L’obscurité était tombée sur la ville depuis quelques heures maintenant. Elle ne le dérangeait pas, car elle était l’alliée naturel des vampires. Contrairement aux croyances populaires, beaucoup de vampires pouvaient survivre à la lumière du jour, mais tous, généralement, appréciaient le manteau de la nuit. La nuit était l’heure où les petits joueurs rentraient chez eux, la queue entre les jambes, afin de laisser parler les vraies prédateurs. Les gens comme lui...
Bran Warren, torse nu, était au milieu du parc, juché sur un arbre, dissimulé dans l’obscurité, et voyait passer devant lui des proies potentielles. En soi, il était un peu inutile, pour lui, de s’abaisser à chasser les humaines comme un vulgaire pervers sexuel en manque. La totalité des femmes du harem de sa sœur bien-aimée auraient été ravies de lui offrir leur gorge, mais, contrairement à sa sœur, Bran, lui, était un vampire-chasseur. Un prédateur nocturne qui aimait sentir le long de son échine le frisson de la chasse. Il avait besoin de ce genre de moments, car ils lui permettaient d’être plus en phase avec ses sens, avec sa puissance et avec ses capacités. Il se sentait alors coupable d’abandonner sa sœur, de ne pas veiller sur elle, et se rassurait en se disant, d’une part, qu’elle était à l’abri au sein du manoir, et, d’autre part, qu’il faisait ça comme une espèce d’entraînement.
Le parc central de Seikusu était une grande structure verte perdue au milieu de la ville, si grand qu’il s’apparentait en fait à une petite forêt, comprenant un sous-bois profond. La nuit, la police déconseillait aux citoyens de s’y rendre, en raison des multiples agressions potentielles qui y avaient lieu. Le parc avait en son centre un agréable restaurant, qui fermait à partir de Minuit, et le parc lui-même fermait une demi-heure plus tard. Pour autant, il y avait toujours quelques personnes qui jugeaient bons de s’y rendre. Bran était là pour les cueillir. Contrairement à sa sœur, il était un guerrier, un chasseur, qui avait été entraîné pour utiliser au mieux ses instincts vampiriques dans le combat.
L’homme s’attarda sur une cible potentielle, une jeune femme qui était sur son portable, écoutant de la musique. Une proie presque trop facile... Trop facile pour lui. Elle devait probablement écrire à ses copines, pour parler de son rencard avec un homme. Elle était plongée dans son monde. Il pourrait tomber sur elle et l’immobiliser très rapidement, mordrait dans son cou, et la prendrait contre le sol. Il n’y avait là aucun challenge, aucun
piquant. Tout cela, il pouvait le faire au manoir. Bran voulait un peu d’action, il voulait ressentir le frisson sur son échine. S’il l’avait pu, il aurait préféré se rendre dans les profondes forêts sur Terra, mais y aller aurait été se séparer trop longtemps de Mélinda, ce qu’il ne pouvait tout simplement pas faire. Il avait un besoin compulsif de sa sœur, de la voir en train de dormir, de lui faire l’amour, de la voir faire l’amour. S’éloigner d’elle le déprimait, le rendait plus colérique, beaucoup plus instable.
Alors qu’il commençait à se dire que cette morne soirée n’avait rien de palpitant, et qu’il ferait mieux de retourner humer l’odeur de sa sœur et caresser l’ourlet de son corps, il sentit alors quelque chose de particulier. En tant que vampire, il disposait d’un sixième sens vampirique, lui permettant de capter les groupes sanguins autour de lui. Un pouvoir très utile, un don qui faisait qu’il était virtuellement impossible de piéger un vampire... Et ce sang était...
Juteux. Un sang sucré, chargé de délicieuses odeurs. Bran se déplaça rapidement, descendant sur le sol, longeant les arbres et les buissons.
«
...Bonne, cette salope ! »
Bran s’arrêta prudemment derrière un tronc d’arbre. Plusieurs individus encerclaient une jeune femme posée sur le sol... Une démone. Vu l’odeur particulière de son sang, le bel éphèbe optait pour une succube.
«
On doit vite la ramener. C’est une démone, je ne sais pas combien de temps le somnifère fera effet... -
Oh, ta gueule, Kyle ! L’alchimiste nous a dit qu’il l’endormirait pour plusieurs heures. Ça nous laisse donc le temps de la ramener... Mais avoue que ça serait dommage de se priver d’un si joli minois. -
T’es... T’es sérieux, là ?! -
J’ai l’impression d’entendre un pédé de puceau... Oh, Kyle, on se réveille ! Regarde-moi cette pute, et dis-moi que t’as pas envie de te la faire ! -
Si, mais... -
T’as jamais baisé une femme pendant son sommeil ? Crois-moi, mon pote, c’est magique... Comme se taper une putain de poupée gonflable, mais avec un vrai corps. Car, pendant qu’elle dort, son organisme continue à tourner, tu piges ? C’est comme fourrer une nana, mais sans tous ces cris de salope. »
Ces types traquaient une succube, probablement pour la ramener à Terra. D’autres esclavagistes ? Ils n’avaient pas l’air de ressembler à des paladins, en tout cas. L’un d’eux avait retiré son pantalon, mastiquant son mandrin en se rapprochant de la femme. Bran, lui, se disait que ce serait un joli cadeau à offrir à sa sœur. Une belle succube...
«
J’vais m’la faire en premier... Putain, ouais, une succube, j’en rêve depuis des mois... Allez, ma belle. »
Sa grosse main potelée vint caresser l’un des seins de la femme, et l’autre se déplaça vers la culotte noire de la femme. Ils étaient trois, l’encerclant. Bran se décolla lentement de son arbre. Tout ça allait être très rapide. Il était aussi furtif qu’une ombre, dans une partie du parc où aucun lampadaire n’était présent. Prudemment, il avançait le long de l’herbe, cette dernière étouffant ses pas. Deux des trois étaient côte à côte, lui montrant son dos, observant le troisième se masturber contre la culotte noire de la démone.
Les griffes de Bran jaillirent d’un coup, et égorgèrent les deux hommes, passant devant eux, glissant sur leurs cous. Ils se mirent à gargouiller, et le troisième homme, se surpris se redressa... Pour voir Bran l’attraper par le cou et le plaquer contre le sol.
«
HAAAAAAAAAAAAAA... !! » hurla l’homme de terreur.
La dernière chose qu’il vit fut les crocs de Bran fondant sur lui, des canines pointues et acérées, qui se plantèrent dans sa gorge, sectionnant sa veine, et s’aspergeant généreusement de son sang. Le corps de l’homme se débattit faiblement, avant de cesser de remuer, inerte. Bran se redressa, et essuya son visage recouvert de sang, puis contempla le corps de la femme, inerte, couchée à ses pieds... Et grogna.
«
Baiser une femme endormie... »
Il considéra les queues rabougries des trois imbéciles heureux, et attrapa la femme, la tenant entre ses bras. Il regarda brièvement son beau visage... Et se dit que Mélinda serait ravie. Il la prit entre ses bras, et s’éloigna du parc, laissant les trois cadavres derrière lui.
La succube était allongée dans un confortable lit, au sein d’une chambre assez grande et confortable. C’était un lit deux places, et, quand elle commença à se réveiller,
Zan, la jeune femme qui veillait sur elle, s’extirpa de son siège, reposant son livre, et se pencha vers son visage, l’embrassant tendrement sur le front.
«
Vous vous réveillez ? Rassurez-vous, vous êtes dans un endroit familier... »
Zan disait ça, mais, en fait, elle ne savait pas trop si la femme l’entendait.