la détendrait et l’aiderait à dormir. Elle repensa alors à sa soirée avec le jeune homme. Il lui avait dit qu’il la retrouverait juste si elle pensait à lui. Cela la fit sourire. Comment pourrait-il faire ça ? Elle supposait qu’elle avait peu de chance de le revoir. Ils ne fréquentaient pas les mêmes lieux. Même si il lui avait dit qu’il l’aiderait à trouver du travail pour le lycée, elle n’y croyait pas trop. Mais elle avait trouvé sa proposition des plus gentilles. Elle finit par couper l’eau et s’essuya rapidement avant d’aller se mettre au lit.

A sa grande surprise, elle mit peu de temps à s’endormir. Elle qui croyait faire une nuit blanche de plus. Mais le sommeil la prit en quelques minutes. La soirée agréable qu’elle venait de passer n’y était peut-être pas pour rien.

La première partie de sa nuit fut sans rêves mais, comme chaque nuit, des images d’horreur vinrent la hanter. Elle finit par se réveiller en criant, la sueur perlait à son front et elle l’estomac au bord des lèvres. Les larmes se mirent à nouveau à couler comme souvent à ce moment là. Elle se recoucha en chien de fusil et enfouie sa tête dans l’oreiller pour étouffer ses sanglots. Elle aurait bien aimé ne pas être seule. Elle revit le visage du jeune homme et se dit qu’elle aurait bien aimé qu’il soit là.

Il fut enfin devant chez lui. Il introduisit sa clef dans la serrure de la porte et rentra. Lui qui pensait qu’il se coucherait tôt venait de voir ses espoirs réduits à néant. En effet, avant de sortir, il n’avait pas vu le petit post-it posé sur la table lui rappelant de faire ses devoirs. Il s’y attela donc. Son livre de math, il lut l’énoncé sans rien comprendre, pour changer … Après avoir griffoné des réponses au hasard, il s’affala sur la table. Que pouvait-elle bien en ce moment ? Bah, peu importe. A l’heure qu’il était, elle devait surement faire un bon gros somme. Pas étonnant si ça faisait une semaine qu’elle n’avait pas fermée l’œil de la nuit.

Quoi qu’il en soit, il finit par sortir de sa rêverie et partit prendre une bonne douche. Une fois fini, il partit en direction de sa chambre et ouvrit la fenêtre, regardant les étoiles un moment. Il tira sur la couette et se glissa dans son lit. D’un large geste de main, il éteignit la lumière et se tourna pour se laisser lentement glisser dans les bras de Morphée. Mais qui aurait crut que la nuit serait si courte ?

Autant dire qu’il ne passa pas une très bonne nuit. Il entendait une personne l’appelait à l’aide, mais il en la voyait pas. Plusieurs il poussa un grognement, se demandant quand est ce qu’elle arrêterait. La voix se faisait de plus en plus suppliante, mais sa source était toujours introuvable. Il se réveilla en sursaut, assit sur son lit. Il la sentait. Elle était là, sa voix. Elle résonnait dans sa tête. Avoir passé une soirée avec elle avait accrut sa perception. Il s’étira un instant puis alla s’habiller : une promesse était une promesse. Direction l’hôtel de Marine.

L’air s’était rafraîchit de manière surprenante. Il avançait donc, reprenant ce même chemin qu’il avait emprunté un peu plus tôt dans la soirée. Au fur et à mesure qu’il avançait, il sentait le « lien » devenir de plus en plus fort. Ainsi, il se retrouva au pied de l’hôtel. Cela venait du deuxième étage. Il ramassa un petit caillou qu’il lança sur la vitre de la fenêtre à Marine. Pas de réponses. C’était-il trompé ? Il y avait peu de chance que ce soit le cas. Il réitéra l’opération une seconde fois, mais il n’eut toujours pas de réponse. Il était donc obligé de le faire. S’assurant qu’il était seul dans la rue, il enleva son gilet puis son T-Shirt. Combien de temps ne s’en était-il pas servit ? Son dos commença à remuer légèrement et quelque chose en déchira sa peau : deux ailes d’une blancheur éclatante venaient d’apparaitre. Il commença à s’élever lentement dans les airs et se posa sur le balcon de la dite chambre. Ses ailes disparurent, laissant derrière lui une multitude de plumes tomber dans la ruelle. Les plaies se refermèrent d’elle-même et il se rhabilla. Lorsqu’il releva la tête, Marine était en face de lui. La peur prit possession de lui. Avait-elle vu ce qui venait de se passer ? Si oui, comment régirait-elle ? Il se prépara néanmoins au pire, mais dit d’un air sérieux.

