Tadam [ Pv ]

- Tam tadam, tam ... ( 8 )

La fillette chantonnait. Sa voix se glissaient entre les arbres, portée par un vent léger, mais qui suffisait à faire voler sa chevelure dorée. Le bout de ses cheveux, et sa joue gauche, ainsi que ses mains et sa robe blanche sur laquelle elle venait d'essuyer ces dernières étaient tachés d'un sang rouge pur.
La fillette était debout, face à la lune, le ventre bien rempli. Encore un coeur de dévoré ... A ses pieds était nichés, mort, le corps d'une jeune femme. Innocente. Cette pensée ne lui procura aucune émotion. Elle se contenta de remuer, comme pour réveiller son corps engourdis. Elle aimait tant chasser ... La lune lui offrait des reflets presques irréalistes, comme si elle sortait d'une peinture, comme si elle était irréelle. Une étrange anfant que voilà ...

- Tadamm ... Tam !

Elle eut un rire, presque mauvais, et tourna sur elle même. Elle avait cette apparence de môme pré-adolescente, 13 ans presque, et regrettait que son corps ait cessé de grandir. En réalité, elle aurait dû être plus vieille. Cette pensée la fit tressailir. Cette éternelle jeunesse l'aidait suffisamment, les éventuelles proies se sentant en confiance, la cajolant, ne se doutant pas de ce qu'elle cachait réellement derrière ses iris miroitantes.
Elle se mordit la lèvre inférieure, et passa sa langue sur ses lèvres. Elle n'avait pas l'attitude d'une gamine, plutôt d'une prédatrice affamée, cherchant à survivre. Elle avait toujours cette chère armée de démons à ses trousses. Mais sa puissance grandissait de jour en jour. " Et toc ! ".

Elle donna un coup de pied dans un caillou, et continua d'admirer la lune, immobile, debout, dans une sorte de petite clairiére, un cadavre à ses pieds.
Cela donnait un tableau assez macabre, surtout étrange et atypique. Elle ressemblait presque à un fantôme, et continuait de chantonner remuant les mains en rythme, comme si elle tenait des marionnettes au bout de ses doigts.

Le vent soufflait entre les branches, secouant chaque feuille, dans un bruit qui rappelait à Maxence un nid de serpent à sonnettes.
Cigarette aux lèvres, il marchait, mains dans les poches. Tantôt il regardait le sol, tantôt la Lune. Une idée qui lui était venue durant son heure de musculation. S'il arrivait, à force d'entrainement, à soulever un poids de fonte croissant, alors, il pourrait probablement réussir à dominer peu à peu les tremblements et les accès de colère que l'approche de la Pleine lune exerçait sur lui. Peut-être même au point, il l'espérait, de pouvoir se souvenir à force des nuits qu'il passait enchainé à son lit quand il était transformé. Pour le moment, il n'avait conscience que de s'endormir harnaché aux montants et de se réveiller les muscles douloureux et la couverture déchirée. S'il pouvait garder conscience de ce qu'il faisait quand il se transformerait, voilà qui serait une idée autrement plus séduisante que de se réveiller un jour à nouveau la bouche en sang.

- Passer mes nuits enchainé où à me geler les couilles dehors... Nom de Dieu, pourquoi je dois faire ce genre de choix ?... se dit-il en expédiant les braises orangées de sa cigarette dans la nuit.

Il leva le visage, yeux fermé, cherchant à tâton son paquet de clopes dans sa poche et profitant du vent frais sur son visage. Il n'avait pas marché beaucoup, pourtant il transpirait. Ça lui avait déjà fait ça la dernière fois, et il se doutait que c'était un des symptômes lycanthropique.
Une fureur qui croissait en lui; une envie de cogner, de gueuler, et surtout de baiser jusqu'à plus soif. L'envie de manger aussi. Des steaks à peine saisit sur le grill, servit dans une assiette baignée de sang. Il se voyait déjà couper de généreuses portions de chaire, les déguster longuement, le goût du sang salé comme celui de la lycéenne qu'il avait tué, un plat si bon qu'il en sentait sa queue se raidir...

