Key to the divine > Spider-Woman

Le hurlement du monstre résonna après que les sirènes du véhicule de police se soient tues, comme pour fêter la victoire de la créature à l'aspect pierreux sur cette petite chose noire et blanche qui était venue perturber son avancée folle à travers le quartier résidentiel de Gold Hill, dans les hauteurs de Tekhos. Un des officiers présents dans la carcasse fumante gisant sur le toit tenta bien de s'extirper péniblement après un moment, mais le monstre fut plus rapide. Se saisissant de la jeune femme par la tête qu'il enserrait de ses impressionnants bras, il la souleva au niveau de son propre visage... Près de trois mètres plus haut. Et il poussa un hurlement puissant avant d'expédier la malheureuse contre l'une des grilles qui ceignant une propriété toute proche de sa position. Le corps sembla s'y encastrer, se désarticulant à l'impact contre le fer forgé.
Un nouvel hurlement plus tard, le golem rocheux se remettait en marche vers le haut de la rue, en direction de ce qui semblait être la maison de Carlotta Emerald. Et pour cause, il n'y avait plus à présent que son pied-à-terre, au bout de cette allée.

Le monstre était apparu réellement comme par magie dans une des rues adjacentes une dizaine de minutes auparavant, hurlant avant d'user de son épée en pierre sur tout ce qui était à portée. Des voitures et quelques motos principalement, ce qui avait alerté les riverains qui avaient contacté les services de police. Seulement, ils étaient à Gold Hill, le quartier le moins accessible de tout Tekhos pour les gens qui n'y habitaient pas. Gold n'avait en tout et pour tout qu'une petite patrouille peu armée qui était à présent éparpillée sur la chaussée et les renforts plus importants tarderaient à avoir les autorisations d'accès à ce quartier ultra-sécurisé de l'extérieur.
Pourtant, le golem n'avait pas semblé agir au hasard et ce à aucun moment. En effet, lorsqu'il avait entamé sa marche, cela avait été bille en tête, comme si son objectif avait été précisément défini dans son esprit. L'intervention des gardiens de la paix l'avait à peine ralentit et il était à parier qu'il faudrait du gros matériel pour le neutraliser.

Carlotta Emerald, de son côté, était inquiète. Ameutée à ses fenêtres par le raffut, la fière et tyrannique patronne d'une puissante corporation de robotique qu'elle était avait perdu de sa superbe en voyant le saccage de la bête et son entêtement à remonter vers sa villa. Fuir ? Elle y avait pensé, mais sa demeure ne comptait qu'un point d'accès. Précisément celui que le golem remontait inexorablement en défonçant les murets qui déterminaient la petite allée dans laquelle il progressait rapidement. Filer par l'arrière ? Impossible, la maison était au bord de la falaise qui dominait la zone industrielle de Tekhos où la société de Carlotta avait d'ailleurs son siège social.
Et voilà que la bête, exhalant un souffle légèrement verdâtre, venait d'arracher les grilles qu'il projeta à travers la superbe baie vitrée de la maison, qui explosa tout à côté de la belle femme d'affaire en la blessant légèrement.
La douleur, Emerald ne la ressentait pas. Dans son esprit, la peur commençait à dominer, ses yeux plongés dans les orbites artificiels de celui qui remontait vers elle de son pas lourd.

Il serait bientôt à la porte, pour elle. Et la panique couperait toute retraite à la plantureuse tekhane. Dans sa tête, le compte à rebours vers son destin était enclenché et rien ne semblait en mesure de le désamorcer.

Son costume ressemblait à un pyjama. Ou à un justaucorps pour aller faire de la gym’.

C’était la remarque qu’elle s’était faite ce matin en s’observant devant son miroir tridimensionnel. Certes, le costume mettait plutôt bien ses formes en valeur, mais il ressemblait vraiment à un pyjama. Il n’y avait rien de symbolique derrière ce costume. Elle avait eu besoin d’un costume, de quelque chose pour dissimuler son apparence, et éviter que Carol n’apprenne que Jessica était dotée de superpouvoirs, et risquait les soirs sa vie. Elle avait trouvé le premier costume complet qu’elle avait trouvé dans le grenier de la maison, et était tombée sur ça. Elle était sûre qu’il avait appartenu à Kelly, et elle ne voulait pas savoir dans quelles circonstances cette dernière avait décidé de le confectionner. Parfois, la curiosité était une très mauvaise chose.

Jessica volait dans le ciel, une chose qu’elle adorait faire. Pouvoir voler, c’était vraiment cool. Maintenant, elle passait presque plus de temps à se rhabiller en approchant de l’université qu’à y aller. En volant, elle évitait tous les embouteillages, et la vue était  phénoménale. Tekhos Metropolis était vraiment une ville immense, majestueuse et terrible. On disait que, sur Terra, Nexus était la plus grande des villes, mais Jessica doutait que cette analyse soit toujours vraie, maintenant. Les gratte-ciel de Tekhos Metropolis étaient extrêmement impressionnants, tout comme la ville, au sens général du terme. Une massive construction. Elle s’accordait toujours au moins une heure par jour pour pouvoir voler ici et là. La ville était loin de se résumer aux Caligulas, et aux autres cités masculines, des enclaves sinistres et mal entretenues au milieu des tours d’acier et de verre.

Elle était en train de voler du côté de Financial District quand elle entendit des vrombissements. Entre deux gratte-ciel, elle s’arrêta en voyant passer devant elle plusieurs hélicoptères de combat de police. Ils filèrent devant elle, et elle cligna des yeux, surprise, avant d’entendre une série de gyrophares. De nombreuses voitures de police roulaient à toute allure, et Jessica comprit qu’elle allait devoir intervenir. Elle s’élança à la suite des hélicoptères, et n’eut pas trop de mal à voir où il y avait des problèmes.

Gold Hill. Le ghetto des riches, en parfaite opposition avec les Caligulas. Gold Hill était plantée sur une colline jouxtant la ville, avec d’énormes villas ultrasécurisés, la sécurité du quartier étant assurée par une force paramilitaire proche de l’armée. Des volutes de fumée s’échappaient ici et là, et elle vola rapidement, dépassant sans hésitation les hélicoptères. Les rues étaient jonchées de débris, de carcasses de voiture renversées sur le sol, de corps démantibulés. Des cadavres des Tekhanes ayant essayé de repousser une espèce de monstre.

Jessica ne tarda pas à voir une silhouette massive qui remontait le long d’un immense jardin. C’était une baraque énorme avec plusieurs garages, de grands balcons, des colonnes en marbre. Un colosse semblant fait de roches s’avançait le long du jardin, faisant trembler le sol.

« Appelez des renforts ! s’exclamait une Tekhane blessée dans la radio de sa voiture de police, le genou coincé sous cette dernière. On ne peut rien faire contre lui ! »

Les hélicoptères approchaient rapidement, mais Jessica était là avant eux. Elle se rapprocha du monstre, qui ne la voyait pas, étant dans son dos. Elle fendait l’air, accumulant de la vitesse, et arma son pied... Pour le frapper à l’arrière du crâne.

« Prends ça !! »

Elle sentit une vive douleur remonter le long de la jambe, alors que le monstre n’avait pas tremblé. Jessica fut déstabilisée, et heurta le sol, roulant sur l’herbe, poussant un petit cri apeuré avant que son dos ne heurte la statue d’une fontaine, juste devant le perron. De l’eau fraîche lui tomba sur le visage.

*Aïe, cet enfoiré est plus costaud que prévu !*

Contre de vulgaires voleurs, ses coups de pied étaient très efficaces. Mais elle avait l’impression d’avoir frappé un bloc de béton. Elle vit la gueule du monstre flamboyer, et eut juste le temps de s’écarter, évitant de justesse une sorte de boule verdâtre qui explosa contre la fontaine, la pulvérisant. La déflagration souffla Jessica Drew, qui alla heurter la portière d’une superbe voiture. Secouant la tête, Jessica se releva, voyant que le monstre continuait à s’avancer vers la ville. Elle concentra ses poings, et envoya des décharges magiques à son attention.