« Tu m’as appelé … n’est-ce pas ? »

Elle restait à pleurer, incapable de se reprendre. Elle n’en avait pas envie d’ailleurs. Pleurer lui faisait du bien. Elle se sentait si seule mais c’était volontaire. Elle ne savait pas se comporter avec les gens. Les relations humaines lui faisaient peur. Alors elle préférait s’isoler et les éviter.

Elle se recroquevilla davantage encore sur elle. Entre ses sanglots, elle perçut un léger bruit contre sa fenêtre. Elle releva la tête et attendit un instant. Alors qu’elle allait se rallonger, un deuxième bruit, identique au premier, retentit. Marine repoussa drap et couverture et se leva.

La jeune femme avança en direction de la porte fenêtre donnant sur le balcon. Elle vit une ombre se dessiner sur le sol. Une ombre humaine avec… des ailes ? Elle resta un instant à contempler l’ombre. La projection des ailes disparue pour ne laisser la place qu’à une forme humaine. Elle reporta son regard sur le balcon. Un homme se tenait dessus. Elle alla ouvrir la porte. Kei !

Comment était-il arrivé là ? Comment avait-il su qu’elle avait eu envie de le voir ? Son visage, encore noyé de larmes, reflétait la surprise et le désarroi de la jeune femme.

« Tu m’as appelé … n’est-ce pas ? »

Appelé ? Que voulait-il dire par là ? Une bourrasque de vent froid vint la frapper. Le coup de vent ramena des plumes avec elle. Marine en attrapa une. Une belle plume blanche. Elle n’avait jamais vu une telle plume. Elle regarda alors le jeune homme devant elle. Il était apparu de nulle part, il avait soigné son poignet en quelques secondes, là il était venu juste parce qu’elle avait pensé à lui.

« Qui… qui est-tu ? »

Elle n’avait pas peur. Elle se posait juste la question de savoir qui il était ou plutôt ce qu’il était. Visiblement, il ne lui voulait pas de mal. Au contraire d’ailleurs. Elle s’était sentie si bien avec lui. Ça aurait du lui mettre la puce à l’oreille. Elle ne parlait jamais autant. Elle ne se laissait jamais autant aller.

Elle frissonna sous les nouveaux assauts du vent. Elle était pieds nus et ne portait qu’une simple nuisette de coton blanc qui n’était pas vraiment ce qu’il y avait de plus chaud. Ses bras étaient nus et la nuisette s’arrêtait à mi-cuisses laissant apparaître une grande partie des cicatrices situées sur sa cuisse gauche.

Marine regarda à nouveau le visage du jeune homme. Elle se rendit compte qu’elle s’en fichait au fond de savoir qui il était. Elle était bien avec lui. Là elle avait juste besoin d’une présence, de la sienne en faites. Toujours la plume à la main, elle marcha vers lui et se serra tout contre lui.

Un rayon lunaire éclaira le visage de la jeune femme. Cet à cet instant qu’il vit les traces de larmes sur ses joues. Elle avait donc encore pleuré … Et les traits de son visage lui montrait qu’elle avait vu sa « métamorphose ». Le vent se leva et emporta une plume prêt d’elle, qu’elle attrapa au vol, par réflexes. Elle l’examina un petit moment, puis son attention se reporta sur lui. Il put lire le doute qui s’était installé au fond d’elle. Elle devait à cet instant se demandait si lui faire confiance était une bonne chose. Lentement, ses lèvres s’entrouvrirent, laissant échapper de simples mots.

