Cela lui fit l'effet d'un seau d'eau glacé jeté sur la peau brûlante de son dos. Il se figea si rudement que ses dents grincèrent et ses muscles se tendirent jusqu'à flirter avec leur point de rupture. Intimement lié à la trame de magie rose qu'il avait tissé, Vaelh vécu l'intrusion massive des forces de Raven comme si une lame froide lui plongeait dans la chair. Des dizaines, des centaines de femmes toutes plus déterminées les unes que les autres fondaient vers le château, piétinant les fils invisible de la trame de l'Incube qui s’étendaient doucement et subtilement sans la moindre considération. En plus, vu la hargne et la rancune qui les animaient déjà toutes, la magie rose du mâle ne pouvait que les rendre plus agressive.
Mais, malgré le concert de cors, de cloche d'alarme, de piétinement et de cris de guerre, le bruit que le Démon trouva le plus magnifique de tous fut ce grincement caractéristique qu'émis la grande porte principale de la ville fortifiée lorsque les infiltrées de Raven l'ouvrirent, dont la note boisée et grave sonna comme un glas funeste. Un son qui collait parfaitement au contexte, pour être honnête.
Après s'être accoutumé à cette sensation d'intrusion, Vaelh avait décidé de prendre de la hauteur pour se rendre compte de l'ampleur de l'assaut. Il eut bien fait : quelques minutes plus tard, les rues voyaient défiler dans tous les sens escouades de soldats et groupes d'attaquants, dont la fréquence de passage et le nombre l'aurait balayé, lui qui était seul.
De son point de vue en hauteur, le Démon s'imprégna de la scène : un tableau terrible à la lumière rouge et vorace des feux déclenchés dans la ville, aux notes brillantes et éphémère de heaume métalliques qui se déplaçaient, d'armes qui fendaient l'air en quête de chair à fendre et d'os à rompre. Rage, peur, mort, gloire et plaisir venaient sublimer le tout.
-Magnifique !
Et en même temps qu'il grogna son appréciation, son œil de leader vit que Beaulierre était déjà perdue : trop d'assaillantes étaient déjà entrée dans la ville, trop de cibles différentes s'offraient aux défenseurs qui ne scindaient pas leur escouades en petits groupes de craintes de tomber dans des pièges. Trop de feu et d'actes de sabotages avaient eu lieu. Sans mentionner d'éventuels agents déjà infiltrés.
La ville était tombée à l'instant même ou Raven avait décidé de la faire sienne.
Même si cette chienne n'était qu'une sale humaine, le Démon fut contraint de reconnaître que ses méthodes étaient superbes. En fait, si c'était lui qui avait été chargé de prendre une place forte, il aurait plus ou moins agis de la même manière. Après tout, les sièges dans lesquels ont se contentait de placer un périmètre infranchissable autour d'une forteresse n'étaient bon que pour de misérables crétins qui n'appréhendaient pas les vertus de la vitesse, la précision et la ruse.
Oui, Raven avait remporté cette bataille. Mais Vaelh n'en fut pas affecté. Son allégeance n'allait pas à Beaulierre, et que cette ville tombe l’indifférait. Cela lui offrait néanmoins un beau spectacle auquel l'envie de participer le tiraillait. Mais à quoi bon ? Trop d'humains courraient dans tous les sens, plongé dans une panique et une désorganisation dont il n'était même pas la cause ! Descendre tuer des mortels dans un tel contexte ça aurait comme... Se servir de la cuillère de quelqu'un d'autre pour manger dans son assiette. Dégouttant.
Cependant, le mâle avait encore quelques tours dans son sac.
*
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Pendant ce temps, la corde se resserrait autour du cou de l'Amazone. La présence de tout ces adversaire autour d'elle et la dernière réplique de son amante d'une nuit posaient l'ultimatum suivant : rends toi sans condition et rejoint nous. Ou alors meurs ici comme de la vermine.
Autour d'elle, le cercle que formait le groupe de femme se rapprochait doucement. Silke n'avait pas à faire à des combattants débiles qui la sous estimait, ni n'était trop occupé à la regarder. Non, cette fois, la beauté de Silke ne serait pas un atout sur lequel elle pourrait tant s'appuyer. Surclassée en nombre et en arme, elle devait se rendre à l'évidence : elle était cuite. L'Amazone ne pouvait que se soumettre, être conduite devant Raven, être à sa merci et finir jugée par sa plus grande rivale. Et ça n'était pas la peine de se leurrer : Raven ne ferait pas l'erreur de laisser une nouvelle chance à Silke. Sa sentence serait la mort. Une mort rapide, sans doute, c'était déjà ça de gagné.