- Bordel, t'es en train de péter les plombs... Tu mélange tout...

les yeux toujours fermés, il fixa une nouvelle cigarette entre ses dents, l'alluma, et...

Tam tadam, tam ...

 Ça, ce n'était pas les feuilles. Une voix, très clairement.
Il s'approcha, oubliant sur le moment les reflets de la lune dont les rayons tombant sur lui brulait sa peau comme un soleil en plein juillet.

Tadamm ... Tam !

Il suivit ces sons, jusqu'à distinguer des éclairs blancs entre les troncs noirs... Il s'approcha encore.
L'instinct de flic lui fit remarquer immédiatement la masse forme au pieds de l'ombre blanche; Un corps, pour sûr. Aux pieds...
D'une gamine en robe blanche... Qui avait l'air de sortir d'un conte de fée... chantonnant toute seule, fixant la lune...
Non, pas si blanche, la robe... Il distinguait des taches sombres de motifs plus foncés...
Son odorat balaya toute les spéculations qui s'enchainait dans son esprit, un odorat qu'il n'avait jamais su si développé.
Du sang.
Une fois cette info assimilée, la première réaction qu'il eu fut...
Elle est sexy avec ses fringues tachées, elle....
Nom de Dieu mais tu déconnes ou quoi ?
Il se mit violemment une grande claque mentale dans le cerveau, ce qui le calma. Par réflexe, il chercha son .45 dans le hoslter derrière son dos, mais le laissa pendre au bout de son bras. Un rayon de lune l'éblouis un instant, et il secoua la tête, faisant tomber de son visage quelques gouttes de sueur. Il y était devenu tellement sensible que la lune lui paraissait un gros phare halogène dans l'obscurité.

- Que.... Ho, Gamine, ça va ?

Mais qu'est ce que c'était que cette question, se dit-il une fois qu'il s'entendit la prononcer. A croire que son esprit perdait de perspicacité au fur et a mesure que ses pulsions reprennait le dessus. Il plissa les yeux sous la concentration pour essayer de chasser des envies de mordre voluptueusement la gorge de la gamine...

- Je... T'es blessée ?

La jeune fille n'eut qu'une réponse. Elle tourna doucement la tête vers lui, le fixant de ses yeux clairs et vifs, entrouvrant la bouche.
Un long filet de sang coula, d'entre ses lèvres jusqu'à son menton.
Décidemment, cette soirée ne serait pas habituelle ! Un bon coeur avalé avec fierté et délice, et voilà qu'une nouvelle proie se présentait face à elle. " Proie ? Fais attention. " Elle plissa les yeux, le dévisageant de haut en bas, sans répondre. Et elle bougea, reculant, pour lui montrer le corps à ses pieds, qu'elle dissimulait grâce à son ombre. On pouvait clairement, maintenant, y voir davantage qu'une forme pâteuse. On distinguait un corps humain, allongé ...
Elle n'avait pas peur.

Elle fixa l'inconnu, fronça les sourcils. Il n'était pas humain, jusqu'à nouvel ordre. Une analyse compléte fit comprendre qu'il était même armé. Une fille de démon sentait le danger.
Elle inspira. Se mordit la lèvre inférieure. On la croirait folle, ainsi.

- Non, murmura t'elle.

Un long sourire s'étala sur ses lèvres. Un sourire qui n'était pas celui d'une gamine de 13 ans.

- La forêt est bien dangereuse, continua t'elle. Que faites-vous ici ?

Elle haussa un sourcil. Elle ne bougeait pas, le fixant, clignant à peine des yeux. Le corps, à ses pieds, commençait à empester. Elle passa sa main sur sa bouche. Et essuya à nouveau ses mains sur sa robe.

Que..Quoi ?