Un insecte avait semblé le piquer, mais celà n'avait pas vraiment dérangé le colosse. La vague sensation du choc le fit s'arrêter pour pousser une sorte de petite interrogation gutturale qui sembla faite du bruit de pierres frottant l'une contre l'autre sur un fond de crépitement de flammes. Le golem fit jouer son buste en direction de la jeune femme vêtue de rouge et d'or qui venait de lamentablement s'écraser contre le point d'eau et fit ce pourquoi il avait été en partie programmé : un étalage de force pur et simple. Sa gueule sembla luire avant que dans un bruit de crachat épais il n'éructe un projectile crépitant et verdâtre. Une sorte de glaviot démolisseur qui emporta la fontaine à l'impact.
Le colosse ne s'acharna pas plus et reprit sa route, considérant que la gêne inattendue était à préésent hors de sa route. Ses lourds pas reprirent leur marche vers l'imposant demeure de Carlotta Emerald, dont il parvint à démolir les colonnes du perron dans un cri rageur avant qu'il ne soit à nouveau dérangé. Un nouveau nuisible volant, différent de celui qu'il pensait avoir pulvérisé, lui crachait des dards de métal à répétition aprèss qu'une voix microphonée eut donné des sommations d'usage un peu à côté de la plaque. Les hélicos étaient arrivés sur les lieux et faisaient parler la mitraille, ce qui égratignait l'épaisse couche rocheuse du golem sans réellement l'entamer.
Agacé, la créature se détourna du perron effondré et prit une très profonde inspiration tandis qu'une lueur verdâtre sembla remonter de ses pieds à son buste vers sa gorge. Il ouvrit alors la gueule et ce ne fut pas un projectile qu'il lança, mais un une sorte de souffle compact et rectiligne qui évoquait tant l'arme des dragons qu'un canon à plasma. Et il fit mouche ! Si l'un des hélicos parvint à se déporter de justesse, ce fut pour laisser le second encaisser de plein fouet l'attaque. L'engin explosa en vol, les morceaux restants retombant un peu partout sur Gold Hill.
Comme à chaque fois après une "victoire", le golem se détourna après un hurlement pour revenir à son but premier. De ses bras puissants, la chose commença à abattre les murs de la demeure de Carlotta pour pouvoir se frayer un chemin vers elle.

Si Jessica avait tiré ses rayons dans l'entrefait, force lui aurait été de constater que jusque là, elle n'avait pas été très inspirée. Le corps pierreux de la créature n'avait pas semblé vacillé plus que sous le feu tekhan et il ne s'était même pas donné la peine de s'intéresser de nouveau à elle jusqu'à une décharge bien précise. Une qui le fit hurler encore, mais clairement de douleur. Le cri évoqua la craie crissant sur le tableau noir et résonna un moment avant que le golem ne se retourne vivement, massacrant le sol à grands coups d'épée. La maison en trembla tandis qu'il fouillait le jardin de cette dernière, l'oeil fou.
La raison de sa douleur ? Elle était visible entre deux gestes, bien qu'il fallait regarder avec attention. Sous pectoral droit, une des zones verdâtres qui circulait sous la gangue de pierre ne luisait non plus de la couleur de la Volonté* mais de celle de la Colère. Une plaie, un indice.

Qu'il allait falloir exploiter au plus houleux du danger puisque le monstre fou de douleur chargeait déjà la forme en justaucorps écarlate et démontrait que sa puissance ne résidait pas uniquement dans ses bras mais aussi dans ses jambes. Son avancée fut brutale et la puissance du coup d'épée qu'il abattit sur Jessica encore plus. Le choc allait laisser une profonde marque sur le sol, sans compter qu'il répandrait une zone d'impact.

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(*) Je suis sûr que tu connais la référence o/

« ...Arrêtez immédiatement vos actions, et rendez-vous ! Nous sommes prêts à ouvrir le feu ! »

Les sommations d’usage, larguées depuis les deux hélicoptères de combat, ne semblèrent visiblement pas préoccuper le monstre, et les hélicoptères firent feu. Les balles ricochèrent contre la pierre, et le monstre les attaqua. L’un des hélicoptères fut touché par une sorte de projectile verdâtre, l’autre hélicoptère ayant réussi à éviter le projectile de justesse. Il n’y eut même pas d’hurlement. L’hélicoptère explosa instantanément, carbonisant les pilotes. Ce n’était pas un hélicoptère transportant des troupes, mais un hélicoptère d’assaut. Il n’y avait donc « que » deux pertes à déplorer... Mais ça faisait deux pertes.

« Enfoiré... grogna le pilote.
 -  Nos balles ne lui font rien ! » indiqua le copilote.

L’hélicoptère n’avait malheureusement pas de missiles. C’était une conséquence de la politique et du besoin que les Sénatrices avaient besoin de séduire l’électorat. Quand les Tekhanes avaient appris qu’on doterait la police d’hélicoptères militaires d’assaut, des voix s’étaient inquiétés d’une dérive policière autoritariste. On avait ainsi retiré des hélicoptères les missiles. C’était dommage : quelques missiles auraient été plus efficaces contre ce monstre que leurs puissantes mitrailleuses, qui semblaient, en l’état, aussi efficaces qu’un cure-dents. La pilote contacta le Central, demandant l’envoi de blindés et de troupes d’élite spéciales. Malheureusement, du fait de l’éloignement géographique entre les garages et Gold Hill, il faudrait aux blindés une dizaine de minutes pour arriver.

« Merde, vous croyez qu’on peut attendre dix minutes ou quoi ? Dites-leur de remuer leurs culs ! » s’énervait le pilote.

Elle pouvait encore faire feu, mais ça reviendrait juste à énerver le monstre. Le pilote avait réussi à éviter son attaque, plus par miracle que par autre chose. Les deux femmes virent alors le monstre pousser un hurlement de douleur, et notèrent alors, sur leur gauche, contre le flanc d’une voiture classique, une femme qu’elles n’avaient pas vu. Une nana habillée dans un justaucorps de gymnase rouge.

« C’est qui, celle-là ?
 -  Elle ne porte pas l’uniforme règlementaire... »

Jessica avait compris que la force physique serait inutile. Elle était forte, mais c’était comme s’énerver contre un bloc de béton. Elle avait donc opté pour les autres cordes à son arc, en lançant ses décharges magiques. Elles étaient comme des espèces de bombes provoquant des explosions élémentaires magiques de deux éléments : le Feu et la Foudre. Avec un peu d’entraînement, elle se disait qu’elle arriverait sûrement à mieux contrôler ces bombes pour former des attaques élémentaires différentes. La magie était un domaine qu’elle ne connaissait pas trop, étant après tout une Tekhane, et, même si Internet était une bonne manne de savoir, c’était insuffisant. Elle avait ainsi appris que le Feu et la Foudre étaient des éléments magiques différents, car ils ne s’annulaient pas entre eux, ni ne se repoussaient. Elle aurait toutefois préféré obtenir des éléments magiques complémentaires, comme l’Eau et la Foudre, ou le Feu et l’Air. Mais, après tout, on ne pouvait pas toujours avoir ce qu’on voulait.

Ses premiers tirs avaient été sans effet sur le monstre de pierre. Des lueurs verdâtres s’échappaient ici et là de son corps, et elle avait donc décidé de frapper ces espèces d’excroissance verdâtre, se disant que la roche devait y être moins résistante. Grand bien lui en prit. Elle atteignit le pectoral droit du monstre, près du creux de l’épaule, et la lueur verte se mit à luire de manière plus intense.

« ...Ne restez pas là, Madame, vous êtes en danger ! tonna la voix du pilote de l’hélicoptère. Nous contrôlons la situation ! »

Jessica ne leva même pas la tête. L’un de leurs hélicoptères venaient d’exploser en plein vol. Ces filles ne devaient pas contrôler grand-chose. Agacé, le monstre courut vers elle, faisant trembler le sol, et leva bien haut son épée, avant de l’abattre.

*Ho-ho !*

Jessica s’envola sur le côté, et le bout de la lame rentra en collision avec le moteur de la voiture. Le capot fut embouti, et la lame atteignit le moteur, perçant le réservoir d’essence. Il y eut une belle explosion, qui renforça l’onde d’impact de l’armure. Jessica poussa un hurlement paniqué en perdant le contrôle de son corps, et fila à l’intérieur de la maison, passant à travers une fenêtre. Elle rebondit sur une table, la pulvérisant, et termina sa course contre un magnifique piano à queue nexusien, le pulvérisant. Le piano démantibulé s’écroula sur elle. Étant surtout sonnée, Jessica mit quelques secondes avant de se relever.

*Aïe, mon pauvre dos...*

Elle avait défoncé une belle vitre, et son costume était déchiré à quelques endroits. Heureusement, elle avait d’autres modèles dans son armoire.

L'explosion de la voiture n'avait pas inquiété le colosse, mais la déflagration lui avait fait perdre ses repères dans l'espace et le bruit de tonnerre qui avait accompagné le choc l'avait comme sonné. Car le golem avait été conçu avec une excellente audition, pour traquer sa cible rien qu'à l'oreille. L'idée en soi n'avait pas été mauvaise, mais constituait une faille sévère dans une situation de combat. Une détonation aussi violente auditivement encaissée de plein fouet paralysa le golem qui, relevé après l'explosion, chercha son équilibre sans grande assurance. Tandis que le sifflement vrillait encore ce qui lui faisait office de tympan, la créature pierreuse fut une nouvelle fois sous le feu tekhan.
Les pilotes de l'hélico restant avaient judicieusement décidé d'ouvrir le feu sur la cible bien visible et dégagée que composait le golem et bien que leurs tirs n'avaient toujours pas de réels effets, ils allaient s'avérer un peu plus tard d'une utilité plus que certaine. Pour l'heure, les balles ricochaient le plus souvent sur la pierre dans de petits tintements métalliques qui produisaient de petites étincelles sur la masse de moins en moins chancelante du Golem.
Il se reprenait enfin et serait très bientôt de nouveau pleinement opérationnel.

