Sarah la releva, et était loin de s’attendre à ce qu’Irina cherche à la piéger. Elles venaient de vaincre un adversaire surpuissant, et Pezzini ignorait si ce monstre était vaincu. Elle voulait explorer les tunnels, et pensait juste à écarter Irina le temps de retourner explorer les égouts. C’était son plan, une stratégie simple et efficace, mais, alors qu’elle y réfléchissait, Irina se mit alors à l’embrasser fermement. Sarah écarquilla les yeux, surprise… Et sentit alors son corps trembler. Elle prit conscience de la position précise des mains de la Tekhane, et se mit à remuer, posant ses mains sur ses épaules nues, cherchant à la repousser. Le plaisir se mit à irradier, mais ce plaisir n’était pas bienvenu. Il était dangereux, mortel, acéré et vicieux. Ses seins se mirent à pointer, ses tétons durcissant, se heurtant à la peau douce et chaude de la femme. Sarah gesticulait encore, tentant de se libérer, tentant de repousser cette femme, mais Irina avait une poigne surnaturelle… Et le Witchblade n’avait aucune raison de réagir. Contrairement à ce qui s’était passé dans l’appartement, où les tentacules d’Irina avaient été clairement perçus par son organisme comme une intrusion, ici, le plaisir annihilait les défenses de son corps. Seul son esprit réagissait, en comprenant le piège de cette bouche angélique, mais elle n’arrivait pas à réveiller le Witchblade.
Pezzini soupira faiblement, n’arrivant pas à parler, n’arrivant plus à se retenir. Rien à faire, le bracelet ne voulait pas se déclencher. Pourquoi ?! Pourquoi est-ce que l’Artefact se refusait à elle ? Sarah ne le contrôlait pas assez, et ce manque de maîtrise se faisait payer. Une sensation de vertige l’envahit, de torpeur. Ses muscles s’affaiblissaient, sa tête bourdonnait, et elle sentait une immense vague de fatigue la saisir.
*
Non… Non, Pez’, résiste, résiste, bordel !*
Elle
devait résister, elle devait lutter contre cette torpeur, contre cette sensation d’endormissement. Le baiser se rompit délicatement. Irina l’avait embrassé divinement bien, et tout le corps de Pezzini frissonnait, de plus en plus excité, incapable de lutter contre les bras puissants, lourds, et doux de la femme. Cette sensation d’écrasement était extrêmement excitante, et son corps était malheureusement en train de la trahir.
D’une douce voix, Irina se mit à lui parler :
«
Je suis désolée Sarah... Tellement désolée... Tu aurais dû me tuer quand tu le pouvais... -
N-Non, I… Irina, je… Je t’en prie, n-noon… »
Sarah gémissait, la vision floue, et sentit une douce main sur son visage.
«
Tout va bien se passer... Je suis là... Laisse-toi aller... Laisse-toi al... »
La voix chaleureuse de la femme l’assommait. Ses paupières devenaient lourdes, si lourdes… Elle détendit ses bras, sentit tous ses muscles s’affaisser, et goûta au sommeil.
*
* *
Plaisir. Évasion. Douceurs exquises, sensations diffuses et ténues de jouissance. Où était-elle ? Elle flottait dans un océan d’obscurité, sombrant entre le conscient et l’inconscient, végétant dans un monde à part. Quand sa mémoire parcellaire revenait, elle revoyait des lueurs aveuglantes, une civière avec des sangles solides la maintenant… Puis le plaisir, vague. Elle flottait dans un océan d’étoiles, séparée du monde, séparée de la réalité. Son nom lui était vague, ses souvenirs se dispersaient, disloqués comme un kaléidoscope.
*
Sarah Pezzini… Sarah Pezzini, je m’appelle… Sarah Pezzini, Sarah Pezzini…*
Elle était incapable de remuer. Parfois, les sensations de son corps revenaient, et elle sentait le froid, ainsi que des bras bloqués, des jambes coincées, et une langue qui s’activait contre sa cuisse. Sa volonté essayait de surmonter les doses de plaisir, les injections et les overdoses en elle. Elle savait ce qu’on lui faisait… Irina avait essayé de le faire dans son appartement. Elle essayait de réunir ses pensées, mais, à chaque fois, un orgasme supplémentaire la saisissait, l’endormant, brisant encore ses pensées, ravageant ses idées.