« Qu'est ce que vous faites ici ? » Mais c'était sa réplique à lui, ça !
Maxence s'avanca, oubliant totalement la cigarette au coin de ses lèvres qui laissa tomber une large portion de cendre sur sa veste.
La gamine dévoila son ombre sur le corps qu'il avait deviné. Un cadavre salement travaillé... Corps qui …
...Qui lui rappelait t'état dans lequel il avait laissé la lycéenne... Et il se surpris une nouvelle fois à apprécier le travail. La cage thoracique était efficacement écartée sur un mélange baignant de sang et d'organes.
D'où il était, Maxence comprit qu'il manquait pourtant quelque chose dedans.
Il suivit des yeux les traces de sang... qui l'amenèrent malgré lui sur les chaussures, les mains, la robe blanches... Et sur ce visage qui le fixait dans les yeux.
Elle.
Il plissa une nouvelle fois des yeux sous le rayon de lune, essayant de faire défiler chaque hypothèse dans sa tête. C'était sa grande sœur qui avait prit les coups pour elle, agressé par un groupe de junks. C'était sa mère qu'elle était partie cherché voyant qu'elle rentrait tard, la trouvant la serrant dans ses bras. Oui, et c'est ça qui était la cause de ce sang sur elle. Il faisait plus confiance au humains, pas après ce qu'il avait vécu. Mais elle, nom de Dieu c'était une enfant, ça rentrait pas dans le cadre c'était trop...trop...
Emily lui aurait peut-être ressemblé si elle avait été encore en vie... Elle aurait eu quel age aujourd'hui ?... Il n'arrivait même plus à se concentrer...
Maxence s'approcha encore... Tout ce qu'il comprenait, c'est que ses tentatives pour trouver une raison cohérente, une raison qui pouvait entrer dans les ruines de son système de valeur étaient vouées à l'échec. Ce corps, ce sang, cette fille, et dans les yeux de celle-ci, quelque chose qui.. le soulageait.
Le spectacle était beau. Oui. Peut-être était-ce La lune, mais... ce tableau semblait auréolé d'une douce lumière blanche. La robe immaculée brillait si forte, que les traces de sang paraissaient noires.
Il eut envie de gouter ce sang.
Se rendant compte de sa pensée, il cracha sa cigarette au sol et fit sauter la sécurité de son arme pour se donner une contenance.

- … Qui est-elle ? Demanda-t-il en pointant du menton le corps au sol.

Aussitôt, la jeune fille s'approcha du corps. Elle s'accroupit à son niveau, fouillant sans aucune honte les poches de la veste de la jeune femme. Ainsi, elle se tachait davantage les mains, mais s'en moquer.
Elle était une petite fille bien obéissante. Il voulait connaître l'identité de cette femme ? Il l'aurait. Le seul souci étant qu'elle ne connaissait même pas elle-même le nom de sa victime. Mais, par moquerie, amusement ou dieu-sait-quoi-d'autre, elle voulait donner une réponse claire. Dans une poche, elle trouva un porte-feuille. Un bilet y trainait, elle le rangea dans une poche de sa robe, puis elle attrapa la carte d'identité de sa proie.
Elle la tacha de sang, mais la nettoya avec sa robe. Elle la laverait plus tard, ce n'était pas le plus gênant. Et de sa voix claire, elle énonça :

- Elizabeth Mc Blien. D'origine écossaise.

Elle fronça les sourcils.

- Jamais goûté. C'était donc ça l'arrière-goùt ? s'étonna t'elle à voix haute.

Elle se retourna vers l'homme, se revelant, jetant la carte plus loin.

- Je le surnomme "mon repas de ce soir", assena t'elle d'un ton moqueur.

Un nouveau sourire vint naître, la faisant sourire d'une lueur maline. Elle n'inspirait pas confiance, mais s'en moquait pas mal. Il avait une arme, elle s'en moquait aussi. Elle avait toujours ses cartes sur elle, pour la défendre, en cas de soucis. Elle le craignait cependant un peu, elle possédait aprés tout un instinct de conservation assez virulent.
Mais qui était-il, lui ? Elle l'interrogea du regard, puis lui fit un signe de la main.

- Baissez cela, vous allez blesser quelqu'un, dit-elle d'une voix presque lasse, sur un ton quasi banal.

Au contraire, Maxence releva l'arme et la pointa sur la gamine.

- Si ça ne te vexe pas, je préfère la garder ainsi.

Il savait, aussi pertinemment qu'il faisait nuit, que cette arme ne lui serait pas d'une grande utilité. Mais les années à braquer des clients récalcitrants avec pour en obtenir une soudaine coopération avait fait de ce geste un exorcisme aux doutes.
C'était avec incompréhension qu'il avait vu la gamine fouiller le plus naturellement du monde dans les poches du cadavre, sans éprouver le moindre dégout apparent.

