Cette affaire folle était en train d’atteindre un point culminant, mais, si Sarah espérait obtenir un dénouement digne d’un film hollywoodien, elle se trompait. Son projet était de diffuser toutes les données compromettantes de cette odieuse société au public, afin de déclencher un scandale majeur, un scandale que même les importants liens de collusion entre les firmes privées, l’État, et les médias, n’arriveraient pas à étouffer. L’État serait contraint d’intervenir pour mettre fin aux expériences génétiques illégales de cette firme. C’était le projet de Sarah, mais, pour résoudre le problème, la mégacorporation avait tout simplement coupé le courant, plongeant toute l’installation dans le noir, avant que des lumières d’urgence ne s’allument, fournissant un faible éclairage.
Entièrement recouverte par le Witchblade, Sarah ressemblait à une sorte de guerrière médiévale sexy et issue d’un univers d’
hertoic fantasy. L’armure était d’un gris métallique lumineux,
recouvert de multiples écailles, comme un croisement entre une armure en métal et une peau de serpent. Sarah sentit soudain des bruits de pas, et bondit sur la garde, manquant la tuer en la frappant. Le Witchblade amplifiait fortement toutes ses capacités, et l’agente, en agonisant, ne lui apprit rien d’utile, si ce n’est qu’elle avait condamné tous les membres ici.
«
Tous ceux et toutes celles qui ont participé à ces odieuses expériences ne méritent que la mort ! »
Difficile de se raisonner sous cette armure. Elle relâcha ce corps, puis se rapprocha des ordinateurs. Le courant avait certes été coupé, mais Sarah pouvait, grâce à son armure, interagir avec la matière. Malheureusement, elle ne contrôlait pas énormément ses capacités, mais posa quand même ses mains sur le pupitre, essayant de relancer les machines. Ce fut un coup d’épée dans l’eau, avant qu’une voix ne résonne depuis des haut-parleurs. Elle entendit dans la foulée de multiples bruits, correspondant à des portes qui se levaient et d’autres qui s’abaissaient, d’épaisses portes coupe-feu, balisant ainsi un chemin vers un ascenseur, qui brillait dans l’obscurité de ces couloirs froids et aseptisés, les battants entrouverts de l’ascenseur donnant sur la lumière de l’ascenseur, comme celle au bout du tunnel.
*
Irina !*
Tout ça sentait le piège, mais Sarah ne pouvait pas laisser son amie retourner sous leur contrôle. Elle serra les poings. Son visage était dissimulé sous un
heaume gris et organique, au menton proéminent, avec des yeux rouges protégeant les siens. Elle sortit de la pièce, et s’approcha, le Witchblade ne sentant plus aucune présence humaine.
«
Si vous lui faites du mal, je vous tuerai ! »
Sarah n’avait pas trop compris ce qu’elle avait provoqué, mais, après tout, elle ignorait encore où elle se trouvait. Irina, sous l’effet de son conditionnement mental, l’avait trahi, mais Pez’ avait réussi à la libérer. Depuis lors, le chaos régnait dans ce complexe. Sarah courut droit devant elle, filant à toute allure, atteignant une vitesse surhumaine, jusqu’à s’approcher de l’ascenseur. Elle hésita un peu, avant de rentrer dedans, et sentit rapidement ce dernier s’ébranler, se mettant en marche automatiquement.
Alors que l’ascenseur montait, le Witchblade l’avertit à nouveau, et un gaz vert se diffusa soudain tout autour d’elle. Du poison... Inefficace contre elle, vu que le Witchblade la protégeait, et, quand l’ascenseur s’ouvrit, elle défonça les battants du cube métalliuq,e envoyant valdinguer les portes dans une grande pièce sombre et froide... Qui s’illumina petit à eptit, tandis que Sarah, troublée, sentait d’étranges signaux de vie.
*
Qu’est-ce qui se passe, ici ?!*
Elle aurait pu utiliser la vision infrarouge du Witchblade, mais vit, peu à peu, les lumières se dessiner, éclairant
une grande structure, atypique. Sarah, surprise, s’en approcha un peu, et posa sa main dessus, sentant des courants électriques... Puis nota alors, à la base de cette tour, des espèces de cavités, des alcôves avec des numéros peints sur le mur. «
01 », «
02 », «
03 »...
Surprise, elle continua à marcher, avant d’entendre des bruits de talon, et une voix féminine, forte et autoritaire, qu’elle ne connaissait pas, résonnant depuis des micros :
«
Bienvenue dans l’enceinte du plus grand projet jamais entrepris par l’Humanité, au cœur de la Révolution ! Tu peux t’estimer heureuse, les personnes ayant vu ce que nous fabriquons ici se comptent sur les doigts d’une seule main. -
Que... Qui êtes-vous ? -
Une scientifique, qui a travaillé sur ce projet, et sur bien d’autres choses. La fusion entre l’Homme et la Machine, détective, voilà ce dont BIOGENIX s’agit. Irina et les autres sujets que tu as vu ne sont que des amusements, des cobayes, en vue de projets plus grands. Ce que tu vois sous tes yeux est la conceptualisation d’un ordinateur inédit, un ordinateur qui propulsera l’humanité au statut de divinité. »
Encore une folle... À l’entendre parler, elle avait tout de la mégalomane. Sarah se rapprochait de l’une des alcôves, son cœur battant lourdement la chamade, et posa sa main dessus, appuyant sur un bouton... Et de la fumée s’échappa alors, tandis que, dans un sifflement, ce qui s’avéra être une capsule s’ouvrit lentement, révélant, à l’intérieur, un liquide amniotique qui s’écoula un peu sur le sol...
