Un autre gang, assurément... C’était l’hypothèse la plus crédible, et la seule qui tienne. Les gangs de Seattle se trouvaient au nord, mais aussi au sud, côté sud-est, là où Maria, Mike et Bryan se trouvaient. Il était fascinant de voir comment Seattle, l’une des villes les plus sûres des États-Unis avant l’Apocalypse, avait fini par se dégrader, et par devenir la ville sinistre qu’elle était actuellement. Pour autant, même aujourd’hui, Maria poursuivit sa réflexion en se disant que la ville restait toujours relativement sûre. Seattle était située à l’extrême nord de la Côte Ouest des États-Unis, et il n’y avait pas grand-chose aux alentours. Essentiellement de vastes forêts et des montagnes, ce qui faisait que l’infection avait mis plus de temps à se propager, permettant aux militaires qui se trouvaient à proximité de la ville de tout préparer. Initialement, les gangs n’existaient pas, et étaient venus avec les afflux massifs de réfugiés venant du reste de la Côte Ouest, quand il était clairement apparu que les grandes villes de la Californie n’étaient plus sûres. Et, entre la Californie et Seattle, il y avait un vaste désert végétal constitué de villes secondaires ou de bleds paumés.
Maria ignorait qui était ce gang, mais ils n’avaient pas l’air de plaisanter. Quand l’un d’eux frappa Bryan, elle poussa un cri, mais se ravisa bien vite, en serrant les poings. Maria savait de quoi les hommes armés étaient capables, et, comme toujours, elle sentit qu’il allait encore falloir user sa verve pour pouvoir s’en sortir... Même si, pour l’heure, les mots ne l’avaient pas trop aidé. Bryan était blessé, mais la blessure restait superficielle, pendant que le type sur qui ils étaient tombés semblaient exulter de jouer au petit chef.
*
Ce n’est sûrement pas lui le chef de ce gang...*
Encore une fois, Maria réalisa que ça allait être à elle de jouer, et elle se mit donc à parler :
«
Écoutez, on comptait pas venir ici, initialement. On a dû traverser les égouts, et... Tout ça est un malentendu, mais on a de l’argent chez nous, et... -
Et quoi ? le coupa l’homme, visiblement agressif, avec les pupilles légèrement dilatées, ce que Maria sembla noter en ce moment.
Tu nous prends pour des putains de banquiers qui faisons crédit ? -
Vous pouvez prendre nos armes ! Ce sont les armes des miliciens, elles ont des munitions, et ne sont pas rouillées. Ça vaut largement le droit de passer, non ? »
L’homme se tut pendant quelques secondes. Vu la rapidité et la sauvagerie avec laquelle ils avaient tué Tom, Maria n’avait toujours pas compris pourquoi ils ne les avaient pas tués. Enfin... Elle comprenait qu’ils puissent la garder pour la violer, mais... Bryan et Mike ? Maria réfléchissait donc, comprenant qu’il y avait nécessairement quelque chose qui les tracassait. Et, s’ils avaient tué Tom, c’était parce qu’il leur était inutile.
*
Réfléchis... Et, au pire, bluffe !*
Maria ne voyait qu’une seule chose capable d’inquiéter les gangs, et enchaîna rapidement, pendant que le type en face cherchait un nouveau moyen de faire pression :
«
Les miliciens comptent attaquer les gangs pour reprendre le contrôle sur la Zone. »
La phrase, totalement issue de son imagination (mais qui était aussi ce qu’elle pensait) ne manqua pas de réagir, et tous les regards se tournèrent vers elle.
«
Qu’est-ce que t’en sais, salope ?! -
On... On les a entendues. Vous avez dû entendre le bruit à l’ouest, non ? Près de Lincoln Park ? C’était eux... Ils ont des mortiers, des véhicules lourds... J’ai surpris leur stratégie. »
Il n’y eut aucune réponse, puis le « chef » s’énerva, en s’approchant d’elle, pointant son arme sur son visage :
«
Tu mens, sale pute, on a un accord avec White ! -
Ne me fais pas rire ! Tout ce que White veut, c’est vous supprimer, et, crois-moi, elle en a largement les moyens. Ces hommes s’entraînent d’arrache-pied à Harbor Island, et ils ont de l’équipement lourd là-dedans. Tu sais qu’il y avait une base militaire avant, non ? Où tu crois que tout le stock militaire est parti quand l’infection a commencé ? Ils ont tout stocké chez eux, et ils vont s’en servir sur vous. »
Cette fois, elle avait fait mouche, car elle vit clairement la détermination du sous-fifre vaciller dans ses yeux.
«
Putain, putain, putain... Okay, okay... On les emmène voir Théo ! »
Théo devait être le véritable chef du gang. Un seau d’eau glacé fut balancé sur la tête de Mike pour le réveiller, et le trio suivit ensuite les hommes armés à travers les rues désertiques de l’ancien quartier industriel de Seattle. Leur marche les conduisit vers le
centre PACO, qui avait jadis servi pour acheter du matériel en tout genre, et qui était maintenant le quartier général d’un gang qui accordait visiblement un respect très faible pour la vie humaine.
Maria avait de plus en plus envie de retourner chez elle...