- Elizabeth Mc Blien. D'origine écossaise.

Ce a quoi il avait répondu d'un rire bref, plus proche de l'aboiement.

- Alors c'est bien toi qui l'a tuée... murmura-t-il comme pour lui-même. Le monde était bien devenu cinglé, il marchait sur la tête,; mais peut-être avait-il toujours été ainsi,; et lui n'était qu'un des nombreux aveugles dans le monde de Dieu. Jusqu'à maintenant.

Il rit une nouvelle fois, et de sa main libre vint chercher sa flasque, qu'il dé bouchonna du pouce avant de s'en envoyer une bonne gorgée. Non pas qu'il en avait besoin, il ne s'était jamais au contraire sentit si calme, si... à sa place. Comme lorsqu'on se trouvait face à la solution d'une énigme qui nous taraudait depuis des années.
Non, il but pour calmer l'envie qu'il avait de gouter ce sang. Et ce whisky lui parut alors plus plat que de l'eau.

- Bien... bien bien bien.. Si je te dis que c'est dangereux pour une gamine comme toi de se ballader seule si tard, tu m'enverras me faire foutre, n'est ce pas ?...

Il oscilla un moment sur ses pieds, en proie à l'hésitation.

- Et puis merde, dit il brusquement en rangeant son arme dans son dos. Pour ce que ça apportera toute façon...

Il s'approcha jusqu'à se trouver juste à côté du corps, face à la jeune fille. Il se retrouva baigné dans l'odeur de sang. Un sang qui commençait à se révolter d'être ainsi à l'air libre et dégageait une odeur qui devenait désagréable.

- Qu'est ce que tu es ? Demanda-t-il enfin, alors qu'il s'accroupissait au dessus du corps. Un loup t'as bizouillé toi aussi ? Un.. une chauve souris , t'es peut-être une foutue sorcière. Si ça se trouve, t'es même carrément le Diable incarné ? Ton prénom, c'est Reagan ?

Il releva les yeux, se retrouvant face au bassin de la jeune fille, que le sang plaquait contre sa peau. Il ferma les yeux et revint au cadavre...

- J'entends repas, et je vous ici un morceau qui manque. Je n'ai jamais été doué en biologie. Un poumon, le foi ? Il s'appuya doucement sur les bords de l'ouverture dans la poitrine du corps, comme s'il scrutait l'intérieur d'un gouffre sans fond.

- Le coeur ! répondit aussitôt la jeune fille, d'un ton enjoué.

Ce ton qui évoquait celui d'une enfant ravie de montrer son dessin à sa mère, ou sa dernière trouvaille, même. Elle pouvait presque paraître adorable, ainsi, avec sa chère et tendre voix ... Si seulement ses paroles étaient aussi mignonnes, et non pas si dures et sanglante.
Elle leva doucement la main, en direction du policier. Son doigt pointa le coeur de l'homme, sans le toucher, comme pour appuyer ses paroles.
Puis elle prit une moue un peu boudeuse, fronçant les sourcils.

- Le foie, ce n'est pas bon. Trop amer. Les poumons, pas terrible. La cervelle, assez plausible. La chair, bonne.

Elle eut un sourire, et s'abaissa à son niveau. D'un geste vif et acéré, elle colla la paume de sa main sur le coeur de l'homme, le tapant presque.

- Mais le coeur ... C'est le meilleur.

Son sourire s'accentua. Elle retira sa main. Elle ne comptait pas l'avaler tout de suite, cet homme. Elle s'installa en tailleur, sur le sol, comme si le lieu était équipé pour cela, comme si la situation était bien choisie.
Elle comptait bien décliner son identité, mais ne souhaitait pas le faire tout de suite. Elle chantonna doucement, regardant l'homme dans les yeux. Il avait rangé son arme. Cela signifiait qu'il était tout à fait en état de l'assassiner sans son arme. Elle sourit.

- Je m'appelle Liliza. Je viens des Enfers. Je tue les démons.

