C'était désagréable. Certes la pudeur n'était vraiment pas le point fort du Dieu, si bien qu'il avait fait mine de rien lorsqu'il avait senti ces deux faibles auras arriver dans le bâtiment. Elles étaient faiblardes et ridicules, mais l'excitation de ce couple était telle que Kyô les avaient facilement perçues. Comme si les deux amants s'étaient approché de son oreille et avaient hurlé "ON VA BAISER!". Aucune dignité, aucun tact, à tous les coups des adolescents libidineux. De toute façon, qui d'autre irait prendre un bain de minuit, à part un Dieu et une humaine créée génétiquement?
Mais elle avait entendu les bruits, et elle semblait gênée d'être dérangée dans un moment d'intimité. Purement humain comme réaction, mais c'était assez attendrissant. Mignon même. Il fit mine d'ignorer les bruits et les rires. Avec un peu de chance, ces deux-là seraient tellement empressés qu'ils commenceraient contre les casiers. Ils avaient l'air si impatients. Mais Kyô souriait toujours à Lanfear, pour la rasséréner. Et puis d'une voix chaleureuse, peut-être un peu trop sur le ton de l'évidence, il déclara:
"Oui, bien sûr que j'ai aimé! Attends de voir la suite!"
A vrai dire, il avait quelque chose derrière la tête. Un être mentalement bien constitué aurait eu plusieurs réactions: se barrer, se cacher, ou faire déguerpir les indésirables, en gueulant c'est pris ou en leur courant après pour leur péter les dents. Oui, sauf que Kyô était loin d'être mentalement bien constitué. Et qu'en plus d'être tordu, il était complètement allumé. Si bien qu'au lieu de penser putain, ils font chier ceux-là, il s'était dit chouette, des jouets! Et il s'expliquait cette idée totalement irresponsable par un bah, faut bien qu'elle se fasse des relations, je peux pas être partout...
Il déposa un baiser sur les lèvres de sa nouvelle amie alors qu'il s'extrayait avec douceur de son intimité. Puis, lui indiquant par un geste de la main de ne pas bouger, il se reconstitua un caleçon de bandages (on à la classe ou on l'a pas. Et c'est pratique pour être habillé quand on sort par la fenêtre au moment où le mari débarque. Mais ça, c'est une autre histoire.) et décolla ses pieds du sol, flottant au-dessus de l'eau en laissant un sillage derrière lui, alors qu'il s'approchait de l'entrée du couloir. Toujours au-dessus du bassin, il écartait un peu les bras (environ 30°, si vous voulez du détail), et attendit que les deux intrus arrivent.
Et quelle ne fut pas leur surprise, lorsque tous deux se rendirent compte, alors qu'ils étaient encore vêtus de leurs sous-vêtements et en train de se rouler des pelles sans faire attention, de voir un homme plutôt bien bâti, à la longue chevelure noire et trempée, au bras flamboyant d'obscurité, et uniquement vêtu d'un caleçon douteux au travers duquel on distinguait plutôt bien un membre raide qui venait de servir. Ouais, il avait vraiment l'air d'un gros pervers. D'abord surpris, les deux lycées prirent peur, et décidèrent de se barrer avant qu'il ne se passe quelque chose d'affreux. Manque de bol, des chaînes sorties du carrelage étaient déjà en train de s'enrouler autour de leurs poignets et de leurs chevilles, et malgré la résistance futile qu'ils opposaient, ils furent séparés en moins de deux et suspendus de façon, disons... Suggestive? Inconfortable? Provocante? Bon, pour vous donner une idée, leurs mains étaient jointes au-dessus de leurs têtes, et leurs jambes étaient écartées.
"Excusez-Moi hein, généralement je fais pas ce genre de truc sans consentement. Mais bon, d'une vous nous dérangez, et de deux ma copine là-derrière a besoin de se faire des connaissances, vous voyez!"
Bon, c'était un peu sadique d'offrir ainsi deux cobayes à une demoiselle qui n'avait été que cela toute sa vie. En même temps ne fais pas à autrui ce que tu ne veux qu'on te fasse n'était jamais qu'un slogan bateau qu'un type victimisé avait inventé pour s'en sortir, en se faisant passer pour un homme de savoir. Un truc de perdant quoi...
Il se tourna vers sa maîtresse, tendant sa main ondulée de noir vers elle, souriant. Il était vraiment malsain, ce type.
"Ma chère? Veux-tu t'amuser avec Moi? Ou préfères-tu qu'on les dégage?"