Parait qu'on m'a collé une boulette. [Pv Maelie]

Aujourd'hui j'avais pour but de me relaxer un maximum. Vous savez, boire un verre, manger un bout, un bon petit plat dans une taverne où la cuisine était top. Mais bon, voyez, j'avais bientôt plus d'argent pour mon usage personnel - car oui, j'ai beau être pirate, il faut que je sépare impérativement l'argent que je réserve pour le 'travail' et celui que je garde pour moi - et j'avais donc en tête de me lancer dans une petite mission. Enfin, petite... J'allais avoir besoin d'au moins une personne supplémentaire et vu l'état de mes équipiers ces derniers jours je pouvais pas du tout compter sur eux. On m'avait prévenue qu'une petite nouvelle voulait s'offrir un taff et on lui avait pointé mon incroyable bonté à accepter n'importe qui, même les plus incompétents. Je ne savais pas encore ce qu'elle savait faire et je ne tarderai sans doute pas à le découvrir. On devait discuter de tout ça autour d'un bon verre.

-"Boss! Sort moi une bonne bouteille et ramène deux verres!"

Peut-être qu'elle n'aimerait pas ce que le barman viendrait nous proposer? Peu importe, j'en aurai plus pour moi au pire et je lui paierait un truc qu'elle préfère. Il avait plus qu'à attendre qu'elle se ramène. Je m'étais fais livrer un sandwich plus tôt dans la journée que je mangeais à mon aise, tranquillement. Je le finirai durant l'entrevue au pire, en comptant qu'elle soit pas dix plombes en retard. Je ne savais pas trop à quelle heure elle était censée arriver, surtout qu'on ne s'était pas donné l'un à l'autre personnellement rendez-vous non plus, ce qui compliquait la rencontre.

-"Et si tu pouvais t'assurer que personne vienne me déranger quand ma cliente arrivera, ça s'rait super!"

À quoi pouvait-elle ressemblait? On m'avait fait mention d'une longe chevelure pourpre ou écarlate? Je ne savais déjà plus, mais j'avais retenu ses yeux d'une amande claire et envoûtantes. On lui avait donné une photo de moi, enfin j'espère qu'elle l'avait reçue, ou qu'elle ne l'aie pas non plus perdue en chemin. Ou alors qu'elle a bonne mémoire. Enfin, une jolie dame qui débarque comme ça, j'la remarquerait direct si c'est une nouvelle du coin.

Maelie n'avait plus un rond ; elle venait de passer la nuit dans la chambre d'une auberge crasseuse en échange d'une corvée de vaisselle, et espérait ne pas avoir à renouveler l’expérience. Elle avait cédé à la tentation de s'auto-satisfaire avant de s'endormir ; un luxe qu'elle ne s'était pas permis depuis son départ de Russie. Mais cette nuit était un peu spéciale, puisque le lendemain elle allait devoir rencontrer quelqu'un qui pourrait peut être lui donner du travail. Elle tenait a être en pleine possession de ses moyens, et elle ne l'était jamais vraiment lorsque sa faim d'hommes la tiraillait.

Le matin elle s'était lavée à l'aide d'un bac d'eau froide et avait enfilé la robe noire achetée au Japon ; cette fois, il n'était pas question de l'enlever et de la remettre rapidement après une téléportation, mais simplement d'être présentable pour un entretient d'embauche. Et cette fois elle la portait avec des sous-vêtements. Elle avait démêlé ses cheveux à l'aide d'un peigne et décidé de les laisser libres, abandonnant son habituelle queue de cheval. Elle sourit en regardant son reflet dans son miroir de poche ; elle était bien plus présentable qu'elle n'aurait cru. Seul un peu de maquillage aurait pu améliorer son apparence ; tant pis.