Elle avait ce ton fier, heureux. Elle haïssait ces gens. Elle fronça les sourcils, chassant ses souvenirs. Puis, sur le ton d'un jeu innocent et enfantin, elle le fixa, les yeux dans les yeux.

- Qui es-tu ?

Maxence sentit un courant électrique lui traverser les veines au contact de la main de la jeune fille, sans pouvoir définir si la sensation lui était agréable ou non.
Fou l'ambiguïté qu'il ressentait depuis sa rencontre. Cet être qui semblait si inoffensif, et qui sortait les pires saloperies qu'il ai jamais entendu, peut-être probablement justement parce qu'elle n'avait pas le...
Le corps pour ?. Mais est ce que ça avait une importance ici de toute façon ?
Le cœur c'est le meilleur... Il avait constaté sur sa propre scène de crime qu'il n'avait pas éviscéré sa victime. Il avait dévoré sa chaire en longues portions, et l'avais violé, sauvagement à en croire les marques de ses griffes enfoncées dans la taille et l'état du vagin de la victime. Mais son cœur, non. Peut-être que c'était ça, les pulsions des lycans. La chaire, sous toute ses formes, mais sans violer la barrière protégeant l'intérieur du dehors (à l'exception du sexe). Il prit mentalement note d'essayer ça si un jour il devait contrôler le loup, et qu'il trouvais une victime adaptée. Il n'était pas encore assez dingue pour attaquer un innocent.
Elle, elle tuait des démons. Il y avait donc une éthique chez elle aussi ? De toute façon, qu'aurait été la réincarnation de la mère Thérésa qu'il voyait massacré au sol qu'il n'aurait pas été troublé outre mesure. Ces questions d'innocences lui semblaient toujours plus lointaines.

- Je... je ne suis pas un démon. Tout du moins je ne crois pas, dit-il en songeant néanmoins, tout en fixant les yeux de la jeune fille comme deux grands lacs profonds qu'il aurait subitement trouvé très agréable de se laisser déguster le cœur, ou n importe quel autre organe par elle, si du moins elle continuait de le regarder de cette façon pendant le repas.

Il se racla la gorge. Chercha une autre cigarette dans sa poche.

- Tu es des enfers Mais tu chasse les démons... Donc tu chasse tes congénères ou... Ou il existe autre chose que des démons ?

C'était hallucinant,, ils étaient tout deux accroupis devant un cadavre dépecé et le voilà qui s'intéressait la démographie d'un « Enfer » auquel il n'avait jamais cru, tout au plus deviné lors de son coma...

- … Il existe donc bien une porte, un chemin, qui même... d'ici... à un... « Autre » endroit ?... c'est...

Il s'allongea subitement sur le dos, juste à côté du cadavre. Au dessus de lui, la Lune continuait de briller trop fort à son goût. Il alluma sa cigarette et posa son poignet sur ses yeux pour se protéger, comme un vacancier sur la plage.

- Foutu délire... Foutu délire... Il s'obligeait à se répéter ses mots, essayant de les faire prendre sens dans son esprit, car aussi absurde que ça puisse paraître, il n'était pas choqué de toutes ces révélations.

La jeune fille cligna des yeux, interloquée.
Quoi ? Il n'était pas au courant qu'il y avait un Enfer ?
Quel être étrange. Elle croisa les bras sous la poitrine, le dévisageant. Il n'avait pas l'air bien. Elle avait tendance à oublier que les humains étaient naïfs et peu rêveur. Ils refusaient d'accepter en face une réalité qui apparaissait devant eux aussi souvent que possible ; tout existait ici.
Elle s'apprêtait d'ailleurs à lui faire la leçon, à ce jeune homme. A lui expliquer pourquoi, comment, même si cela devait prendre des heures et des jours. Elle aimait ce sentiment de supériorité qu'elle avait sur les gens, savoir qu'elle en savait plus, qu'elle était plus cultivée, intelligente peut-être, malgré son âge ...

Elle tendit la main, et attrapa la cigarette de l'homme pour la mettre dans sa bouche, lui volant son tabac.

- C'est simple. A partir du moment où tu croirais quelque chose, cette chose naîtra.

Elle tira une bouffée sur sa cigarette.

