[FINI] La Morsure du Roi [Shad Hoshisora]

Élise avait de puissants alliés, mais encore fallait-il pouvoir les contacter... Et, sur ce point, le pessimisme était plutôt de rigueur. Médonée et Shad étaient toutes les deux prisonnières dans ces lieux, et Shad ne pouvait pas utiliser sa magie, à cause du poison que Charlotte avait distillé en elle. C’était cela qu’il ne fallait pas oublier ; Médonée avait certes des alliés puissants, mais ses ennemis l’étaient tout autant. Pour autant, elle savait, en son for intérieur, qu’Élise était encore en vie. Il fallait mettre fin à cette force d’invasion, et reprendre le contrôle de la Forêt des Toiles. En ce moment, c’était sûrement à cela qu’Élise s’échinait, car il n’y avait aucun autre moyen pour mettre fin à cette guerre. Les forces du royaume ne pourraient jamais repousser celles de White Élise, divisées et affaiblies comme elles l’étaient. La situation était très largement critique, et Shad lui demanda si elle n’avait pas un moyen de récupérer son énergie.

« Pas ici, non... Tu n’es pas la seule à avoir été empoisonnée par Charlotte, ma chérie. Néanmoins, je te confirme une chose... Je n’aurais pas aimé avoir des mandibules sur la tête. »

Fort heureusement, Sha avait aussi veillé à lui donner une meilleure apparence esthétique. Il se dégageait de Médonée une impressionnante beauté bestiale. Elle sourit à l’intention de Shad.

« Ne désespère pas, je suis sûre que ton amie est encore en vie. Un chevalier de Nexus ne peut pas se faire arrêter par ces créatures hideuses, n’est-ce pas ? Et puis... Comme je t’ai dit, j’ai, moi aussi, mes soutiens... »

Médonée savait que Charlotte ne les écoutait pas. L’arrogance de cette femme, c’était ce qui causerait sa perte. Sûre de sa victoire, et sûre de pouvoir maintenant retrouver Élise, elle avait dû s’empresser de partir prévenir ses maîtres, les informer de l’évolution de la situation. C’était donc l’occasion de révéler à Shad quelques informations supplémentaires.

« Il existe une chambre de sorcières dans le royaume... Un culte voué à Sha, et, avec la guerre, elles se sont regroupées à Koldoue. C’est elles qui protègent Élise. Mais ça, tu vois, c’est une information que Charlotte ignore, car elle pense qu’Élise est affaiblie et recroquevillée, seule et isolée. »

Est-ce que Shad verrait où Médonée voulait en venir ? Blessée, torturée, la prêtresse n’avait jamais cessé de perdre la foi, et avait visiblement développé, dans sa tête, une stratégie plutôt efficace.

« C’est elle qui va nous amener à Élise, Shad... Depuis le début, c’est ce que je veux, mais je ne pouvais pas parler trop rapidement, ou Charlotte aurait eu des soupçons. Je regrette que tu aies dû te faire torturer, mais... Crois-moi, nous allons pouvoir prendre notre vengeance sur Charlotte ! »

Depuis le début, Médonée n’avait eu qu’une envie : satisfaire les envies de sa tortionnaire. Elle voulait retrouver Élise ? Eh bien, Médonée n’en demandait pas mieux ! Que Charlotte la suive dans la gueule de la louve, et, toute aussi pacifiste qu’elle fut jadis, Médonée serait ravie de la briser sur place !

« Mais, pour l’heure, tu vas devoir faire sans ta magie, seule Élise, ou les sorcières de Koldoue, pourraient te soigner... Comme moi. »

Elle reprit ensuite sa respiration, et changea de sujet, en souriant légèrement :

« Tu as été en Enfer... Pour toi, ça, ça doit être une promenade de santé... »

Autant essayer, dans la mesure du possible, de détendre l’atmosphère...

« Tu es….incroyable Médonée, fais-moi penser à ne pas  être ton ennemie »

Et pour cause, malgré tout ce qu’elle avait pu endurer, la loyale servante d’Elise n’avait cessé de mettre en marche un terrible plan pour prendre Charlotte à son propre piège. Elle voulait la Reine des Araignées ? Elle allait l’avoir, mais loin de la femme recroquevillée et seule comme elle se plaisait à se l’imaginer. Non, si ce que Médonée disait était vrai, la maîtresse des Arachnistes risqueraient d’avoir une fameuse surprise.  La lycane eut un  petit sourire moqueur face à la dernière phrase dictée.

« J’ai vu bien pire que l’Enfer sur Terra si tu veux mon avis….Ne t’en fais pas pour ma magie, j’ai déjà connu pire avec moins de capacité qu’à présent, mais désarmée et affaibli je ne risque pas d’être fort utile…d’un côté pour ce que tu comptes faire, cela risque d’être un avantage. Je ne pense pas que le poison que Charlotte m’a distillé dans les veines durent éternellement et je devrais, je l’espère, retrouver plus de tonus dans les heures à venir. Mais je vais faire en sorte qu’elle pense que le poison est toujours actif afin qu’elle ne pense pas à m’en inculquer. Je peux me tromper et elle peut très bien le faire à sa guise mais dans le doute…mieux vaut essayer non ? Et puis, on n’y perd rien… »

C’était un pari risqué. Est-ce que le venin avait une durée limitée ? Est-ce que Charlotte allait lui en remettre dans les veines pour s’assurer de sa « docilité » ou  n’allait-elle prendre ne considération que ce dont qu’elle voyait ?   La Terranide misait sur le fait que cette femme était imbue et trop fière d’elle-même pour aller au-delà des apparences.  Si elle était aussi confiante que Médonée le disait, ces points allaient également participer à sa chute.

« Ne t’en fais pas, je sais très bien jouer la comédie si besoin…C’est même le fait de me faire passer pour plus bas que terre qui m’avait permis de m’échapper d’un esclavagiste – un frisson lui parcouru l’échine lorsqu’elle y repensa – un lieu bien pire que l’Enfer…- elle regarda Médonée et lui sourit tendrement - une simple arme blanche pourrait déjà m’aider à faire pas mal de dégâts si mes suppositions sont exactes….maintenant….Nous n’avons plus qu’à attendre… »

Et elles attendirent, partageant quelques mots pour passer le temps jusqu’à cet instant fatidique, cet instant où Charlotte pensait enfin avoir la victoire au creux de ses mains. Comme elle l’avait supposé, l’état de l’Okami s’était nettement améliorée et même si sa magie n’était pas encore présente et qu’il lui faudrait l’aide des sorcières du culte de Sha pour la retrouver, elle était en mesure de bouger normalement. Et de ce fait, de se défendre si besoin avec les moyens du bord. Mais pour l’heure, la Terranide jouait le rôle de l’affaiblie, s’aidant de Médonée pour marcher, montrant les signes de faiblesses liés au poison que Charlotte voudrait voir. Un point qui fut aussi discutée entre les deux femmes.