Et un corps, qui disparaissait dans un enchevêtrement indescriptible de câbles reliés à son corps, de bandelettes blanches, ses bras nus s’enfouissant sous une série de câbles.
Blême, Sarah vit alors les lèvres de la femme s’ouvrir, cette dernière aspirant de l’air en recrachant un tuyau planté dans sa bouche, et qui devait servir à l’hydrater.
«
Depuis que l’Homme créé, il ne fait que recopier la Nature, mais sans jamais l’égaler. Les inventions les plus formidables, les plus incroyables qui soient, ne seront jamais inventées par l’Homme. Pourquoi s’embêter à vouloir concevoir des ordinateurs de plus en plus perfectionnés, quand nous disposons déjà de la source la plus impressionnante jamais fabriquée ? Une matière qui contient plus de banque de données que tout ce qu’on pourrait jamais concevoir ? Les dernières recherches en matière de neuroscience estiment que la capacité de stockage du cerveau humaine serait d’au moins 1 pétaoctet... 1015 ! De quoi emmagasiner tout ce qui se trouve sur Internet dans un seul cerveau ! Alors, si nous pouvions mettre à commun ces cerveaux, et les utiliser, on pourrait concevoir un ordinateur dont les capacités défient l’entendement. »
Sarah n’en croyait tout simplement, ni ses yeux, ni ses oreilles. Du bruit se fit entendre près d’elle, et elle constata qu’une porte venait de s’ouvrir, libérant son interlocutrice...
Qui s’avéra être une femme à la beauté aussi majestueuse que glaciale, et qui, depuis la mezzanine en hauteur, sauta élégamment en contrebas, se réceptionnant sans difficulté à quelques mètres de Pezzini.
«
Depuis l’aube des temps, la masse se sacrifie pour une minorité cultivée qui la mène à son summum. Ceci, c’est l’avènement scientifique qui nous permettra de dépasser notre potentiel, de transformer l’homo sapiens en homo superior avéré et patenté, loin de ces rejetons débiles et ratés de mutants et autres ESPers. -
J’ignore qui tu es, ma chérie, mais tu es juste folle... Toi, et tout ce projet dément, vous allez disparaître ! »
Sarah bondit alors à toute allure vers la femme, déployant ses griffes... Mais la main de la scientifique se leva brusquement, et, à la surprise de Sarah, la saisit à la gorge, avec une poigne de fer, puis la repoussa alors, la balançant comme un fétu de paille contre un escalier menant aux mezzanines en hauteur. Elle s’écrasa violemment dessus, autant sonnée que surprise, en comprenant que cette femme avait des capacités surhumaines avérées.
«
Malheureusement, une telle machine consomme énormément d’énergie. Mais toi, Sarah, tu abrites en toi des ressources énergétiques potentiellement infinies avec ton artefact. Grâce à toi, grâce à ton cadeau, je pourrais terminer ma machine ! -
Je... Je ne t’aiderai jamais, sale folle... -
Tu peux m’appeler... Supéria. Et ton consentement n’était pas requis en la matière. »
Supéria posa sa main sur le cobaye que Sarah avait sorti de la tour infernale. Cette dernière, à ce contact doux et chaud, celui d’une main, sembla frémir, puis la femme appuya un peu sur son crâne, et la capsule retourna se verrouiller.
«
Va chier, salope, tu crèves maintenant ! »
Pezzini s’élança à nouveau furieusement vers elle, déployant des tentacules argentés, mais Supéria bondit alors vers elle, se catapultant en avant, et le genou de la femme heurta violemment la tête de Pezzini, provoquant un choc violent qui repoussa encore Pezzini. Elle n’eut cependant pas le temps de s’envoler, car la main de Supéria la saisit à la jambe, et la fit tournoyer sur place, avant de la lâcher, l’envoyant s’envoler à toute allure. Sarah s’écrasa contre un coin du mur en hauteur, et Supéria bondit à nouveau, pour atterrir à quelques mètres d’elle.
Sous son heaume, Pezzini sentait sa bouche se couvrir de sang. Elle tenta de se relever, se tenant à quatre pattes, et le pied de Supéria la frappa dans le ventre, la faisant hurler en la repoussant contre le mur. La femme l’attrapa ensuite à la gorge, et la souleva de nouveau... Puis sa tête heurta celle de Pez’ dans un violent coup de boule, qui la fit hurler de douleur, en l’envoyant s’étaler sur le sol.
«
Où... Où est... I-Irina ?! » réussit alors à demander Sarah, se sentant épuisée, et ayant surtout mal partout.