"J'éspère qu'il ne va pas me demander des choses malhonnêtes..." songea-t-elle en marchant vers le lieu de rendez-vous. "...mais non, je me fais des idées, je ne vais pas à un rendez-vous de gangsters ou je ne sais quoi... je me demande dans quel domaine il travaille ? L'ivrogne d'avant-hier soir n'avait pas l'air de se rappeler... enfin ce qui compte c'est qu'il ait fait jouer ses relations pour m'obtenir un entretient"


Alors qu'elle tentait d'imaginer quel genre de relations un paysan alcoolique pouvait bien avoir et dans quel secteur d'activité, elle arriva devant la taverne qu'on lui avait indiquée. Elle vérifia que sa tenue était bien en place et entra : la taverne était presque vide ( il devait être trop tôt encore ), elle aperçut donc le jeune homme de la photo immédiatement. Elle s'approcha de sa table en arborant un sourire timide ( celui qui plait tant aux hommes ). Arrivée devant lui elle lui tendit la main d'un air qui se voulait assuré :

"Bonjour, je m'appelle Anastasia !"

Ouah! Une jolie donzelle comme dirait l'autre. Mais si elle savait que ce genre de charme ne marcherait pas sur moi. C'est pas que j'étais pas attiré par de mignonnes femmes comme elle, c'était juste que j'étais capable de mettre en place mes priorités. J'étais en train d'avaler ma dernière bouchée quand elle se présenta à moi. Oh! Non, ne croyez pas que je mangeais vulgairement, j'ai mes manières aussi. Si on se donnait pas de bonnes images de nos jours plus personnes nous livrerait ses demandes. De ce fait je n'étais donc pas impolis, et je pris alors la peine de lui serrer doucement la main après l'avoir essuyée dans un tissu utile à cet égard, lui rendant un sourire moyennement forcé.

-"Salutations Anastasia. On te l'a sans doute déjà dit mais moi c'est Ruse Artell. Je t'en prie, prends place. J'ai prévu un bon vin, si cela t'enchante, sinon tu peux commander ce que bon te semble. Oh, ne t'inquiète pas, j'compte pas te saouler pour te faire accepter ce qui pourrait me passer par la tête, j'ai déjà assez souvent d'emmerdes comme ça. Je vais aussi te sembler rude - évitons les jeux de mots pourris avec mon prénom... - mais je préfère être ainsi aux premiers abords et me relaxer ensuite."

Oui, je n'y allais pas de main morte quand je devais énoncer les détails sur ma façon de faire. Autant éviter le moindre malentendu le plus vite possible, et mon visage avait beau dévoiler que j'étais souvent sur les nerfs, agacé par mon entourage, il s'en dégageait une sincérité à toute épreuve. Elle aura vite fait de remarquer que je la tutoyer déjà. C'était ma façon de faire, quand je parlais à quelqu'un que j'estimais de mon âge ou plus jeune. Et puis on s'était présenté alors évitons les emmerdes.

-"Je te dévoilerai tout ce que tu veux sur moi, je n'ai rien à cacher et ce n'est pas une personne de plus qui risque de mettre ma vie en danger plus qu'elle ne l'est déjà. Si tu as des conditions sur ton embauche, je te prierais de les énoncer au plus vite comme ça j'adapterai les miennes."

Oui, quitte à ce qu'elle quitte en plein milieu de la mission, je préfère qu'elle sache directement ce que je suis et qui je suis si ça l'intéresse, ou si elle préfère ne rien savoir sur moi et avancer jusqu'à l'objectif atteint, gardant ainsi un certain anonymat. De mon côté je ne comptais pas la laisser s'en tirer de sitôt.

-"Quant à moi, si ça ne te dérange pas, j'aurai quelques questions. Rien de personnel, enfin, à mon goût. Par exemple si ta race? Ou encore ce que tu es capable de faire pour m'aider, que ça soit combattre, magies, soutient, connaissances diverses?"

Maelie fut un peu déstabilisée par cette attitude presque brutale, quoique absolument pas méchante. D'habitude les hommes n'avaient pas besoin de se forcer pour lui sourire. Celui-ci avait une attitude très... "professionnelle". Donc soit il était d'un grand sérieux, soit elle le laissait de marbre, ce qui lui était assez désagréable.

"Je te dévoilerai tout ce que tu veux sur moi, je n'ai rien à cacher et ce n'est pas une personne de plus qui risque de mettre ma vie en danger plus qu'elle ne l'est déjà. Si tu as des conditions sur ton embauche, je te prierais de les énoncer au plus vite comme ça j'adapterai les miennes."