La maîtresse des Arachnistes s’était entourée d’une petite dizaine de fidèles, prêts à tuer Elise. Sa sœur jumelle, White Elise, continuait ses attaques contre les forts des différentes cités, mettant les régions à feu et à sang. La nouvelle de la capture d’Elise lui était parvenue et elle était parfaitement sûre que la victoire était sienne, que ce n’était maintenant plus qu’une question du temps. Plus qu’une question de temps avant que le piège de Médonée ne se referme sournoisement contre Charlotte et ses sbires.  En pleins milieu de la nuit,  le groupe incongru parcourait les rues de Koldoue.  Grommelant intérieurement, la Lycane n’avait pas songé que ses  mains seraient liées derrière son dos par d’épais fil de soie gluante. Bha peu importe ! Une surprise de taille les attendait de toute manière.  Puis, le groupe se stoppa devant une massive dans une impasse. Une simple maisonnette qui de base n’était pas vouée à attirer l’attention.  L’endroit où se terrait seule et apeurée Elise. Prise d’une confiance sans borne, la maîtresse des Arachniste ordonna à un de ses fidèles de défoncer la porte avant de pénétrer dans la gueule du loup.

Elles durent attendre jusqu’à la tombée de la nuit. Impossible pour Charlotte de se déplacer en plein jour, et, même de nuit, les rues étaient étroitement surveillées. Un parfum de révolte soufflait à Koldoue. La ville était au bord de l’implosion sociale, devant faire face à un afflux considérable de réfugiés, avec toutes les conséquences négatives qu’on pouvait imaginer. Difficile d’accueillir un tel flux de population, de gens désespérés, désœuvrés, affamés et ruinés, qu’on parquait dans des dortoirs, ou dans des camps de fortune aménagées dans de grandes places. La garde était au bord de la rupture, et Charlotte voulait en finir avec Élise.

Ce soir, elle était donc particulièrement enjouée, mais n’avait pas remisé sa vigilance au vestiaire, avançant prudemment le long des ruelles, évitant autant que possible les grandes rues, tout en maintenant Shad et Médonée prisonnières. La priorité était de ne prendre aucun risque, et c’était bien à ce titre que Charlotte avançait prudemment. Médonée, quant à elle, n’était pas idiote. Tenter de prévenir la garde, ce serait aller de Charybde en Scylla, car, avec ses pattes arachnéennes, la jeune femme aurait rapidement été accusée d’être une Arachniste.

Elle guida ainsi le petit groupe jusqu’à un quartier populaire, près du port. Koldoue était bâtie le long d’un fleuve, et son port se composait donc de deux rives, longeant le fleuve, avec une série de ponts permettant de rejoindre les rives. Le groupe se rapprocha donc du port, évitant soigneusement les quelques auberges où des bruits se faisaient entendre, filant le long d’entrepôts silencieux, plongés dans la pénombre.

« On approche ?
 -  Tu le verras par toi-même...
 -  Tâche de ne pas me faire perdre mon temps, petite sotte, ou tu sais ce qu’il en coûtera à Shad ! »

Médonée n’ajouta rien, devant toujours donner le rôle d’une femme forcée. Elle avança entre deux entrepôts, remontant une ruelle étroite, qui conduisit à une impasse, avec plusieurs portes fermées. Médonée désigna de la tête une porte, et Charlotte sourit, puis fit signe à un homme de l’ouvrir. Ce dernier obtempéra, et, assez rapidement, fractura la porte, donnant sur une petite cour d’entrée avec un seul arbre, et une porte derrière, menant sur un immeuble de trois étages. L’Arachniste s’avança en premier, tandis que Médonée attendait.

Le temps sembla se suspendre, et, quand l’Arachniste força la porte, il déclencha un mécanisme de défense, somme toute, assez classique. La poignée de la porte était reliée à un fil suspendu qui se détacha, déclenchant l’ouverture d’une trappe piégée, qui se redressa au milieu du salon, crachant une série de pieux acérés, qui transpercèrent la monstrueuse bête, l’envoyant s’écrouler sur le sol dans un hurlement de douleur.

« Quoi ?! »

Des rideaux de feu jaillirent alors à l’entrée de l’impasse, bloquant cette dernière, pendant qu’une silhouette se téléporta juste devant Charlotte, et la repousdsa à l’aide d’un sort d’Air, envoyant valdinguer la femme dans un grognement de colère. Cette dernière se fracassa sur le sol, et, devant les yeux de Shad et de Médonée, une nouvelle protagoniste venait d’apparaître : Scybilla, la sorcière de Sha à Koldoue.

« Allez, dépêchez-vous, rentrez !! »

Elle tendit ses mains, et envoya des arcs électriques qui contournèrent efficacement Shad pour frapper ses geôliers, lui laissant ainsi le temps de se réfugier dans la maison...

Le piège s’était refermé comme convenu sur Charlotte et ses sbires.  Profitant de la distraction lancée par la sorcière de Koldoue, la Terranide  bouscula d’un coup d’épaule l’un de ses geôliers, courant en compagnie de Médonée vers la maison. Les mains attachées dans son dos, elle trébucha un peu en avant, manquant de se vautrer sur le sol, mais utilisa sa queue lupine pour garder son équilibre et continuer de plus belle. Il ne leur fallut guère longtemps pour atteindre leur objectifs, des cris d’agonis se faisant dès lors entendre au dehors. Mais cela, l’Okami ne se préoccupa pas, elle se rendit auprès de Médonée et lui tourna le dos, lui présentant ses mains liées.

« Tu pourrais avec tes pattes d’araignées ? »

 Une fois libérée, l’Okami détacha également les liens de son amie, frottant par la suite ses poignets, portant son regard vers la porte et donc vers l’extérieur. Quid de Charlotte ? Etait-elle entrain de combattre ? Avait-elle pris la fuite,  bouillante de rage d’avoir été ainsi dupée ?  Impossible de savoir pour l’instant. De plus cette sorcière qui était venue, avait-elle était  reçu quelques renforts ? Ou s’occuper t’elle toute seule de ces quelques importuns ?  Haussant les épaules, la Lycane se mis à observer l’intérieur de la maison, qui n’affichait en réalité  rien de spécial.  L’intérieur semblait tout à fait banal, avec ici et là quelques ustensiles de cuisines, deux trois livres, quelques bougies brûlant au fond d’une pièce….Rien qui pourrait faire penser aux premiers abords à un antre de sorcière.

