Le droit chemin [Sentinel]

HRP : Comme convenu, je n'interviendrai pas ce tour pour laisser un peu de temps à Dick et Ciara d'échanger quelques mots^^

Ciara sursauta en sentant une main se poser sur son épaule. Son regard azur se leva, inquiet, puis surpris face à ce visage inédit encore. Elle se redressa, et adressa un sourire à celui qui venait d'arriver, et qui en plus avait eu la gentillesse de lui apporter un thé. Mieux encore : un américain ! Ciara remit une mèche de cheveux derrière son oreille, avant d'entourer le gobelet de ses mains, à la recherche d'un peu de chaleur. En anglais, elle le remercia, et confirma la première impression de Dick :

- Effectivement, ce n'est pas la grande forme... Je suppose que c'est le cas de la plupart des gens qui se retrouvent ici...

Encore un pauvre sourire, avant qu'elle ne plonge ses lèvres dans le thé au citron, brulant. Ciara eut un sursaut, mais trouva un certain réconfort dans la chaleur de la boisson. Elle sourit à nouveau à Dick, et le remercia.

- Je m'appelle Ciara Macross. Quant à ma présence ici...

Elle haussa les épaules et poussa un soupir. Dick et Gabriel, c'était un peu le jour et la nuit. Cependant, ils étaient collègues... Si ça restait difficile à imaginer que deux personnes aussi opposées puissent être du même côté... Et si Ciara n'était pas du genre à médire habituellement, elle allait encore moins le faire dans le cas d'un flic... Et face à un de ses collègues de travail.

- Il faudrait demander à votre collègue... Le blond qui a des bleus partout.

Ciara poussa un nouveau soupir et plongea le regard dans son gobelet de thé. Elle remua le liquide ambré avec la touillette en plastique, et avec un sourire en coin, elle finit par relever les yeux vers Dick.

- Ca fait du bien d'entendre quelqu'un parler la même langue. J'étais justement en train de me laisser avoir par le mal du pays...

Ciara souleva à nouveau son gobelet, et souffla dedans pour refroidir le thé.

- Dites moi... Votre collègue... Il est toujours comme... ça ? Enfin, je veux dire...

Elle dut réfléchir quelques secondes avant de choisir le mot :

- ... Rancunier ?

Richard « Dick » John Grayson sourit à la jeune femme, elle faisait un peu peine à voir…. Elle semblait un peu perdue…. En même temps ça se comprenait, rien qu’à entendre sa voix on sentait qu’elle était comme lui, non, pas irrésistible, quoique, mais un peu perdu, pas d’ici. Elle était elle aussi sans doute des USA, peut-être du Canada, mais pas d’ailleurs, ça se reconnaissait à l’accent de son anglais. Quoique non, pas du Canada. Maintenant, côte est ou côte ouest ?  Là par contre….. allez, on parie !  Côte est !  Mais vraiment au hasard !

Ciara Macross… très joli prénom, peu commun aussi d’ailleurs, il ne dit rien mais ses magnifiques yeux pétillèrent de malice. Il n’oublierait pas un tel nom. Il continuait de sourire, compatissant. Il avait laissé sa main sur son épaule, comme pour la rassurer alors qu’elle pouvait profiter du thé qu’elle avait entre les doigts, dans le gobelet en plastique merdique.

Ainsi c’était Gabriel qui était derrière tout ça. Il soupira et amena un tabouret à côté d’elle. Il s’assit, retirant enfin la main de son épaule. Il l’entendit parler de sa mélancolie, de son mal du pays. Il comprenait. Oui, lui aussi il avait beaucoup eu le mal du pays, mais il avait choisi de s’éloigner, et même si c’est dur, c’était une question de volonté. Son seul lien avec les USA était Bruce Wayne avec qui il restait quelques peu en froid depuis la catastrophe Barbara, tragique accident…

Puis vint la vraie question : Gabriel !  Oui, un sacré zouave ! Est-ce qu’il était toujours aussi rancunier ? Bonne question…. Hum…. Il avait le choix, lui répondre honnêtement, ou la rassurer…. Va pour un mix des deux…

« Ce type, rancunier ? Une belle saloperie ouais ! »

Il avait commencé à parler en anglais, il serait plus libre en faisant ainsi ; il se souvenait que Gabriel ne connaissait pas cette langue.

