Le Suspendium, une usine d’êtres vivants... La perspective était effrayante, et Jessica se demandait toujours si ce n’était pas une blague... Mais ce n’était pas possible, c’était bien trop réaliste, et ça expliquait bien trop de choses... Comment un vulgaire employé de bureau avait réussi à fabriquer un troll, et pourquoi Twain tenait tant à son Platinum Access... Progressivement, Jessica se sentait rassurée, soit parce qu’elle commençait à se faire à l’idée, soit parce que Cyrianna agissait pour faire en sorte de la rassurer. Le Suspendium était donc un laboratoire où, sur demande, les clients pouvaient fabriquer des êtres vivants... C’était se prendre pour Dieu ! Mais Jessica était à Tekhos, une nation qui dominait Terra, où chaque Tekhane s’estimait privilégiée d’être une Tekhane, et non une Nexusienne usée par la corruption, ou une Ashnardienne qui pouvait se faire violer par une garnison de soldats à tout instant. Cependant, elle était convaincue de ne pas être sur Terra... Même pour Tekhos, une telle usine était trop riche, trop avancée, pour exister là... Où était-elle ? Cyrianna avait beau répondre de manière énigmatique, le Suspendium devait bien être un lieu. Quelqu’un avait bien du bâtir ces machines, ces murs, ces ordinateurs, programmé cette IA, lui donner cette apparence si sexy... Mais, dans le fond, était-ce si important que ça ? Même si Cyrianna devait lui donner l’emplacement géographique précis du Suspendium, s’il était dans une autre galaxie, Spider-Woman serait bien incapable d’y arriver.
Cyrianna lui expliqua que le Suspendium n’était pas responsable des agissements des créatures qu’il fabriquait. C’était discutable, mais Jessica se voyait mal faire une leçon de morale à une IA... Le Suspendium devait estimer être un simple fabriquant. Pouvait-on poursuivre le fabriquant d’un pistolet qui avait servi, entre les mains d’un autre, à abattre quelqu’un ? Fondamentalement, c’était la même logique, que Jessica pouvait comprendre. Ainsi donc, on lui proposait de créer... Un être vivant. Cette perspective effrayait Jessica, tout simplement... Tout en l’excitant. Elle était jeune, après tout, empreinte de cette énergie d’insouciance propre à la jeunesse, et savait aussi que défendre Tekhos Metropolis serait difficile... Car elle devrait défendre la ville contre toutes ses menaces, aussi bien illégales que légales. Or, et même si elle avait des capacités exceptionnelles, le combat contre le troll avait rappelé à Jessica qu’elle était aussi très fragile... Et s’il existait d’autres Platinum Access ? Et si d’autres Twain invoquaient des monstres comme ça ? Jessica ne pouvait pas rester seule à défendre cette ville !
*Mais c’est terrible... Je ne peux pas non plus créer un être humain, ce serait trop... C’est dingue, quoi !*
Oui, c’était dingue, mais ça avait l’air... À portée de main... Elle pouvait se créer une assistante, une petite amie, quelqu’un qui l’aiderait et ne la laisserait jamais tomber... Jessica commençait à envisager de plus en plus cette idée, tout en la rejetant avec force. Il fallait qu’elle sorte d’ici, qu’elle détruise cette Platinum Access, qu’elle les détruise absolument tous... Mais c’était dément ! Comment diable est-ce que ça marchait ? Depuis quand est-ce que cette pratique existait ? Elle avait toujours du mal à y croire... Et, honnêtement, si vous vous retrouviez tout d’un coup d’un studio miteux à un laboratoire futuriste où on vous annonçait que vous pouviez créer un être vivant... Ça sentait l’entourloupe.
« Je... Euh... Et la création consiste en quoi ? Parce que j’ai toujours été nulle en physique... Et... Ça va coûter combien ? Parce que je suis pas bien riche, non plus... »
Parler d’argent lui rappela Carlotta Emerald. Aucun doute que, à sa place, Carlotta n’aurait pas hésité le moins du monde... Elle se demandait bien ce qu’elle aurait voulu faire... Sur le coup, Jessica avait quand même un léger doute.
« Et... Hum... Il y en a combien, des Platinum Acess ? » demanda-t-elle alors.
Elle rajouta ensuite, sentant les idées affluer :
« Et vous auriez pas... Je sais pas, moi... Un genre de contrat-type écrit, de conditions générales, des machins comme ça ? Parce que là, même si vous êtes sexy à tenter le sexe d’un moine, j’ai du mal à vous accorder ma confiance sur la seule base de ce que vous m’avez dit... »