« A moins qu’il y’ait un sort d’illusion, je ne pense pas que ce soit là où elle se trouve réellement, n’est-ce pas ? »

Non, pour la Terranide, Elise et le reste des sorcières étaient autre part dans Koldoue, mais où exactement ?  Tendant l’oreille, elle nota que les bruits de combat au dehors s’était tut et peu de temps après, Scybilla fit son entrée.  Instinctivement, la Lycane sut qu’il ne valait mieux pas l’énerver au risque de recevoir son ire destructeur en guise de réponse.  Cependant, l’Okami savait que Médonée était connue pour être la suivante d’Elise, sa prêtresse mais qu’en était-il de sa personne ? il était vrai que Scybilla n’avait nullement dirigé ses arcs électriques vers elle, ce qui laissait supposer qu’Elise avait pu les prévenir de qui elle était et….Elle chassa bien vite ses pensées de sa tête.

Pour l’heure, Médonée et elle n’était plus entre les griffes de Charlotte et elles pourraient bientôt être soignées. Et ça, c’était le plus important. De plus, une fois que la Terranide serait remis en forme, elle comptait bien partir à la recherche d’Aoife..et récupérer ses affaires par la même occasion. Un sort de rappel….Voilà ce qu’elle devrait demander dans l’urgence, cela lui éviterait ces inconvénients, pénibles à la longue…Préférant garder le silence pour l’instant, elle n’attendait pas moins une indication sur la suite à venir, étant prête à répondre à toute éventuelle question.

Médonée et Shad se retrouvèrent dans l’entrée de la maison, comprenant un couloir menant à un escalier, et un salon sur la gauche. C’était une simple maison de banlieue, qui semblait apparemment vide. Libérant Médonée à l’aide de ses pattes d’araignées, Médonée se déplaça un peu, allant dans le salon. Les bibliothèques étaient vides, poussiéreuses. En réalité, la maison semblait totalement abandonnée. Quand on savait que la ville connaissait une crise de réfugiés, Médonée se doutait que, tôt ou tard, la municipalité viendrait réquisitionner cette maison, mais, pour l’heure, elle servait visiblement de repaire aux sorcières. Dehors, on entendait des hurlements et des coups sourds. Les sorts magiques faisaient vibrer les murs, et de la poussière tomba à plusieurs reprises du plafond. Il fallut encore attendre quelques secondes, avant que la situation, dehors, ne se calme, et que la puissante sorcière ne débarque dans le salon.

« Vous avez réussi à les repousser ?
 -  Oui... Provisoirement. Mais le temps nous est compté. Mes pièges magiques ne fonctionneront pas une seconde fois, et elle va revenir. Il nous faut partir.
 -  Élise n’est pas ici, alors ?
 -  Non... Mais elle a hâte de vous revoir, toutes les deux. C’est ma maison, ici, précisa-t-elle. Mais, avant de vous amener dans notre refuge, il va falloir que je purge votre organisme du poison de Charlotte. Autrement, elle pourra vous pister. »

Médonée ne pouvait qu’acquiescer. De toutes les manières, plus vite elles se débarrasseraient du venin dans leurs veines, et mieux ce serait. Difficile de dire quelles pouvaient être les conséquences de cette toxine, mais elles n’étaient sûrement pas bénéfiques.  Se débarrasser de ce poison était donc une chose primordiale pour Médonée, qui suivit donc la jeune femme à l’étage. Elle leur expliqua en chemin s’appeler Scybilla, et être la sorcière supérieure du sabbat de Koldoue.

Elles arrivèrent à l’étage, où Scybilla avait un petit laboratoire alchimique, qu’elle alluma rapidement, à l’aide de la magie, faisant chauffer les becs Bunsen, et préparant ensuite l’ensemble. À l’aide de la télékinésie, elle faisait flotter les éprouvtetes, mélangeant des substances avec d’autres.

« Est-ce que ça va prendre longtemps ? s’enquit Médonée.
 -  Non... Mais Charlotte ne va pas tarder à revenir. Elle n’a pas que les Arachnistes à sa botte, mais aussi de multiples bandes et autres gangs locaux. »

Scybilla était visiblement aussi belle que rigide, parlant peu, et ne cherchant pas spécialement à rassurer le duo. Médonée, pourtant, mourait d’inquiétude pour Élise, et avait une envie furieuse de demander à Scybilla où elle se trouvait, et si elle allait bien. Des bruits se firent alors entendre venant du jardin, et Médonée s’approcha d’une fenêtre, pour froncer les sourcils. Dans la cour d’entrée, comme Scybilla l’avait supposé, elle vit une dizaine d’hommes portant des torches et des armes blanches approcher, les deux tiers portant des capuches recouvrant leurs visages.

« Ils n’ont pas traîné...
 -  La maison dispose de runes de protection, mais elles ne tiendront pas éternellement. Le cas échéant, il vous faudra défendre les lieux. »

Scybilla tendit sa main vers un placard dans un coin, qui s’ouvrit instantanément, révélant une série d’armes entreposées dedans. Il y avait quelques coutelas, des haches, des marteaux...

« Choisissez. »

Médonée resta silencieuse pendant quelques secondes, avant d’entendre des coups sourds en contrebas. Les bandits étaient en train d’attaquer la porte d’entrée avec de lourdes haches, faisant flamboyer le bouclier défensif. Néanmoins, à chaque coup, ce dernier s’amenuisait. Médonée, quant à elle, après avoir brièvement observé les armes, se retourna vers Shad.

« Je ne sais pas manier ce genre d’objets. Je vais me battre avec mes pattes arachnéennes pour ma part. »

Après tout ce qu’elle avait subi dans le manoir de Charlotte, et bien que n’étant toujours pas remise des sévices qu’elle avait subi, Médonée était néanmoins prête à se battre... Et ce parce que, de toute manière, elle n’avait pas spécialement le choix.

En effet, Charlotte n’avait pas perdu de temps et voilà qu’elle avait déjà envoyé quelques sbires attaquer la maison de Scybilla. Une bonne dizaine d’hommes, pour la plupart encapuchonnés, pénètrent dans l’enceinte et se mirent à attaquer immédiatement le bouclier qui empêchait, pour l’instant, toute intrusion. Mais le bouclier n’allait guère tenir bien longtemps face à temps de hargne et ce fut plus par nécessité que par choix que Médonée et Shad furent invités à protéger les lieux, le temps que la sorcière termine son remède à l’aide de sa table d’alchimie. Peu de temps, cela lui prendrait peu de temps qu’elle disait….La Louve souffla, après tout, avait –elle seulement le choix ? Elle porta son attention vers les différentes armes proposées, prenant simplement deux épées à une main et une dague de bonne facture pour le combat rapproché.