Des conditions sur son embauche ? Rien ne lui venait. Était-il utile de préciser qu'elle voulait un salaire ? De toute façon comme elle avait absolument besoin d'argent, elle jugea bon de ne pas ennuyer son futur patron avec des réclamations et de se montrer conciliante. Elle resta muette alors qu'il continuait à déblatérer :

"Quant à moi, si ça ne te dérange pas, j'aurai quelques questions. Rien de personnel, enfin, à mon goût. Par exemple si ta race? Ou encore ce que tu es capable de faire pour m'aider, que ça soit combattre, magies, soutient, connaissances diverses?"

Là ! C'était le moment de faire valoir son utilité potentielle ( pour faire elle ne savait trop quoi ). Elle se lança dans une tirade empreinte d'une fierté non feinte :

"Eh bien je suis une demi-succube - mon père était un incube et ma mère une humaine - et par conséquent je peux me téléporter ! Je suis aussi plus forte que j'en ai l'air. Enfin pas si forte que ça, mais c'est bien pour mon gabarit ! Et euh... la téléportation je ne peux pas vous montrer maintenant parce ... enfin ça n'est pas possible dans l'immédiat mais d'habitude je peux ! Mais même je ne préfère pas vous montrer, parce que quand je réapparait je suis euh... nue. Pas que je sois complexée mais... bon vous comprenez ?"

Son aplomb s'était effondré à mesure qu'elle parlait, et son discourt s'acheva par un petit rire gêné. Elle tenta de sourire à nouveau, par une sorte de réflexe, pour amadouer son interlocuteur. On ne se refait pas.

Je savais pas trop ce qu'elle essayait de me dire sur la fin. Enfin, c'est pas que j'avais pas compris, j'ai pigé le fait qu'elle ne maîtrisait pas encore son pouvoir, par conséquent elle ne pouvait transférer que son corps, pas ses habits. C'est vrai que ça serait gênant. D'un autre côté, et j'espère ne pas trop l'avoir vexée, elle m'avait faite un peu rire, mais de bon cœur.

-"Demi-succube? Intéressant... Peut-être que je pourrai te demander d'user de tes charmes raciaux pour duper quelques types qui risqueraient de nous tomber dessus..."

Cette remarque de ma part était sortie de façon machinale, presque neutre dans son intonation montrant donc que je n'étais pas du tout sérieux dans ce que je venais de dire.

-"Blague à part. Donc tu ne peux pas faire grand chose de magique. Bon, au pire, j'espère que tu sera quand même de te téléporter si ta vie risque d'y passer. Je préfère te voir nue que coupée en deux."

J'essayais de la détendre un peu, sans savoir si je la détendais réellement ou si je la faisais encore plus flipper. C'est sur que j'avais toujours pas détailler en quoi consisterait la mission, et malgré que ça n'allait rien être de très sorcier, le monde de Terra en général était dangereux rien qu'en s'y promenant en pleine journée.

-"Sans vouloir te blesser, je n'aurai jamais demandé de l'aide extérieure si j'avais un truc très important à faire, pour moi en tout cas. Ici, on devra escorter des marchandises de ce type, le tavernier, à un de ses établissements en dehors de la ville qui sert de point de ralliement pour les voyageurs. Tu vois c'est urgent et personne veut s'occuper d'un truc pareil. Enfin, je ne peux pas promettre que ça se passera sans embrouille non plus, sinon on n'aurait pas besoin de nous engager. C'est d'ailleurs par moi que ça passe parce que certaines de ces marchandises m'appartiennent et j'en ai besoin pour mon navire donc ne t'inquiète pas non plus sur ce point, je compte pas garder la récompense pour moi et c'est toi qui en touchera la plus grosse partie."

Enfin je lui énonçais quelques points positifs sur cette entrevue. Je profitais d'ailleurs de cet instant pour faire une pause dans mes mots, prenant alors la bouteille de vin et nous servant, elle d'abord, nos verres. Je traçais légèrement du bout de l'index les bords du mien, pensif.