~

"Elle est sexy" fut la première chose que pensa Carlotta quand elle posa les yeux sur la jeune femme qui venait de pulvériser ce qui restait de sa baie vitrée. De fait. Le costume de Jessica la mettait naturellement en valeur, mais les déchirures éparses qui dévoilaient le bas de l'un de ses seins, le haut de ses fesses et un peu de ses bras et de ses jambes avaient quelque chose de furieusement érotique. Toutefois, miss Emerald avait d'autres impératifs sur lesquels se pencher. D'un regard affolé, elle scruta l'extérieur et vit que le golem s'était reprit et cherchait pour le moment à abattre le dernier hélicoptère grâce à ses projectiles explosifs. Par bonheur, le pilote se montrait jusque là assez habile pour esquiver les salves.
La chef d'entreprise se précipita vers l'inconnue, l'aidant à se relever de ses mains tremblantes. Les coulures noirâtres de son mascara témoignaient des pleurs que Carlotta avait essuyé.

- Vous devez m'aider, vous entendez ? Vous devez m'aider ! Je suis Carlotta Emerald et vous devez m'ai-

La destruction de l'hélicoptère la coupa et elle ne put réprimer une plainte apeurée tandis qu'elle se collait à Jessica, la tête contre son épaule. Carlotta tremblait de tous ses membres, ses jambes manquant à tout instant de se dérober sous elle. Penser à la fuite ? Emerald ne serait qu'un poids mort, très clairement. Elle était terrorisée et incapable de se mouvoir et déjà le golem remontait vers la maison en fouettant l'air de son arme, qu'il balança d'ailleurs à travers le bâtiment.
Et c'est alors qu'il se rapprochait inexorablement que s'exposèrent à Jessica le résultat des tirs de Police. Ils n'avaient pas blessé le golem comme elle l'avait fait un peu auparavant, mais avaient entamé la couche de pierre, agrandissant ainsi les espaces entre les agencements rocheux qui couraient sur la masse verte qui circulait sous elle.

En somme, la Police tekhane avait offert au dernier rempart de Carlotta Emerald une chance, minime toutefois, de renverser la vapeur. Mieux valait qu'elle se bouge, car déjà les poings se levaient, prêts à frapper.

« Mayday, Mayday, appareil touché ! Je répète : appareil touché, mayday ! »

La demande d’aide mourut dans un crachotement, et les policières, silencieuses, serrèrent les dents. Le long de l’autoroute urbaine tekhane, plusieurs véhicules de police filaient à toute allure, leurs sirènes hurlant à vous en arracher les oreilles. Les autres véhicules s’écartaient prudemment devant tout ce convoi. De lourds jeeps blindés hérités des bunkers militaires s’avançaient rapidement, accompagnés par des CPCF, les fameux Chars Policiers Civils de Frappe. Ces puissants véhicules disposaient de tourelles de combat particulièrement efficaces, utilisent des charges lasers explosives, une tourelle sur le côté gauche du véhicule permettant d’orienter précisément le tir. Gold Hill était un endroit qui faisait l’objet d’une attention particulière à l’égard de la municipalité, et même de l’État tekhan. Les hauts revenus vivaient ici, donnant lieu à une manne de revenus très importante pour les collectivités publiques. C’était d’ailleurs pour ça qu’une ordonnance sénatoriale avait autorisé la constitution d’une force de sécurité parapolicière à Gold Hill.

Avec la chute du dernier hélicoptère, il s’écoulerait toutefois un certain laps de temps avant que les véritables renforts n’arrivent. Devant la propriété, les autres patrouilles de sécurité n’avaient que de vulgaires pistolets contre le golem, et préféraient secourir les blessés, évacuant les gravats. Il n’y avait pas d’héroïnes. Il ne s’agissait que d’agentes privées, qui touchaient un salaire, généralement des anciennes militaires, qui avaient déjà suffisamment donné, à leur goût, pour la patrie.

Jessica se relevait lentement des décombres, quand quelqu’un la saisit. Sur le coup, la seule chose qu’elle vit fut une énorme paire de seins, une poitrine qui ferait passer la sienne, honorable, pour de vulgaires planchettes. Elle se présenta comme s’appelant Carlotta Emerald... Sur le coup, ce nom disait vaguement quelque chose à Jessica. Terrorisée, la belle rousse suppliait Jessica de l’aider.

« Je... »

Elle n’eut pas le temps de terminer qu’elle vit quelque chose de gros foncer droit sur elles.

« Attention ! »

Le golem avait balancé sa longue épée droit vers elles. Jessica empoigna la femme, et s’envola sur sa gauche. L’épée les loupa, heurtant le mur, s’enfonçant dedans comme dans du beurre, tandis que Jessica, s’étant lancée de manière précipitée, tomba dans le couloir, sa tête s’enfouissant entre les volumineux seins de la femme. Elle se redressa ensuite.

« Écoutez-moi ! intima-t-elle, tandis que toute la maison tremblait. Trouvez un endroit où vous réfugier, je vais m’occuper de ce gros tas ! »

Est-ce qu’elle l’entendait suffisamment ? Miss Emerald avait l’air complètement terrorisé, mais Jessica n’avait pas le temps de jouer la psychologue. Elle retourna dans la pièce, et vit que le monstre s’avançait. Ses lueurs verdâtres étaient encore plus grosses, signe qu’il n’était pas aussi invincible que ça. Jessica concentra à nouveau sa magie, et visa son torse, là où les plaies vertes étaient abondantes, et tira, envoyant une nouvelle décharge magique en joignant ses deux mains.

*Prends ça, salopard !*

Carlotta était, en temps normal, une femme pleine de bon sens et dotée d'un caractère qui faisait d'elle une superbe peau de vache. Sa plastique avantageuse et son charmant minois faisaient des ravages et la belle avait toujours su en jouer pour obtenir ce qu'elle voulait, menant son ascencion sociale d'une main de maître qui n'hésitait nullement à écraser tant ses adversaires en affaires que ses collaborateurs à ses yeux les moins compétents. Une chienne brûlante mais toujours prête à mordre, voilà ce qui résumait la redoutable Carlotta Emerald. Ceci étant, elle n'avait jamais eu jusque là qu'à composer qu'avec des problèmes à son échelle : OPA agressives, affrontements juridiques et autres conquêtes de marché la posaient dans son domaine en impitoyable guerrière.
Le golem ne faisait pas partie des choses très concrètes qui parsemaient sa vie. Un robot agressif, Emerald aurait put gérer émotionnellement. Même une équipe de tueurs quelconques. Mais une créature sortie de ces documentaires filmés en dehors de Tekhos, c'était tout simplement inconcevable pour elle. De plus, il n'y avait aucune raison que cette...chose...lui en veuille à elle. Jamais elle n'avait frayé, de près comme de loin, avec la magie. Jamais. Alors pourquoi ?

La tête écrasée dans les seins généreux qui manquaient toujours de s'extirper du beau décolleté que lui faisait son étroit chemisier noir ne la dérangea pas. Elle ne réalisa pas la pression sur son buste, pas plus que celle qu'elle infligeait au sein de Jessica sur lequel sa main s'était posé dans la chute. En temps normal, Carlotta aurait pétrit cette forme délicieuse avec intérêt, mais là ça tenait du réflexe pur et simple, car son esprit était ailleurs. Apeuré toujours, mais focalisé sur une sensation de déjà-vu. Ce monstre qu'elle fixait de son regard tremblant alors que sa sauveuse se redressait, elle le connaissait. Seulement, elle était incapable pour l'heure de savoir pourquoi.

- O...oui... répondit-elle quand Jessica lui intima de se réfugier. Je vais... le bureau !

Pour elle, ce fut comme une illumination soudaine. Carlotta se remit sur ses jambes comme elle le pouvait et abandonna ses chaussures avant de relever sa mini-jupe en dévoilant sa finie lingerie. Le tissu l'empêchait de courir et ses jambes galbées ainsi dévoilées pouvait la porter plus loin et plus vite. Plutôt que de sortir, elle s'engouffra dans ce qui restait de sa maison. Il fallait qu'elle s'assure de ce à quoi elle pensait.

Le golem, de ses amples mouvements, détruisait presque méthodiquement la pièce qui l'entourait. Adieu murs et meubles, au revoir b   aie vitrée. Il saccageait tout de colère, avant de se préparer à frapper Jessica de son lourd et puissant poing, projettant très certainement de la réduire à un reste de corps plus ou moins informe. Mais l'araignée eu un mouvement intelligent, superbement calculé. Sa décharge doublée frappa son buste pile au bon endroit et cette fois, le Golem ne résista pas. Il sembla fauché dans son action et porta une main à sa poitrine dans une plainte avant de basculer vers l'arrière, s'abattant sur le sol de la maison avant de ne plus bouger, l'ensemble des failles de son corps pulsant à présent d'un faible rouge qui tendait à s'éteindre un peu plus à chaque battement.