« Je crois qu’on est loin d’être au mieux de notre forme….Autant faire gagner le plus de temps possible sans risquer nos vies pour rien… »

En d’autres termes, la Louve allait être plus sur la défensif, économisant le plus ses ressources. Mais, elle se doutait bien que leurs adversaires ne risquaient pas d’êtres que de simples humains et, voir des arachnistes tirant des fils de soies pour les engluer ne l’étonnerait absolument pas. D’autres secousses dans la pièce….Les runes de protections commençaient grandement à faiblir, mais chaque seconde gagnée était précieuse. Une autre secousse, plus violente cette fois, les runes étaient sur le point de céder. La Lycane se tourna vers Médonée :

« Allons y…. »

De la lassitude était palpable dans le timbre de sa voix.  En effet, l’Okami n’avait nullement l’envie de se battre.  C’est sans réelle motivation qu’elle rejoignit la porte d’entrée afin de défendre la bâtisse. Au même instant, la dite porte céda, laissant apparaître un homme au crâne rasé et tatoué d’étranges symboles. L’une des lames de la Terranides accueillit l’importun, tranchant net son crâne en deux.  Le corps sans tête, chuta en avant et une flaque de sang se répandit sur le sol. Se mettant sur la défensive aux côtés de Médonée, la Lycane se mis à défendre du mieux qu’elle pouvait la maison de Scybilla.

Les secondes lui parurent des minutes et les minutes des heures….La sorcière de Koldoue leur avait dit que le remède ne prendrait pas longtemps mais quand des ennemis affluaient sans cesse, cette notion de «  pas longtemps » semblait durer une éternité. La chose principale à faire était de bloquer par n’importe quel moyen la porte, afin de diminuer l’afflux d’ennemis. Et quoi de mieux que les cadavres de ces derniers ? Peu à peu, les corps qui tombaient sous les coups meurtriers des deux femmes formaient une sorte de barrière qui réduisait la mobilité de leurs assaillants.

« !! Attention ! »


Un fil de soie gluant venait d’être lancée en direction des deux femmes. Par réflexe la Lycane se baissa pour éviter de se retrouver bêtement entoilée mais cette diversion permis à un autre adversaire de gagner du terrain et de porter un coup de pommeau au niveau de son abdomen.  Le soufflant coupé, la Louve cracha un peu de sang avant de saisir rapidement sa dague et de l’enfoncer dans la gorge de son ennemi, ce dernier étant suffisamment à porter pour cela. Un juron lui échappa et portant une main à son ventre, la lycane se mis à tousser. C’est qu’il avait taper fort le salaud !  Elle fut obligée de laisser Médonée gérer l’assaut pendant une bonne minute avant de pouvoir se rebattre à ses côtés.

Puis, soudain, sans que rien ne les préviennent, un sort de téléportation les mena vers un autre endroit….

La maison de Scybilla n'allait pas résister plus longtemps. Médonée et Shad descendirent rapidement, rejoignant l'entrée. Elles eurent à peine le temps de descendre l'escalier que le bouclier explosa. La porte, elle, n'offrit guère de résistance, et Shad bondit sur le premier malandrin, le tuant d'une attaque rapide et violente, faisant couler le sang le long de la porte. Un bandit utilisa ensuite un sort, et lança une boule de Terre qui fit exploser la porte en mille morceaux, permettant ainsi aux autres d'avancer.

Jadis femme pacifiste, Médonée avait appris à se battre, et, quand les ennemis s'approchèrent, elle bondit brusquement en avant, et envoya son pied se loger dans la tête de l'un d'entre eux, à l'aide d'un puissant coup de pied retourné, l'envoyant heurter le mur. Un autre s'élança vers elle, en faisant tournoyer son fléau d'armes, et elle l'évita en bondissant sur le côté, puis le fouetta avec ses pattes, le repoussant violemment contre le mur.

« Ils sont nombreux... »

Ce fut tout ce qu’elle eut l’occasion de dire. S’équipant d’une épée, un autre zélote hurla vers elle. Les tatouages qu’ils portaient rappelait à Médonée ceux des Arachnistes, ce qui l’amena à comprendre que ces bandits n’étaient pas un simple gang de rue, contrairement à ce qu’on aurait pu croire, mais des fanatiques... Probablement les larbins de la secte de Charlotte, appelés à devenir des Arachnistes en remplissant des missions et des activités. Autrement dit, ils se battraient jusqu’au bout, car ils étaient prêts à  donner leur vie à cette folle.

Le zélote armé d’une épée manqua Médonée, qui se réfugia dans le salon, où il la poursuivit en hurlant, avant de tendre sa main, envoyant une boule de feu. Avec l’une de ses pattes, Médonée la coupa, puis elle bondit sur la table, s’élançant dans les airs, évitant à nouveau la lame, qui décrivit un mouvement circulaire au-dessus de la table. Les pattes de la femme-araignée fouettèrent l’homme au visage, perforant sa mâchoire, le balançant au sol dans des filaments de sang. Médonée se rétablit après ce glorieux salto pour voir un autre bandit l’attaquer, avec un fléau d’armes.

Les boules de fer s’abattirent violemment sur la table, et Médonée en tomba au sol. Elle fit une roulade, évitant l’attaque supplémentaire, puis bondit sur le côté, et frappa l’homme, encore avec ses puissantes pattes. Le coup fut tel que l’ennemi passa à travers la fenêtre, s’effondrant dans le jardin. Néanmoins, d’autres Arachnistes approchaient, et balancèrent des filaments de toile sur les fenêtres, arrachant ainsi les panneaux de bois qui en avaient condamné les accès, dans de multiples craquements. D’autres filaments jaillirent ainsi fusant autour de la jeune Médonée, la contraignant à fuir vers l’arrière précipitamment.

*Ça se complique ! Scybilla n’a toujours pas fini ?*

Plus le temps passait, et plus défendre la zone devenait difficile. Shad elle-même se retrouva attaquée par un ennemi, et Médonée bondit vers l’homme, empêchant ce dernier d’asséner à la Louve un coup fatal. Elle s’élança sur lui, et ses pattes le transpercèrent, l’empalant sur elle, puis elle balança le corps contre un autre ennemi. Dans le jardin, les Arachnistes continuaient à balancer des filaments de toile, et des archers venaient ensuite les soutenir, enflammant les toiles, déclenchant peu à peu un redoutable incendie.

« On monte, vite !! »

Médonée laissa Shad grimper l’escalier la première, elle-même restant un peu en retrait. Un ennemi se rua vers elle avec une épée dans la main, hurlant comme un dément, et elle posa ses deux mains sur son poignet, l’empêchant d’abaisser son arme. Néanmoins, l’homme la repoussa, et les chevilles de Médonée heurtèrent une marche, l’envoyant s’affaler sur l’escalier. L’homme en lâcha son épée, et posa une main sur sa gorge, cherchant à l’étrangler.

« Argh !!
 -  Meurs, salope ! Ton sacrifice... Est ce que la Reine requiert... »

La jeune femme grogna encore, et frappa avec ses ongles, qui poussèrent pour devenir des griffes acérées, dont elle se servit pour lacérer le ventre de l’homme. Il se mit à gémir, crachant du sang sur le visage de la femme, mais tint bon, ce qui l’amena à frapper encore, lacérant le corps de l’homme, jusqu’à pouvoir le repousser avec ses jambes. Il partit en arrière, heurtant le sol, et Médonée se redressa. Elle se retourna, cherchant à remonter, mais un archer réussit à la toucher, décochant une flèche qui l’atteignit dans le dos.