-"De mon côté, je suis un Esper, tu as entendu parlé d'eux? Bien qu'on est de moins en moins rares de nos jours, mais on reste pas trop aimés quand même. J'ai un pouvoir qui comme toi serait très embêtant si je n'avais pas appris à le maîtriser: je suis capable de provoquer de fortes hausse de température au toucher et j'apprends aussi à la transférer, mais ça c'est plus compliqué. Bref, tu comprends que si je me mettais à brûler mes habits, ça serait pas très pratique. À côté de ça je me bats avec des dagues, des épées, parfois un arc. Je voyage beaucoup, sur terre comme sur mer et rien ne me fait vraiment très peur."

Il fallait bien que je révèle à mon tour quelques informations potentielles, pour ne pas donner l'impression d'être le seul à y gagner dans le dialogue.

-"Au passage... Tu dis être plus forte que tu n'en donne l'air, était-ce vrai? Tu sais te battre d'une quelconque manière? Et crois moi, c'est mieux pour nous deux que tu sois franche ou précise, histoire qu'on évite des incidents quand on devra s'y lancer."

Coupée en deux ? Comment ça "coupée en deux" ? Est-ce qu'elle allait devoir travailler sur un chantier ? Et c'était SI dangereux que ça ? Maelie se sentit pâlir en entendant la suite du briefing ; escorter des marchandises ?! Elle s'en sentait complètement incapable - et elle avait raison. Elle se voyait déjà taillée en pièce par des bandits armés jusqu'aux dents. Elle continua cependant à hocher la tête pendant que Ruse parlait, et porta machinalement son verre de vin à ses lèvres pour cacher son trouble.

Ce jeune homme avait l'air tellement...dur. Elle sortait à peine des jupes de sa mère, et n'avait jamais résolu ses problèmes qu'avec son charme. N'avait-elle pas été sauvée récemment par une démone, uniquement parce que celle-ci la voulait pour une nuit ? Alors que le pirate énonçait ses compétences martiales, elle se sentit faible comme une poupée de chiffon.

"Il ne dit pas ça pour se vanter... il parle d'aller se jeter dans un combat à mort demain, et il le fera sans broncher" pensa-t-elle.

Ruse lui faisait peur également, d'une certaine manière. Elle présentait qu'il appartenait à cette catégorie d'hommes capable de vous tuer en vous regardant dans les yeux, alors qu'elle même en serait encore à se demander si elle n'a pas l'air trop impolie de les supplier avec autant d'insistance. Bien sur le jeune homme était de son côté... il n'empêche qu'elle se sentait vulnérable.

"Au passage... Tu dis être plus forte que tu n'en donne l'air, était-ce vrai? Tu sais te battre d'une quelconque manière? Et crois moi, c'est mieux pour nous deux que tu sois franche ou précise, histoire qu'on évite des incidents quand on devra s'y lancer."

Elle commença à répondre d'une voix tremblante, sans conviction

"Eh bien... je ne savais pas de quel type de mission il s'agissait mais... hm... j'ai environ la force d'un homme moyen et je connais quelque tours avec la téléportation pour surprendre... je n'ai jamais vraiment essayé dans un vrai combat..."

Elle était ridicule. Sa voix se brisa alors qu'elle terminait sa phrase, et elle dut essuyer une larme avec sa main. Elle reprit la tête baissée :

"Je suis désolée... je veux pas me battre, je peux pas."

Bon... Aussi peu empathique que j'pouvais être, j'avais bien compris que jusque là je ne faisais que lui faire de plus en plus peur. Je savais que j'avais tendance à exagérer, mais d'un autre côté la vie n'est jamais rose dans le coin, donc si cette simple mission l'effrayait à ce point, même aller faire des courses la ferait paniquer au bout d'une heure de lèche-vitrine.. Bon de nouveau j'exagère mais c'est pas rare de voir des viols en pleine rue, parfois même en public dans ce monde de ch'tarbés.

-"Heum, Anastasia, je t'en prie calme toi. Je suis désolé, on va..."

J'avais entamé ma phrase lors que j'avais remarqué que je l'avais presque fait pleuré. Sur le coup j'étais vraiment gêné, j'aimais pas du tout voir les gens pleurer et savoir que j'en étais la cause me mis un peu hors de moi. Après avoir bugué un petit instant, je secoua la tête légèrement de gauche à droite, reprenant un petit sourire qui se voulait réconfortant.