« Qui… qui est-tu ? »

Il la regarda d’un air mi-triste. Il avait passé une bonne soirée en sa compagnie, et il lui semblait qu’il en était de même pour elle, et la voilà qu’à présent il lui demandait qui il était, comme s’il ne s’agissait là que d’un simple étranger. Il voulut que c’était lui, que c’était le Kei de cette soirée, mais elle n’était pas débile. Elle avait les yeux grands ouverts et le voyait parfaitement. Mais répondre à cette question lui était horrible. Le vent se leva une nouvelle fois, faisant frissonner Marine très faiblement vêtue. D’un coup d’œil, il remarqua les cicatrices de sa jambe, ce qui confirma ce qu’il avait pensé en l’entendant dire que son dos se souvenait très bien …

Il n’avait toujours pas répondu lorsqu’elle reporta son attention sur lui. La plume était toujours dans sa main d’ailleurs. Puis lentement, son attitude et son regard semblèrent changer. Doucement, elle se mit à marcher vers lui. Il s’attendait à recevoir une gifle. Il ferma donc les yeux, prêt à se laisser faire pour lui avoir caché la vérité : de toutes façons, même si il lui avait dit, elle ne l’aurait surement pas crut à moins de le voir sous sa véritable forme. Mais le coup qu’il attendait ne vint pas. A la place, une douce chaleur apparut au niveau de son torse. Lorsqu’il rouvrit les yeux, elle était là, contre lui. Dans un élan, il l’entoura de ses bras. Puis ses mêmes ailes qui l’avaient apporté ici réapparurent et se refermèrent aussi sur elle afin de la protéger du vent. Il posa ses lèvres sur le front de la jeune fille, puis lui murmura en un faible sourire.

« On peut dire que je suis ce que vous appelez … un ange. Désolé de t’avoir menti, mais sache que tout dans ce que je t’ai dit était vrai… »

Il ne s’attendait pas à se faire pardonner. Il voulait juste lui faire perdre se regard triste et la revoir sourire, au moins une dernière fois. Et surtout ne plus jamais la voir pleurer. Sa punition attendrait. Il descendit lentement une de ses mains le long du corps de la jeune femme, sans arrières pensées, et s’arrêta à l’endroit des cicatrices. Il les effleura du bout des doigts, essayant d’imager le mal qu’elle avait ressentit. Les larmes vinrent prendre leur place au fond de ses yeux. En un instant, sa main s’illumina faiblement et il recouvrit de cette même lumière les blessures de Marine. Ce contact devint de plus en plus chaud, et lorsque sa main quitta sa jambe, il n’y avait plus de traces de ces marques de malheur …

Le torse de Kei était chaud contre elle. Elle sentit ses bras se refermer sur elle et quelque chose d’autre l’entourer. Elle ouvrit les yeux et vit des plumes, les mêmes que celle qu’elle avait attrapé. Des ailes, c’était des ailes. Elle referma les yeux se sentant alors si bien dans ses bras, à l’abri de tout. Elle sentit les lèvres de Kei se poser sur son front. Elles étaient si douces, si tendres, sans agressivité.

« On peut dire que je suis ce que vous appelez … un ange. Désolé de t’avoir menti, mais sache que tout dans ce que je t’ai dit était vrai… »

Sa voix était douce et chaude. Un ange ! Marine n’avait jamais cru aux êtres fabuleux et pourtant elle en avait un devant elle, contre elle. Elle devait rêver.

Elle sentit la main de Kei descendre jusqu’à sa cuisse. Il avait du voir les cicatrices. Elle sentit alors la chaleur de sa main sur sa cuisse. Elle ne savait pas ce qu’il faisait mais elle était sûre, de manière instinctive, qu’il ne lui voulait pas de mal. Elle ne savait pas comment elle le savait, mais elle le savait.

Elle se serra encore plus contre lui comme se persuader qu’il était bien réel. Les larmes se mirent à nouveau à couler sur ses joues.

« Si tu es vraiment un ange, alors emmène-moi loin d’ici – elle releva son visage à nouveau couvert de larmes vers lui – emmène moi au Paradis. Là où je n’aurai plus jamais mal et où les souvenirs ne viendront plus me hantés »

Elle était désespérée. Elle lui aurait donné tout ce qu’elle avait, c'est-à-dire pas grand-chose, pour qu’il l’emmène mais elle savait cela impossible. Elle baissa à nouveau la tête contre son torse.

« Tu ne peux pas, n’est-ce pas ? – c’était une question qui raisonnait comme une affirmation – Je sais bien que c’est l’enfer qui m’attend pour le mal que j’ai fait »

Elle éclata en sanglot. Elle se raccrochait à lui comme une noyée à une bouée dans la tempête. Elle fit alors un pas en arrière. Malgré ses pleurs, elle lui sourit.