« Aaaaahhh... !! »

Dans un hurlement de douleur, Médonée trébucha à nouveau, mais essaya quand même de grimper vers le grenier. Les Arachnistes s’approchaient, pendant que l’incendie se répandait le long de la façade de la maison, mais aussi à l’intérieur. Médonée se rapprocha de Shad, et Scybilla les téléporta alors. Elles arrivèrent dans une sorte de grand hall, avec des piliers évoquant un temple, et, assez rapidement, plusieurs femmes se précipitèrent vers Médonée et Shad, tandis que Scybilla s’avança un peu.

« La flèche n’a pas atteint une zone sensible… Nous allons vous soigner toutes les deux. »

Et, pour ça, Scybilla utilisa encore des sortilèges, qui amenèrent Shad et Médonée à s’endormir toutes les deux.

Si téléportation il y’avait eu, c’était que Scybilla avait terminé sa mixture et qu’à présent, Charlotte ne pourrait plus le suivre à la trace. Mais au vue des évènements qui venaient de se passer, la Lycane eut tout juste le temps de jeter un œil sur le lieu où elles étaient arrivées. Elle eut l’impression d’être dans un ancien temple mais déjà plusieurs femmes accouraient vers elles et surtout…Scybilla grâce à sa magie, les plongea dans un profond sommeil. Un sort particulièrement efficace dont la Lycane n’avait pu apposer aucune résistance, tombant comme une souche et étant à présent, ainsi que Médonée, entre les mains des sorcières servant Scybilla et par extension : Sha.

Quand elle se réveilla quelques heures plus tard, la Lycane se redressa sur le lit où elle avait été déposée, un fin bandage de lin autour de son abdomen. Finalement, le coup porter par son adversaire avait été plus violent qu’au premier abord. Sans doute des liaisons internes. Regardant autour d’elle, la Louve vit quelques femmes passer, l’une d’entre elle, remarquant qu’elle était enfin sortie de sa torpeur lui amena une tasse fumante. Anticipant sa question, la femme lui précisa qu’il s’agissait d’un remède, certes un peu amer, mais fortement efficace pour finir de soigner les blessures et pour retirer les derniers résidus du poison de Charlotte qui pourraient subvenir dans son organisme.  Goûtant une gorgée, la Lycane afficha une moue dégoûtée. En effet pour être amer ça l’était ! Mais elle se fit violence et but petit à petit la boisson qui lui était proposée. Et malgré un coup infâme, les résultats étaient là. Petit à petit, l’Okami reprenait des forces, se sentant mieux de minutes en minutes.

Elle « dégusta » son thé seule avant de le poser contre le plateau prévu à cet effet, cherchant par la suite Médonée du regard. Elle n’était pas là. Etait-elle dans une autre pièce ? Ou était-elle déjà parfaitement rétablit ?  Pour cela, il n’y avait qu’une seule façon de le savoir : Se lever et chercher la réponse.  Sans attendre une seconde de plus, l’Okami sortit de son lit,  portant sur elle qu’une simple robe de couleur ébène. Ses affaires étant sans doute rangées quelques part…Après tout, qu’elle fut dénudée pour les soins ne l’étonnait guère. Elle haussa simplement les épaules dans un léger soupir et se mis à marcher à travers les corridors.

Et quel lieu !  La magie palpitait dans chaque recoin, des incantations pouvaient se faire entendre ici et là, les adeptes des arts occultes pressaient le pas, tentaient divers sortilèges, perfectionnaient leurs arts. Prise d’un doute, la Lycane essaya un petit tour pyrotechnique. La simple flammèche qui naquit dans le centre de sa main lui apporta un soupir de réconfort. Refermant sa main, elle étouffa la flamme, ne laissant qu’une petite fumée noirâtre s’échapper de son poing fermé. Continuant de marcher, la Louve observait, cherchant la présence de Médonée ou de Scybilla.

Elle finit par s’arrêter subitement en passant devant une salle, se retournant pour voir apparaître dans son champ de mire, trois silhouettes qu’elle ne connaissait que trop bien. Et singulièrement, elle ne put retenir sa joie, se retrouvant en moins de quelques secondes contre Élise, la queue battante à tout rompre, heureuse et soulagée de voir que la Reine des Araignées se portait pour le mieux, faisant fi des personnes autour. Remarquant son geste, elle souffla un mot d’excuse et se recula, oreilles légèrement baissés sous la gêne qu’elle aurait pu occasionner. Mais elle ne demeurait pas moins heureuse.

Sans trop de surprises, le refuge des sorcières se trouvait dans les souterrains de Koldoue, dans une ancienne crypte que les sorcières avaient réaménagé, en protégeant l’accès par des runes et des glyphes, dissimulant l’entrée derrière un mur factice, qui faisait office d’illusion magique depuis les égouts. C’était un refuge secret, abritant, depuis des années, le culte de Sha. Scybilla en était la gérante. Le lieu était sûr et protégé, même si, parfois, des monstres arrivaient à entrer. Pour l’heure, personne n’avait encore remarqué ce caveau, car Scybilla avait veillé à en supprimer les plans dans les registres cadastraux et les plans de la municipalité. De cette manière, la zone était protégée par le secret. Autant dire que Charlotte allait avoir bien du mal à remonter jusqu’ici.

Quand Shad revint à elle, elle tomba rapidement sur un trio. Il y avait Médonée, pleinement rétablie, Scybilla... Et Élise ! La Reine des Araignées était là, visiblement en pleine forme, et Shad alla se précipiter contre elle, avant de s’excuser... Mais, si elle levait la tête, elle pourrait voir un fin sourire orner les lèvres d’Élise.

« Oh... Moi aussi, je suis bien contente de te revoir, Shad. Médonée m’a raconté tout ce que tu as fait pour me retrouver, c’est... C’est impressionnant ! »

Élise était bien en vie. Cette fois, c’était bien elle, et non White Elise. C’était la vraie Reine, celle que Shad avait rencontré dans la Forêt des Toiles, et qu’elle avait aidé à vaincre Brahmin. Celle qu’elle devait retrouver pour la ramener auprès d’Elena Ivory, après son escapade en Enfer. La Reine lui souriait, continuant à la caresser, et relâcha ensuite le corps de l’Okami.

« Médonée m’a raconté que tu avais beaucoup voyagé. J’ignore s’il existe une autre Terranide sur Terra qui a pu faire des voyages aussi impressionnants que toi. Je suis heureuse et fière de t’avoir comme alliée, car, pour vaincre l’usurpatrice, il va falloir que nous mobilisions toutes nos forces.
 -  Nous avons purgé vos corps du venin de Charlotte. Elle n’a pour l’heure plus aucun moyen de vous retrouver. Ce lieu est sûr. »

La précision était utile pour rassurer tout le monde.