-"Je disais donc, on va reprendre depuis le début. Si je t'ai demandée ça c'était justement pour savoir si je devais te compter parmi les combattants ou pas. Bon, tu ne sera jamais à l'abris d'une attaque mais normalement il ne t'arrivera rien."

Peut-être que j'aurai du commencé par ces détails là en fait, ça l'aurait moins fait perdre les pédales, et moi mes plombs.

-"Tu pense pouvoir diriger le chariot? Enfin, le diriger, c'est plus simplement tenir les rennes pour éviter que les chevaux se cassent de l'autre côté."

Même si elle n'était pas très utile, si elle pouvait s'occuper d'un rôle occupé par quelqu'un qui savait se battre, ça libérerait cette personne et donc rien n'était perdu. De plus, c'était dans mes habitudes d'engager des personnalités pas très compétentes pour ne pas trop m'appuyer sur elles. En plus, une aussi jolie demoiselle à bord, ça motiverait un peu les deux trois compagnons qu'on aura à être vigilent pour la protéger.

-"Après, si tu sais cuisiner un peu, c't'un bonus. Ou appliquer des premiers soins si besoin ça serait encore mieux."

Je sais pas dans quoi je me foutais pour elle. Mais bon je l'avais devant moi et chercher quelqu'un d'autre prendrait trop de temps. Et puis elle semblait trop obéissante depuis tout à l'heure, elle avait besoin d'un truc à faire pour se faire de l'argent, ça se voyait, sinon elle se serait déjà cassée d'ici.

-"À part tout ça, je peux juste de promettre que cette mission ne sera pas plus dangereuse qu'une journée normale. Les bandits en ville sont du genre à piquer au premier venu, que ça soit un simple colis ou toute une caravane. Dis toi que ça t'endurcira un peu. Mais vu ton comportement... tu n'es pas d'ici je me trompe? Tu as voyagé beaucoup?"

Vous savez ce que c'est, quand quelqu'un est au bord des larmes ; soit vous le laissez tranquille le temps qu'il se maitrise, comme si vous n'aviez rien vu, soit vous essayez de le réconforter, et à l'instant où vous lui dites "pleure pas!" il éclate en sanglots.

"Heum, Anastasia, je t'en prie calme toi. Je suis désolé, on va..."

Maelie éclata en sanglots. Elle se sentait tellement tellement tellement tellement tellement ridicule ! Elle avait caché son visage derrière sa main pour ne pas croiser le regard du jeune pirate.

"Je disais donc, on va reprendre depuis le début. Si je t'ai demandée ça c'était justement pour savoir si je devais te compter parmi les combattants ou pas. Bon, tu ne sera jamais à l'abris d'une attaque mais normalement il ne t'arrivera rien."

Elle releva la tête d'un air hésitant ; vraiment, il parlait sérieusement ? Elle se sentait un peu gênée d'avoir l'impression d'obtenir une situation plus avantageuse en jouant sur la corde sensible de Ruse - il semblait finalement en avoir une. Elle n'était absolument pas sur de savoir diriger un chariot, mais elle ne pouvait pas décevoir systématiquement toutes ses attentes ! Être assignée d'office à la cuisine ne la dérangeait pas non plus ; cette répartition des tâche carrément sexiste la rassurait plus qu'autre chose. Elle n'était pas une référence en matière de cuisine, mais elle était assez sure de pouvoir se rendre un peu utile de cette manière.

"À part tout ça, je peux juste de promettre que cette mission ne sera pas plus dangereuse qu'une journée normale. Les bandits en ville sont du genre à piquer au premier venu, que ça soit un simple colis ou toute une caravane. Dis toi que ça t'endurcira un peu. Mais vu ton comportement... tu n'es pas d'ici je me trompe? Tu as voyagé beaucoup?"

Maelie ne pleurait plus : elle regardait à présent alternativement ses mains puis Ruse, un sourire de reconnaissance barrant son visage humide, mais n'osant fixer le pirate dans les yeux trop longtemps.

"Je ne peux pas vous promettre de pouvoir soigner les blessés, mais si vous m'acceptez je ferais la cuisine et je dirigerais la chariot !" Elle marqua une pause, reprenant un peu d'aplomb ; " Non c'est vrai je ne suis pas d'ici. Je viens de la Terre, de Russie. C'est ... un grand pays. En taille je veux dire. Je suis venue ici par une faille au Japon, et je n'ai plus d'argent."