« Mais de ce que j’ai vu, il vous a  dans le pif... c’est rare qu’il se frappe comme ça… oui, j’ai l’habitude de le voir dans cet état quand il veut faire accuser quelqu’un….  Mais ça tiendra pas, ne vous en faites pas ! Il faudra juste quelques heures avant qu’il ne vous libère. Vous avez de quoi appeler chez vous… euh enfin…. Là où vous loger ? Que l’on ne s’inquiète pas ! »

Il soupira à nouveau et lui  adressa un clin d’œil.

« Par contre, pour le mal du pays, il y a un bar pas mal, le patron est de Starcity, il est très sympa, vous verrez… il s'appelle Junior... mais tout le monde le surnomme Gunner, ne l'appelez pas Junior, il n'apprécierait pas ! Dites lui que c'est Dick qui vous envoie... »

Il fouilla ses poches, pas de papiers, seulement un stylo. Il soupira et pris la main de la jeune femme.

« Vous permettez ? Je n’ai pas de papier.... »

Et si elle était d’accord, il lui inscrivit l’adresse au creux de la paume.

Et bien, la voilà rassurée ! Ciara poussa un soupir, teinté l'un très léger et à peine audible gémissement... Ce Gabriel, elle le savait, allait lui pourrir la vie, et lui mettre sur le dos des crimes qu'elle serait incapable de commettre. On la renverrait aux Etats-Unis, et ne pourrait plus mettre les pieds au Japon. Non que pour l'instant, elle y ait énormément de liens, ou de contacts... Mais elle n'osait imaginer combien de gens elle allait décevoir si elle devait être rapatriée. Cependant, Dick la rassura aussitôt. Ainsi, ce n'était pas la première fois que ce Gabriel se frappait pour inculper un innocent ? Mais quel genre de flic était-il ? Son regard bleu clair restait planté dans celui de l'américain, surprise de l'entendre un peu parler ainsi de son collègue... De l'autre, soulagée de savoir qu'elle ne serait pas traitée comme une criminelle hautement dangereuse, et qu'elle serait sans doute relâchée dans la nuit... Avec un peu de chance, elle n'aurait pas à raconter cette histoire à qui que ce soit... Quelle honte, et quel dérangement ce serait, n'est-ce pas ?

- Ne vous en faites pas... Je suis venue ici avec mon sensei de kenpo... Et il sait que je suis dehors à cette heure ci... Et, il n'a aucune raison de s'inquiéter pour moi... Enfin, sauf s'il ne me voit pas au petit dej ?

Petite moue contrite, mais soulignée d'un sourire. Non, vraiment, avec les supers pouvoirs qu'elle possédait, Sakuragi-sensei n'avait aucune raison de s'en faire pour elle, et l'homme devait dormir sur ses deux oreilles. Le remède contre le mal du pays que Dick lui prescrit agrandit ce sourire, et son regard se fit reconnaissant. Ciara sursauta, cependant, quand il lui prit la main, et demanda à écrire dessus. Elle hocha simplement la tête, incapable de prononcer un mot. Et, réellement innocente, elle répondit, le regardant écrire dans sa main :

- Je ne sais pas si j'oserai y aller seule, et en votre nom... Mais c'est gentil, j'irai faire un tour...

Elle rit légèrement, alors que la pointe du crayon lui chatouillait la paume. Et une fois que Dick eut finit d'écrire, Ciara leva la main au niveau de son visage, pour y lire l'adresse... Et un *crac* sonore la fit sursauter... Et fermer les yeux. Et zut... Elle continua à lever la main, pour constater la cassure nette d'un des maillons des menottes. Un soupir, et elle demanda à Dick :

- Pour ça... Ce Gabriel va me coller quoi sur le dos ? Délit de fuite ? Acte de terrorisme ? Utilisation illégale sur le territoire japonais de sup...

Oups... Seulement à ce moment là, Ciara se rendit compte que ça pouvait surprendre Dick, ce qui venait de se passer... Ce n'était pas donné à tout le monde de briser des menottes comme ça... Elle ne cachait pas ses pouvoirs - et franchement, le justaucorps qu'elle portait avec son jean laissait supposer que ce n'était pas sa tenue de tous les jours... Mais sans nul doute qu'elle venait de se fiche dans une panade pas possible. Ciara se mordit la lèvre inférieure, détourna la tête et reposa les deux mains sur la table. Mais la chaînette cassée était toujours, hélas, une triste réalité...

