Silke et Raven se faisaient mutuellement face, dans leur dernière danse. Les lames s’entrechoquaient, et les deux Amazones se livraient à un ultime combat. C’est ce moment que Vaerlh choisit pour venir, frappant la femme à la cuisse, la faisant hurler de douleur. Une blessure superficielle, mais qui agaça Silke, qui fronça instinctivement les sourcils, avant de regarder Vaelh. Tentant de profiter de son avantage, le démon sournois indiqua qu’il était temps de la tuer, et attrapa dans sa main du sable, la lui jetant à la figure.
« Argh ! Foutu traître, je savais que nous n’aurions pas dû te faire confiance ! »
Vaelh profita de ce moment pour se ruer vers elle, mais, même privée de vision, Raven, restait une Amazone, et, malgré sa blessure, évita les griffes tranchantes de l’Incube, et pivota sur place, cherchant à le frapper dans le dos... Mais fendilla le vide. L’Incube avait déjà bondi sur le côté, évitant l’épée, qui frappa l’air.
« Tu crois pouvoir me vaincre avec du sable, Vaelh ? Ridicule ! J’ai honte pour toi, Silke ! Obligée de te cacher derrière ce démon sournois aux dents longues... Tu fais honte à nos ancêtres ! »
Silke observait la scène sans intervenir, partagée entre plusieurs émotions. Rationnellement, elle savait que, avec l’aide de Vaelh, elle avait toutes les chances de tuer pour de bon Raven, mais... D’un autre côté, sa fierté, cette éternelle fierté, lui interdisait de s’abaisser à la tuer ainsi. Certes, Raven avait déployé sur elle toute une armée avant leur combat, mais ce n’était pas une raison. La fierté des Amazones... On leur avait tout pris, historiquement. Leur nation. Leur patrimoine. Leur fortune, leur richesse, leurs possessions, même leur liberté et leur vie, en les monnayant comme des esclaves et comme une simple valeur marchande... Mais on avait jamais retiré à une Amazone sa fierté. Jamais !
Vaelh continuait à se battre, avec un rythme différent que celui de Silke, mais Raven comprenait son style, et anticipa l’une de ses feintes. Plutôt que de le frapper avec son épée, elle envoya son coude, et ce dernier heurta le visage de Vaelh, le faisant reculer tout en lui faisant cracher du sang, le coup s’accompagnant d’un impressionnant coup de pied retourné dans la poitrine, l’envoyant se clouer au sol.
« Raven !
- Tu as fini de te cacher, Silke ? Tu es prête à en finir ?
- Je ne me cache pas... Viens, Raven. »
Et elle vint, en hurlant, tout comme Silke. Au milieu de la bataille, les deux ne firent plus qu’un, et ce combat aurait pu durer des heures, tant elles semblaient similaires. Deux hyènes, deux véritables furies. La lame de Silke repoussa celle de Raven sur la gauche,e t elle glissa dessus, venant lui donner un coup d’épaule, la déstabilisant, puis courut vers elle, et bondit en avant, rejoignant ses deux jambes en un seul point, frappant son adversaire au niveau des seins suite à ce saut périlleux et, en réalité, fort impressionnant. Après ce coup grâcieux, Silke tomba au sol, se redressa, et courut vers Raven, qui roula sur le sol, évitant son épée, puis se retourna à nouveau, et détendit son poing, frappant Silke au visage, lui faisant cracher un garrot de sang.
Raven se releva encore, en hurlant, et abattit sa lame dans un mouvement vertical puissant, du haut vers le bas, croisant encore le fer avec Silke, qui tint sa lame à deux mains, une main sur le manche, l’autre sur l’extrémité, se coupant les doigts. Raven releva son épée, et l’abattit encore rageusement, lui postillonnant à la figure. Elle repartit à nouveau, mais Silke profita de l’épée se relevant pour bondir en avant. Sa tête heurta violemment celle de Raven, laissant quelques traînées de sang. Raven tituba sur place, sonnée, et Silke, alors que des lignes de sang coulaient entre ses yeux, envoya son pied, et frappa violemment Raven à la figure.
« Argh ! »
La puissante Amazone finit à terre, et Silke la regarda, dressée, reprenant son souffle.
« Relève-toi... RELÈVE-TOI !
- Hnnnn... »
Elle se redressa lentement, en respirant lourdement, et essuya, du revers de sa manche, le sang qui dégoulinait de ses lèvres, avant de cracher une dent ébréchée.
« C’est très bien, Silke...
- Je te l’ai dit, nous en finissons maintenant, Raven.
- Oh ça oui ! »
Raven chargea encore, attaquant cette fois-ci par le bas, et remonta son épée, contraignant Silke à s’écarter, bondissant en arrière, puis croisa à nouveau le fer, Raven la poussant avec sa charge, et tournoya sur place, tout comme Silke. Les deux lames se heurtèrent, et les femmes s’élancèrent encore, virevoltant comme des toupies, croisant à chaque fois le fer. Elles se retrouvèrent finalement face à face, et attaquèrent, Raven en levant son épée vers le haut, Silke la tenant vers le bas. Les deux lames se rapprochèrent, il y eut un ultime choc, et l’épée de Raven « sauta », glissant entre les mains de la femme pendant que Silke avait avancé sa jambe, la déstabilisant.
Raven trébucha, et Silke l’évita, mit un pied en avant, s’en servant comme pivot, tournoya ensuite... Et frappa.
Le sang fusa, la lame se mit à rougeoyer.
Raven était vaincue, mais nul cri d’allégresse ne s’échappa des lèvres de Silke, qui mit le genou à terre, et saisit le corps de Raven contre ses bras, apposant sa tête contre la sienne.
« Ma... Ma sœur... »
Silke ne dit rien, mais sentit les larmes couler le long de ses yeux. La main de Raven, tremblotante, monta fébrilement, et caressa sa joue.
« Toi... Tu pleures ? Hmmm... Je... Je dois vraiment être sur le point de mourir... »
Raven soupira encore, fermant les yeux pendant ce qui sembla être une éternité.
« Notre fille... Héla... Tu crois qu’elle aurait été heureuse ?
- Pourquoi ne l’aurait-elle pas été ?
- Parce que... Nous ne l’avons jamais été, Silke... »
Silke ferma les yeux, et crispa ses mains contre la chevelure de Raven. Le sang ruisselait le long de son dos, et l’Amazone sentait le liquide carmin se poser sur ses genoux.
« Elle m’aime toujours, tu crois ?
- Notre fille t’aimera toujours... »
Silke se pencha vers elle, et l’embrassa tendrement. Raven soupira encore, sa tête basculant en arrière.
« Tu... Méfie-toi, Silke... »
Et Raven s’éteignit ensuite. Silke observa son cadavre, la tête baissée, pendant plusieurs longues secondes, et finit par murmurer quelques mots contre elle, inaudibles, tout en déposant un tendre baiser sur son front, puis la relâcha. Raven était morte, Beaulierre était perdue, et un grand vide s’était instauré dans son cœur. Silke soupira alors, et redressa la tête, puis se releva lentement. Elle tournait le dos à Vaelh, le poing serré, et tourna finalement la tête vers lui, restant de côté, ne permettant que de voir ses lèvres, qui se découpaient après sa longue chevelure.
« Iranaël va ouvrir un Portail dans l’église pour nous permettre de fuir. À vous de voir ce que vous voulez faire, Vaelh. Nous suivre... Ou rester ici. Le choix vous appartient. »