Cela ne serait pourtant que provisoire, à moins que Jessica ne prenne le temps d'examiner la carcasse qu'elle devrait délester de sa pierre pour trouver le noyau qui alimentait le golem. Il avait été conçu d'une façon qui, en d'autres circonstances, aurait put s'avérer stupide. En effet, le golem se régénérait en absorbant tout élément rocheux à sa portée. Si dans Tekhos la pierre était somme toute assez rare, il fallait noter que dans l'espace de Gold Hill, chacune des demeures était façonnée dans ce matériau qui donnait un cachet particulier que le verre et l'acier n'auraient jamais. Une certaine "noblesse", en quelque sorte.
Du corps du Golem s'étaient extirpée de petites pointes de pierre qui, fichées dans la pierrre qui constituaient les murs et le sol de chez Carlotta, lui permettaient doucement de se soigner. Mieux, il reconstituait sa carapace alors que la demeure s'effritait inexorablement. C'était tout de même une excellente occasion de fuir.

Miss Emerald sembla se réveiller, et courut rapidement. Jessica n’était déjà plus là pour la surveiller. Le golem était en train de s’acharner sur le manoir, faisant dangereusement trembler toute la structure. S’il continuait ainsi, toute la maison risquait de s’effondrer. Cependant, il n’était pas invincible. Jessica avait trouvé, grâce à l’aide des hélicoptères, son point faible, et elle comptait bien l’exploiter. Furieux, le monstre bondissait droit vers elle, et elle envoya une décharge au torse. Il y eut une belle explosion, et des morceaux de roche s’envolèrent tout autour d’elle, élargissant sensiblement la plaie béante qui trônait sur le torse du monstre. Ce dernier sembla tituber, et son lourd corps bascula en arrière, s’écrasant douloureusement sur le sol. Toute la pièce trembla. Il y avait des lézardes le long des murs, remontant jusqu’au plafond. Quand ça serait terminé, elle allait devoir retrouver la dirigeante, afin de la mettre à l’abri.

*Tu as l’avantage, profite-en, Jess’ !*

Elle pouvait, au loin, entendre les sirènes des voitures de police. La cavalerie allait débarquer, mais, quitte à agir par elle-même, elle préférait en finir toute seule avec ce monstre. Elle s’envola à nouveau. La pièce était haute de plafond, et elle vit que le golem gisait sur le sol, avec une plaie béante. Ses lueurs vertes étaient désormais rougeâtres, et elle discerna, au niveau du torse, une lueur un peu plus vive... Le cœur de son être ? Le noyau ? Jessica se rapprocha un peu, fronçant les sourcils, et vit alors que des morceaux de pierre s’envolaient du sol, pour rejoindre le monstre, le reconstituant progressivement.

*Merde !*

Jessica ne pouvait décemment pas laisser ce salopard se régénérer ! Jessica regardait autour d’elle. Les lézardes se prolongeaient le long des murs. L’épée avait du se planter dans un mur porteur, et de la poussière tombait du plafond. Le moindre coup supplémentaire achèverait de détruire cette partie du manoir, si le temps ne s’en chargerait pas tout seul. Jessica se mordilla les lèvres, concentrant sa magie dans ses points. Elle ferma brièvement les yeux, puis les balança. Deux boules magiques frappèrent le torse du golem, répandant des arcs électriques tout autour d’eux. Des morceaux de la maison tombèrent à nouveau, et un énorme morceau de bois s’abattit sur le golem. Jessica ne pouvait plus attendre. Elle se replia, retournant dans le coulori,e t rejoignit assez rapidement le hall d’entrée du maison.

« Miss Emerald ? Il faut partir ! »

Les lézardes se répandaient partout, des fissures épaisses, comme s’il y avait un séisme. Les poutres étaient en train de rendre leur dernier soupir, ne parvenant plus à supporter le poids de cette massive demeure. Jessica monta le long de l’escalier, et aperçut une double porte ouverte, donnant dans un bureau encore plus grand que son studio. Carlotta Emerald était derrière son bureau, avec une grande fenêtre derrière donnant sur un immense jardin privé. Jessica fonça droit sur elle. Sa main gauche envoya une décharge légère, afin d’exploser la vitre derrière, et sa main droite saisit la femme à la taille. Elle s’envola alors, décollant comme une flèche, tandis que le manoir s’écroulait. Le golem reçut sur la tête des tonnes et des tonnes de béton, de bois, de plâtre, de câbles électriques crachotants, dans un grondement infernal, tandis que, tout autour du manoir, la cavalerie arrivait. Les hélicoptères de la presse filmèrent une forme rougeâtre emportant dans ses bras une femme paniquée, les camions de pompiers et les ambulances débarquaient, ainsi que les troupes de choc, tandis que le manoir s’écroulait sur son propre poids, provoquant un épais nuage de poussière.

Jessica vola encore un peu, cherchant où poser Carlotta, et amorça une descente, se posant sur le toit d’un immeuble, après un vol de cinq à dix minutes, le temps de laisser à la femme l’occasion de profiter de l’air frais, afin de se calmer. Le toit était un jardin privé désert, avec un petit ruisseau artificiel, des transats. Elle se posa sur le sol, tenant Carlotta par les hanches, son visage proche du sien.

*Carlotta Emerald...*

Maintenant qu’elle avait l’esprit un peu plus clair, tout était plus évident pour Jessica. Carol, sa mère, était une femme d’affaires, cadre au sein d’une société pharmaceutique. C’est à cette occasion qu’elle avait entendu parler de Carlotta Emerald, l’une des femmes les plus riches de Tekhos. Sa société avait été rachetée par les actionnaires de Carlotta Emerald. Jessica venait de sauver la patronne de sa mère.

*Et personne ne me croira jamais...*

Elle sortit rapidement de son mutisme, sentant les gros seins de Carlotta frotter contre les siens, glissant sur sa combinaison :

« Vous... Vous allez bien, Madame Emerald ? Je... Je suis désolée pour votre manoir, ce... Ce monstre était plus puissant que ce que je pensais... »

Carlotta avait foncé dans l'escalier en laissant derrière elle l'héroïne et la chose pierreuse qu'elle affrontait. Pour parler franchement, l'industrielle ne pensait pas que la souple petite gymnaste (elle avait d'ailleurs pensé cela avec une pointe d'excitation tout à fait déplacée au vu de sa panique) pouvait vraiment venir à bout du danger rocher et humanoïde. Cela lui importait pour l'heure peu, puisque l'entrée en scène de cette fille lui laissait une belle opportunité de fuite mais surtout de résoudre l'énigme de l'origine de ce monstre qui avait dévasté le quartier en général et sa maison en particulier. Carlotta avait eut un éclair de génie quelques instants plus tôt, quand son esprit avait réalisé que oui, il connaissait l'apparence de ce monstre ou plutôt son design. La belle rousse -enfin, rose- préférait parler dans ce terme là, plus proche de son petit univers que le monstre ne pouvait l'être. Le design, l'apparence... Emerald l'avait déjà vu avant et enfin son cerveau avait réalisé, par-delà sa peur du colosse, les connexions nécéssaires. C'était pour ça qu'elle avait filé vers son bureau, se ruant vers un des tiroirs du meuble central de la pièce pour attraper un dossier qu'elle avait compulsé fébrilement tandis que la maison tremblait des effets de ce qui devait être une bataille.

Puis, tout s'était enchaîné. La femme en body ultra-moulant l'avait rejoint à l'étage alors que la villa semblait sur le point précis de s'effondrer sur elle-même. Carlotta s'était emparé du dossier avec force et l'inconnue l'avait empoignée elle comme si elle n'avait rien pesé. Un petit "Ah !" de surprise avait précédé leur passage à travers la vitre avant qu'elle n'hurle franchement en s'accrochant au cou de Jessica quand elle avait réalisé à quelle altitude elles se trouvaient toutes deux. Une main crispée sur le dossier et l'autre autour du coup de la brune, Carlotta avait collé cette dernière avec une telle force que ses imposants seins avaient écrasés ceux de la justicière tandis qu'elle avait fermé les paupières avec assez de force pour s'en faire mal aux yeux.
Elle ne les rouvrit que lorsque ses pieds touchèrent un sol en dur et bien réel, découvrant le panorama du toit privé et aménagé. Ouf ! Carlotta ne se défit nullement de l'étreinte de Jessica et préféra reprendre tranquillement ses esprits en s'appliquant quelques excercices respiratoires qu'elle tirait du Yoga. Une fois son souffle plus tranquille et ses jambes assurées, la redoutable chef d'entreprise leva ses grands yeux vers sa sauveuse, un petit sourire aux lèvres. La sensation d'écrasement de leurs poitrines l'une contre l'autre était nette et savoureuse, procurant en elle une chaleur bienvenue après ces émotions fortes.

- Je ne vous enverrai pas la facture, trésor. Détendez vous, vous affrontez cette chose et bafouillez devant moi... Ce n'est pas très héroïque, ça.