Que faire, que dire ? Ciara était trop gênée pour proférer le moindre son, à présent...

Alors elle n’était pas venue seule, mais avec un maitre de kempo. Kempo chinois ? Cela faisait partie des arts martiaux qu’il avait appris. Intéressant… un échange peut être un jour. Cela pourrait être une belle leçon à apprendre pour lui comme pour elle. Enfin bon, ce n’était ni le lieu ni le moment. Il opina du chef. Elle serait rentrée à temps pour le petit déjeuner, et Gabriel la ferait même raccompagner. Ça, il en faisait son affaire !  foi de Richard Dick John Grayson !

Elle parla de ne pas oser, mais bon, elle verrait ce serait très agréable comme ambiance, chaleureux, bon enfant !  Et son lait grenadine était à tomber ! Si, si ! Lait grenadine !  Quoiqu’il devait y avoir d’autres fruits rouges là dedans ! Ce n’était pas un vrai lait grenadine, mais cela restait sa boisson préférée !  Pas d’alcool pour le héros !

En voulant voir l’inscription, elle fit, au grand étonnement de Dick casser net les menottes. Bon, il en fut étonné mais pas surpris…. Il connaissait superman, Superboy, Wonderwoman, Donna… au final, rien de cela ne pouvait vraiment l’étonner… mais il se tut. Elle ne l’avait pas fait exprès. Mais oui, elle avait raison, elle pouvait avoir des ennuis avec Gabriel pour cela… il lui chuchota :

« Au pont où vous en êtes, retirez les menottes complètement, je dirai que c’est moi qui vous les ai enlevées ! »

Il ne releva ni super pouvoir, ni remarque là-dessus. Il ne voulait pas la mettre mal à l’aise.

« Ou alors je peux vous mettre les miennes à la place, ce sont les mêmes serrures… »

Il montra sa ceinture où de l’autre côté du corps, en face de l’arme, il y avait les menottes d’accrochées.

« Ah et chez Gunner, demandez le lait grenadine !  Délicieux ! »

Ce ne fut que pour changer plus vite de sujet.

« Kempo vous avez dit tout à l’heure ? J’ai pas mal de pratique en la matière, il faudrait que je le rencontre si vous êtes d’accord… »

Il ne semblait pas surpris plus que ça qu'une fille aux poignets aussi fins puisse briser aussi facilement une paire de menottes. Ciara coula un regard de chiot battu vers Dick, mêlé de surprise. Mieux encore, il lui donnait les solutions pour ne pas avoir Gabriel sur le dos pour rien. Avec un soupir, Ciara acheva la paire de menottes et les retira, posant les débris déformés sur la table... Mmmh...

- Je crois qu'il vaudra quand même mieux que vous me passiez les vôtres, inspecteur. Et cacher les traces de ce crime ?

Elle désigna du bout du doigt les menottes cassées...

Puis, comme pour la mettre à l'aise, il changea aussitôt de sujet, parlant du lait grenadine. Et Ciara en sourit. Elle notait mentalement que sa première commande serait donc un lait grenadine, alors. Mieux encore, Dick enchaina sur le Kenpo. De gêné, son regard pétilla, et son sourire s'agrandit encore un peu :

- Oui, du Kenpo Kai. Je fais aussi du Tai Chi Chuan, pour la relaxation. Sakuragi Sensei a quitté le Japon pour venir enseigner aux Etats Unis, et c'est ainsi que nous nous sommes rencontrés... Il a voulu que je participe à une compétition organisée par le Dojo où il a tout appris... Nous sommes au...

Ciara dut réfléchir quelques secondes, avant de retrouver le nom du Dojo où elle logeait. Sans parvenir même à s'en souvenir.

- C'est le Dojo de Watanabe-san. Je n'ai plus l'adresse exacte en tête, je suis navrée...

Elle lui donna cependant quelques points de repères, qu'avec un peu de chance, il reconnaitrait. Ciara n'était pas à Seikusu depuis si longtemps, et le japonais restait parfois assez brumeux pour qu'elle s'y perde... Alors, maintenant qu'elle parlait américain, nul doute qu'elle ne retrouverait pas un mot de japonais avant quelques minutes.