« Donc... J’imagine que tu as bien des questions, Shad, mais j’en ai aussi. Déjà... Comment vas-tu ? Et, ensuite... Tu as vraiment été en Enfer ? »

On pouvait presque lire de l’admiration dans la voix d’Élise.

Contrairement à son habitude, la Louve se laissa cette fois enserrer et cajoler, ne disant rien, profitant juste de l’instant, sa queue battant tranquillement dans le vide. C’était comme si une grosse épine venait de lui être retirée du pied et elle ne pouvait que se délecter de cet instant. Enfin elle avait retrouvé Elise, la vraie et non sans mal ! Mais tout était loin d’être fini et la Reine des Araignées ne tarda pas à en faire la remarque.  Il restait encore les usurpatrices qui en cet instant devaient remuer ciel et terre pour les retrouver. Se retournant vers Scybilla, l’Okami hocha simplement la tête en guise de remerciement avant de se reculer d’Elise.

« Je pense que Médonnée as dû te raconter ce que je lui avais déjà résumé pendant que je …dormais. Pour répondre à tes questions…Oui je vais bien, un petit tiraillement au ventre mais…rien de grave – elle se tourna vers la sorcière – merci pour les soins – avant de se retourner vers Elise –quant à ta dernière question. Oui, c’est vrai. »

Il était vrai qu’à bien y réfléchir, la Lycane pouvait se vanter d’être une des seules Terranides à ne pas rester cloitrer chez un particulier à satisfaire toutes sortes de désirs et plaisirs sexuels. Non, elle voyageait, laissant ses pas la guider aux travers des sentiers, faisant tout aussi bien des rencontres bénéfiques que sordides. Mais cela faisait partie des risques d’un tel mode de vie et..elle ne s’en plaignait pas. La découverte poussée par une certaine forme de curiosité accrue la poussait à découvrir toujours de nouvelles contrées. Mais pour l’heure, l’instant n’était pas au voyage et elle devait apporter certaines précisions à Elise.

« Donc…Oui j’ai été en Enfer, poursuivi par l’un des champions du Roi Cramoisi et aidée  par Alastar Magoa … »

Et elle leur résuma toute l’histoire. La course poursuite avec le champion, son sauvetage par le Diablotin, sa dette qu’elle devait payer, sa rencontre avec différents généraux des Enfers et également Lucifer, son escapade dans l’un des anciens fort du Roi Cramoisi, l’ancienne cité et le portail d’où avait émergé Hastur grâce au médaillon d’Elise et pour finir ses récompenses octroyer par Onyxian Magoa pour avoir aidé les Enfers. Mais elle revint surtout sur un des points les plus importants pour cet instant :

« Quand je fus en Enfer, Lucifer m’a demandé de te retrouver et…de te convaincre de te rendre à Nexus afin d’y rencontrer la Reine Elena Ivory car ce serait elle qui pourrait rassembler les Immortels afin d’arrêter une fois toute cette folie. Et…TU es l’une d’entre elle. »

Les dés venaient d’être jetés. Certes, la Louve aurait pu y aller autrement, mais, sur le coup, elle avait préféré jouer la carte de la franchise et d’y aller directement.

« Cependant…Je pense que cela devra attendre encore un peu…Comme tu l’as dit, nous avons deux usurpatrices à combattre et une invasion à éradiquer. »

Cela semblait plus facile à dire qu’à faire !  La Lycane rajouta également :

« Il faudrait aussi que je parte à la recherche d’Aoife, depuis le temps, je ne sais pas si elle erre encore dans les égouts à combattre ces immondices… De plus peut être qu’avec son aide, nous pourrions disposer de plus d’hommes pour combattre Charlottes, White Elise et leurs araignées.»

« Rejoindre Nexus ? Les Immortels ? »

Est-ce que le monde était devenu fou pendant son absence ? Elle, rencontrer la Reine de Nexus ? Pour quelle raison ? Sur le coup, on put lire, sur les yeux d’Élise, une franche et sincère surprise. Et, pour surprendre Élis,e il fallait tout de même placer la dragée haute. Shad dut encore lui réexpliquer ce qu’était l’histoire des Immortels. Une légende, concernant treize individus qui se fédéreraient autour de la Reine de Nexus, afin de vaincre le Roi Cramoisi. Tout cela ne disait pas forcément grand-chose à Élise, mais le Roi Cramoisi, en revanche...

Confuse, elle ne releva pas la remarque de Shad concernant Aoife, et s’avança un peu, plongée dans ses pensées.

« Le Roi Cramoisi... »

La Reine des Araignées laissa sa phrase en suspens, tout en se retournant de nouveau vers Shad, non sans jeter un bref regard vers Médonée.

« Quand l’autre Élise est venue... Elle disposait du même contrôle que moi sur les araignées. Et... »

Élise pinça les lèvres. Comme on pouvait s’y attendre, ses pensées étaient encore confuses. Elle avait perdu un foyer qu’elle protégeait depuis des années, car sa propre armée avait choisi de la trahir. Élise n’avait de « Reine » que le titre, désormais, et tout cela était lié à ce fameux, et non moins mystérieux, Roi Cramoisi. Qui était-il vraiment ? Et pourquoi est-ce que la simple évocation de cet être provoquait chez Élise un redoutable frisson de peur ?

« Je pensais que mes pouvoirs venaient d’une araignée infectée par les Formiens, Shad... Que c’était là la manière dont mon corps avait muté pour me permettre de contrôler ma communauté. Mais... J’avais tort. »

La femme-araignée avait eu le temps d’y réfléchir, et marcha encore un peu, continuant à déambuler, tout en exprimant le fil de sa pensée :

« L’araignée qui m’a mordu... Elle appartenait au Roi Cramoisi. Son venin a modifié mon sang, et a fait de moi la femme que je suis. Et, quand il a vu que je ne lui obéissais pas, il a envoyé White Élise. Elle est, d’un certain point de vue, mon clone... Mais, là où je suis une erreur de la Nature, un accident résultant d’une araignée qui s’est égarée, elle, elle a été créée pour me supplanter, et accomplir ce que j’étais supposée faire... Envahir ce royaume, répandre la mort et le chaos. »

Élise secoua la tête.

« Il faut trouver un moyen de la vaincre...
 -  Vous êtes la Reine légitime, répliqua Médonée. Si nous arrivions à améliorer les phéromones que vous émettez, je suis sûre que vous arriverez à reprendre le contrôle de vos araignées.
 -  Oui... J’ignore pourquoi la Reine de Nexus désirerait s’entretenir avec moi, Shad, mais tu as toute ma confiance. Les évènements récents m’ont montré que, seule, je ne suis pas capable de lutter contre mes ennemis. J’accepte donc... Mais je ne laisserai pas cette usurpatrice triompher si facilement. »

Le doute qu’on aurait éventuellement pu lire dans le ton de la femme laissa place à une détermination plus assurée.

