Gabriel fumait dans le commissariat. Oui, c'était interdit, mais il avait rendez-vous avec le directeur dans quelques instants et n'avait pas le temps de sortir. Il fumait même près du détecteur de fumée, comme s'il avait décidé que l'entretien n'aurait pas lieu… mais devant la pression du regard des autres, il finit par écraser le mégot sur la porte du chef, devant lui avait de le laisser tomber au sol, comme si de rien n'était et plonger ses mains dans ses poches, dans l'attente. Le commissaire lui avait dit de l'attendre devant la porte et il se trouvait forcé d'attendre comme ça, maintenant. Putain ce que ça lui faisait chier… il avait un vrai travail normalement, et il avait une canette de bière ainsi qu'un gueuleton à se faire à l'oeil chez un commerçant qu'il rackettait occasionnellement…
Bon dieu, le sac à merde faisait quoi à le faire attendre comme ça…. Ce ne fut qu'après une heure d'attente que le commissaire arriva enfin… il semblait pressé et sa chemise blanche était toujours la même, tachée sur le col avec un liquide bordeaux, du vin sans doute. Il ne serra pas la main de Gabriel et se contenta d'entrer dans le bureau et de faire signe au blondinet de le suivre., non sans une légère remarque sur le fait que ça sentait la clope et le lieutenant de police se contenta de souffler bruyamment. Oui, il le faisait chier, et il n'allait pas le cacher… Il n'était pas là pour faire le lèche pompe avec le connard de l'autre côté du bureau…
Le commissaire lui fit signe de s'asseoir et Gabriel obéit sagement avant d'attendre, avachis, qu'il lui explique d'abord pourquoi il l'avait fait poireauté et plus encore, pourquoi cette convocation, alors que pour une fois, il n'avait rien foutu de déplacé, ou du moins, rien que ne puisse remonter aux oreilles du patron… car bon gré mal gré, il était de toute manière confronté à deux ou trois situation pas vraiment légales au quotidien. Gabriel avait fini par faire abstraction du mot « légalité » dans ce genre de cas. Mais tout le monde n'était pas aussi souple que lui là dessus, bien au contraire… Il regarda le commissaire et sur un ton sec, il entama la conversation.
« Bon, alors, c'est quoi vos conneries, va falloir accoucher, parce que bon, je commence à penser que je suis en train de perdre mon temps ou du moins, qu'on veut me faire perdre mon temps... »
Le chef de la police locale leva un sourcil intrigué par ses propos mais ne répondit pas et griffonna des notes, ajouta des signatures sur un papier en silence, avant de prendre la parole, enfin. Car Gabriel commençait à devenir complètement fou. La patience, ce n'était pas franchement l'atout du blondinet, lui même le reconnaissait sans mal…
« Bon, alors, vous êtes là, Valmy, parce que ce n'est plus possible… plus personne ne veut bosser avec vous, et même les volontaires désignés se font porter pâle. Aussi, voilà la seule solution que nous avons. On va vous placer avec quelqu'un qui vous ressemble, même genre d'épine dans le pied, même avis sur la hiérarchie, et même genre de tête brûlée... »
Gabriel haussa les épaules, un rien déboussolé, il ne voyait pas quoi dire ou quoi faire de toute manière, si ils en avaient décidé ainsi, et bien soit…
« Et ? Je vois pas ce que ça peut bien faire, c'est pas la première fois que je me retrouve avec un coéquipier qui tiendra pas la journée… alors pourquoi je devrai m'étonner de ça ? Ou plutôt pourquoi me faire venir ici pour en parler ? »
Le commissaire connaissait assez bien Gabriel pour se dire qu'au moindre mauvais mot, il pouvait le braquer… et après, pour le faire revenir à de meilleurs sentiments, c'était particulièrement dur…
« Disons simplement que cette fois-ci, il n'y aura pas de changement… à moins que l'un de vous fasse une grosse connerie, et bien, je crois que le partenariat devra durer. Donc c'est simple, Gabriel, soit vous mettez tous les deux de l'eau dans votre vin, soit vous allez vous faire descendre… je le vois gros comme une maison, d'autant que j'ai une enquête qui ne demande pas trop de finesse mais qui est assez dangereuse pour que vous deviez vous supporter et vous aider, et en plus vous devrez essayer de voler sous les radars... »
Gabriel soupira et en même temps, quelqu'un frappait à la porte. Le commissaire donna l'ordre d'entrer et Gabriel se contenta d'admirer le spectackle. Elle était rousse et plutôt bien roulée, aussi japonaise que lui… il ne put retenir un sifflement avant de dire assez bas.
« Belle bête... »
Le commissaire fit mine de ne pas avoir entendu.
« Ah et bien vous voilà enfin ! Ce n'est pas comme si je n'ai pas trouvé le temps long à vous attendre…. Nous avions rendez-vous il y a une heure. Vous avez une bonne excuse ? Enfin, passons, heureusement que ma réunion a duré plus longtemps que prévu… asseyez vous. Valmy, laissez moi vous présenter votre nouvelle partenaire, mademoiselle Myuki Shinko. Lieutenant Shinko, voici le lieutenant Gabriel Valmy. »
Gabriel se contenta d'un hochement de tête avant de finalement devenir songeur…. Il était assailli d'une impression étrange… vous savez, un peu comme si elle lui était familière et qu'il aurait du se souvenir d'elle… mais où et quand l'avait-il rencontré ? Il ne s'en souvenait pas…. Boarf, ça lui reviendrait bien à un moment ou à un autre….