- C'est ainsi que sont nées divinités, Enfer et Paradis.

Elle le regarda, souriante. L'explication était simple. Elle ne comprenait pas pourquoi un homme pouvait être si fermé à ce qu'elle voyait comme une éventualité.

- Et plus tu y crois, plus cela donne de la puissance. Tu me suis ?

Elle n'avait pas besoin de cela, elle. Elle avait juste besoin de vivre. A force d'affirmer, de croire, de créer, l'homme avait bâtit un monde qui existait, qu'il le veuille ou non.
Au fond, si elle vivait, c'était à cause des humains. " Et toc ! " Elle eut un sourire de contentement. Puis rendit sa cigarette, à moitiée entamée, au jeune homme, sans cesser de le regarder.

- Tu n'as pas répondu à ma question, dit-elle en lui enfonçant la cigarette entre les lèvres.

- Maxence...Edouard Masden...

La cigarette qu'elle lui planta entre les lèvres avant un goût de sang. Il aspira profondement la fumée.

- Inspecteur Masden, attention... Veuf... Divorcé de... héhéhé.. de l'état de New-york... Et fils d'un tueur en série qui doit à l'heure actuelle encore ressembler à un esquimau à la morgue... Un esquimau sans tête...

Il parti d'un rire étouffé entre ses dents, faisant s'envoler la fumée de sa clope en petits nuages irréguliers. Il avait explosé le crane du lycan qui l'avait contaminé; Comme Oedipe, il n'y avait pas mieux.
C'était plausible après tout, oui. Les humains créent ce qu'ils croient. Une pensée sérieuse, concentrée et...

- .. Et pouf, dit-il en essayant de saisir un nuage de fumée.

Les rayons de lunes chauffaient son visage; Il transpirait.

- … Et donc.. Poursuivit-il d'une voix étranglée... Donc.. C'est en partie à moi que tu dois d'exister, si je me trompe pas... je suis... je suis ton père, héhéhéhé...

L'herbe lui piquait la nuque, et il sentait certains brins se faufiler sous sa chemise et agacer le bas de son dos. Il tendit les bras, dans une parodie de Christ en croix, sa main gauche venant se poser sur le visage de la morte à côté de lui.

- Vient faire un gros câlin à ton papa... hahahaha !

Il se sentait bizarre. L'idée qu'il était timbré s'infiltrait de plus en plus dans son esprit, et s'il l'était, autant avoir l'attitude qui convient.
Une grande lassitude l'abattit soudainement. Il n'avait plus envie de se lever. Il se voyait bien rester là, allongé à côté d'un corps déchiqueté et d'une bouffeuse de cœurs jusqu'à ce que ses collègues ne viennent l'enfermer en cellule et lui foutre ce meurtre sur le dos.

La petite fille le regarda s'amuser ainsi. Il avait des paroles amusantes, empreintes d'une folie pure et fière. C'était plaisant à entendre, vraiment. Elle qui se croyait folle semblait avoir, face à elle, un adversaire, et digne surtout.
A l'entendre ainsi parler, elle avait presque le sourire. Elle connaissait son prénom, maintenant. Même si cela ne l'avançait pas à grand-chose, en vérité. Demander un prénom était une preuve d'amabilité, de politesse, voilà tout. Au fond, connaître le prénom d'une personne n'était pas si importante.
Les habitudes humaines s'ancraient en elle. Elle grogna.
Puis elle l'entendit parler. Le " Je suis ton père " la cloua sur place. Et son sang ne fit qu'un tour. Immédiatement, elle plongea sur l'homme, le saisissant royalement par le col, pour le rapprocher d'elle, le visage tout proche. Ses yeux si bleus étaient obscurcis.

- Mon père ? grogna t'elle. Si tu avais le malheur de l'être, je te jure que je t'aurais déjà terrassé !

Elle lâcha son col, le rejetant en arrière. Faire référence à sa famille la contrariait. Elle détestait ce père absent, cette mère lubrique, son enfance quasi orpheline dans un climat détestable. Elle détestait ses origines, et la vie qu'elle aurait menée si elle était restée en Enfer.
Elle poussa un long soupir.
Elle lui jeta un regard noir.

