Il y a quelques mois, Poison Ivy avait fait la rencontre fascinante d’un couple d’Alraunes : Lily et Raune*. Les deux belles nymphes avaient la particularité d’être toutes les deux issues de la même plante. Deux sœurs, dont la fonction était de se rendre dans les forêts détruites, afin de les reconstruire. Que ces forêts aient été détruites du fait d’incendies naturels, de guerres, ou de la déforestation, elles s’y installaient, et usaient leur savoir-faire floral pour faire repousser les arbres, faire revenir la végétation, attirant ainsi la faune, repeuplant progressivement les forêts. Elles faisaient ça sans demander aucune récompense, simplement avec cette gentillesse naturelle propre aux Alraunes. N’était-ce pas, fondamentalement, la preuve tant voulue que la Nature était une mère qui savait pardonner ? Une Mère clémente et généreuse ? Ivy en était convaincue. Elle était, depuis toujours, persuadée de la supériorité fondamentale de la Nature… Cette miséricorde, elle ne l’avait toutefois pas toujours eu. Sa mentalité était très variable, car elle dépendait pour beaucoup du climat dans lequel elle vivait. Dans une ville extrêmement polluée comme Gotham City, où les raffineries et les usines ne respectaient absolument aucune norme environnementale, et crachaient dans le ciel des tonnes et des tonnes d’une fumée noire et empoisonnée, il ne fallait pas s’attendre à ce que Poison Ivy soit une gentille fleur. Il avait fallu attendre qu’elle explose Terra, qu’elle se plonge dans de profondes et vastes forêts ancestrales, pour ressentir en elle le bonheur… Et pour finir par rencontrer les Alraunes.
Lily et Raune étaient pour elle des Déesses. On pouvait dire ce qu’on voulait sur le comportement fier et autoritaire de Pamela, sur les esclaves qu’elle ensorcelait avec ses spores, face aux filles
pures de la Nature, elle sentait en elle un élan de vénération et d’adulation telle qu’elle était comme une dévote face à son idole : incapable de la regarder trop longtemps dans les yeux sans sentir une vague d’humilité la saisir. Les expériences du Professeur Warren sur elle avaient transformé Pamela en une mutante. Elle n’était plus humaine, mais pas Alraune non plus ; elle était à mi-chemin. Supérieure aux humains, inférieure aux Alraunes. Elle avait donc mis plusieurs semaines à rechercher les Alraunes, se rendant dans les villages où elles étaient passées. Le passage d’une Alraune marquait les mentalités et les humeurs des humains. Les villageois qu’elle avait vu étaient tous dans un état festif et très libéré, avec des colliers de coquelicots, et des orgies continuelles. Elle était remontée le long des forêts, jusqu’à les retrouver…
*
Ça a été merveilleux…*
Plongée dans ses pensées, Pamela avançait le long d’une vaste et profonde forêt. C’était dans cette forêt que Lily et Raune lui avaient offert son cadeau… Le plus beau des cadeaux. Portant
un corset vert végétal, Pamela avançait, avec sa peau devenue verte. Pieds nus, elle avançait le long de l’herbe, ressentant, à chaque exhalaison, la pureté de cette forêt. Toute cette partie de la forêt était encore ravagée il y a une année, environ. Il n’en restait plus rien suite à un incendie. Elles avaient ressourcé la forêt, et c’était une tâche à laquelle Pamela les avait aidées… Elle était restée là plusieurs semaines, et elles avaient, bien entendu, fait très longuement l’amour. Lily et Raune avaient fini par lui dire que sa mouille pouvait être utilisée pour fertiliser une plante, car, si Ivy n’était pas une Alraune, elle en était très proche. Les deux Alraunes pouvaient donc réaliser des expériences sur son liquide de vie, afin qu’il fertilise une plante, et donne naissance, grâce au savoir-faire des Alraunes, à une Alraune.
Les Alraunes avaient une période d’incubation de plusieurs mois, mais elle était très variable. En apprenant qu’elle était susceptible d’avoir une fille, et, qui plus est, une fille Alraune, Pamela avait senti son cœur se fondre. Elle n’avait jamais eu de fille, et n’avait jamais pu en avoir, car, depuis sa transformation, elle était stérile. Sa mouille était incompatible avec le sperme humain. La mort dans l’âme, Pamela s’était donc faite à l’idée qu’elle n’aurait jamais d’enfants… Et là, les Alraunes lui offraient la possibilité incroyable et magnifique d’avoir une fille. Certes, ce ne serait pas un bébé, et c’était ce qu’Ivy avait voulu. Lily et Raune lui avaient expliqué qu’elles auraient pu tenter de faire pousser la plante dans son ventre, mais il y avait des risques d’incompatibilité, des risques que le bébé sorte mal formé, ou non viable. Sachant qu’elle ne supporterait pas une fausse couche, elle avait suivi la voie de la chrysalide.