Elle ignorait si Ruse avait connaissance de la géographie de la Terre ; elle décida en tout cas d'arrêter là son récit, n'osant pas dévoiler des détails trop personnels.

"Oh, et puis... mon pouvoir reviendra dans une dizaine d'heures"

Quand elle s'était mise à pleurer de plus belle, j'avais presque perdu tous mes moyens. Je n'étais pas spécialement naïf ou sensible. J'veux dire, quelqu'un crève devant mes yeux, ça ne me fera rien, même si c'est votre mère ou votre tante. Mais si quelqu'un se mettait à pleurer devant moi, j'en paniquais toujours un peu trop intérieurement. Heureusement, petit à petit, ayant repris une direction de dialogue plus sure, lente et calme, elle reprit peu à peu son attention et ses pleures ne firent bientôt qu'un mauvais souvenir. Enfin, j'espérais...

-"Bon, on a donc trouvé un compromQUEquoii?!?"

Oui, je venais de me couper tout seul dans mon élan lorsque je venais de réaliser ce qu'elle venait de dire sur ses origines. Je m'étais même levé soudainement de ma chaise, mains plaquées sur la table, avant de voir que j'commençais à attirer l'attention des quelques clients présents autour de nous.

-"Heum, désolé... Laisse moi deux secondes..."

J'inspire profondément et j'expire, formule sempiternelle pour récupérer sa sérénité.

-"Tu es donc venue sur Terra depuis ce fameux truc là, le Japon? Par une faille?"

J'avais déjà vécu cette expérience une fois, et j'avais eu pas mal de soucis et mauvaises surprises. Ce monde duquel je ne connaissais rien, un univers complètement différent qui si au départ m'effrayait, mon instinct de pirate et surtout aventurier reprenait rapidement le dessus.

-"Tu... es passée par une faille tu dis? Il y aurait donc réellement quelque chose qui nous fais passer d'un monde à l'autre?"

Et ouais, je n'avais pas eu la chance de découvrir l'existence des failles durant mon expédition là bas. Et le fait qu'elle le dise de façon si sure d'elle devait montrer qu'elle disait la vérité, enfin, je croyais. Je voulais en apprendre un peu plus et Anastasia allait sans doute se retrouver plus utile pour moi qu'elle ne l'aurai crut au début.

-"J'vais pas te demander trop de détails, mais si tu peux me raconter des trucs sur ces failles, ou même cet autre monde, je serai ravi de t'avoir à mes côtés pour notre petit voyage."

Les choses allaient un peu vite pour Maelie en deux minutes elle avait passé un entretient, bu un verre de vin, pleuré, décroché un travail, cessé de pleurer... et maintenant qu'elle retrouvait son calme le jeune homme commençait à s'exciter. Elle commençait à avoir du mal à réfléchir ;

"Bien sur, pourquoi, c'est tellement rare ?"

Évidement que c'était rare, elle n'aurait jamais trouvé elle même cette faille si on ne l'avais pas aidée. Ce qui l'étonnait le plus, c'était que Ruse doutait de l'existence de ces passages. Après tout, il était capable de mettre le feu à ses vêtements par la pensée et elle pouvait se téléporter, alors des passages entre les mondes, quoi de plus normal ? ... Ces pensées furent vite chassées de sont esprit : elle allait enfin pouvoir se rendre réellement utile.

"Tu sais, je peux même t'y emmener si tu veux. Je pense que je saurais retrouver la faille par laquelle je suis arrivée !"

En disant cela, Maelie s'était également levée. Étrangement, elle avait proposé son aide avec une sorte de timidité, comme si elle craignait d'être repoussée.

J'avais repris parfaitement mon calme le temps qu'elle me réponde. J'avais encore un peu de mal à croire ce qu'elle disait, ou plutôt sur l'exactitude de sa déclaration. Même si elle semblait s'être rendue compte de l'idiotie de sa remarque, je ne put empêcher un petit commentaire...

-"Bah si justement, c'est par une chance infime que j'ai pu rentré chez moi... et c'est encore dur de trouver de sgens ayant vécu l'expérience."