- Tu es complétement fou, n'est ce pas ? Il paraît que c'est ainsi que se comportent certaines personnes, la nuit.

Elle parlait en connaissance de cause, ne chassant que la nuit.

- Tu vas me faire quoi, grand mèchant loup ? demanda t'elle d'une voix amusée.  Elle te fait quoi, la Lune, au juste ?

Ses yeux brillaient de curiosité, de défi. Elle avait en face de lui une folie pure. Elle adorait cela ... Elle passa sa langue sur ses lèvres tachées de sang.

Quand elle relâcha son col, Maxence en fit tomber sa cigarette encore allumée dans son col de chemise. Il se claqua vigoureusement la poitrine pour l'éteindre, avant de retomber sur le dos, un gros soupir melé de rire.

- Héhéhé bé, pendant un instant j'ai bien cru que tu allait m'embrasser de force !

Il resta étendu au sol, avant de s'étirer., et se laissa lourdement retomber ses bras en croix, donnant au passage une violente claque au cadavre.

- Oups.. Désolé ma chérie... Bien... Désolé dans ce cas... j'espère que j'aurai laissé de meilleurs sentiments à ma fille si elle avait pu atteindre ton age...

Son regard se voilà un instant.

-  Tu es complètement fou, n'est ce pas ? Il paraît que c'est ainsi que se comportent certaines personnes, la nuit.

Maxence parti ce coup ci d'un grand éclat de rire, qui se répercuta contre les arbres. Un grand rire profond, théâtrale, qu'il ne s'était jamais entendu avoir. On aurait dit un vampire de cinéma.

- Oui, je... je crois que la nuit va commencer à avoir des effets de plus en plus puissants chez moi... je vais finir par devenir de mauvaise compagnie...
- Tu vas me faire quoi, grand mèchant loup ? demanda t'elle d'une voix amusée.  Elle te fait quoi, la Lune, au juste ?

Le ton qu'avait employé Liliza lui serra soudainement la gorge, comme si une main chaude lui tordait, la gorge et le ventre. Pendant un court instant, il ne vit plus ce corps d'enfant, mais une femme, dans toute sa plénitude, couverte de Lune et de sang écarlate. Au creux de son ventre naissait à nouveau cette furieuse envie.
Il se redressa sur ses coudes, baissa les yeux sur sa chemise et déboutonna ses trois premiers boutons pour enlever la cigarette éteinte. Sa peau avait gardé une marque rouge, et un point sombre désignait l'endroit ou le tissu s'était consumé sur sa chemise.

- Grand méchant loup... Oui, je crois que ça résume bien, dit-il en souriant, dévoilant des canines qu'il avait toujours eux assez pointu. Mais je crois qu'un grand méchant loup n'est pas le compagnon nocturne idéale pour une petite chaperonne rouge comme toi, dit il en pointant du doigt les taches rouges sur sa robe blanche. Cette lune, me fait...

Il la vit se passer malicieusement la langue sur les lèvres.

- … Me donne envie de lécher ce sang sur toi.

Il se surpris en s'entendant prononcer ces paroles qu'ils n'avait pas eu le temps de passer par sa conscience. Mais il su pourtant que s'était l'exact vérité.

La jeune fille ouvrit de grands yeux ébahis.
Il parlait sérieusement, le grand méchant loup ?
Et elle jouait le rôle du petit chaperon rouge ? Elle eut un sourire. Savait-il réellement son âge ? Elle était une adolescente coincée dans un corps de gamine pré-pubére, voilà tout. Son esprit était plus elevé que celles qui avaient son apparence.
Et c'était bien mieux ainsi. Elle l'écouta, presque conquise par tant de folies. Elle trouvait cela étrangement poétique. Sa manière de faire, de parler, son comportement. Il était plus qu'une simple humain désabusé et déçu par la vie et son systéme totalitaire. C'était charmant ! Un grand méchant loup, et un petit chaperon rouge, tout les deux atteints d'une folie dangereuse ...

D'un bond, elle se leva, et le salua d'une mince révérence.
Elle se mit à tournoyer sur elle-même, riant.
Puis elle défit sa robe, l'ôta et lui lança au visage. Dessous, elle n'était pas nue, non. Elle portait une sorte de robe de nuit fine et simple, fluide.