« Tu devrais t’en aller, bel ange. En restant avec moi, tu risques de perdre tes ailes. Je ne suis pas quelqu’un de bien et je ne veux pas te faire du mal ou que tu en subisses à cause de moi. Mais se fut un grand honneur de te rencontrer »

Elle garderait la plume en souvenir mais il ne devait pas rester avec elle. Elle ne le méritait pas.

Sa présence se fit plus proche lorsqu’elle se rapprocha de lui. A travers le fin tissu de sa nuisette, il sentait son cœur battre. Un rythme rapide, mais régulier. Elle trembla dans ses bras, et il comprit qu’elle pleurait de nouveau lorsque son T-shirt fut mouillé par ses larmes. Sa prise sur elle se fit plus forte, comme s’il cherchait de la protéger de quelqu’un. Mais il ne la protégeait de personne, si ce n’est de l’injustice dont elle avait été la proie. Elle avait surement du se demander pourquoi elle. Pourquoi pas une autre personne ? Ce n’était pas ce qu’il manquait, le choix. Mais le destin en avait voulut autrement …

Elle le pria de la mener au Paradis. Comme le racontait certains livres, les anges descendaient du Paradis. Mais malheureusement, Kei doutait de la réalité de cet endroit. En revanche, l’enfer était bel et bien réel, et il s’appelait Terra. Cette planète à l’image de la Terre était peuplée de créatures plus ou moins féroces. S’y aventurer seul était signe de grand danger. En pensant ça, il sentit son estomac se nouer, se sentant coupable de ne pas pouvoir répondre à ses attentes. Il préféra donc rester silencieux. Elle dut le sentir et lui avoua ce qu’elle pensait aussi, c'est-à-dire que ce même Paradis n’existait pas. Elle rajouta toutefois que ce qui l’attendait, c’était l’enfer, en raison de tout le mal qu’elle avait provoqué. Il ne connaissait rien de son passé, et cela aurait été mal vu de vouloir en savoir plus, mais il ne voyait pas Marine comme ça. De nouvelles larmes vinrent rouler sur ses joues, et s’accrocha davantage à ses vêtements tandis que lui glissait sa main dans ses cheveux, tentant de la rassurer de par sa présence. Un instant plus tard, elle s’éloigna doucement de lui, essayant de cacher son désarroi derrière un sourire.

« Tu devrais t’en aller, bel ange. En restant avec moi, tu risques de perdre tes ailes. Je ne suis pas quelqu’un de bien et je ne veux pas te faire du mal ou que tu en subisses à cause de moi. Mais se fut un grand honneur de te rencontrer »

Il fut soudain prit d’une grosse envie de vomir. Elle lui demandait de la laisser seule face à son sort. Pourtant, son attitude démontrait le contraire en serrant de ses deux mains l’une de ses plumes. Le visage de Kei tomba, ses yeux regardant le sol. Il se sentit se remplir d’une haine envers ce monde pourri. Pourtant considérés et représentés comme des êtres purs, les anges étaient aussi capable d’une grande colère. Et ce qu’il se passait en ce moment même. Il entendait des voix murmurer dans sa tête, des voix  suppliant Dieu de leur venir en aide. Des pleurs, des cris. Il sentait que sa tête allait exploser. Tout ça pour quoi ? Elle avait vécue ça pour quel but ? Des milliers de questions apparaissaient les unes après les autres dans sa tête, et pourtant elles restaient sans réponses. Dans quel but avait-il été envoyé sur Terre dans ce cas ? S’il ne pouvait pas soulager la conscience d’une personne et lui faire regagner confiance en elle, à quoi servait ses pouvoirs. Il tomba à genoux au sol, approchant la crise de nerfs. Le lampadaire éclairant la rue derrière lui commença à briller de plus en plus fort jusqu’à exploser. De fins bouts de verres furent projetés sur lui, lui entaillant la peau à quelques endroits, mais ces coupures s’évanouirent l’instant d’après. Il se força à respirer calmement pour retrouver son calme, et ainsi éviter de blesser la demoiselle …

Après de grands efforts, il réussit tout de même à se calmer. Il avait certes un peu mal à tête du fait de l’explosion de ses pouvoirs mais au moins, Marine semblait aller bien, du moins elle n’avait rien subit de physique. Il se releva et s’approcha d’elle, levant la main et effleurant du bout des doigts son fin visage.

