L'homme avait le moral au plus bas, clairement, il savait que Minerve était passée mais il n'avait jamais eut l'occasion de se préparer au fait qu'Alice lui en parlerait alors qu'il était focalisé sur la réussite de son futur passage dans sa pensée. Minerve était dans le fond quelqu'un qu'il aimait beaucoup, et si le début de son voyage s'était fait par simple curiosité, l'évolution qu'il avait subit suite à celui-ci l'avait si drastiquement métamorphosé que désormais il trouvait cela inconcevable que la jeune femme puisse le retrouver sans vivre une cruelle déception. Et c'est une chose qu'il voulait à tout prix lui éviter, il voulait plus que tout qu'elle se souvienne du jeune homme un peu candide qui passait son temps à protéger les autres et à faire de son mieux pour survivre, pas cet être dépressif et constamment sombre qui ne vivait que pour s'en sortir dans une vie de sang et de fuite, à se déplacer de jours en jours vers de nouvelles destinations pour ne pas subir les représailles de ses morsures. Minerve était quelqu'un de pure, quelqu'un de nature, comme nombre de ceux de sa race, et elle ne pouvait tout simplement pas côtoyer un être comme Darthestar, c'était clair comme de l'eau de roche dans la pensée du vampiroïde, et si cela ne pouvait pas vraiment être compréhensible pour autrui, pour lui qui avait connu si longtemps la vie à ses cotés, il ne pouvait y avoir d'autre vérités possible.
« Quel est donc ce tas de conneries qui vient de sortir de votre bouche ?! Vous êtes en Ashnard, terre de démons, terre d’êtres monstrueux et infernaux, terre d’individus qui ne connaissent que le sang et la mort ! Pourtant, notre Empire se compose de villes, de forts, de constructions ! Votre nature a changé, mais votre libre arbitre est toujours en vous. La capacité de choisir, de choisir entre le Bien et le Mal…Votre corps est fait pour tuer, vous dites ? Je ne connais aucun organisme qui ne soit pas un tueur. Ainsi va la vie, en se nourrissant de la vie des autres pour survivre. Allez-vous reprocher à un loup d’avoir des crocs pour mordre une biche ?
- Cela s'entends... »
Il ne pouvait dire le contraire, le monde tournait autour de la sustentation par la mort d'autrui, mais même si cela était normal du point de vue de la nature, le vampiroïde avait reprit ses esprits depuis l'époque où il agissait au "naturel", et depuis ce moment ne se sentait que plus coupable à chaque fois qu'il se retrouvait à mordre l'un de ses "semblables" pour vivre. Comment expliquer cela, peut-être était-ce propre à de nombreux nouveaux vampires, de se sentir ainsi trahis par eux-mêmes, trahis par leurs désirs et leurs pulsions alors même qu'ils espèrent plus que tout au monde rester le plus humain possible, alors que le simple fait de vivre la journée devient une véritable torture à cause de la morsure permanente et récurrente du soleil ? En tout cas la démone avait raison sur un point, il y avait surement bien pire que lui dans cette cité, dans ce pays, que ce soit des démons ou des malfrats, qui se sont échappés depuis longtemps de la voie du bien pour perpétrer leurs forfaits avec une assurance qui ferait froid dans le dos, mais cela ne pouvait pas vraiment empêcher les états d'âme de l'homme envers lui-même. Oui il choisissait le bien, il choisissait d'être un glaive pour ceux qui ne pouvait présenter de griffes ou de crocs pour se défendre, d'être l'homme qui tendrais sa main à tout ceux qui en ont le besoin pour leur offrir un goût de sécurité et d'aisance au creux du coeur, mais cela justifiait-il sa sauvagerie et sa monstruosité ? Il n'en était clairement pas certain.
« Si cette femme, cette Minerve, est aussi importante que ça, alors elle peut nous aider. Si elle vous a connu avant votre transformation, elle pourrait même être un meilleur choix que la Princesse de Sylvandell ! Elle pourrait vous aider à vous rappeler cette image positive que vous avez de vous, et vous accompagner dans les tréfonds de votre inconscient. C’est une aide non négligeable !
- Et bien, oui, mais…
- Nous ne parlons d’une promenade de santé ! Dame Zariël a souhaité que je vienne m’assurer de la viabilité de cette expérience ! S’il existe une femme qui vous connaît depuis des années, alors elle est appelée à être votre guide dans votre inconscient ! C’est aussi simple que ça !
