Comme on se retrouve ! [Jack Taylor]

Parmi ses nombreux actes de trahisons, Asmona pouvait avouer qu'elle avait aussi agit parmi les humains. A la fois sur Terre et sur Terra suivant ses envies, deux fois par an, au solstice d'été, puis au solstice d'hiver. Changeant assez souvent de tête, personne ne l'avait vraiment remarquée pour le coup. Ses trahisons, assez minimes, étaient bien vite oubliés en général d'une année à l'autre.
Cependant, il existait quelques petites exceptions. Des gens qui n'avaient absolument pas digéré ses manigances. C'était sans hésiter le cas d'un dénommé Jack Taylor, un flic assez spécial vivant à New York. Durant le dernier solstice d'été, il y a un an donc, Asmona avait fait la connaissance de cet homme intéressant, quoiqu'un peu inquiétant. En effet, si elle l'avait d'abord prit pour un flic comme les autres, elle s'était rapidement rendue compte que ce n'était pas le cas. Oui, il était un peu trop au courant des altérations créant les passages dimensionnel entre la Terre et Terra. Et ce n'était pas trop au goût de la demoiselle qui comptait bien à ce que chaque monde et ses habitants restent à leur place. Alors elle avait mit au point un plan de sa composition. Oh, ce n'était pas bien méchant.
Asmona avait séduit le flic, l'avait amené jusqu'à un hôtel, avait couché avec lui... et s'était tiré avec l'appareil qui lui permettait de détecter et d'étudier les portails. Avec l'appareil, oui... et avec l'ensemble de ses fringues. Oui, Asmona aimait bien faire preuve d'humour de temps en temps.

Aujourd'hui, donc, c'était un nouveau solstice d'été. Quittant l'Enfer dans lequel elle opérait la veille sous sa forme démoniaque, elle s’engouffra dans le passage dimensionnel pour apparaître discrètement dans une petite ruelle de New York. Elle s'était prise d'affection pour cette ville. Elle aimait traîner dans les boites de nuit ou les bars pour s'amuser.
Elle avança un peu le long de la rue et s'arrête au niveau d'un vitrine pour admirer son apparence. Ce n'était pas spécialement voulu, mais elle avait choisit le même physique qu'il y a un an. Elle s'aimait bien comme ça.

Asmona arrangea son débardeur noir, celui qui moulait soigneusement sa poitrine généreuse et alla même jusqu'à remonter légèrement son string pour qu'il dépasse de son jean. De quoi rendre dingue les hommes sur son passage, ce qui l'amusait beaucoup.
Il faisait très beau, très bon, alors la jeune femme décida d'aller se promener un peu à Central Park. Beaucoup de New-Yorkais avaient eu la même idée, il y avait donc un peu de monde.
Elle s'arrêta devant une petite camionnette colorée ou un vieil homme vendait des glaces à l'italienne. Elle commanda un cône à la fraise, paya le marchand, puis s'éloigna en souriant, imaginant les yeux globuleux du vieux scotché sur son petit cul qu'elle faisait sensuellement rouler au rythme de ses pas.

« Merci mec, garde la monnaie ! »

Jack adressa un signe de tête au vendeur de hot-dog et s'éloigna d'un pas chaloupé. La CIA lui avait filé les cinq jours de congé qu'il réclamait depuis un bail et il en avait profité pour passer à New-York, son port d'attache depuis des années. Il y avait passé sa première année de service et même si celle-ci avait été difficile, il en gardait d'assez bon souvenirs. N'étant pas en service, l'agent Taylor avait laissé son arme à son hôtel et portait une tenue relativement décontractée ; pantalon en laine gris souris, chemise blanche en popeline et veston bleu nuit. Enfonçant avec plaisir ses dents dans le sandwich brûlant, Jack s'engagea dans une allée boisée de Central Park. Il faisait bon, et c'était la pause déjeuner ; la plupart des cadres des environ étaient descendue prendre l'air. Jack quant à lui était théoriquement en vacances, mais il devait préparer un rapport sur les créatures surnaturelles qu'il avait eu l'occasion de rencontrer à Seikusu et n'en était qu'à la page de garde... L'après-midi s'annonçait plutôt longue. Lorsqu'il aperçut la camionnette d'un glacier à l'intersection de deux allées, Jack s’immobilisa un instant, et sourit en observant les enfants qui se bousculaient entre eux pour être servi en premier. Pour l'heure, c'était une jeune femme aux cheveux roses qui réglait son cornet. « Bon dieu, quel postérieur ! », songea le beau Jack alors que son sourire s'élargissait. Curieux de savoir si l’inconnue était aussi attirante de face que de dos, il sentit les battements de son cœur s’accélérer, alors qu’il détourna les yeux pour ne pas attirer son attention.

« Cette foutue salope… »

Cette foutue salope, c’était Asmona, une créature fantastique à laquelle Jack avait été confronté au cours de sa première année de service… A cette époque, Jack était un bleu. Tout droit sorti du campus de Fairfax, Virginia, il avait un cv long comme le bras, et une ambition sans limite. Lorsqu’il avait entendu parler des premiers prototypes de détecteurs de déformation gravitationnelle que la CIA avait secrètement mis au point, il avait tout fait pour qu’on lui en confie un… Eu égard à des résultats exceptionnels à ses test d’aptitude, le boitier petit boitier sombre tant convoité lui avait été fourni. L’appareil l’avait mené jusqu’à Asmona, qu’il avait coincée alors qu’elle sirotait un daiquiri dans un bar ; le voyage inter dimensionnel (qui correspondait également à un voyage dans le temps, d’un point de vue scientifique), produisait une déformation de la gravité que l’appareil pouvait détecter, de même que les particules provenant de réalités différentes, qui demeuraient sur la peau, ou sur les cheveux du voyageur. Sommée de s’expliquer sur la raison de sa présence sur terre, Asmona s’était montrée enjôleuse et lui avait promis de « tout lui raconter ». Ils s’étaient inévitablement envoyés en l’air. La baise avait été géniale, mais le réveil plutôt douloureux ; lorsqu’il s’était réveillé le lendemain matin, la salope s’était tiré avec son détecteur et… L’ensemble de ses fringues. Cet évènement avait failli plomber sa carrière et lui avait valu de passer six mois derrière un bureau, ainsi qu’un nouveau costume sur-mesure… Emboîtant silencieusement le pas à la jeune femme, Jack vérifia la date sur l’écran de son téléphone ; le doute n’était pas permis, c’était le jour du solstice d’été.

« Même endroit, même date. Ben voyons… »

Avisant l’allée qu’Asmona allait emprunter, il coupa à travers la pelouse pour la dépasser, et s’installer sur un banc de bois, devant lequel elle allait forcément devoir passer.

« Ça alors, mais quelle surprise », s’exclama-il d’un ton faussement enjoué, une fois qu’elle fut arrivée à sa hauteur. « Asmona ! Ça doit faire quoi… Cinq, six ans ? »

Il mourrait d’envoi de saisir la jeune femme par son débardeur et de la jeter sur le sol pour lui faire bouffer sa grosse queue, mais d’une part, le parc était bondé. D’autre part, il était curieux de savoir ce qu’elle avait bien pu faire de son détecteur. En la jouant fine, il lui était peut-être possible de le récupérer. Ensuite… Eh bien ensuite il lui ferait payer la monnaie de sa pièce, bien évidemment. Tapotant le banc du plat de la main, il invita la jeune femme à s’asseoir d’un signe de tête.