« Je ne pense pas que le fait d’être avec toi puisse m’apporter le malheur – il rajouta en détournant quelque peu le regard – Tout ce que je souhaite, c’est être avec toi … »

Ces faibles mots résonnèrent dans la nuit …

Marine aurait du avoir peur quand l’ange tomba à genoux devant elle et que le lampadaire explosa projetant des éclats de verre dont certains blessèrent Kei. Elle aurait du avoir peur mais elle avait mal pour lui. Elle comprit soudain la solitude de cet être. Beaucoup de gens devaient lui demander la même chose qu’elle et lui ne pouvait accéder à leurs requêtes. Il devait tant en souffrir. Il s’en voulut de son égoïsme. Elle n’avait pas pensé qu’un ange pouvait souffrir. Ce n’était pas l’image que les livres en donnaient.
 
Il finit par se relever. Il vint vers elle et tendit sa main pour toucher sa joue. Une main toujours aussi douce et chaude.

« Je ne pense pas que le fait d’être avec toi puisse m’apporter le malheur. Tout ce que je souhaite, c’est être avec toi … »

Il avait prononcé ses mots à voix basse et sans la regarder. Il voulait rester avec elle ? Pourquoi ? Il pouvait aller où il voulait. Pourquoi rester avec quelqu’un comme elle ? C’était incompréhensible pour elle. Mais elle se rendit compte qu’il semblait avoir autant besoin d’elle, qu’elle de lui. Il semblait aussi seul qu’elle, aussi blessé qu’elle. Non, il était bien plus blessé qu’elle.

Elle posa sa main sur celle qui était posée sur sa joue. Elle ferma les yeux et profita de la chaleur de sa main. Lorsqu’elle ouvrit à nouveaux les yeux, elle lui souriait. Elle se rapprocha de lui et l’enlaça. Elle voulait le réconforter, qu’il se sente mieux, moins seul.

« Je n’ai rien à t’offrir mais… si tu veux rester, alors reste »

Elle essaya de mettre toute la douceur et la tendresse qu’elle avait en elle dans ces quelques mots et dans ce simple geste. Elle qui avait tant souffert. Pour la première fois de sa vie, elle avait envie d’aimer, de prendre soin de quelqu’un, de le rendre heureux. Elle ne pensait pas forcément y arriver mais elle voulait au moins essayer.

La main qu’elle posa sur la sienne était chaude, bien plus chaude que la sienne. Un sourire illumina son visage, et elle se rapprocha de lui, l’enlaçant. Il fit de même, déposant sa tête sur la sienne. Il passa doucement ses doigts le long des joues de la jeune fille, chassant les larmes qui essayait de rester à leur place.

« Je n’ai rien à t’offrir mais… si tu veux rester, alors reste »

Si, bien sûr qu’elle pouvait lui offrir quelque chose. Pas quelque chose de matériel, pas ça. Quelque chose de bien plus significatif qu’un simple cadeau : un sourire. Et inconsciemment, elle lui avait offert. Pour lui, c’était le plus beau des cadeaux … Le vent recommença à se lever et à souffler bien plus fort qu’auparavant. Les ailes de l’ange seraient assez fortes pour les en protéger, mais le froid resterait toujours présent. Si lui ne pouvait pas tomber malade, il n’en allait pas de même pour elle.

« Il commence à faire froid, tu devrais rentrer te mettre au chaud avant de tomber malade, jeune fille … »

Il resta encore un moment collé à elle, profitant une dernière fois de cet instant. Il ne voulait pas la quitter, pas la laisser seule dans cet état. Sans compter qu’elle devait aussi se reposer : sa nuit avait été bien plus courte et bien plus mouvementé que la sienne. Il s’éloigna doucement d’elle, mais en resta tout de même très proche. Il lui prit les mains et lui rendit un des plus beaux sourire dont il était capable …

La jeune femme se sentait bien au chaud dans ses bras. Le vent avait redoublé d’efforts mais elle n’y faisait pas attention.

« Il commence à faire froid, tu devrais rentrer te mettre au chaud avant de tomber malade, jeune fille … »

Il finit par se détacher d’elle, au grand regret de Marine. Kei lui tenait les mains et lui souriait. Elle fit de même en lui rendant son sourire. Elle ne voulait pas le voir s’en aller. Elle avait besoin de lui. Elle recula pour rentrer dans sa chambre sans pour autant lâcher les mains de l’ange. Elle l’entrainait avec elle.

« Reste avec moi »

Marine voulait encore rester près de lui ou plutôt que Kei reste près d’elle.