- Sakuragi-sensei est un homme vraiment extraordinaire. Je suppose qu'il sera ravi de vous rencontrer, surtout si vous êtes vous-même adepte et pratiquant de kenpo...

Ciara était même sur le point de proposer à cet illustre inconnu de s'entrainer ensemble, mais elle s'arrêta net, et rougit même légèrement... Vite, change de sujet, Ciara... Son regard se tourna vers la porte, craignant de voir Gabriel Valmy débarquer...

- Vous croyez que je peux m'en sortir, ce soir ? Je veux dire... Je ne vais pas être rapatriée pour ça ? Je n'ai qu'un visa de touriste...

Elle était charmante et Dick comprenait exactement pourquoi Gabriel s’acharnait, cet abruti fini, ou du moins, il le devinait aisément, il avait la fâcheuse tendance à s’acharner sur les personnes un peu trop gentilles… Tout simplement. Il sourit en la voyant reprendre un peu des couleurs à la mention de son addiction… enfin, addiction, le terme était un peu fort ! Il était ravi de lui avoir un peu remonté le moral. Mieux encore, le kempo semblait être le bon sujet à aborder. Mais s’il n’aimait que moyennement le kempo kai par rapport au kempo traditionnel, cela n’en restait pas moins intéressant ! Et de toute manière, dans un combat entre arts martiaux différent, il ne fallait pas savoir déterminer quel art surpassait l’autre, mais quel adepte maîtrisait le mieux son art. Car après tout, comme le signalaient beaucoup de grand maitres, l’ennemi était tapi en nous, certains se laissaient parfois  vaincre, entrainant des situations désastreuses, mais pas tous.

Elle lui expliqua où ils s’entrainaient et il nota les indications données, il voyait à peu près où c’était, et bien il irait tester. Bien qu’il ne soit pas de taille à rivaliser avec un maitre, il se débrouillait bien dans bon nombre de disciplines et excellait même dans certaines, mais  de là à rivaliser avec un maître, non, il n’était sans doute pas de taille… Bruce ne l’aurait pas forcément été non plus. Mais il pouvait y faire un tour.

Mais chassez le naturel, il revient au galop. Elle revint bien vite  à ses craintes basiques. Il comprenait très bien, oui ses craintes étaient justifiées, très largement justifiées même. Mais pas pour si peu. Il sourit et posa une main rassurante sur la sienne alors qu’il saisissait de l’autre ses menottes pour les lui installer.

« Ne vous en faites pas, vous savez, c’est comme un chien, il aboie beaucoup, et mord peu, là il va aboyer, menacer, mais il ne mordra pas vraiment, il sait que si on fait un examen médical, on verra qu’il s’est blessé lui-même…. Il va se mettre à pousser un peu la gueulante, il va menacer, mais il finira par vous relâcher faute de preuve… et s’il va trop loin, mon bureau est le troisième à droite… »

Il sourit et revint sur un sujet qui leur plaisait énormément à tous les deux, le kempo.

« A vraie dire, car j’en reviens au kempo, je n’ai jamais vraiment pratiqué le kempo kai, il s’aghirait plutôt du kempo chinois traditionnel, même si les maitres sont difficiles à trouver, surtout aux USA, même dans les quartiers chinois, mais sinon, oui, le tai-chi, le karaté kyoku-shin, le taekwondo, jujitsu, et d’autres. Mais tout expérience est bonne à prendre. Pour la relaxartion, je pivilégie un peu de philosophie zen avec les méditations du zazen. »

Il aurait pu parler ninjutsu, kung fu, et d’autres, mais inutile d’aller trop loin ou elle comprendrait, autant éviter. Il n’avait cité que les disciplines qu’il flic pouvait décemment apprendre. Et tout en parlant il lui mettait d’autres menottes, puis il  ferma le poing gauche, le poing droit venant le saisir pour le serrer légèrement alors qu’il inclinait la tête. Le salut traditionnel de kempo.

