Enfin ! Navlys avait finalement pris connaissance du seul moyen de quitter le monde qu'elle venait de rejoindre : l'existence de portails reliant les différents plans de l'univers. Cette idée ne l'enjouait pas vraiment vu ce qu'il arriva lorsqu'elle utilisa ce moyen de transport mais elle n'avait apparemment pas d'autre choix... Ne pensant qu'à rejoindre le monde des Douze, la disciple de Sadida se mit à la recherche de ses portails et réussit tant bien que mal à en trouver un ! Il était bien différent de celui qu'elle avait emprunté : plus blanc, plus grand et Navlys avait l'impression de sentir la vie à travers. C'était comme si tout ce qui se trouvait de l'autre côté n'était en réalité qu'à quelques centimètres d'elle... Cela la poussa à avancer sa main vers cette blancheur jusqu'à ce qu'un moment d'hésitation vint la troubler.
*Que vais-je trouver de l'autre côté ?... Mon monde ou ?...*
Elle ramena alors cette main vers sa poitrine, sentant alors l'adrénaline opérer sur son cœur. La très jeune femme avait peur, angoissée par ce nouveau voyage qui pouvait l'emmener n'importe où. Ses yeux se fermèrent et sa respiration se ralentit sous forme de longue inspiration et expiration en espérant se calmer ainsi. C'était sans compter l'intervention d'une petite boule de tissu qui effleura son mollet, la faisant sursauter de frayeur. Navlys se retourna en s'écartant de cette potentielle menace pour constater sa maladresse : ce n'était que Pouly, sa petite poupée qu'elle avait créé sur Terre. Cette dernière pencha la tête sur le côté, surprise par la réaction de sa maîtresse qui soupira avant de lui parler.
"Aaaaah Pouly... Pouly, Pouly, Pouly... Tu n'as pas honte de me faire peur comme ça ?..... Bon, d'accord, c'est surement ma faute... Mais évite de recommencer, tu m'as vraiment foutu une de ces trouilles !"
La petite Pouly baissa la tête, honteuse, mais Navlys la récupéra dans ses bras pour la serrer très fort avant de la poser sur son épaule gauche.
"Là, voiiiii-là ! Comme ça, tu ne seras plus capable de me donner la chair de poule !"
L'avatar de Sadida sourit alors de toutes ses dents et la poupée l'imita du mieux qu'elle le pouvait tout en enlaçant la tête de sa maîtresse.
"Ahaha, moi aussi je t'aime ma petite Pouly !"
Après un petit bisou sur son bout de tissu favori, son attention se tourna de nouveau vers le portail qui semblait peu à peu disparaître. Ses yeux s’écarquillèrent et Navlys s'élança alors à travers.... pour se vautrer lamentablement de l'autre côté. Sa dernière expérience avait duré bien plus de temps et elle ne pensait pas que le voyage serait si rapide... Quelques gémissements et jérémiades plus tard, elle se releva timidement en faisant bien attention de garder Pouly sur son épaule. Très peu vêtue comme à l'habitude des sadidas, elle prit tout de même la peine de se frotter pour retirer la poussière qu'elle venait d'accumuler et constata au fur et à mesure l'environnement qu'elle venait de rejoindre. Comparable à un désert, il n'en était rien en réalité. Cette étendue de poussière sableuse avait bel et bien un sol dur, parsemée de rochers de tailles plus ou moins imposantes et accompagnée de rares arbres dont la vie était partie depuis des dizaines voire centaines d'années. L'un d'entre eux ne se trouvait pas si loin d'elle et, alors qu'elle se rapprochait, sa poitrine se serra et une larme coula le long de son visage. Navlys pouvait sentir la souffrance de cette nature morte, une douleur indescriptible qui l'envahissait de plus en plus et qu'elle était bien incapable de soigner. La disciple en était bien consciente : il était inutile d'essayer d'utiliser ses pouvoirs pour redonner de la vie ici, le mal était bien plus grand. Tout ceci lui rappelait les landes de sidimotes, un territoire qu'elle avait toujours détesté...
Alors que la peine prenait possession de l'esprit de la sadida, sa poupée tapota sa joue pour lui indiquer quelque chose au loin derrière elle. Navlys se retourna donc et plissa les yeux en positionnant sa main au niveau de ses sourcils pour s'abriter du soleil qui martelait la zone avec sa chaleur irradiante. La distance l'empêchait de bien voir mais une forme se détachait clairement de l'environnement dans lequel elle venait d’atterrir. Plus qu'une forme, c'était même tout un horizon qui n'avait ni la couleur, ni l'aspect de ce semblant de désert. Était-ce une ville ? Une montagne ? Ou... Une forêt ? Oui ! Une forêt ! Une jungle ! Un marais ! Peu importe ! Navlys sentait cette nature rafraîchissante et pleine de vie ! Une lueur de bonheur l’enivra et elle se précipita alors vers cette masse pour savoir concrètement de quoi il était question.
Suite à une longue course effrénée, la jeune femme pris le temps de reprendre son souffle en se penchant vers l'avant pour poser ses mains sur ses genoux. Haletante, elle redressa néanmoins sa tête pour en voir d'avantage alors qu'elle était à la limite entre les deux biomes, une frontière qu'elle trouva d'ailleurs très brutale. Alors que la poussière ardente se trouvait encore sous ses pieds, elle pouvait sentir l'humidité que dégageait cette verdure qui ne se trouvait qu'à quelques mètres d'elle. Cette fraîcheur la fit frissonner de plaisir... Après tout ce temps loin de sa maison, elle retrouvait un climat qui lui correspondait parfaitement. Cette joie merveilleuse et absolue dessina un gigantesque sourire sur son visage encore tiraillé par sa précipitation. La sadida éclata de rire par son bonheur tandis qu'elle se remettait bien droite pour s'aventurer vers ce qu'elle considérait comme un havre de paix.