Un petit mouvement de buste appuyé ponctua sa phrase, comme une caresse mammaire qui fit se dresser les pointes de ses seins à travers le tissu, contre Jessica. Carlotta s'en amusa et déposa un petit baiser sur les lèvres de Jessica, avant de s'écarter légèrement pour ouvrir le dossier qu'elle avait tenu à sauver. Faisant quelques pas, elle tourna le dos à Jessica et lui exposa une chute de reins aux hanches larges, acceuillantes. Un moment durant, seul le bruit de papier froissé passa entre les femmes, avant que Carlotta ne tourne légèrement la tête pour faire signe à Jessica de venir, lui désignant du doigt un dessin crayonné d'une patte excellente, qui représentait ni plus ni moins que le golem.

- Je tiens ça d'un de mes subalternes, Karl Twain. Un pisse-menu sans envergure mais avec beaucoup de talent. Il griffonne sur son temps libre, vous voyez ? Et on peut reconnaître cette créature qui a détruit ma maison.

Elle tapotait du doigt sur le feuillet, qui comportait en outre quelques indications comme la capacité à cracher des projectiles explosifs, une estimation de sa force et sa capacité à se régénérer grâce à la roche environnante.

- Vous pensez que ce petit merdeux puisse être impliqué, l'amie ? Elle la toisa. D'ailleurs, comment dois-je vous appeler ? Je ne vais pas vous donner du trésor à toutes les sauces... pas encore, du moins. Vous avez bien un numéro de série, un nom de code ?

Carlotta lui conseilla d’arrêter de bafouiller (pourquoi elle bafouillait, d’ailleurs ?!) avant de... De l’embrasser. Pour le coup, d‘était une chance que Jessica disposât d’un masque autour de son visage. Sa visière permit de cacher l’écarquillement de ses yeux, même si ses lèvres, sous l’effet de la surprise, s’écartèrent brièvement... Avant que Jessica ne les referme, Carlotta s’éloignant d’elle. Les gros seins de la PDG s’étaient heurtés au sien, dans une position des plus sensuelles, mettant Jessica dans une confortable situation. Qu’elle soit troublée se comprenait. Contre ce golem, elle pouvait être la super-héroïne, et employer tous ses pouvoirs. L’adrénaline explosait dans ses veines, sous l’effet de la bataille, de la situation de danger. Mais là, ici, face à Carlotta Emerald, Jessica Drew se réveillait pleinement, et, sous son costume, elle restait une simple fille lambda, une petite étudiante qui vivait dans un studio en ville. Et l’une des femmes les plus puissantes de Tekhos, ayant la mainmise sur un empire industriel, était en train de l’embrasser, de flirter avec elle... Il y avait de quoi être troublée !

*Le pire, c’est que je suis sûre qu’elle doit être plus vieille que ma mère... Avec toutes ces technologies, maintenant, il est très facile de masquer son réel âge...*

La femme se retourna, et Jessica put admirer son dos, souple. Que ce soit de face, de profil, ou de dos, Carlotta Emerald était extrêmement attirante, et elle ne laissait pas indifférente Jessica. Mais elle était riche, après tout : il fallait bien qu’elle soit belle. C’était ça, non, le secret du monde des affaires ? Carlotta farfouillait dans ses dossiers, et, avec un tact tout à fait naturel, trahissant la professionnelle, habituée à jouer des effets de son corps dans une transaction, lui dit qu’elle avait une identité sur la cible. Elle lui montra une feuille, forçant Jessica à cesser de regarder ses seins (ou ses obus, plutôt), pour s’emparer du papier.

C’était un gribouillis fait sur une page de cahier arrachée, mais on voyait très clairement la silhouette du golem, avec des indications tout autour. Karl Twain... Visiblement, ce jeune homme avait l’air d’avoir un penchant pour les bandes dessinées fantastiques. Jessica pouvait le comprendre, elle les adorait aussi. Elle lut brièvement les inscriptions, et trouva que la ressemblance, effectivement, était troublante.

*Mais quoi ? Twain a donné vie à son dessin ? C’est un magicien ?*

À Tekhos, on avait du mal avec la magie. On ne niait pas son existence, ce qui aurait été stupide, mais on la voyait comme une forme de science naturelle, très spéciale, et entourée d’une forte dose de mysticisme. Les scientifiques tekhanes traitaient avec mépris les magiciens, ayant du mal à voir en ces fous excentriques des scientifiques, comparables à elles. Pour les autres, c’était une sorte de snobisme intellectuel, une déformation d’une civilisation très avancée d’un point de vue technologique... Et, pour le coup, ce n’était pas uniquement sexuel. Les sorcières étaient également comparées par les scientifiques à des vieilles folles hirsutes.

Carlotta lui demanda si Twain pouvait être impliqué... Mais comment est-ce qu’elle était censée le savoir ? Et, pour ne rien arranger, Carlotta enchaîna en souhaitant savoir si Jessica disposait d’un alias.

« Ben... Euh... » commença Jessica, bafouillant à nouveau.

Un alias ? Elle n’y avait pas encore pensé ! Et elle ne pouvait tout de même pas dire à Carlotta de l’appeler par son nom. Cette femme avait l’air d’être aiguisée comme un radar militaire. Si elle disait qu’elle s’appelait Drew, Carlotta découvrirait que, parmi l’une des sociétés dont le capital était entre les mains de ses actionnaires, il y avait une Carol Drew... Et elle ne tenait surtout pas à ce que Carol apprenne que Jessica risquait sa vie le soir, et avait affronté un golem immense. Jessica avait encore du mal à croire qu’elle avait bel et bien défié un golem géant, faisant plusieurs mètres de haut, et qui avait pulvérisé toute une maison. Est-ce qu’elle était folle, ou tout simplement téméraire ? Le pire, c’est qu’elle ne pourrait le dire à personne...

« Vous pouvez m’appeler... Spider-Woman » lâcha-t-elle rapidement.

Ce n’était pas un si mauvais nom que ça, puisque, après tout, ses pouvoirs, si elle avait bien compris, lui venaient d’une araignée. Jessica décida de reprendre un peu d’aplomb, et se pencha vers la femme, l’embrassant à son tour. Un baiser également bref, quoique un peu plus long et un peu plus appuyé que celui que Carlotta lui avait offert il y a quelques minutes. Autant en profiter, non ?

« Mais, pour toi, ce sera Jessica... »

Jessica en mode allumeuse... Si Carol la voyait, elle la tuerait sur place ! En divulguant uniquement son prénom, Jessica ne prenait pas trop de risques. C’était un prénom très courant, après tout. Jessica croisa les bras. Carlotta avait vraiment de très belles lèvres, avec un fort goût de « reviens-y »... Mais il fallait rester professionnelle avant tout. Si ce Twain était capable d’invoquer des monstres, rien ne l’empêcherait de recommencer.

« Votre siège social n’est pas loin, non ? demanda-t-elle alors en regardant la ville. L’adresse de Karl Twain doit bien figurer dans votre registre du personnel... J’ignore s’il est impliqué, mais c’est une coïncidence trop grosse pour que je la néglige... Et, si vous appelez la police, ces dernières mettront trop de temps à réagir. »

Les policières ne pourraient d’ailleurs pas se contenter d’un simple dessin, et, même si Karl Twain était un mâle, il avait des droits. Et puis, Jessica ne pensait pas que Carlotta avait envie d’attirer la police auprès de son entreprise. De ce qu’elle avait compris à travers les repas de famille, en affaires, l’apparence avait une importance fondamentale, car elle déterminait le lien de confiance unissant l’entreprise à ses clients, ou à ses fournisseurs. Or, la présence de la police permettait rarement d’entretenir un lien de confiance.

« Mais... Pourquoi pensez-vous que Twain voudrait vous tuer ? »

C’était une question légitime, après tout. S’il invoquait un monstre pour attaquer Carlotta Emerald, il devait forcément avoir un mobile.

La vérité, c'était que Jessica amusait hautement Carlotta. La PDG n'avait jamais été une amatrice de ces histoires de justicières costumées qui luttaient contre le Mal pour un quelconque idéal mais avait sut, comme beaucoup, reconnaître l'intêret des combinaisons moulantes portées sur un corps taillé par l'effort et l'entretien physique. Dire que sa sauveuse lui plaisait était toutefois un peu trop hâtif. A la rigueur, Emerald appréciait son corps et la pulpe de ses lèvres ce qui justifiait à ses yeux ces petites caresses camouflées qu'elle lui avait offertes, comme le baiser. Ca ne répresentait rien pour Carlotta, à part peut-être une proie un peu plus singulière que les autres à épingler à son carnet de chasse. Et puis, voir cette farouche combattante perdre pied ainsi face à elle, cela avait quelque chose de jouissif !
Pourtant, Carlotta était rapidement passée à autre chose. Twain pouvait donner naissance à des dessins ? Non, c'était stupide. Et le golem n'avait rien eu de robotique à ses yeux et la rousse était assez calée en engineering pour savoir de quoi elle parlait. Aucune société à Tekhos ou ailleurs n'aurait put établir un "camouflage" aussi semblable à une apparence de cette mouvance qu'on appelait "fantasy". L'explication était donc ailleurs, même si Carlotta ne voyait pas trop où. Soit, elle irait donc la chercher.