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le Démon s'était mis en quête de la rouquine sans perdre plus de temps. Il l'avait cherché de ses yeux, espérant voir se détacher d'une escarmouche un point rouge feu caractéristique, en vain. Il l'avait cherché là où le combat faisait le plus rage, veillant à ne jamais se faire engager, mais sans succès. Il avait fini par la chercher à l'odeur quand la frustration l'avait gagné, mais c'était peine perdu : sous cette forme, son odorat n'était pas si développé que ça, et vu la puanteur qui embaumait déjà les rues...
En se déplaçant de toits en toits, il réfléchissait à un moyen de la retrouver. Il passa près des diverses zones d'affrontement et remarqua de temps à autres des ruelles anormalement désertes. En forçant sur ses sens, Vaelh y repérait des petits nombres d'embusqués près à affaiblir et démoraliser les renforts qui y passait. Malin. Mais mieux valait ne pas y passer.
Bien qu'il n'était en rien prudent, il eut quand même conscience qu'il valait mieux qu'il se trouve des armes au cas où une tuile lui arriverait. Il opta pour une épée de bonne qualité trouvée sur le corps d'un chef de troupe et, vicieux, un fouet déniché dans l'établissement d'un palefrenier en proie aux flammes. L'outil semblait basique et assez peu dangereux, mais dans les mains d'une créature Démente comme Vaelh, un fouet avait tôt fait de se transformer en une arme abominable, qui en plus viendrait taquiner un adversaire qui luttait contre l'oppression qu'un tel outil pouvait représenter.
Vint un moment où, de plus en plus frustré, le Démon faillit manquer un détail crucial. De la lumière s'échappait de sous une petite porte perdue dans une rue déserte. Et par déserte, il fallait entendre que Vaelh n'y voyait même pas le moindre embusqué. Il s'arrêta net, dérapant sur les tuiles avant de se hâter de revenir en arrière. Il réfléchit à tout allure : d'abord, il ne pouvait pas y avoir d'habitants cachés ici. Ils n'auraient jamais commis l'erreur d'allumer un feu et auraient profité de l'obscurité pour mieux se dissimuler. Peu de chance que ce soit un groupe de défenseurs ou d'attaquant en train de soigner un blessé. Là aussi, ils auraient opté pour une source de lumière moins vive, peut être une bougie.
Le groupe de personne là dedans devait avoir besoin d'y voir comme il faut, pourquoi pas pour examiner un plan de la ville afin de faire un topo sur la situation pour mieux savoir où attaquer ensuite ?
Oui, un groupe du commandement des attaquants !
Le Démon rechignait certes à aller s'amuser dans les rangs des fantassins quelconques, mais les officiers... Il y avait même peut être des champions avec eux. Qui portaient sans doutes de belles pièces d'équipements qui viendraient gonfler la fortune terrestre du mâle.
Il décida de s'approcher de la porte, et de tendre l'oreille. A sa grande surprise, l'une des voix mentionna le nom de Silke. Ravi de ce tour du destin, il se hissa en silence jusqu'à l'une des fenêtres de la bâtisse pour jeter un coup d’œil entre deux volets.
Il fallut qu'il se retienne d'éclater de rire quand il vit dans quelle situation s'était fourrée l'Amazone. Bien fait pour elle ! En plus, cela allait même profiter au Démon. Il avait initiallement prévu de la retrouver pour lui faire savoir qu'il serait impossible de gagner sans invoquer les siens, mas à présent... Il allait quand même invoquer ses troupes, sans la moindre retenue, et resterait là à surveiller le groupe. Avec un peu de chance, le violent retournement de situation les feraient s'enfuir avec Silke sous le bras pour la ramener à Raven. Cela éviterait à Vaelh d'avoir à la chercher pour lui faire du mal.
Décidé, Vaelh revint au centre de la rue. D'une voix claire, il entonna un chant bref qui fit se rompre sa toile de magie, laquelle libéra de ses effets quiconque se trouva dans la zone. Ainsi, tous les humains eurent l'esprit claire lorsque la magie liée à la destruction de la trame vint se convertir dans le corps de chacune des femmes que Vaelh avait ensorcelé. Le temps sembla se figer, et les sons ne voyageaient plus que comme à travers de l'eau. Puis les âmes des malheureuses furent tout simplement effacée. Pas de paradis ni d'enfer pour elles, rien que le néant. Leur chair se changea en un amalgame de métaux précieux, avant de s'étirer dans un grincement abominable pour faire apparaître dans la ville un total de six portes chatoyantes, hautes mais peu larges. Des ouvrages splendides, dignes des plus grand maîtres inhumains. Seulement... Ces portails dégageaient quelque chose de foncièrement immonde lorsqu'on posait le regard dessus.
Ce fut pire lorsque des vortex mauves s'y ouvrirent pour vomir les troupes et les bêtes que Vaelh qualifiait de « Superbes ».
Les premiers hurlements résonnèrent dans le noir, souligné par un rire enjoué qui s'éloignait.