- Tu aimes le sang ?

Elle éclata de rire.
Et lui lança un regard inquiétant.

- J'ai faim.

Un sourire. Aussitôt, elle fit mine de se ruer sur lui, mais sautant devant lui, proche du cadavre, et attrapa la main du corps inerte. D'un bond, elle arracha le pouce, et le fourra dans sa bouche. On aurait dit une petite cuisse de poulet. Elle l'avala sans aucun probléme.
Elle sortit une carte de sa poche, et la remua. Celle-ci les entoura un instant de brume, et fit dissoudre le corps.

- Il n'était plus bon. Chair flasque, expliqua t'elle.

Elle se nettoya la bouche avec la main, et essuya cette même main sur la chemise du policier, la tachant de traces de sang.
Ses lèvres et ses joues restaient barbouillées de quelques restes d'hémoglobine, lui donnant un air d'enfant affamé.

- Tiens, si tu aimes le sang ...

Elle éclata de rire, puis le fixa. La scéne était atypique, inquiétante. Mais jouer à la folle l'amusait. Elle aimait la bonne chair, le sang, la souffrance. Mais pas les cadavres qui empestaient.

L'odeur puissante, enivrante du sang le prit de plein fouet. Comme si le contact sur son propre corps, celui du sang et celui de cette fille décuplait le pouvoir qu'exerçait ce parfum sur lui. Il ferma les yeux, comme prit de vertige. Et saisit soudainement la main de Liliza, la gardant quelques instant plaquée contre lui.... Avant de la porter à ses lèvres, et de sucer un de ces doigts.
Ce courant électrique qu'il ressentit fut terriblement plus puissant. Il le sentit parcourir sa salive, de la pointe de sa langue et s'enfoncer dans sa gorge jusqu'à son estomac qu'il sentit se contracter douloureusement de plaisir...
La robe que lui avait jeté Liliza était toujours sur lui, tombant sur ses cuisses quand il se redressait. Elle cachait une érection qui commençait à gonfler sa braguette.
Maxence lécha ainsi chaque doigt, les nettoyant e leurs traces de sang, tandis que des yeux, il dévorait le corps de Liliza voilé sous une fine nuisette...
Plus, fut tout ce qu'il réussit à penser en ces instants, avec ce parfum délicieux lui emplissait les narines et la langue, l'intense plaisir qu'il ressemblait à chaque fois qu'il déglutissait sa salive mêlée de sang et du gout de l'épiderme de Liliza.
Les rayons de lune se réverbérait sur le corps de la jeune fille, mais il ne les trouvaient plus désagréable au contraire, ils irradiait une douce chaleur au seins de laquelle il avait envie de s'engouffrer à jamais.

La jeune fille resta interdite en le voyant saisir sa main. Elle avait oubliée - et se ferait un jour taper sur les doigts pour cela - les effets que pouvait avoir la lune sur les êtres humains. En devinant qu'il portait sa main à ses lèvres, elle pensa tout d'abord qu'il voulait la manger, purement et simplement, sans aucun état d'âme.
Elle se préparait à riposter, mais ... N'en fit rien, en voyant qu'il ne comptait pas la boulotter sans regret. Ses yeux vifs s'allumérent davantage, et elle se sentit frissonner. Il semblait aimer particuliérement le goût du sang, celui là ... Cela l'arrangeait bien, d'ailleurs. Elle le laissa faire, restant presque assise sur le sol, calme, le couvant du regard. Puis, quand il acheva son travail, elle s'approcha de lui.

- Eh, tu es gourmand toi, dit elle d'une voix envoutante.

Aussitôt, sans douleur, elle se mordit la langue, et sentit le sang envahir sa bouche. Ainsi, elle lui sauta dessus, l'enjambant, et l'embrassa, pour lui faire goûter ce sang-là, aussi, qui avait si bon goût. Elle savait que ce goût de sang déserterait vite sa bouche, mais s'en souciait peu. Autant profiter que cet arôme soit présent à ce moment. Ils étaient baignés par la lune, qui semblait plus brûlante que jamais ...