Fiore pousse le soupir de sa vie quand elle entendit la réponse. Un soupir tellement fort qu’il était obligé que sa partenaire de fortune l’entende tellement elle y avait mis de la force. Maintenant, c’était clair, elle éprouvait un très puissant sentiment de regret à l’idée d’avoir accepté une infiltration en binôme avec cette femme qui, en plus de lui avoir retiré ses capacités à tuer, était beaucoup trop stricte pour pouvoir faire ce qu’il y avait à faire de manière à ne pas faire passer ça pour une corvée. Son avis était définitif, la bretteuse détestait clairement cette femme. Surtout si sous ses cheveux là il y en avait des plus courts, même si elle ne connaissait pas ce dernier détail.
Démotivée, elle décida cependant de continuer à la suivre. Après tout, elle pourrait lui être encore utile pendant quelques temps, même si elle comptait déjà la lourder au détour d’un couloir. Elle ne respecterait pas ses engagements, mais elle avait le sentiment que si elles restaient ensembles, la rousse aurait plus de problèmes que de solutions. Mais clairement, les gadgets de cette justicière lui étaient utile pour faire ce qui serait peu à sa portée, ou du moins difficilement. Elle utilisa un truc qui finit par émettre un bruit dérangeant… Comme un compte à rebours. Pour sa part, elle aurait tout simplement planté son épée à l’intérieur puis la faire disparaître grâce à son collier, mais elle ne pouvait se le permettre avec une terrienne à ses basques.
Étant parfaitement silencieuse, la Terranide sentit que les yakuzas finirent par se rapprocher. La porte fermée bloquant tout accès au moindre courant d’air, elle ne put que savoir qu’il était trop tard pour rester cachée. Alors qu’elle comptait prendre la fuite tout en assommant les deux gardes, elle se stoppa net dans l’utilisation de sa manipulation de l’air quand elle sentit une forte odeur de fumée lui bousiller les poumons. Autant la cigarette pouvait passer, autant là c’était comme si elle se retrouvait en plein cœur d’un incendie à respirer toute la fumée, bien qu’au final, il s’agissait plus de poussière. Elle comprit rapidement que la femme masquée avait lancé une espèce de fumigène, sûrement destiné à brouiller la vue des deux glandus en face vu que leurs tirs d’armes leur passaient largement à côté. Fiore était coincée car elle ne pouvait pas courir en utilisant ses capacités anormales au risque à la fois de se faire repérer et d’avouer clairement qu’elle n’était pas humaine. Elle opta pour une solution classique, mais dangereuse.
Elle arrêta tout simplement de respirer, histoire de diminuer au maximum les risques de s’étouffer, mis son épée courte en position de semi-garde, puis fit un bond en avant destiné à lui donner un maximum d’accélération en un coup et foncer droit devant. Elle évita les balles qui fusaient n’importe comment, utilisant sa lame pour repousser celles qui passaient trop près. Une fois à portée de celui qui ne s’était pas pris l’engin de sa propriétaire sur la nuque, elle porta un coup de taille rapide sur une de ses mains, histoire de lui faire lâcher son arme, l’oreille portant son transmetteur, et enfin d’un mouvement habile de poignet, l’assomma d’un coup de pommeau sur la tête. Restant dans l’adrénaline. Le second qui semblait sonné eut droit au même traitement, mais en plus rapide vu qu’il était déjà atteint. Elle n’avait tué personne, comme promis, et avait mis hors service ses agresseurs sans les avoir tués. S’écartant du nuage de fumée, elle remplit ses poumons d’oxygène, en manquant cruellement, puis une fois son souffle revenu quasiment à la normale, elle attendit que l’autre se pointe pour lui sortir une tirade presque en cherchant les ennuis, palpable dans le ton qu’elle utilisa :
- Je les aie juste empêchés de nuire, ils sont vivants. Si je n’ai pas le droit de tuer, je ne me gênerais pas à blesser quoi que tu en pense.
Les coups qu’avait faits la bretteuses étaient simples. La blessure à la main consistait d’une part à leur faire lâcher leurs armes pour éviter des tirs supplémentaires, mais également neutraliser leur main principale, chose qu’elle pouvait deviner par rapport à leurs postures bien précises pour tenir leur engin. Ensuite, le coup de taille léger à l’oreille servait uniquement à détruire le seul moyen qu’ils avaient de communiquer ensemble, c’est-à-dire une sorte d’oreillette un peu grosse. Enfin, avec le pommeau de son arme blanche, elle avait visé une partie bien précise de leur crâne, l’hippocampe. Techniquement, il fallait porter un coup suffisamment puissant pour atteindre cette zone du cerveau traitant la mémoire humaine tout en s’assurant de mettre ko la personne sans la tuer, histoire qu’elle ne se souvienne pas des quelques minutes, voir heures, qui précédait ce coup. Ce n’était pas la première fois que Fiore faisait ça, mais elle n’était pas sûre d’avoir bien visé à cause de l’écran de fumée. Même si l’objectif principal était réussi.
Tournant son visage vers celui de la justicière, la tueuse la fixa cette dernière, presque en la dévisageant, montrant ouvertement qu’elle ne l’appréciait pas :
- J’espère que tu as de quoi réduire à néant leur moyen de communication tout entier. Sinon, couper le courant sera moyennement efficace.
Si ces deux-là étaient équipés pour, il avait fort à parier que d’autres yakuzas étaient en liaison avec eux et que l’intégralité des gardes de cet endroit pouvait converser plus ou moins librement sans avoir besoin d’une quelconque forme d’électricité. La terranide pouvait sans aucun soucis détruire leurs appareil un pas un, mais certainement pas à chaque rencontre.
Maintenant, il fallait qu’elles partent, mais un détail la perturba. Pourquoi est-ce que le troisième garde ne bougeait pas ? Il gardait quelque chose de tellement important qu’il ne devait pas bouger quitte à laisser ses collègues mourir ?