- Spider-Woman ? Elle avait lâché ça avec un ton d'amusement qui tranchait avec son sérieux précédent. Ce n'est pas terrible, trésor. Ces noms ne sont pas sensés refléter vos capacités ou encore justifier votre costume ? Je n'ai rien vu de très arachnéen, à la villa. Spider-Woman, franchement...

Elle aurait rit presque dédaigneusement si le baiser de la costumée ne l'avait pas surprit. Un peu d'assurance et de prise de risque, vraiment ? Voilà qui n'était pas pour déplaire à Emerald, qui participa au baiser qu'elle acheva dans un léger mordillement labial accompagné d'une très légère succion. Sa marque de fabrique, en quelque sorte. Sa main qui s'était posée sur la joue de celle qui révèla s'appeler Jessica glissa vers sa mâchoire avant de remonter vers son nez, qu'elle saisit entre deux doigts avant de froncer les sourcils tout en conservant un petit sourire mutin.

- Tutoie moi encore une fois et tu auras à endurer MON venin, petite araignée.

Une menace claire et nette, qui résonnait presque comme un défi. Carlotta acheva sa provocation par un passage de son doigt, très léger, sur l'entre-seins de Jessica. Elle évoqua Twain, le siège social et donc l'avancement vers l'explication de toute cette pagaille. La justicière était peut-être une bleue mais n'était pas forcément bête. En revanche, elle sous-estimait les petits tours que pouvait cacher la désirable Carlotta, qui avait ouvert un peu plus son chemisier sous prétexte de souffrir de la chaleur. Jess' avait la plus jolie vue de la ville, assurément. Et Emerald en jouait savamment.

- Pourquoi ? Parce que je ne suis pas aussi agréable avec tout le monde comme avec toi, petite araignée. Tu sais, j'apprécie aussi les mâles mais ceux qui ont de la poigne. Et Twain m'agace, parce qu'il n'a aucune force morale et qu'il s'aplatit toujours devant moi. Elle agita sa main devant elle, comme pour chasser une image imaginaire, et reprit. Il a du génie, c'est un fait. Mais il n'a rien d'autre. Peut-être n'aime t'il pas la pression que je lui inflige, ce pauvre petit ?

La notion de pression devait être un doux euphémisme dans la bouche délicieuse de Carlotta, qui avait craché ces derniers mots avec un manque de considération pour Twain. Se collant un peu contre Jessica pour sentir le renflement de ses seins contre son bras, elle détacha l'oreillette-téléphone de son bracelet pour la porter à son oreille, composant un numéro sur les petites touches digitale du bijou. Tandis que la numérotation se faisait et qu'elle patientait en attente de son interlocuteur, Carlotta s'amusa à remonter une de ses cuisses contre Jessica, conservant l'équilibre grâce à la main qu'elle avait posée sur ses fesses. Ses doigts jouaient avec la chair ferme quand on décrocha au bout du fil et lorsqu'elle répondit, ses lèvres frôlaient délicieusement celles de Jessica.

- C'est moi, Edith. Accédez aux dossiers du personnel et donnez moi l'adresse de cette lavette de Twain. Vite.

Enfin, pas trop, puisqu'elle profitait du temps accordé pour laisser le bout de sa langue cavaler sur les lèvres de Jessica, inférieure comme supérieure. Entre ça et la main qui se glissait entre la démarcation des deux fesses, Carlotta marquait insolemment son territoire.

- 3, Silvertower street ? Ce n'est pas loin de la zone industrielle en bordure de la ville, ça. Elle fixa Jessica dans les yeux. D'accord, merci. Ma villa aux infos ? Ah, oui. Je ferai un communiqué de presse, mais vous pouvez dire que je vais bien. J'ai un bel ange-gardien tout près de moi... Sa langue s'égara à nouveau. Laissez faire les médias pour le moment. Nous payons une légion d'avocats pour gérer ce genre de crise, il me semble ! Qu'ils fassent leur boulot.

Et elle raccrocha, sans cérémonie aucune. L'oreillette retourna à sa place initiale, tandis qu'elle regardait Jessica.

- Je viens avec toi et ne crois pas que non soit une réponse que tu puisse m'opposer. Si ça tournait mal, tu ferais barrage de ton corps, non ?

Carlotta minaudait presque comme une étudiante, mais le ton n'autorisait absolument aucun refus. Quand bien même Jessica l'aurait plantée là, la désirable chef d'entreprise avait assez de ressources pour se rendre chez Twain quand même et en plus lui faire payer sa mauvaise idée. Il était temps de se mettre en route !

Plus tard, elle allait devoir sérieusement se pencher sur son nom d’artiste. Spider Woman serait incompréhensible si on ne connaissait pas l’origine de ses pouvoirs. Mais quoi d’autre ? Super Woman ? Ultra Woman ? Power Girl ? Non, ça faisait... Moche. Trop classique, digne d’un dessin animé pour enfants. Elle ne voyait rien d’autre que Spider Woman, mais avait du mal à se concentrer. Carlotta n’était plus seulement en train de l’emballer, elle se frottait contre elle, se blottissait, retirant encore plus son chemisier, faisant silencieusement déglutir Jessica. Elle était loin d’être insensible au charme de cette femme, qui était très entreprenante. Sa maison venait d’exploser, mais ça ne l’empêchait pas de flirter avec sa sauveteuse... Allez savoir pourquoi, Jessica l’imaginait plutôt bien dans une soirée coquine, le genre de soirées où on portait du latex et du cuir sur le corps, et où on fouettait en rafale. Ouais, elle la voyait même très bien dans une soirée comme ça. Elle allait droit au but, et Jessica n’était pas insensible à son charme.

L’une de ses mains en posa sur ses fesses, et elle rougit, sentant Carlotta jouer avec ses lèvres. Jessica n’avait pas une très grande expérience sexuelle, et Carlotta devait probablement l’avoir ressenti. Les deux femmes se retrouvèrent blotties l’une à l’autre, tandis que Carlotta utilisait sa technologie pour contacter une assistante. Si Jessica aurait été plus ferme, elle aurait probablement touché, elle aussi, les parties intimes de la femme. Au lieu de ça, ses mains restaient posées sur ses hanches, et, quand Carlotta parlait, elle embrassait le creux de sa nuque, léchant sa peau douce et chaude. Son intimité était en train de la déranger, de se réveiller, indiquant tout le plaisir que cette scène lui procurait.

Elle était dans un tel état qu’elle avait même du mal à entendre les indications de Carlotta. La PDG lui indiqua que Twain était un ouvrier minable, qu’elle méprisait joyeusement, probablement parce qu’il était un homme. Comment diable avait-il fait pour concevoir un golem aussi puissant ? Jessica l’ignorait, mais ce ne pouvait être que magique. Peut-être était-il un magicien ? Il lui était très difficile de réfléchir, dans cette situation, son esprit se focalisant de plus en plus sur le corps ferme et tendre de Carlotta Emerald. Elle se pressait contre elle, savourant son odeur, cette belle peau tendre. Cette femme lui faisait de l’effet, c’était indéniable.

*Si toutes les femmes que je sauve sont comme ça, il n’y a que ma carrière de super-héroïne qui va décoller...*

Ce n’était pas que la plastique phénoménale de Carlotta, ou son charme, qui l’excitait, mais aussi cette grisante et délicieuse de sensation de violer les tabous. Carlotta était plus vieille qu’elle, était à un autre niveau de l’échelle sociale... Bref, il y avait largement de quoi sentir les frissons ! Elle obtint en tout cas l’adresse de Twain, rappelant Jessica à la réalité.

*Le réconfort après l’effort... Vois ça comme un avant-goût, une promesse...*

Carlotta voulait venir avec elle, ce qui était indéniablement très dangereux. Le premier souhait de Jessica fut de refuser fermement. Elle ignorait ce qui se cachait chez ce Karl Twain, et ne tenait pas à exposer inutilement la vie de Carlotta. Cependant, Jessica se dit que, même si elle refusait, Carlotta y irait quand même, et qu’elle risquait d’être un encore plus gros problème. Au moins, si Jessica l’emmenait, elle saurait où elle est, et pourrait la surveiller. Elle savait où était Silvertower Street, et répondit donc.

« Okay... Mais vous ferez exactement ce que je vous dis, nous ignorons de quoi cet homme est capable ! »

Jessica empoigna Carlotta, et les deux femmes décollèrent, filant vers la zone industrielle à l’extérieur de la ville, naviguant entre les bâtiments. L’air frais lui faisait du bien, lui permettant de calmer ses hormones. Ce n’était clairement pas le moment de penser au décolleté plongeant de Carlotta, ou à ses fesses ! Elle ignorait comment cette dernière avait pu devenir la chef de ce puissant consortium industriel, mais elle la voyait très bien faire l’éloge de la promotion-canapé.

