La bête émit un râle sourd, chancelante sur ses pattes. Du sang coulait de sa blessure au flanc, rouge et épais. Plusieurs autres coupures couvraient le corps de l'animal, et avaient enfin raison de lui. La créature poussa un dernier mugissement, fixant son opposant, et s'écroula au sol, morte. Haletante, Irys resta quelques secondes sur ses gardes, vérifiant si la bête était bien morte, avant de se laisser aller au sol elle aussi. De là, elle fixa le bestiporc.
Les bestiporcs. Une des nombreuses créatures féroces et abjectes qui pullulaient dans les contrées du chaos. Si on voulait les décrire, on commencerait par dire que c'est un sanglier, de la taille d'un cheval. Une titanesque masse d'os, de muscles, de graisse et de cuir. Leur poids se chiffrait en quintaux, et leur vitesse de course surpassait largement celle des humains. Avec leurs défenses acérées, leur crâne surépais et leur dos solide, la charge d'un de ces monstres était instoppable, et laissait un sillage de mort et de désolation.
En raison de leur tendances à débouler de nul part et à tout détruire sur leur passage, les bestiporcs étaient régulièrement la cible de campagnes de contrôle et régulation des espèces dangereuses, un nom ampoulé pour désigner une grande chasse à la bête. L'ordre de mission était simple : abattre à vue tout spécimen de l'espèce désignée. Pourtant, en dépit de la rémunération généreuse, peu se risquaient à l'aventure. Après tout, le taux de mortalité de ces campagnes avait de quoi refroidir même les plus motivés. Irys comptait parmi les rares téméraires à oser s'y risquer, plus par désœuvrement qu'autre chose.
Jusque là, la semi-démone avait croisé trois bestiporcs, qu'elle avait tous vaincu. Pour autant, une telle prouesse n'avait pas été sans grandes difficultés. La férocité sauvage et le cuir épais des monstres lui avaient donné beaucoup de fil à retordre, et alors qu'elle prélevait la queue de l'animal, l'habituel trophée qui servait également de preuve, elle se dit que ça serait bien de prendre une bonne pause. La fatigue et les coups reçus au cours des affrontements prélevaient maintenant leurs dus, et la mercenaire ne de sentait pas apte à assurer une quatrième fois. De plus, la nuit arrivait.
Irys marchât encore un peu, avant de s'installer au pied d'un amas rocheux, et commença par allumer un feu avec le bois qu'elle trouva. Les précautions élémentaires : un obstacle pour ne pas être prise à revers, et une source de lumière pour voir ce qui arrive. La mercenaire installa ensuite son bivouac, et se prépara son souper. La journée avait été rude, et la suivante s'annonçait pareille...