« Je t’en demande beaucoup, Shad, mais souhaites-tu encore m’aider à reconquérir mon trône ? J’ai besoin de toute l’aide possible. Toi, cette Aoife dont tu m’as parlé... Notre ennemi est puissant, mais il n’est pas invincible. »

Elle conclut alors, en résumant ce qu’elle venait de dire en quelques mots :

« M’aideras-tu encore ? »

« Elise Elise…-commença tout simplement l’Okami – penses-tu que j’ai remuer ciel et terre pour te retrouver pour après ne pas t’apporter de mon aide ? Bien sûr que je t’aiderais à retrouver et ton trône et tes sujets ! Cette White Elise n’a pas lieu d’être… »

Une certaine détermination pouvait se faire entendre dans le ton de sa voix.  Elle se mis également à marcher, faisant les cent pas, pensive, réfléchissant à la situation actuelle. Pour l’heure, la rencontre entre Elise et Elena devrait encore attendre et avant cela, il était fort probable qu’elle devrait se rendre auprès de la Reine de Nexus pour lui expliquer la situation. Car débarquer en tout impunité à Nexus, surtout après les évènements qui se déroulaient actuellement, ne risquait pas d’être la meilleure solution en guise d’approche. Il y’avait actuellement plusieurs points à régler : Retrouver Aoife et la convaincre d’aider Elise à battre son double maléfique, vaincre Charlotte et ses sbires pour retirer toute trace d’arachniste en pleins Koldoue et…vaincre White Elise lorsque son armée d’araignées arrivera.

« Je vais repartir là où j’ai vu pour la dernière fois Aoife, avec son aide, je pense que nous parviendrons à battre les Arachnistes et Charlotte présent dans cité…Si ne nous le faisons pas, il y’a de fort risque qu’ils attaquent la cité de l’intérieur lorsque White Elise attaquera…Prenant ainsi les gardes en étau. Par contre…Il me faudrait une autre tenue et d’autres armes, à défaut d’avoir les mi… »

« Ce ne sera pas utile ! – Clama au loin l’une des sorcières – Retrouver des affaires n’a rien de bien compliqué, les voilà. »

Et sous les yeux quelques peu surpris de la Lycane, ses effets lui étaient remis, parfaitement en état. Bon, au moins une chose de réglée. Elle se tourna par la suite vers Scybilla :

« Y’aurait-il un moyen pour revenir ici une fois que j’aurais retrouvé Aoife et que nous aurions prévenu les gardes du danger qui risquaient d’encourir s’ils ne réagissaient pas dans les temps ? »

Elle laissa planer quelques instants de silence avant de rajouter :

« Et…si je puis me permettre…Pourriez-vous poser un sort de rappel sur ceci ? »

Le sort de rappel. Un sort bien utile qui permettait à l’objet enchanté de toujours revenir auprès de son porteur. Un sortilège qui ne serait pas un luxe pour l’Okami. Elle se tourna par la suite vers Médonnée :

"M’accompagneras-tu Médonnée ? Après tout nous étions à ta recherche pour pouvoir retrouver Elise, si Aoife me vois en ta présence, peut-être cela sera-t-il plus simple pour la convaincre de tout ce qui se joue ici et…du fait de devoir mobiliser les gardes de la cité. »

Plus elles auraient de forces, et plus les chances de vaincre White Elise seraient grandes mais…sous-estimer leurs adversaires ne serait pas avisée. Pensive la Louve osa une dernière question :

« Je me demandais…Si nous parvenons à affaiblir suffisamment White Elise, penses-tu réussir à reprendre le contrôle de tes sujets ? »

Encore faudrait-il réussir à atteindre cette furie et à l’affaiblir ! Mais ça c’était une autre histoire…

Shad était décidée à retrouver Aoife dans les égouts, et demanda à Médonée si elle comptait l’accompagner. La jeune femme hésita un peu, regardant sa Reine, puis Shad de nouveau.

« Je ne sais pas, Shad, répliqua-t-elle. J’ai peur de ne pas t’être utile. Même si Scybilla a commencé à me soigner, je suis encore affaiblie par le poison qui circule dans mes veines, et il faut du temps pour que l’antidote agisse. »

Ce qui valait pour Médonée valait aussi pour Shad, mais, Médonée ayant été incarcérée plus longtemps, elle avait été davantage empoisonnée que l’Okami, de telle sorte que, chez elle, son organisme mettait plus de temps à se soigner, et à purger toutes les traces de la toxine dans son corps. Pour autant, il était risqué d’envoyer Shad seule sur les traces d’Aoife. De plus, Élise voulait aussi passer du temps avec Médonée, afin de voir comment reprendre le contrôle sur ses araignées.

Alors que la situation semblait se bloquer, une voix mit fin à la situation :

« Je viendrais avec toi, Shad. »

Scybilla venait de parler. La puissante sorcière venait depuis une alcôve, et s’avança près de Shad.

« L’ennemi que nous affrontons est puissant, et il nous faut un corps d’Arachniste... Vivant dans l’idéal. L’étudier est nécessaire pour comprendre comment leurs toxines fonctionnent, et améliorer nos antidotes.
 -  En effet, reconnut silencieusement Élise. Il faut que nous arrivions à contrer les pouvoirs de White Elise.
 -  Et puis, avec mon aide, nous pourrons retourner sans difficulté dans ce refuge. »

Honnêtement, on voyait mal Shad refuser l’aide de la puissante Scybilla.

« Partons donc... »

Et, ceci fait, Scybilla les téléporta toutes les deux, les ramenant dans les égouts, près de la zone où Shad avait été séparée d’Aoife. Il y avait des traces de lutte dans ce couloir, des projections de sang sur les murs, et les cadavres de plusieurs Arachnistes qui flottaient et dérivaient lentement à la surface de l’eau poisseuse...

« Ton amie est partie... Elle est visiblement très douée à l’épée. »

Scybilla regarda autour d’elle, cherchant des traces susceptibles de la retrouver.

« L’odeur est insupportable ici, mais, avec ton flair, je pense que tu pourrais la pister. Je vais t’aider à identifier son odeur. Ferme les yeux, et concentre-toi. »

Dans cet égout puant, il y avait quantité d’odeurs fortes et insupportables, et Shad allait devoir en faire abstraction, afin de sentir celle d’Aoife. Elle pouvait peut-être y arriver toute seule, mais, dans le doute, Aoife tendit ses mains vers elle, et entreprit de l’aider en usant de sa magie, afin d’amplifier l’odeur d’Aoife et les sens de Shad.