Elle atteignit Silvertower Street, une rue assez triste, en lisière de la ville, où le sable du désert commençait à poindre. On pouvait voir, au loin, les montagnes éloignées. C’était vraiment le terminus, ici... Des immeubles insalubres plantées au milieu des raffineries et des centrales d’énergie. Ce n’était pas les Calis’, mais ça en avait un avant-goût. Jessica s’avança vers le 3, et vit un petit ensemble d’immeubles formant un U, avec une cour au centre, accessible par une porte grillagée crochetée.

« Quel trou sinistre... » commenta-t-elle sommairement.

Elle chercha sur l’interphone la liste des résidents. Elle appuya pour cela sur le bouton. L’interphone était électronique, ce qui était la norme standard depuis des années, et trouva la cible : TWAIN, KARL, ainsi que l’immeuble et le numéro d’appartement : B-22. Elle ouvrit la porte dans un grincement, et arriva dans la cour centrale, sinistre. Il y avait des lézardes sur le sol, une aire de jeux rouillée. Elle repéra l’immeuble B, et entra dans le hall d’entrée, la serrure magnétique de la porte ne fonctionnant plus, et chercha le plan d’évacuation, pour repérer l’appartement 22.

« Okay... Vous attendez là, Carlotta, je vais passer par la fenêtre pour aller voir ce que mijote Twain. »

S’il était vraiment un magicien, l’effet de surprise serait sa meilleure arme contre lui.

Il était certain pour Carlotta que Spider-Woman (dont elle ne pouvait décidement s'empêcher de penser qu'elle avait un alias ridicule) allait accepter sa proposition. Cette petite araignée innocente était dans une toile hormonale tissée par une consoeur bien plus expérimentée et plus carnassière et la prédatrice qu'était Emerald goûtait par avance l'initiation qu'elle infligerait à son petit insecte préféré. Des liens seraient sûrement de la partie, comme quelques jouets trop épais pour être honnêtes. Carlotta savourait d'avance, sentant ses lèvres délicates saliver légèrement pour imbiber le tissu de la lingerie grand luxe qu'elle portait. Tout viendrait, elle le savait. Jessica ne pouvait plus s'échapper de sa toile, mais le moment de la consommer n'était pas encore venu.
Elles s'envolèrent dans le ciel tekhan collées l'une contre l'autre. Carlotta savourait ce vol bien que le fait de ne devoir sa vie qu'aux bras de sa sauveuse ne la rassurait pas beaucoup. Comment volait-elle ainsi librement ? Etait-ce là un exploit technologique dû à quelques industriels de Novac ? Possible. Glissant dans un coin de sa tête la promesse qu'elle se fit de percer ce secret à jour, Carlotta regarda la ville s'étendre sous elle tout en refermant plus intensément sa prise sur Jessica. Cette fois, il s'agissait plus de peur que de désir et l'araignée n'aurait certainement aucun mal à le comprendre. Après tout, la situation n'était pas banale.

- Silvertown est un véritable trou à rat... La planque parfaite pour ce cancrelat de Twain, persifla t'elle alors que Jessica atterrissait.

Tandis que Drew cherchait l'appartement de Karl, Carlotta observait le quartier dans une grimace dégoûtée. Réfléchir à l'attaque lui permettait de ne pas penser à cette crasse rampante qui était pire que ce qu'on pouvait voir aux infos. Et les Caligulas étaient sensées être un cran en-dessous encore ? Inimaginable pour elle.

- On entre pas n'importe comme dans Gold Hill. Les accès sont sévèrement contrôlés par la petite milice qui assure la sécurité du quartier. Si ce monstre en pierre avait remonté d'un point X de Tekhos jusqu'à nous, nous aurions été rapidement alertés et évacués. Or, il a débarqué comme par... comme par magie. Elle répugnait visiblement à le dire. Twain pourrait concevoir pareille créature et de surcroît la transporter incognito vers Gold Hill ? Ca ne tient pas. Et puis, si rites magiques il y a bien dans cette histoire, ils devaient être conséquents pour arriver à un résultat pareil ! Les capteurs, les radars et tous les autres petits gadgets de la défense civile et des forces de police n'auraient rien signalé ? C'est inconcevable, voyons !

Tekhos Metropolis était truffée de différents réseaux de détection, orginellement mis au point pour éviter et prévenir toute incursion formienne. Avec le temps et les différentes menaces que présentait l'ensemble de Terra, ces dispositifs avaient été améliorés et ce en partie grâce à la société de Carlotta. Penser que toutes ces sécurités aient put être déjouées était inimaginable pour Emerald, qui ne comprenait pourtant toujours pas comment Twain avait put s'y prendre.
Toujours est il que les filles parvinrent à s'introduire dans l'immeuble où résidait Twain sans vraiment de difficultés. C'était si excitant, de jouer les flics ! Carlotta se sentait comme une môme, pas tout à fait consciente qu'elle risquait d'y laisser des plumes. Par contre, rester là ? Spider-Woman devait de préférence ne pas trop y compter, bien qu'elle se garda bien de le lui faire comprendre.

- Oui, il vaut mieux que je me mette dans un coin, je pense... Fais lui sa fête, ma petite araignée.