Elle lui rendit son sourire, et il crut alors qu’elle rentrerait. Ce qu’elle fit d’ailleurs, mais pas toute seule. Ses mains toujours accrochées aux siennes, il voyait de plus en plus la chambre de Marine approcher de lui.

« Reste avec moi »

Cela le surprit, il ne s’y attendait pas. Penser la revoir était une chose, rentrer chez elle en était une autre. Mais si elle le voulait tellement, il n’allait pas refuser. Après tout, lui aussi voulait rester avec elle. Il fit donc quelques pas et lorsqu’il se trouva à la limite de la porte, ses ailes s’évanouirent. Il rentra donc, se retrouvant à ses côtés, à l’intérieur de la pièce. Il referma ainsi la porte-fenêtre afin de ne pas y faire rentrer du froid. D’un rapide coup d’œil, il examina la chambre de la jeune femme, et il put aisément dire qu’elle était beaucoup plus ordonnée que lui. D’un côté, c’était difficile de ne pas l’être. Il serra légèrement plus les mains de Marine dans les siennes avant d’ajouter.

« J’accepte avec joie »

Puis il l’attira doucement à lui pour de nouveau l’enlacer et ainsi se retrouver très proche d’elle …

La jeune femme fut déçue lorsqu’il replia ses ailes. Elle les aimait beaucoup ses belles ailes blanches mais elle se dit que ça ne devait pas forcément être des plus pratiques. C’était étrange, cela ne faisait que quelques minutes qu’elle savait que Kei était un ange et pourtant cela ne la dérangeait pas. L’effet de surprise passé, elle le considérait comme lors de la soirée qu’ils avaient passée ensemble.
 
Il entra avec elle dans la pièce et referma la porte vitrée. Marine devait bien reconnaître qu’il faisait bien meilleur dedans que dehors malgré les bras de Kei. Mais s’il avait voulu, elle aurait passé la nuit près de lui dehors dans le froid. Il serra davantage ses mains.

« J’accepte avec joie »

Elle sentit qu’il l’attirait contre lui. Elle n’opposa aucune résistance et se retrouva, une nouvelle fois, dans la chaleur rassurante de ses bras. Elle souriait toujours. C’était agréable de se laisser aller contre quelqu’un sans avoir à se poser de questions. La jeune femme n’avait jamais connue ça auparavant. Néanmoins, elle ne voulait pas que cela prête à confusion pour lui.

« Je ne veux pas… Enfin… je voudrais juste dormir avec toi »

Elle ne voulait pas aller plus loin. Elle n’était pas prête à ça. Elle espérait juste pouvoir profiter de sa présence, dormir près de lui.

Marine toujours dans ses bras, il sentit une sorte d’embarras en elle. La gênait-il tant que ça ? Il eut beau chercher en quoi, il ne trouva pas. Il ignora donc cette impression, croyant s’être trompé. Rester ainsi près d’elle lui faisait un grand bien. Il ne savait pas pourquoi alors qu’il venait tout juste de la rencontrer, mais il le ressentait au plus profond de lui. La jeune femme sembla légèrement bouger et une petite voix s’échappa de sa bouche.

« Je ne veux pas… Enfin… je voudrais juste dormir avec toi »

Voilà d’où lui venait cet embarras. Peut-être avait-elle crut qu’il faisait cela pour coucher avec. C’était bien mal connaitre l’ange. Elle était certes très belle, mais s’il sortait ou se retrouvait seul avec une fille ce n’était pas pour le cul, même si il éprouvait une forte attirance. Et puis il n’était pas le seul à décider de ça. Il n’avait jamais forcé la main à une fille, et il ne le ferait jamais. Le rouge lui monta néanmoins aux joues : en effet, il ne s’attendait pas à une telle demande.

« Euh … B-Bien sur … »

Tout ce qu’il espérait, c’était que Marine ne le prenne pas pour un pervers pour avoir accepté aussi vite. Elle avait peut-être fait ça afin de le tester, et si c’était le cas, il était royalement tombé dans le piège de la belle. Mais le ton de sa voix paraissait si sincère qu’il décida de lui faire confiance.

« Euh … B-Bien sur … »

En entendant ces mots, Marine espérait ne pas l’avoir froissé. Elle n’avait pas voulu le blesser. Elle s’écarta de lui mais lui prit la main pour l’amener jusqu’au lit où elle s’assit.