*
Dollification… Sarah Pezzini… Pense, Sarah, pense, peu importe à quoi. Ils… Ils ne peuvent pas obtenir ma liberté de pensée, ils… Ils ne peuvent pas me contrôler ainsi.*
Elle se rappelait de son identité, de son nom… Qu’était-elle, déjà ? Il lui fallut plusieurs minutes pour s’en souvenir… Une policière. Que faisait-elle ici ? Allez, Sarah, fais marcher tes méninges ! Ils cherchaient à la contrôler, mais… Elle ne les laisserait pas faire ! Elle était une femme forte, courageuse, têtue !
*
Sarah Pezzini, Sarah Pezzini, Sarah Pezzini…*
Son nom était son mantra, son motto, un message de ralliement qu’elle utilisait pour ne pas sombrer dans la démence et la folie.
*
Sarah Pezzini… Pezzini, Pez’, Sarah… New York, Tekhos… Sarah Pezzini…*
Le plaisir explosa ensuite, et elle soupira.
*
* *
Pezzini se tortillait sur son siège, instable, mal à l’aise, galvanisée par le plaisir. Lorsque les doses de narcotique commencèrent à descendre, Pezzini retrouva peu à peu l’usage de ses pensées. Les drogues se dissipaient, et elle prit conscience que ses corps étaient tirés dans tous les sens. On avait replié ses jambes sous ses mollets à l’aide de solides sangles, et ses bras étaient enfoncés dans des espèces de trous étroits, avec une sorte d’épaisse mousse qui les immobilisait totalement. Elle ne pouvait même pas remuer le moindre petit doigt. Tous ses muscles étaient tirés, et le plaisir était intense. Depuis combien de temps était-elle là ? Une seringue la nourrissait en nutriments par le biais d’une intraveineuse, et elle sentait une langue lécher son intimité… Sans arrêt, sans relâche, avec un indéniable talent. Ses yeux étaient obstrués par un bâillon noir en cuir, et elle soupirait, haletant et gémissant.
«
Hmmmm… Hmmmm !! »
Elle ne pensait à rien d’autre en ce moment que le plaisir incessant… Ou à presque rien d’autre. Sarah respirait bruyamment, haletant et gémissant, mais elle sentit les lèvres de la femme en train de la sucer remonter le long de son corps, se rapprochant de son visage. Les lèvres furent remplacées par des doigts précis et tendres, qui s’attaquèrent à son intimité, heurtant rapidement son clitoris. Elle sentit une main soulever son bandeau, et une aveuglante lumière agressa ses yeux.
«
Hunn ! »
Elle vit un visage se découper, mais ses yeux avaient été privés depuis bien trop longtemps de lumière pour qu’elle voit quoi que ce soit. La lumière était agressive, dangereuse, aveuglante, et elle sentit le visage se rapprocher du sien. Des lèvres s’approchèrent des siennes, et elle reconnut la voix, qui susurrait contre elle :
«
Détends-toi Sarah... Tout va bien... Je suis avec toi... Tu aimes ce que je te fais ? C'est bon n'est-ce pas ? Laisse-toi aller... Fais-moi confiance... Je suis ton amie... Tu en veux encore... Détends-toi et laisse-moi t'aider à te soulager... »
Sarah soupira à nouveau, sans rien dire, et sentit les lèvres d’Irina sur les siennes. Pezzini avait perdu toute volonté, anesthésiée qu’elle était par le plaisir, et elle enfonça sa langue dans la bouche de la femme, soupirant contre cette bouche magnifique. Le baiser dura de longues secondes, et même plus. Sarah n’était plus qu’une poupée sexuelle, en train de vivre le processus de
dollification, vivant directement ce sur quoi elle voulait se renseigner. La femme avait, dans son esprit, un carcan de résistance, mais il était comme une faible voix, un murmure silencieux.
«
Fais-moi l’amour, Irina… Hunnn… En… Encore, haaaa… Je… Je t’aime… »
Son corps en voulait plus, encore et encore, et elle ne pouvait rien faire pour le réfréner.