Les deux Alraunes avaient utilisé sa mouille pour faire pousser une plante spéciale, et, quelques semaines après cette expérience, Pamela avait vu une chrysalide se former. C’était comme un énorme œuf, dans les profondeurs de la forêt. Un œuf qu’elle avait caressé, en sentant la vie pousser à l’intérieur. Sa fille sortirait viable et âgée, car, à l’intérieur, elle flottait dans un liquide amniotique qui accélérait énormément la formation de ses cellules. Elle revenait fréquemment, dans une forêt désormais vierge. Lily et Raune étaient parties ailleurs, et cette chrysalide était trop profonde dans la forêt pour que des humains viennent l’attaquer. Néanmoins, Ivy y revenait souvent, et, grâce à son esprit scientifique, elle savait quand le moment serait proche… Celui où Kyli briserait sa chrysalide.
Ce moment était enfin arrivé.
*
Par là…*
Elle fila entre plusieurs arbres, s’enfonçant dans une végétation dense et hostile, avec de multiples ronces, bien loin des sentiers. Elle avait reçu quelques instructions de la part des deux Alraunes. Kyli ne serait pas une humaine, mais bien une Alraune… Et il y aurait donc quelques différences avec les simples humains… En plus du fait qu’elle aurait grandi dans une chrysalide, avec un aperçu très déformé du monde extérieur. Autrement dit, il ne fallait pas croire que Pamela aurait droit à une Alraune toute faite. Il lui faudrait l’éduquer et la former. La jeune femme-plante continuait à avancer, filant entre les arbres, jusqu’à ce que plusieurs grosses feuilles s’écartent.
La chrysalide était là… Une forte chaleur émanait d’elle, et elle remuait sur place.
*
Ouf, je suis arrivée à temps !*
Pamela ne voulait surtout pas manquer la naissance de Kyli. La chrysalide remuait sur place, de plus en plus faible. Son enfant, son bébé… Il poussait à l’intérieur, et la chrysalide finit par se fissurer. Du liquide amniotique jaillit des pores, déformant davantage la plante, qui se flétrit totalement, et s’ouvrit. Le liquide se déversa sur le sol, et Pamela retint son souffle, en voyant une silhouette en sortir. Son corps était relié par des tentacules verdâtres, et Pamela écarquilla les yeux en la voyant… Les tentacules la relâchèrent, et la silhouette sortit de la chrysalide. Elles étaient dans une clairière entourée par des arbres, où le soleil tapait bien. La Nature s’appela à Kyli… Puis Ivy s’élança vers elle.
Elle ne le réalisa pas tout de suite, mais, en la tenant dans ses bras, Pamela pleurait. Son corset végétal avait disparu, et elle aussi était toute nue, décollant Kyli du sol, une main sur ses cheveux, l’autre sur son dos. Elle la soulevait du sol, et la tenant contre elle, en ne parvenant pas à retenir ses larmes de bonheur. Elle déposait des baisers sur le front de la femme, et la tenait contre elle, la serrant fort. Sa fille, sa fille…
SA FILLE ! Oh oui, sa belle et pure fille… Kyli, une magnifique Alraune, qui se pressait contre elle… Kyli, son ange, sa petite beauté ! Pamela soupirait longuement, débordant de plaisir, d’une joie ancestrale qu’elle n’avait jamais ressenti auparavant. La chrysalide avait été un succès tel, et cette dernière était lentement en train de disparaître, maintenant qu’elle avait accompli son office.
«
Maman... » soupira-t-elle.
Pamela la regarda en souriant, et l’embrassa brièvement.
«
Oui, ma puce, oui… C’est moi, ta Maman… Pamela Lilian Isley… Mais tu peux m’appeler Ivy, mon ange… Oh, ma belle petite plante, tu es tellement mignonne ! »
Sa main caressa ses cheveux, et elle sourit à nouveau.
«
Je suis ta Maman… Et tu t’appelles Kyli, mon amour… Tu es ma fille… Ma fille. »
Sa fille… C’était merveilleux ! Pamela s’en sentait toute émue, et l’embrassa sur le front.
«
Et je t’aime, Kyli… Est-ce que tu te sens bien, ma chérie ? Je vais m’occuper de toi… Maintenant, et jusqu’à ta mort, ma plante… »
La voix de Pamela était chargée en émotions.
Elle n’avait jamais été aussi émue de toute sa vie.
* :
Cf. RP « Passion florale »