Cela faisait quelques mois que Niqa avait quitté le Donjon de Tat’wir, découvrant le monde petit à petit, le fonctionnement des villes, ce que signifie vivre en société, l’importance de l’image, la noblesse, la royauté, le travail, l’argent et encore une montagne de concept qu’il n’avait vu que dans des ouvrages ou par les récits de ses compagnons. Il pouvait donc les expérimenter pour la première fois de sa vie et éprouver les contraintes, les désagréments ou encore les joies qui allaient avec. Il pouvait au moins retenir quelque chose de cette quantité d’informations qu’il recevait, c’est qu’il n’était clairement pas d’accord avec tous ce qui se faisait. Il avait déjà eu ce ressentit durant ses études dans le Donjon, mais à présent, il pouvait confirmer la chose, le système actuel n’était pas correct selon son sens de la justice et de l’harmonie.
Il comprenait l’importance de l’argent, mais il trouvait que la monnaie avait une place bien trop centrale dans le système. Il devait être une aide, pas forcer les gens à courir derrière, il se devait être méritocratique aussi et pas revenir simplement à la personne usant des pires coups bas ou profitant de ce qui appartenait aux autres. C’était ça aussi son autre problème, la noblesse dans le monde lui semblait bien trop corrompues et agissant uniquement pour son bien. Il n’y avait aucune entraide au bout d’un moment, plus l’avarice était grande et la fortune immense, plus cette dernière semblait effacer la bonté d’une personne. Même dans le Donjon, les monstres possédaient un plus grand esprit de cohésion.
C’était son jugement de départ, mais ces nouvelles expériences vinrent compléter sa vision de Terra et du fonctionnement des autres races et de l’humanité. Il comprenait bien vite que le système n’était pas vraiment corrompu, simplement que les humanoïdes venaient profiter des failles. Celui-ci semblait reposer sur la confiance, mais c’est la perversion des Humains et des autres espèces qui est venue bloquer les rouages d’un tel monde. Il avait rencontré des personnes aussi perverties que la noblesse, alors qu’ils n’avaient rien en rapport avec leur statut et inversement. Il ne pouvait donc pas juger tout un système simplement par un représentant, c’est l’individus qu’il devait juger et faire son idée de la personne en lui-même, pas simplement de son reflet. Il devait donc condamner une personne, non pas un pays.
Pourquoi se faire ce genre de réflexion maintenant ? La raison était simple, Niqa assistait à une scène qui affligeait son sens de la justice et de la morale Un humain à l’apparence plus proche du porc sur deux pâtes que de sa propre espèce, il beuglait dans les rues en se pavanant de ses habits de rouge et d’or, un cliché sur pattes, mais Niqa ne pouvait savoir ce genre de chose. Le fait de voir l’homme se balader n’était pas le véritable problème dans cette situation. Non, l’être de mana devait assister à l’autre partie de la scène, un enfant ayant renversé quelque chose sur l’être noble, du moins, c’est ainsi qu’il se présentait.
Ce dernier s’était confondu en excuse pour pardonner son geste, même sa mère était intervenue pour proposer un dédommagement. Le nouvel arrivant pouvait lire la peur dans le visage de la mère et l’enfant. Pourquoi autant de crainte pour une telle affaire ? De simple excuse suffisait, surtout qu’il n’y avait pas mort d’homme. Niqa comprit alors bien vite la raison de cette peur dans les prunelles des deux habitants. Une main se leva pour frapper l’enfant, le faisant tomber au sol sous le regard de sa mère. La frappe venait du porc, qui possédait une sacrée poigne, au vu de son physique. La violence ne s’arrêta pas là, il leva le pied pour marteler l’enfant de ses assauts, le rouer de coup, comme s’il cherchait simplement à l’écraser.
La mère hurlait, faisait le nécessaire pour arrêter le noble. Il finit alors par se stopper, en repoussant la jeune femme et criant des propos pour négocier le pardon. Si la femme se laissait le noble profiter de son corps comme bon lui semblait, il pouvait pardonner l’enfant qui était déjà contusionné et à moitié absent. L’être de mana sentait une forme de rage bouillir en lui, comment pouvait-on agir ainsi ? Et surtout, pourquoi personne ne venait réagir à cette situation ? Aucun villageois ou même la garde ne semblait lever le petit doigt. Pourquoi donc ? Parce que les gardes étaient sous l’affiliation directe du noble, que les membres de cette ville étaient sous la peur ? Il se mordait la lèvre sous une telle injustice ne pouvant laisser cela se produire.
Niqa commençait alors à chantonner à voix basse, dessinant des symboles de ses doigts. Il préparait un sort à l’aide de chaque main, les faisant en décaler pour les exécuter bien rapidement. Tout en faisant cela, il ne quittait pas la scène des yeux, voyant la femme se déshabiller d’elle-même pour obéir à ce porc, ce qui dégoutait encore plus le magicien. Heureusement pour elle et lui, il finissait d’incanter ses petits sorts à temps, lançant le premier. L’effet de celui-ci fut assez immédiat, les vêtements du noble prirent rapidement feu, sans brûler sa peau, simplement pour le mettre à nue comme un vilain porcelet. Une fois ce spectacle surprenant terminé, il lançait son deuxième sort, basé sur l’élément vent. Une bourrasque vint à balayer le noble pour l’écraser contre un mur et le maintenir ainsi, contre la paroi.
L’être de mana se dévoilait alors aux villageois en rejoignant la jeune femme et l’enfant. Une fois à leur côté, il ouvrit son grimoire pour sortir de quoi couvrir immédiatement la demoiselle. Il ne tarda pas ensuite à chantonner un sort de guérison, afin de porter les premiers soins à l’enfant. Cependant, il n’eut jamais le temps de terminer ces derniers, le noble ayant hurlé que l’on tue l’homme. Et pour une fois, les gardes vinrent à réagir, prenant par surprise Niqa qui était concentré sur son sort. Il ne le finnisa jamais, sentant une lance passer par son dos pour ressortir par son estomac, choquant la population. Il faut dire que le noble avait demandé sa mort pour outrage contre la noblesse.
L’opale ne se laissa pas décontenancer, ayant assez de force pour faire lâcher prise au garde et se retirer la lance sous un imposant râle de douleur. Sans attendre, il fit en sorte de régénérer sa blessure, sa condition spéciale l’empêchant de mourir sous une telle action. Il était prêt à se défendre, jusqu’à entendre encore aboyer l’autre crétin nu et écraser contre le mur. Il ordonnait à tous les villageois de l’attraper, l’attaquer ou même le tuer, si personne n’osait le faire, ils seraient condamnés à mort. Au vu de ce que ce porc avait déjà fait, Niqa le sentait totalement capable de mettre sa menace à exécution. De plus, il n’avait clairement pas envie de se battre contre des personnes vivant dans l’oppression.
L’homme n’avait donc pas trente-six solution pour s’en sortir, il devait fuir cette situation. Il grognait de mécontentement, se retournant pour prendre ses jambes à son cou, repoussant les passant essayant de le bloquer et s’engouffrant dans la première ruelle qu’il trouvait. Le voilà mêler à chasse à l’homme et il était le gibier.