Il y a de ces personnes, qui de part leurs simples gestes, savent à vous montrer la voie à suivre. Non pas en la désignant du bout du doigt, mais d'une manière bien plus subtile. C'est un art dans lequel excelle tout grand manipulateur et qu'il se doit de parfaire tout au long de sa vie, les personnes et les moeurs changeant à chaque seconde. Il est difficile pour une personne dépourvue d'un minimum de jugeote, de percevoir ces petits signes, ces petites choses qui lui montrent par A + B, qu'il est en train de se faire berner. Ce sont les personnes les plus faciles à atteindre, celles que l'on arrive très certainement à faire entrer dans nos rangs avec un simple sourire ou un simple froncement de sourcils. En bref, des personnes tout bonnement inintéressantes. Comment trouver plaisir et gloire à asservir cette caste inférieure, qui ne verrait jamais pas plus loin que le bout de son nez et qui ne comprendrait jamais à quel point nous lui sommes supérieurs. En contrepartie, faire d'un chef de rang, d'un haut magistrat ou même d'une simple personne haut gradé dans la société, un de nos jouets favoris, résulte d'une grande victoire. D'un sentiment incommensurable de pouvoir.
A jouer ainsi avec le maître en la matière qui trône devant moi, je sais déjà qu'il sera fort simple de le faire entrer dans mon jeu, puisque lui-même en connait les règles par coeur. Il s'agira donc d'une lutte sans merci, cherchant à désigner lequel de nous deux mérite vraiment le titre honorifique de "maître". La lutte ne sera pas sanglante comme l'on pourrait en voir sur les champs de bataille entre deux chefs de guerre, non, elle sera peuplée de sous entendus, de vices et de menaces dissimulées. Nos yeux parlerons pour nous même, nos mots se feront plus tranchant que des lames de rasoir, nos gestes seront lents et calculés et l'issu de cette bataille n'engendrera aucun blessé. Quoi que... La frontière entre la souffrance et le plaisir n'est-elle pas assez mince pour qu'on ait peine à distinguer l'un de l'autre ? C'est donc à corps perdu que je me lance dans cette nouvelle épopée, certaine dans tous les cas, d'en ressortir comblée.
A présent, les dés sont jetés. L'issue peut-être fatale, comme elle peut se dérouler d'une façon tout à fait alléchante. Les deux corps si proche l'un de l'autre se grisent de frissons. Les tons de voix se font suaves et menaçants. Comme deux prédateurs en chasse de la même proie, la lutte s'apprête à commencer. Y'aura-t-il un gagnant ? Doit-il y avoir un gagnant ? La réponse est rude a être prononcée tant les protagonistes sont similaires. Moulés à même la même glaise, semblant être ancrés dans le même destin funeste.
A la suite de mes mots, il semble s'apaiser. Tout du moins en apparence et finit par rouler sur le côté pour atteindre le bar, et ainsi se saisir de son verre qu'il boit d'une traite. Je hausse un sourcil, considérant que même si l'ont est habitué à l'alcool, boire d'une traite un verre presque plein de scotch, est une pure folie. Je fronce néanmoins les sourcils, consciente à présent que le philtre ne fait plus son effet. Après tout, je pense déjà en savoir suffisamment pour faire moi-même quelques recherches sur le sujet en question, par la suite.
Sa phrase me fait sourire. Comme si j'avais pu avoir un quelconque intérêt pour ses bijoux de famille. De plus, le coup qu'il aurait certainement reçu, n'aurait été destiné qu'à le faire tomber de son perchoir, au pire rouler quelques instants par terre. Je n'étais pas suffisamment en position pour les lui faire ravaler. Bien que je tiens tout de même à le concéder, la chose aurait été fort dommage. Sait-on jamais, elles peuvent toujours servir.
A présent délestée de son poids, je descends de la table, ramassant le verre sur le sol pour le reposer docilement sur la table, comme si je scellais cette partie de la soirée. Passons à autre chose. Mais alors que je tente à remettre mon escarpins, je relève le regard vers lui. Il se rapproche de nouveau, une lueur nouvelle dans le regard. Certainement les volutes de l'alcool qui commencent à faire leur effet. Je me tiens droite, prête à répliquer à la moindre altercation et il m'informe finalement, se moquer de ce que je peux être. Je souris et il continue dangereusement de se rapprocher alors que je siffle entre mes dents pour signifier un éventuel mécontentement et les mots qu'il prononce alors me donne le ton sur la suite des évènements. Cet air autoritaire et cette possessivité soudaine, je me sens comme prise au piège. Alors que je m'apprête à me dégager, ses doigts se faufilent dans ma chevelure et je sens ses lèvres se poser contre les miennes, me procurant un baiser enfiévré. Sur l'instant, je marque une certaine réticence, bien rapidement balayée par ce désir soudain qui me consume. Le goût du malt enivre mes papilles et mes bras, au demeurant immobiles le long de mon corps, se voient animés de volonté propre et je les noue autour de sa nuque, mes doigts fins se perdant dans sa chevelure.
Je prends alors une poignée de ses cheveux dans la paume de ma main et tire sa tête en arrière fermement.
- Vous me voulez hum ? Il va donc falloir me mériter Mr Aurea.
Et je laisse mes mains glisser le long de son corps, appréciant la fine musculature qui se dessine sous sa chemise, me mordant la lèvre sous l'excitation et je fais glisser les bretelles de ma robe, dévoilant dés lors mes épaules et la naissance de mon décolleté. Toujours un léger sourire aux lèvres, je rapproche son visage du mien pour lui prodiguer de nouveau un baiser, gémissant contre sa bouche alors que je glisse ma langue dans l'antre de sa semblable, collant outrageusement ma poitrine contre lui, épousant son corps à la perfection. Lorsque je juge le moment opportun, je lui mords violemment la lèvre, appréciant de sentir le léger goût métallique envahir mes papilles. Et je m'écarte, appréciant de voir sa lèvre rougit avant de le repousser fermement et de me faufiler hors de sa portée, gagnant rapidement le centre de la chambre.
D'un geste du pied, j'ôte mes escarpins, à présent inutiles et à la fois fort encombrants, comme si je m'apprêtais à une course poursuite, bien entendu impossible dans un espace aussi réduit, et je reste immobile, avant de lui faire un léger signe de l'index, que je glisse par la suite entre mes lèvres.
- Un autre Scotch pour vous donner de l'entrain ?
Et je laisse un rire cristallin s'échapper d'entre mes lèvres, alors que je pose de nouveau sur lui un regard lourd de provocation.