« S’il va trop loin, appelez moi, et s’il vous enferme ou tente un coup bas de trop, je m’occuperai de vous faire sortir, ne vous inquiétez pas. Il a des méthodes très peu conventionnelles, mais souvent des résultats, donc beaucoup le laissent faire…. Beaucoup trop sans doute… »

Foutue paperasse !  Il en avait raz le bol. Il rempli les papiers d’usage et comme il n’e faisait pas souvent ou lui fit remplir d’autres documents tant qu’à faire, mais ça le faisait chier. Il avait mal à cause de cette trainée blonde et en plus il ne pouvait même pas se la farcir à tout les coups, ne serait-ce que parce qu’il ne pouvait pas l’encadrer. Elle lui avait fait perdre deux bonnes heures au mieux, une demi-journée au pire…. De quoi bien foutre les boules !

Il ratifia le dernier papelard d’une signature, et excédé, s’en retourna  vers le box ou devait l’attendre  supergirl… ou quelque soit son nom. Macross… Macross, ce nom continuait de lui tourner en tête mais il était incapable de savoir en quoi  ça lui rappelait quelque chose. Ça lui était familier, mais rien de plus, comme s’il l’avait déjà entendu sans savoir où… chez Hitomi… ouais ptêtre, elle ramenait tant de mecs qu’au fond, ce n’était pas impossible qu’il ait entendu le nom dans sa bouche…

 Lentement il e dirigea vers le box d’interrogatoire. Quelle ne fut pas sa surprise d’y voir quelqu’un d’autre ! Ce salopard de Grayson, où, comme on disait ici Guressonn… il avait été son coéquipier pendant deux semaines avant de faire un rapport sur lui à la hiérarchie, selon lui, Gabriel était un mauvais coéquipier…. Il lui avait d’ailleurs mis une beigne à cette occasion…

« Grayson, dégage, ça te concerne pas ! »

Limite s’il n’avait pas aboyé l’ordre, alors que, canette de bière dans la main, il entrait dans le box.

« T’as rien à foutre ici, c’est mon enquête, retourne faire tes conneries de paperasse ! »

Ciara pensa, intérieurement, combien Grayson était charmant. Non pas dans le sens "prince charmant" ou "il me fait un effet fou", mais juste, combien cet homme était sympathique avec elle... On était si éloigné de Valmy... Cependant, cela ne la rassura pas de savoir que Gabriel risquait encore de s'en prendre à elle, verbalement. Et même si Dick parla kenpo, et arts martiaux en général, cela ne suffit pas à faire disparaître le poids qui lui pensait dans l'estomac, comme une boule de neige. Voire même un bonhomme de neige... Ciara reprit son gobelet de thé, et le finit d'un trait, espérant - en vain - faire disparaitre cette sensation désagréable.

En tout cas, elle lui adressa un sourire quand il lui proposa de l'appeler si elle avait besoin, et elle hocha la tête... Tout en remarquant :

- Je me vois mal vous appeler en criant, quand même... Mais je suis touchée par votre proposition, c'est gentil de votre part.

A son tour, elle le salua comme on le faisait au kenpo, un sourire au coin des lèvres. Mais voilà, le moment de détente était terminé, et Gabriel Valmy débarqua, plus sympathique encore que tout à l'heure. Ciara recula un peu dans sa chaise, les épaules légèrement voutées... Cet homme là, elle venait d'apprendre qu'il était capable du pire pour obtenir ce qu'il voulait. Ciara en avait eu un aperçu dans cette ruelle sombre. Elle baissa les yeux, vraiment intimidée... Et puis, passer d'un homme aussi doux et prévenant que Dick à la brute épaisse qu'était Gabriel, il y avait de quoi avoir un vertige.

Mais la jeune femme posa les deux mains à plat sur la table, et même si son regard souligné d'un sourire se releva un instant vers Dick, alors qu'il partait, Ciara ne regarda pas vers Gabriel, trouvant la contemplation de la table bien plus intéressante. Elle se mordit même l'intérieur de la lèvre inférieure, ignorant ce qu'elle devait dire... Ou non, justement, elle devait se taire... Manquerait plus qu'elle fasse une nouvelle gaffe... Gabriel avait du trouver assez de choses à lui mettre sur le dos, inutile d'en rajouter. Il ne lui restait plus qu'à attendre la tempête. Et inutile de préciser que Ciara était angoissée...