L’aide fut apportée par une aide à laquelle la Lycane ne s’était pas attendue mais aussi une qu’elle pouvait décemment refusée. D’un côté, elle comprenait parfaitement que Médonée et Elise ne puissent lui apporter leur assitance, elles avaient tant de chose à régler et à prévoir pour combattre White Elise…Mais de là à ce que Scybilla se propose…Il y’avait de quoi être étonnée !  De plus la question du retour serait en effet réglée, alors pourquoi refuser ? Hochant la tête en signe d’affirmation, l’Okami se retrouva bien vite téléportée dans les égouts au dernier emplacement où elle avait vu Aoife. Elle reconnue le cadavre de l’archaniste qui l’avait attaqué  et nota la présence d’un second…Et de pleins d’autres encore. Pour sûr, le chevalier de Nexus savait se défendre à l’épée et venait de recouvrir le sol et les murs de sang. Mais le pire restait cette odeur. Déjà que de base les égouts n’étaient pas réputés pour avoir un doux parfum mais avec les corps en décomposition avancée dû à l’humidité…l’odorat de Shad en prenait un coup.

« Je…vais essayer. »

Fermant les yeux comme Scybilla lui avait demandé, la Louve se concentra sur les odeurs autour d’eux, cherchant précisément celle d’Aoife. La magie de la sorcière lui fut d’une grande aide car les effluves du chevalier ressortaient, étaient bien plus prononcés que le reste. En ouvrant les yeux, ce fut comme si l’Okami pouvait voir une traînée brillante de particule flotter dans les airs. Certes, c’était assez étrange mais bien utile. Désignant un couloir où gisaient quelques corps éventrés, la Lycane ouvrit la marche.

« Par là…Par contre….Il y’a toujours une odeur qui suit de près celle d’Aoife, elle est minime mais reste bien présente….Et elle est différente de celle des Arachnistes. »

Et pour l’heure,  elle n’arrivait pas à trouver l’origine de cette petite odeur qui suivait celle d’Aoife. Ami ? Ennemi ? D’un côté dans les égouts de Koldoue…avait-elle réellement des amis ?  Continuant cependant d’avancer en suivant la piste olfactive, le duo entendit après un certain le bruit d’une lutte.

« L’odeur se fait plus forte vers le combat que l’on entend par contre…Comment comptes tu capturer un Arachniste vivant ? »

Car ces derniers lors des affrontements finissaient habituellement morts. Ce qui ne pouvait signifier qu’une chose : Il faudrait retenir ses coups et ou au mieux l’immobiliser assez de temps pour permettre sa capture mais d’un côté….Cela ne devrait être qu’une simple formalité pour la sorcière de Koldoue. Réalisant ce fait, la Louve rajouta rapidement :

« Oublies ce que je viens de demander. »

Continuant d’avancer vers le son de la lutte, les deux femmes tombèrent bientôt sur une Aoife encerclée par une demi douzaine d’Arachnistes. Au  moins…Scybilla aurait le choix pour son prisonnier. Levant sa main, la Lycane invoqua des flammes qui partirent frapper de pleins fouet l’un des fanatiques qui comptaient attaquer Aoife par son angle mort. Cinq  à tuer, un à capturer et retour à la maison.  Il y’avait-il autre chose à préciser ? Quant à la fine odeur proche de celle d’aoife, la Louve la laissa de côté pour l’instant, préférant se concentrer sur le combat à venir.

On ne pouvait pas dire que Scybilla était une grande fan des égouts. Des conduits étroits, puants, gluants, sales... Et, pourtant, elle avait l’impression de toujours devoir patauger dans les égouts. Néanmoins, Shad réussit à capter l’odeur d’Aoife, et le duo se mit à marcher, remontant les égouts de Koldoue. La sorcière avait déployé ses sphères de protection, de manière à pouvoir capter les éventuels monstres qui arriveraient. Cependant, ses cercles ne détectèrent aucun noyeur, ce qui, en réalité, était fort surprenant. Scybilla savait que, avec l’afflux des réfugiés et des déchets dans les égouts, les noyeurs s’étaient multipliés. Qu’il n’y en ait aucun dans le coin signifiait qu’ils avaient fui des prédateurs plus dangereux... Probablement comme les Arachnistes. Néanmoins, Shad lui signala une autre odeur, différente d’Aoife, ou des Arachnistes.

« Soyons prudentes, Shad. Il n’y a pas que des humains qui fuient les hordes arachnéennes. »

Elle n’en dit pas plus. Qui sait quel monstre avait pu se terrer dans ces égouts ? Peut-être était-ce bien là, finalement, la raison de la disparition des noyeurs dans le coin ? Scybilla restait prudente, en tout cas, et le duo finit par entendre des bruits de combat. Elles approchèrent d’un éboulement dans le mur, sur la droite, menant à une crypte souterraine, où elles virent rapidement Aoife, aux prises avec les Arachnistes. La guerrière nexusienne était à la hauteur de sa réputation, mais semblait en bien piètre posture.

Scybilla intervint rapidement, déployant ses mains, et envoya des langues de feu, qui enflammèrent deux Arachnistes, les faisant hurler. Un troisième avisa sa présence, et cracha un filament de toiles vers elle. La sorcière resta fixe, et dévia le filament avec sa main, usant de ses pouvoirs télékinétiques. Elle fixa ensuite l’Arachniste, et tendit un doigt, envoyant une onde de choc qui heurta l’Arachniste au torse, l’envoyant voler contre un mur dans un gargouillement.

« S-Shad ?! s’exclama Aoife, surprise. Tu es en vie ?! »

Depuis combien de temps est-ce qu’Aoife errait dans ces égouts ? Elle était fatiguée, visiblement blessée en de multiples endroits, sa tenue déchirée ici et là, des ecchymoses et des contusions sur le corps. Scybilla doutait que, à ce rythme, la jeune femme puisse survivre encore bien longtemps sans leur présence. Pour elle, ce qui venait d’arriver était un miracle. Les Arachnistes se concentrèrent donc sur Shad et sur Scybilla, estimant les menaces beaucoup plus sérieuses qu’Aoife. Toutefois, Scybilla prouva rapidement qu’elle était bien la puissante sorcière de Koldoue, responsable du culte de Sha. Ses pouvoirs magiques déferlèrent sur les ennemis, et Shad vit ainsi des arcs électriques frapper un Arachniste cherchant à l’attaquer de côté, le repoussant au sol dans des couinements de douleur.

Un autre Arachniste bondit sur le mur, évitant ainsi une boule de feu projetée par Scybilla, et cracha un jet d’acide. Scybilla grogna, et, fort heureusement, son bouclier la protégea, mais la douleur fut quand même présente.

« Saloperie... »

L’Arachniste que Scybilla avait projeté contre le mur auparavant était toujours sonné, et était, visiblement, celui qu’elle voulait capturer...

...Mais, pour ça, il fallait encore se débarrasser des autres.