Elle lui vola un baiser et quitta Jessica. Du moins se mit elle hors de sa vue le temps qu'elle ne file vers le 22, que Carlotta entreprit rapidement de rejoindre par les escaliers. Pas question qu'elle rate la fête : cette enflure de Twain avait ruiné sa villa en guise de carton d'invitation.

~~~~~~

Dans son salon miteux, Karl Twain faisait les cent pas devant son téléviseur dont la chaîne d'informations passait en boucle des images aériennes de Gold Hill et de la démolition surréaliste qui s'y était déroulée. Ca oui, le golem avait été efficace ! Cyrianna n'avait pas menti en lui expliquant les merveilleuses capacités du Suspendium. Donner vie à tout ce que l'imagination permet de créer, quel pouvoir ! Il n'avait eu qu'à paramétrer son golem, attendre une heure et son merveilleux bébé avait été libéré au sein même de Gold Hill pour régler son compte à Carlotta. Seulement voilà, les choses n'avait pas tourné comme prévu. Emerald était toujours vivante, le communiqué de presse martelé par sa firme faisant foi. Et le golem avait été détruit par -quelle stupide idée !- par une justicière venue du ciel. On nageait en plein délire et lui s'enfonçait en pleine panique.

- Cela ne se peut, cela ne se peuuuuut ! J'avais tout prévu, il ne devait pas être arrêté avant d'avoir abattu cette pute siliconnée ! Ce n'est pas possible, pas possible !

Dans son état d'esprit, Twain ne pouvait pas correctement réfléchir. Sinon, il aurait vu quelles possibilités de fuite magnifiques lui ouvrait le curieux objetqu'il avait entre-temps saisi pour le secouer. Il tenta bien de l'activer, mais sous la montée de stress ses mains devenues moites glissèrent sur le métal sans pouvoir en faire jouer le mécanisme.

- Faire tourner la base d'un quart de tour et... TOURNE, MAIS TOURNE !

Sans succès. Twain tremblait, suait à grosses gouttes. Il perdait en somme le contrôle, faisant les cent pas dans la pièce. Que faire ? Il n'en savait rien. Mais personne ne pouvait remonter jusqu'à lui, pas vrai ? Aucun lien avec le golem, rien ! Le plan parfait ! Dans les faits, Karl n'avait qu'à se calmer et retourner concevoir un autre monstre, un autre plan.
Seulement cela, l'homme qui jouait avec un revolver ne le voyait pas. Lui ne s'attendait maintenant plus qu'à voir les forces de police rappliquer à sa porte.

Cette femme était une vraie allumeuse ! Ou alors, ça devait l’amuser de la perturber... Difficile à dire, mais Jessica devait se la sortir de l’esprit. Elle était de plus convaincue que Carlotta viendrait quand même à l’appartement. C’était son style : elle était une fonceuse, et elle n’allait pas se priver de ce spectacle. Le pire était que Jessica n’avait même pas eu le temps de changer de costume, ni de se trouver un nom plus classe. Quand elle tomberait sur les médias, elle ne voulait pas que tout le monde se pète une barre quand elle leur sortirait qu’elle avait comme alias « Spider-Woman »... Peut-être devrait-elle mettre un motif d’araignée sur son costume ? Mais ça ne ferait pas très beau, et affreusement cliché...

*Bon, je m’intéresserais à la couture plus tard ! T’as un boulot à faire, Jess’, l’oublie pas !*

S’envolant dans les airs, elle se rapprocha de la fenêtre de l’appartement 22. Il n’y avait aucun balcon, et elle flotta dans les airs. C’était un petit appartement, une sorte de studio, encore plus miteux que le sien. Twain avait l’air d’être doué... Mais, dans la société tekhane, les hommes étaient beaucoup moins payés que les femmes, bénéficiant d’une forte inégalité de traitement. Cette situation se confirmait en ce moment. Est-ce ça justifiait d’invoquer des golems immenses, et de saccager des villas ? Ce n’était pas vraiment une question qu’elle avait envie de se poser en ce moment. La priorité était de neutraliser Twain, pas de se préoccuper de ses motifs. Et ce n’était pas le rayon de Jessica, de toute manière. Elle était super-héroïne, pas politicienne.

La jeune femme se rapprochait de la fenêtre, et jeta un coup d’œil à l’intérieur. Elle ne voyait pas grand-chose, à travers les lattes du store. Est-ce que Twain était là, au moins ? Elle ne se voyait pas entrer en force, comme ça, surtout si Carlotta s’était plantée... Dans le fond, son seul lien était un dessin, ce qui était à la fois beaucoup et rien... Pas assez pour justifier de s’immiscer comme ça dans le domicile d’une personne.

*C’est pas le moment d’hésiter, Jess’ ! se sermonna-t-elle à nouveau. Il est trop tard pour reculer !*

Mais que faire ? Rentrer de force ? Si seulement elle avait des rayons X ! Elle se colla contre le mur, posant ses mains adhésives dessus, et chercha un moyen d’entrer. En se décalant sur la gauche, elle vit alors un moyen d’entrée. C’était une petite lucarne, celle de la salle de bains, qui était entrouverte. Elle se rapprocha, et la poussa un peu plus. La lucarne était assez étroite, mais, en se contorsionnant un peu, et à l’aide ses facultés adhésives, elle pouvait passer. C’est ce qu’elle entreprit de faire. Son costume racla contre le rebord de la lucarne, élargissant légèrement l’une de ses déchirures, et Jessica retint un juron, avant de descendre sur le sol. Elle se rapprocha de la porte, furtivement, et l’entrouvrit un peu.

Twain était à l’intérieur, et était nerveux. Elle pencha rapidement la tête, et le vit en train de s’extasier sur un drôle d’objet. Une sorte d’appareil pyramidal. Jessica, sur le coup, pensait à un objet décoratif pour touristes dans les parties publiques de certaines bases militaires, et remarqua ensuite le pistolet qu’il avait. L’homme était nerveux. Assez âgé, il avait le profil-type du scientifique chercheur.

« Tout ce que je voulais, c’était que cette salope m’aime ! s’énervait-il. Mais non, jamais Twain, vous êtes en retard ! Twain, il y a un programme dans l’algorithme de contrôle que vous avez fourni ! Sale pute !! Je t’ai tout donné, j’ai passé des nuits entières dans ce putain de bureau à planifier des algorithmes, des équations catégorielles pour parfaire les programmes de Madame... Et qu’est-ce qu’elle y comprenait, hein, cette salope ? »

Il épongea son front, en secouant la tête. Visiblement, cet homme avait de gros problèmes avec sa patronne. Il s’affala sur le fauteuil.

« Je voulais juste qu’elle daigne m’estimer... Mais non, non, non, elle me rabaisse... Comme toutes les autres putes ! Vous n’êtes que des salopes mal baisées ! Tu m’entends, pétasse ? Je te chie à la gueule, moi, salope ! »

Il tritura encore son drôle d’appareil.

« Et cette camelote qui refuse de fonctionner ! Putain, putain... »

Cette « camelote » ? Cet objet avait-il une propriété spéciale, finalement ? Jessica pensa soudain, en voyant les espèces de motifs à la base de l’engin, à un explosif, une bombe, et réagit rapidement. Elle bondit hors de la salle de bains, vit le regard plein de surprises de Twain, et tendit ses deux mains. Des filaments de toile en sortirent. L’un d’eux attrapa son pistolet, l’autre la bombe, et elle les tracta en arrière, les ramenant vers elle.

« La fête est finie, Twain. Tu vas attendre bien sagement l’arrivée de la police... Et probablement d’un bon toubib. »

Karl Twain était un ingénieur de génie qui avait conçu pour la société de Carlotta quelques produits qui étaient devenus des "best-sellers", des valeurs sûres qui avaient largement contribuées à imposer la firme sur le marché. Cela, Emerald ne l'avait jamais nié un seul instant. Mais pour cette femme qui aimait les forts caractères capables de lui tenir tête, le côté carpette soumise de Twain lui avait très vite était insupportable. Les premières humiliations avaient d'abord été voulues par Emerald comme étant des déclencheurs. Elle avait espéré que Karl se rebiffe en étant piqué au vif mais l'homme n'avait eu de cesse de s'aplatir face à elle qui avait trouvé avec le temps un côté satisfaisant à ce petit jeu pervers. Twain avait été de moins en moins productif et cet état de fait avait enfoncé le "couple" dans une spirale vicieuse qui avait conduit le mâle à échaffauder des plans fous pour rendre à sa redoutable patronne la monnaie de sa pièce. Ses idées parfois bourrées de non-sens s'étaient toujours trouvées avortées, jusqu'à ce que Twain trouve par hasard la pyramide.

Il l'avait faite marcher et ensuite, tout avait été très vite. Envoyé dans un endroit nommé le Suspendium, il avait été acceuillit là par une image holographique qui lui avait permit de créer ni plus ni moins qu'une créature de toutes pièces. Le golem était ainsi sorti de la feuille pour accoucher depuis les Maters du Suspendium avant d'être lancé sur Gold Hill pour aller tuer Carlotta Emerald. Tout lui avait semblé si simple, grâce au Suspendium... Pourtant, quelqu'un avait sauvé sa patronne et était parvenu à détruire le golem. Où diable avait-il échoué ? Et qu'allait-il faire à présent ?
Tournant et retournant dans le salon en insultant copieusement sa Némésis, l'ingénieur avait finit par s'avachir dans le canapé sans se rendre compte que la Pyramide avait finalement été activée.

- La fête est finie, Twain. Tu vas attendre bien sagement l’arrivée de la police... Et probablement d’un bon toubib.

- Hein ? Mais qui êtes vous ?

Les filins soyeux le désarmèrent et le privèrent de la pyramide, ce qui fit sortir Twain de ses gonds. Lui qui se pensait incapable d'être violent était devenu furieux sous la peur d'être privée de son accès illimité à ce qu'il considérait être l'une des plus grandes créations de tous les temps. Il se rua sur Jessica d'un bond tendant ses bras en hurlant comme un dératé, bien décidé à la saisir à la gorge... Et sa tête rencontra le mur qui se trouvait derrière l'héroïne, le faisant s'assommer brutalement dans un bruit sourd. Entre ses doigts, Jessica Drew s'était proprement volatilisée.
Carlotta entra finalement après un moment de silence complet, découvrant le corps inanimé de Twain qu'elle prit le temps de ligoter grossièrement avant de chercher une trace de sa sauveuse dans tout l'appartement. Curieusement, la désirable petite bête demeurait parfaitement introuvable.

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• Bienvenue, cher utilisateur. Veuillez patienter durant la séquence de démarrage du Suspendium.

La voix informatisée laissa place à un léger bourdonnement de machine en marche avant que quelques néons bleutés ne s'allument et dévoilent à Jessica une pièce parfaitement close. Ce véritable cauchemar pour claustrophobe finir par replonger dans le noir de très courtes secondes avant qu'une des parois ne coulisse vers le bas pour dévoiler un corridor dont le marquage au sol est lumineux, indiquant de se rendre à l'unique issue : la porte ouverte au bout des quelques mètres signalés par les douces lumières industrielles. Pendant que Jessica se décidait -ou pas- à avancer vers la destination indiquée, la voix revint.

• Le Suspendium vous est à présent accessible, cher utilisateur. Vous n'avez rien à craindre, vous êtes ici en parfaite sécurité et vous pourrez vous extraire de notre plateforme à n'importe quel moment. Pour cela, il vous suffira de réactiver votre clé. Vous serez aussitôt évacué vers votre point d'entrée. Attention ! Si vous ne possédez pas une Platinum Access, vous n'aurez aucun moyen de ré-accéder au Suspendium ultérieurement. Les Platinum Access sont de couleur argentée.

Un coup d'oeil aurait suffit pour que la belle justicière s'aperçoive que la pyramide qu'elle tenait au bout de ses filins arachnéens était de teinte argentée, ce qui faisait visiblement d'elle une de ces Platinum Access évoquées. Trouverait-elle cela rassurant ? Ce n'était pas sûr, mais peu importait à l'IA nommée Cyrianna, qui se synthétisa dès lors que Jessica pénétra dans la première salle. La jolie image virtuelle salua poliment la tekhane d'une inclinaison du buste assortie d'un sourire tranquille, avant que ses lèvres ne remuent en correspondance avec la voix qui jusque là avait semblé sortir de nulle part.

• Je suis Cyrianna, votre assistante et votre guide au sein du Suspendium. Voulez vous en savoir plus avant que nous ne commencions, chère utilisatrice ? Pour cela, il vous suffit de me le demander. Je suis programmée pour vous aider et répondre à toutes vos interrogations - dans la limites toutefois des mes autorisations.