Il sourit à sa remarque, mais n’allez pas croire qu’il était stupide, il savait quand quelqu’un angoissait, ou du moins, il savait en reconnaitre les signes visibles pour avoir tenté  et souvent réussi à les inspirer. Il savait qu’elle angoissait. Pouvait-elle être comme toutes ces personnes qu’il exécrait jusque là cause de cette incapacité à dépasser ses propres angoisses… des gens bien pouvaient après tout se trouver soumis à cette idée… enfin bon, bref, peu importe, ce n’était pas vraiment le moment d’y songer.

Oui, le moment était mal choisi car un certain monsieur colérique était de retour… première chose qu’il fit, il s’y attendait :  lui gueuler dessus… quoi de plus logique ? Rien, Gabriel ne savait pas. Il soupira et se leva, non sans presser doucement l’épaule de la jeune femme, un peu comme s’il voulait l’apaiser et la rassurer. Un geste pour lui dire : « Tenez bon !  Courage ! »

Mais néanmoins, le jeune homme ne put se résoudre à partir sans un bon mot bien senti à qui de droit.

« Gabriel, je me fiche pas mal de ce que tu peux vouloir faire, mais si tu vas trop loin, je te promets que même Tsubahana ne pourra pas te protéger contre les emmerdes ! »

Il se tourna vers la jeune femme et lui sourit, un signe d’encouragement avant de lui lancer :

« Ne vous laissez pas faire par cet abruti. »

Et joignant le geste à la parole, le jeune homme il mit une tape derrière la tête de Gabriel, comme pour lui faire remettre les pieds sur terre. Oui, très simple comme geste, mais bien exécuté, avec la bonne dose de force, àça faisait quand même mal. Violence gratuite ? Non, c’était amplement mérité !

Il posa une dernière fois  la mains sur l’épaule de la jeune femme et  sortit.

Hé beh, Grayson était en forme, il le croisait rarement depuis cette histoire de rapport, mais le peu qu’il le croisait, comme il venait de le montrer, était de trop. Oui, très légèrement de trop… et les menaces aussi étaient de trop. Peut être qu’il ne s’en rendait pas compte, mais il aggravait le cas de la jeune femme en s’en mêlant.

Il n’avait cure de ses menaces, elles n’étaient qu’un excitant au fond, un peu d’adrénaline en plus, et placez sur Gabriel un interdit, vous en verrez les conséquences : il ferait tout pour passer outre. Sans le vouloir, Dick venait de condamner la jeune femme à passer une nuit plus que pénible !

Il attendit que Dick soit parti, ne trouvant rien à répliquer, se retenant juste de lui mettre une puissante beigne dans la tronche en réponse à sa tape, et il regarda s’en aller avec une moue méprisante sur le visage. Et une fois seule, il s’assit de l’autre côté de la table, croisant ses mains, coudes sur la table quelques instants, comme s’il réfléchissait, ou que Grayson lui avait vraiment fait perdre des neurones avec sa tape derrière la tête…. Enfin, il sortit des documents un ^peu froissés qu’il avait à remplir avec elle.

« Bon, nom, prénom, date de naissance, lieu de naissance et tout l’état civil tant qu’on y est ça me cait chier, mais ça va te faire chier aussi, crois moi… »

Il lui tendit un document et un stylo. Elle pouvait très bien remplir le dossier sans lui, et ce serait plus long dans le cas contraire…

« Et c’est surtout que j’ai beau vouloir me venger – il avait baissé d’un ton  en disant cela, comme s’il ne voulait pas être entendu – je sais que tu sais lire ! Je te pense pas assez stupide pour  ne pas savoir lire un document en japonais. »

Il appuya ce dernier mot. C’était l’esprit de vengeance sans doute, mais voyons voir si une citoyenne américaine avait les capacités pour se démerder avec ce document en kanjis….

Ciara adressa un nouveau regard reconnaissant à Dick au moment où il quitta la salle d'interrogatoire, et une fois qu'il eut disparut, son sourire en fit de même. Elle regardait un noeud dessiné dans la table, et le reflet de la lumière pauvre sur les nouvelles menottes qui lui enserraient les poignets. Dick avait fait attention à ne pas trop les serrer, histoire qu'elle puisse quand même se mouvoir un minimum sans avoir à répéter le tragique incident de tout à l'heure. Et fort heureusement, Gabriel ne semblait pas avoir remarqué le supercherie.