Arbres, lianes, fleures, buissons, hautes-herbes... On y trouvait presque tout et n'importe quoi dans cette jungle d'une densité qui comblait totalement Navlys. Tout ce vert, toutes ces sensations sur sa peau alors qu'elle caressait chaque branche, chaque liane et que ses jambes frôlaient tout ce qu'elle devait traverser. Son euphorie lui fit totalement oublier ce qu'elle recherchait. Elle avait trouver son paradis et c'était tout ce qui importait sur le moment présent. L'avatar de Sadida enlaça finalement un arbre après s'être grandement enfoncée dans ce lieu pour le caresser et lui confier son exaltation.
"Oooh merci Sadida ! Je pensais ne jamais pouvoir revoir un tel spectacle... Cette nature, cette vie, cette beauté semblait ne pas exister là où vous m'aviez envoyé... Merci, merci pour ce cadeau !..... Dis-moi, grand arbre fort que tu es, où suis-je et que peux-tu me dire sur cet endroit ? Offre-moi ta sagesse, toi qui a vécu si longtemps dans ce monde et aide-moi à retrouver le mien, je t'en supplie..."
Communier avec la nature était sa plus grande spécialité. Dès son plus jeune âge, Navlys avait toujours fait preuve d'un lien très fort avec la nature qui l'entoure. Ainsi, de nombreux bruits qui auraient fait fuir plus d'un superstitieux se manifestèrent autour d'elle : craquement de branche, ébouriffage du feuillage par le vent, grondement du sol... C'était le mode de communication de ce lieux. Bien qu'elle soit habitué à voir les arbres lui parler directement, la jeune femme avait très bien compris la signification de ces quelques sons. Elle apprit alors qu'elle se trouvait sur Terra ainsi que quelques généralités sur ce monde. Toutefois, le grand arbre s'était excusé auprès d'elle puisqu'il n'était pas très au courant des activités qui s'y déroulaient étant donné qu'il passait le plus clair de son temps à dormir... et qu'elle l'avait réveillé. Sans perdre une seconde, la disciple de Sadida avait déjà usé de sa magie pour apaiser son informateur afin de le rendormir avant que sa colère ne s'abatte sur elle. Contrairement à sa maîtresse, Pouly avait déjà imaginé sa fin et avait préféré se blotir contre le cou de la sadida pour cacher cette potentielle vision d'horreur.
"Et bah alors Pouly ? On n'a plus confiance en moi ?" Elle riat doucement avant de reprendre. "Qui mieux qu'une sadida peut savoir à quel point c'est énervant de se faire réveiller, hein ? Aller ma petite, on a de la route à faire."
Une fois l'arbre à nouveau dans les bras d’Orphée, Navlys l'abandonna après quelques dernières caresses pour s'enfoncer encore un peu plus dans la jungle. Toutefois, elle avait désormais une direction en tête : Nexus. Le peu d'informations qu'elle avait pu obtenir lui donnaient une vague idée de l'emplacement de cette ville et la jeune femme était presque persuadée qu'elle pourrait trouver là bas de quoi l'aider à rejoindre le monde des Douze. Ainsi, elle continua sa route en se concentrant cette fois sur son objectif. Sa réflexion était plus calme, plus mature, plus réfléchit... Cet environnement n'était que profitable à l'avatar notamment grâce à l'énergie qui circulait via son contact avec ses jambes. Chaque pas dans cette forêt était à la fois une subtile jouissance mais surtout une aide précieuse pour sa concentration et sa magie. Cet atout la plongea un peu plus profondément dans ses pensées jusqu'à ce que le sol se déroba sous ses pieds...
"Wouaaaah !" Boom !....
D'une agilité hors norme, Navlys se réceptionna en triple salto arrière après une quadruple vrille et.... Comment ça vous ne me croyez pas ?... Oui, bon, d'accord ! Elle s'est vautrée comme une merde sur le cul. Cette chute n'était pas vraiment prévue et son derrière lui faisait sacrément mal lorsqu'elle vit Pouly atterrir grâce à la feuille sur sa tête qu'elle avait utilisé comme parachute, comme si de rien n'était. La poupée pencha la tête sur le côté quand elle vit le regard totalement blasé de sa maîtresse qui se relevait tant bien que mal. Elle prit le temps de se frotter pour retirer la poussière avant de lever la tête pour constater les quatre mètres qui la séparait du sol.
"Pffff franchement... Je le trouvais bien cet endroit... Pourquoi y'a des trous comme ça ? Franchement, c'est ridicule !"
Elle reposa son regard sur sa poupée qui continuait de la dévisager.
"Oooh ça va hein ! Tu ferais moins la maligne si tu faisais mon p.... Si tu n'étais pas g... Si tu... Oh pis merde ! Viens par là..."
Navlys récupéra Pouly sur son épaule et utilisa sa magie pour invoquer une ronce massive sous ses pieds. Elle remonta alors sans aucun soucis mais uniquement pour faire face à une nouvelle surprise...