C’est lorsqu’elle s’assit qu’elle remarqua la disparition des cicatrices sur sa cuisse. Elle releva le bas de sa nuisette sur ses cuisses pour être sur qu’elles n’étaient plus là. Elle passa sa main sur sa peau. Il n’y avait plus une seule marque. Rien ! Comment ? Elle releva la tête vers Kei.

« C’est… c’est toi qui a fait ça ? »

Les traces visibles de son passé s’étaient envolées comme si rien ne lui était arrivé. Malgré tout, elle se souvenait très bien du jour où ses marques étaient arrivées sur elle : le tigre, la peur, la douleur, le sang. Ces cicatrices faites par les griffes de l’animal n’étaient plus mais il lui en restait d’autres.

Cependant, les traces les plus terribles qu’elle avait ne se trouvaient pas sur sa peau, elles n’étaient pas visibles et elles ne s’effaceraient jamais. Elle avait apprit à vivre avec ses cicatrices comme avec son passé mais le passé était bien plus lourd à porter que de simples marques sur la peau.

Elle releva son visage vers l’ange avec un sourire plein de gratitude.

« Merci – elle eu un léger rire – mais si tu veux m’enlever toutes mes cicatrices, tu vas avoir du pain sur la planche ! »

Elle se releva et marcha jusqu’à lui. Elle déposa alors un léger baiser sur les lèvres de Kei.

« Merci encore… pour tout »

La jeune femme retourna près du lit et se glissa sous les couvertures. Elle se poussa le plus qu’elle pu vers le mur et, d’un geste de la main, invita le jeune homme à la rejoindre

Marine s’éloigna lentement de lui mais l’attrapa tout de même par la main, l’entrainant à sa suite vers son lit. Une fois assise, elle parut surprise : elle regardait étrangement vers le bas. Ne comprenant pas, Kei suivit son regard jusqu’au sol, et regarda attentivement sans rien trouver. Qu’est ce qui semblait tant intéressant ? Apparemment, il ne regardait pas au bon endroit puisque la jeune femme passa sa main sur la jambe qu’il avait guérie plus tôt : il pria Dieu pour que Marine n’ait rien vu pour pas qu’elle se moque de lui. Mais d’après son étonnement, elle semblait plus surprise qu’autre chose. Elle releva son visage vers lui et lui demanda si il était pour quelque chose, phrase à laquelle il répondit en souriant.

« Je pense que oui »

En doutait-elle ? Après tout, elle avait déjà vu ses ailes, donc il n’y avait pas de quoi. Mais c’était compréhensible. Toujours est-il que ce qu’il n’avait montré n’était qu’une infime partie de ses pouvoirs. Et encore, ils n’étaient pas arrivés à maturité. De quoi serait-il capable ? Il n’en savait trop rien car il n’avait jamais rencontré d’autres représentants de sa race. Cependant, il n’était pas difficile de savoir à quoi penser Marine. Ses cicatrices faisaient parties de sa vie. Elle avait toujours vécue avec, et elle les avait ressentis de son vivant. Pour elle, elles ne disparaitraient pas pour autant. Mais si ce qu’il avait fait pouvait atténuer cette pensée, alors il n’allait pas s’en priver…
Le visage de la belle se releva vers Kei avec un sourire : qu’elle était belle …

« Merci, mais si tu veux m’enlever toutes mes cicatrices, tu vas avoir du pain sur la planche ! »

Puis tout se passa très vite. Elle quitta son lit, s’approcha de lui et déposa un instant ses lèvres sur les siennes. Pas plus d’une seconde. Mais c’était comme si le temps s’était figé. Le contact, bien que bref, lui avait parut si chaud … Ses lèvres en tremblaient encore. Elle le remercia une nouvelle fois avant de retourner dans son lit et de serrer le plus possible au fond de celui-ci. Elle se tourna ensuite vers lui et d’un signe de la main, l’invita à la rejoindre. Il hocha lentement la tête, toujours groggy à cause du baiser, et enleva ses habits, ne gardant que son sous-vêtement. Il se glissa alors à ses côtés et se mit sur le côté, face à elle, passant une main sur sa joue.

« On peut dire que tu m’as bien surpris … »

Il voulut le lui rendre mais il ne se résolut pas à le faire, alors il visa sa joue plutôt que ses lèvres …