Il se vengerait autrement, de toute manière... D'ailleurs, il se dépêcha de déclencher les hostilités et de donner un crayon et les papiers qu'elle devait remplir... Pour quoi ? Sa déposition ? Il pouvait très bien s'arranger pour la falsifier aussi, supposait-elle. Ciara baissa donc les yeux vers les feuilles chiffonnées - quel professionnalisme... - resta un instant interdite devant toute cette écriture japonaise... Bien entendu, il n'allait pas prendre les papiers bilingues... Ciara releva la tête vers lui, et releva les poignets :

- Et je suppose que si je vous demande de me retirer les menottes pour écrire plus facilement, vous... refuserez...

Ciara eut sa réponse rien qu'au petit sourire en coin de Gabriel. Ca, c'était clairement un non, voire même un "Je vais prendre mon pied à te voir galérer." Un soupire. Pourquoi ce n'était pas Grayson qui prenait sa déposition, hein ? L'américaine saisit le stylo, approcha la feuille, et la mit légèrement de travers pour la lire, et écrire dessus. Non, elle ne demanderait pas la version avec les sous titres. Elle allait lui prouver, à ce blondinet imbu de lui même, qu'elle pouvait y arriver. Les sourcils froncés, elle déchiffrait lentement, écrivait tout aussi lentement.

Elle croisa les jambes sous la tables, faisait régulièrement tourner le stylo sur son pouce, ou entre ses doigts, prenant le temps de bien écrire nom, prénom, adresse sur le territoire japonais, etc... Mais le tout en caractères occidentaux. Evidemment. Sur ce coup là, si quelqu'un devait prendre un blâme, ce serait lui.

Et bien entendu, il fallut que la jeune femme s'en veuille alors à ce propos. Gabriel n'était peut-être pas un bon flic selon ses critères à elle - même si ses références s'arrêtaient aux séries télé du genre CSI, ou aux flics qu'elle avait côtoyé par chez elle... - mais s'il avait des résultats, et que c'était important ici... Même si ses méthodes laissaient à désirer, selon elle...

Bref, elle n'avait pas le droit de prendre sa petite revanche comme ça. C'était puéril d'entrer dans son jeu. De l'autre... Elle se demandait si c'était vraiment à elle de remplir ça, et non à Gabriel ou, mieux, à l'avocat de l'ambassade. Cependant, elle ne dit rien, et se contenta de rentrer la mine dans le stylo, et de rendre le tout à l'inspecteur. Et elle croisa les doigts, les yeux à nouveau rivés sur la table. Et advienne que pourra.

Perspicace !  Non, il ne lui enlèverait pas les menottes, rien ! Ce serait plus drôle, il eut une envie folle de lui répliquer qu’elle n’avait déjà pas les mains dans le dos !  Donc inutile de répondre à sa question, juste un petit sourire en quoi, le petit sourire qui est là pour dire « tu vas en baver ! » Oui très simple ! ais tellement vrai…

Il la regarda remplir en caractères romains le document et s’il pouvait lire, comprenant un peu l’anglais et surtout, habitué à cet alphabet par le français qu’il maîtrisait très bien. Mais il avait bien envie de faire chier, alors pourquoi se priver de ce plaisir qui l’envahissait, ce plaisir qui lui était fait de se venger royalement. Il attendit qu’elle ait fini pour lui dire, sur un ton amusé, mais son amusement personnel uniquement sans doute.

« T’aurais au moins pu faire l’effort d’écrire correctement, que ce soit lisible pour nos services ! »

Il déchira la feuille et sortit du box pour en ramener d’autres.

« Ah, ces amerloques, toujours le mot pour rire ! Bon, fais-le correctement au moins ! Sinon, Tu vas rester plus longtemps ici ! Remarque ce n’est pas moi que ça dérange, hein ! Moi je reste ici toute la soirée, j’ai tout mon temps ! »

Il eut un petit rire avec un regard mauvais. Oui, il se vengeait lentement, il se vengeait avec délectation… la vengeance était un plat qui se mangeait surgelé, mais depuis, on avait inventé le four à micro-onde ! Il se leva pour faire les cent pas de son côté du box.

