Maria connaissait la version de Mike sur les gangs. Elle reposait sur l’idée que White n’avait plus assez d’hommes pour contrôler toute la Zone. En effet, la Zone de Seattle était très grande, l’une des plus grandes que le FEDRA avait fait quand la situation avait commencé à dégénérer, il y a de cela une vingtaine d’années. La taille de cette Zone s’expliquait par le fait que Seattle était l’une des plus grandes villes de la région, et avait dû recueillir les réfugiés venant des proches villes. De plus, au vu de sa position, elle avait été l’une des mieux organisées avant que l’épidémie ne se répande. Toujours est-il que, selon Mike et d’autres, White avait de moins en moins d’hommes, soit parce qu’ils partaient, soit parce qu’ils se faisaient tuer. Maria, elle, était un peu plus cynique, et pensait que les gangs avaient conçu une alliance avec White pour gérer différentes parties du territoire, en échange de rations et d’approvisionnements.
Toujours est-il que ça ne lui disait pas où était leur fils... Wannaker et ses hommes allaient forcément faire quelque chose ce soir, et Maria soupçonnait une intervention extérieure. Les Lucioles ? On disait qu’ils faisaient d’excellents trafiquants d’armes, en encourageant les habitants des Zones à se révolter contre un ordre militaire devenu despotique. Maria, elle, avait juste envie de revoir son fils, et accepta de suivre l’idée de Mike, qui était que Wannaker allait frapper une autre zone, moins importante.
«
Hum... Faisons ça, je pense savoir ce que Wannaker veut faire... »
Maria n’avait pas besoin d’amener sa carte pour visualiser Seattle. Le duo s’éloigna donc du port pour filer vers le sud, pour rejoindre le quartier de
White Center, juché sur une colline. Il se situait en hauteur de la ville, et, quand on connaissait Seattle, on savait que la ville était comme découpée en deux par l’eau. Et, en face de Seattle, il y avait
Vashon Island au sud, et
Bainbridge Island au nord, face au port. Or, il existait jadis d’anciennes lignes de ferry permettant de rejoindre ces îles... Et l’un des anciens embarcadères se trouvait, justement, au sud de
White Center.
Le duo dut cependant faire un long détour, car il fallait passer à nouveau par le centre-ville, qui était sous la domination des forces de White. Au bout de plusieurs heures, le duo rejoignit donc les hauteurs de Seattle, arrivant à
West Seattle, au nord de
White Center. Une série de petites maisons pavillonnaires abandonnées, barricadées, pillées, vidées de tout leur contenu. Un endroit où peu de gens traînaient, avec, encore, ici et là, des barricades sur les rues. Les véhicules blindés de White passaient par là, car ce quartier se trouvait au sud d’une enclave située dans Seattle,
Harbor Island, un ancien quartier industriel, qui abritait maintenant les forces de la milice de White.
Si Mike n’avait pas sa carte, Maria, elle, avait toujours, dans la poche arrière de son jean, un carnet de notes, comprenant un plan très sommaire de la ville, en présentant les zones d’influence :
Ils arrivèrent ainsi à
Delridge, un quartier résidentiel qui était réservé à la fortune des locaux, avec un grand club de golf, et, surtout, les bureaux de
West Seattle Corporate Center, une agence qui, jadis, louait des bureaux pour de multiples sociétés. Tout était à l’abandon, maintenant, mais, alors que le duo avançait dans ces rues silencieuses, et que Maria commençait à craindre d’arriver trop tard, ils entendirent du bruit émanant d’une maison. Enfin, Mike entendit des pleurs. Maria dut froncer les sourcils pour tenter de percevoir les sons, et tourna la tête vers une ancienne maison avec une porte clôturée, et perçut également, en hauteur, des cris.
«
Mike, non... ! » siffla-t-elle.
Trop tard, son mari était déjà parti, la faisant soupirer. Même si l’endroit était abandonné, les soldats de White patrouillaient régulièrement, à bord de véhicules, ou plus souvent pieds nus, et tiraient à vue. On craignait toujours que des infectés ne passent par la mer, même si c’était peu probable, vu qu’ils ne savaient pas nager... Mais on n’était jamais à l’abri d’une mauvaise surprise, comme Mike le faisait en ce moment. Partant devant, il était filé par la porte arrière, dans le jardin, et Maria se précipita à sa suite, rentrant par l’arrière.
Elle entendit des bruits de marches, et, à l’étage, Mike ouvrit la porte où le bébé était censé se trouver... Sur un tapis, au centre, il y avait un tas de chiffons, et un petit bras qui en dépassait.
«
Mike !! »
Dès que l’homme s’approcha du bras, un bruit se fit entendre dans son dos... Puis une batte de base-ball heurta la tête de Mike, le renversant sur le sol, pendant que Maria, au rez-de-chaussée, se fit attaquer par un homme jaillissant de la cuisine.
«
Haha, putain, j’y crois pas ! On en a chopé deux, Steve !! -
Hmmrrpfff... Lâche-moi, connard... !! »
Plaquée contre le mur, Maria parvint à repousser l’homme en lui fichant son coude dans le ventre, mais eut à peine le temps de se retourner que l’homme, nettement plus corpulent qu’elle, lui mit une gifle phénoménale, qui l’envoya s’écraser sur le sol. Mike, de son côté, vit son agresseur s’emparer rapidement de son pistolet.
«
Un flingue, ils ont un flingue, merde !! »
Tandis que Mike gisait au sol, peut-être parviendrait-il à voir que ce qu’il avait pris pour des pleurs n’était rien d’autre qu’un magnétophone posé sur une simple poupée.
«
Merde, j’arrive pas à croire que ce vieux tour ait marché ! Haha, merde ! »
Blessée, Maria sentit l’homme la tirer par les cheveux, et la força à grimper les marches, pour la balancer près de son mari. Soupirant lentement, Maria balança la première chose qui lui vint à l’esprit :
«
Écoutez, on bosse pour Wannaker, et... -
Ta gueule ! »
Un coup de pied frappa Maria en plein visage, la faisant hurler de douleur. Ces types n’étaient pas des tendres, et sûrement pas de la bande de Wannaker. Le pire sur qui on pouvait tomber... Des rôdeurs. Mais comment avaient-ils fait pour venir ici ?