- Mais ça ne se fera pas... »
Grave, décidé, l'homme se retourne pour regarder les deux femmes avec le même air sombre que plus tôt, mais aussi une intonation dans la voix qui laissait comprendre qu'il ferait tout pour que jamais, au grand jamais, il ne donnerait l'occasion à sa petite soeur de coeur de pénétrer dans sa mémoire, ses pensées, et son inconscient. De un il pensait que cela allait seulement mettre Minerve en danger, car il avait tellement d'à-priori envers ces retrouvailles, et tellement de différences par rapport à Balthazar, que la jeune femme ne serait pas reconnue par son nouvel esprit, et surement durement rejetée par celui-ci en conséquences. De deux, même si elle parvenait à trouver un moyen de se faufiler dans les tréfonds de son inconscience grâce à l'aide plus que nécessaire de la consoeur de Samara dans le cas présent, il était au bord de la certitude sur un point, c'est que l'elfe lunaire se perdrait surement face aux nouvelles pensées déviantes du vampiroïde, et que les conséquences sur sa personne serait dramatique. C'est aussi pour cela qu'il avait confiance en Alice, elle connaissait déjà une bonne partie de ses nouveaux défauts en tant que Darthestar, et non en tant que Balthazar, tout en étant capable de les relativiser et de s'adapter, justement parce qu'ils n'étaient pas liés par une histoire d'au moins quinze longues années. Enfin, et plus que tout... Alice, dans le cas où elle découvrirait en Darthestar un ennemi, une force dangereuse et malveillante, saura faire les bons choix en le rejetant et le renvoyant dans les tréfonds carcérals, peut-être avec un peu de peine, mais dans la plus grande des lucidités. De ce qu'il savait de Minerve... elle n'en serait pas capable :
« Vous l'avez vous même dit, elle a passée de longues années avec moi, mais avant tout j'étais un homme, un être simple, Balthazar, pas plus exceptionnel qu'un autre. Ce qu'elle connait est complètement différents de ce que je suis désormais devenu, et même si comme vous l'avez dit, elle saurait faire ressortir un peu de lumière au creux de mon âme, elle s'exposerait à quelque chose qui la blesserait plus que tout autre chose. Les elfes lunaires sont des êtres d'une nature tellement bonne que la moindre ténèbres les terrifient, et elle serait incapable de supporter la vision de celles que j'ai amassé. »
Il observe à ce moment la démone, droit, assuré, et bien qu'elle ai prononcée de nombreuses paroles pleine d'une certaine sagesse, que l'homme ne pouvait que comprendre comme véridique, et qui dans le fond lui mirent une petite claque de rappel suite à sa phase pseudo-dépressive, il était certain de ce qu'il avait dit, et donc qu'elle se trompait sur l'utilité de Minerve dans leur entreprise. S'il avait déjà du mal à l'idée de laisser entrer Alice, il était hors de question d'impliquer l'elfe de son enfance dans tout cela, la jeune femme ayant déjà un lourd impact à subir lors de leurs futures retrouvailles, car il était certain qu'elle avait insistée pour revenir, et que la princesse n'avait eut que l'hospitalité naturelle de lui concéder au moins un second passage pour tenter de la faire retrouver son "frère". Soupirant longuement, il se retrouve à se demander comment il a put finir dans une telle situation, bloqué dans la cité Ashnardienne à devoir planifier une visite dans son esprit en compagnie d'une démone et d'une princière personnalité, tout en parlant de sa petite soeur de coeur avec qui il avait vécu pendant des années. Dans des temps moins grave, la situation aurait surement prêtée à rire pour le vampire, qui aurait surement trouvé le tout relativement ironique et horripilant... Là, il était grave, clairement contracté, et on pouvait sentir chez lui cette rage oppressante et omni-présente qui entachait ses sentiments.
« J'ai ... été plus qu'honnête en disant plus tôt que je pense qu'Alice est la plus à même de remplir cette tâche. Je doutes que mon esprit même puisse lui faire du mal vu la confiance que j'ai en elle, et vu ce qu'il s'est déroulé, elle est la plus à même de savoir comment je peux réagir en la présence d'autrui. Enfin, en ce qui concerne une hypothétique rencontre avec un danger qui me soit étranger, et vous voyez très bien de quoi je peux parler, je m'en remettrais à votre maîtresse pour veiller sur elle, et la mener loin de tout problème, hors de mon inconscient. »
Il marque une pause, regarde rapidement Alice qui avait bien du mal à entrer dans la discussion, puis revient à Morana avec qui il échange une dernière phrase, bien plus pragmatique et calme que les précédentes, tandis qu'il retrouvait la délicatesse de ses traits, et une expression apaisante sur le visage, son expression de vagabond contemplatif.
« Enfin, dans le cas déjà où cette charmante demoiselle accepterait de braver ce potentiel risque et que vous même parliez en bons termes de la réussite de cette entreprise à votre maîtresse n'est-ce-pas ? Je ne suis pas maître de cette situation, à mon plus grand désarroi, mais je peux au moins vous dire en toute franchise ce que je juge être le plus sur, car rassurez vous, je n'ai pas tendance à sortir un "tas de conneries", comme vous l'avez subtilement noté sur mes précédentes paroles. »
Point d'ironie, juste quelques paroles honnêtes... Que cela soit utile ou non.