« En tout cas, tes bracelets sont sympa je trouve acier véritable… »

Ciara soupira. Oui, la réaction de Gabriel avait été prévisible. Pourtant, elle ne pouvait s'empêcher de se montrer un peu agacée. Ses doigts tapotèrent rapidement la table, avant d'attraper la feuille qu'elle regarda. Elle était capable, bien entendu, d'écrire son nom en Kanjis. Le reste... Sa grammaire était encore bancale, et son vocabulaire assez limité. Elle n'allait pas l'avouer à Gabriel, évidemment. Il exploitait assez ses points faibles comme ça. Et puis, ce serait lui donner l'opportunité de la rabaisser encore un peu. Il avait assez à matière comme ça...

Ciara reposa la feuille sur la table, et l'empêcha de glisser en posant la main à plat dessus. Elle pouvait remplir cette feuille, mais elle ne le ferait pas. D'ailleurs, il lui sembla important de le lui dire.

- Je ne vais pas jouer les bêtes de foire et remplir plusieurs fois votre dossier, inspecteur.

Le bref moment où elle l'avait regardé, elle s'était montrée presque sure et déterminée. Cela ne l'empêcha pas de baisser les yeux pour se perdre à nouveau dans la contemplation de la table, et des reflets de la lumière dessus. Elle se tint parfaitement immobile, le dos droit. Ses menottes ne la gênaient plus, même si leur contact glacé la mettait mal à l'aise.

- Moi aussi, j'ai toute la nuit, vous savez.", ajouta-t-elle bravement."Et dès 8h, je suis sure que l'avocat de l'ambassade sera ravi de venir remplir les dossiers en japonais... Avec un document officiel bilingue."

Parce que Ciara était sure que quelqu'un comme Gabriel, malgré son envie de se venger d'elle pour rien, n'allait pas risque de se mettre une grosse institution comme l'ambassade sur le dos pour ses enfantillages. Au pire, il allait l'enfermer en cellule pour la nuit, pour refus d'obéir... Ou quelque chose comme ça.

Ainsi donc elle refusait de remplir une nouvelle fois cette demande ? Soit si ça devait se passer comme ça, et bien soit ! Il patienterait pour qu’elle signe…. Ou il trouverait autre chose…. Il avait une idée complètement débile et peut être un peu humiliante pour elle…. Mais quelle idée ! Il s’en gaussait d’avance, donc elle serait forcément mise en pratique ! Il souriait peut être un peu bêtement d’ailleurs devant son refus de re-remplir les papiers…

Il la regarda droit dans les yeux, sans même l’écouter alors qu’il reprenait le formulaire et le retourna pour avoir une feuille blanche. Il se foutait de ce qu’elle déblatérait comme conneries et prit un crayon de papier pour tracer les caractères japonais, en kanji, pour illettrée avant de la planter là une fois ses quelques mots de bravade terminés, il la regarda dans les yeux avec son éternel sourire en coin sur les lèvres. Un salopard ? Il en était un et il l’assumait complètement !

« Très bien, perdons notre temps, mais pas inutilement… »

Il s’en fut et revint avec un rouleau d’adhésif noir de bricolage. Il en découpa une bonne longueur avant de s’approcher de ses lèvres. Pour lui sauter dessus et lui attacher ce bâillon improvisé. Pour le reste, il avait une autre idée qui viendrait bien assez tôt ! Oui, il lui mettrait bientôt cette grande étiquette improvisée dans le dos.

« Disons que comme ça, tu peux te foutre tes foutaises bien au fond de ton superbe cul pour qu’elles y reste.  Je n’aurai plus besoin de les écouter… et comme ça aussi, c’est…. – il fit une courte pause qui soulignait le calme du box – haaaaaaaa beaucoup mieux. Je sais, on va communiquer par signe. Tu peux toujours faire oui et non de la tête !  C’est déjà ça ! »

Il sourit et lui fit une pichenette sur le front.

« Moi je trouve ça amusant. On peut même faire un tour dehors si tu veux !  Mais alors je t’accrocherai ça dans le dos ! »

Il lui montra l’écriteau qu’il avait fait et lui sourit comme un gosse.

« Si tu veux quoique ce soit, dis, le n’hésite pas ! »

Connard….