Elle se proposa alors d'elle-même pour lui montrer "le chemin", un moyen d'y aller. Je secoua vivement la tête, un peu apeuré ou plutôt perplexe.

-"Tu veux... maintenant? J'veux dire, t'es sure que ça marche comme ça? J'suis retourné plusieurs fois là où j'avais été aspiré dans l'autre monde et je n'ai jamais pu y revenir... Et puis si on change de monde aujourd'hui, on risque de rater la mission nan?"

Je parlais calmement, avant de reprendre un léger sourire.

-"Enfin à part ça, si tu peux vraiment m'y ramener une fois, je serai pas contre, et j'accepterai volontiers ton offre."

Après quoi, je but la dernière gorgée de mon verre, posant un coude sur la table pour soutenir ma tête.

-"J'pense qu'on a plus ou moins tout dis... y a rien d'autre que tu souhaite savoir? Tu as un endroit où dormir cette nuit avant d'y aller demain?"

Maelie laissa échapper un petit rire idiot en voyant qu'elle avait déstabilisé le pirate sans peur en lui proposant de l'amener vers un passage.

"Non bien sur, je ne voulais pas dire maintenant, mais si tu veux t'y rendre un de ces quatres..."

Elle haussa les épaules en souriant, comme une adolescente - eh mais attendez, Maelie EST une adolescente - qui proposerait une sortie au cinéma.

"J'pense qu'on a plus ou moins tout dis... y a rien d'autre que tu souhaite savoir? Tu as un endroit où dormir cette nuit avant d'y aller demain?"

Elle ne sut pas vraiment quoi répondre à cette question ; à vrai dire elle doutait du véritable sens de la question. Était-ce une simple question pratique, ou bien une invitation ? Et quel genre d'invitation ? Il ne s'était pas vraiment montré intéressé par ses charmes, mais à vrai dire elle avait un peu de mal à cerner ce personnage. Finalement elle décida de considérer qu'il s'agissait d'une proposition sans arrière pensée, et elle répondit en pesant ses mots :

"Eh bien à vrai dire si c'est une proposition - pour dormir - j'accepterais volontiers. Sinon je trouverais le moyen de me débrouiller, j'ai déjà payé une nuit à l'auberge en faisant la vaisselle hier soir !"

"Vaisselle, cuisine... j'ai jamais autant appris à être une bonne femme au foyer qu'en explorant le monde" pensa-t-elle amusée.

Nous voila passé la première étape. Je commençais franchement à croire, au début, qu'on n'en sortirait jamais et que j'aurai eu à congédier malgré moi cette pauvre petite. Je préparais déjà dans ma tête un peu le déroulement de la journée du lendemain, tout en restant attentif aux paroles d'Anastasia. Était-ce son vrai nom d'ailleurs? Peu importe, si ça ce trouve je n'allais plus jamais la revoir après coup. Après sa "promesse" - enfin, ça ressemblait à une espèce de promesse, ou de parole - j'avais pris la peine sortir de ma sacoche une bourse, lui donnant déjà un acompte.

-"Tiens, prend déjà ça. C'est pas beaucoup mais ça te permettra d'en faire ce que tu veux pour ce soir. Quant à une place où dormir, j'peux m'arranger avec le barman ici pour qu'il te laisse une chambre à l'étage. C'est pas une auberge mais il a toujours un ou deux lits de réserve. C'est aussi ici que je vais loger cette nuit, j'habite trop pour pour me permettre de rentrer et revenir."

J'avais d'ailleurs échappé un petit rire à sa remarque si je lui proposais une place pour dormir, ça donnait presque une mauvaise impression de ma personne. Enfin, c'est normal après l'échange qu'on a eu aujourd'hui.

-"Si ça peut te rassurer, après faut que tu me fasse confiance, j'suis pas du tout le genre de mec à sauter sur toutes les filles qui me passent sous le nez."

Une touche d'ironie s'envolait de mes lèvres à ce moment, mais je n'en restais pas moins sérieux sur ce que je venais de déclarer. Je n'avais peut-être plus eu d'occasion depuis une? Deux voire trois années alors bon. Pour en revenir ensuite à ce qu'elle disait sur son expérience...

-"Mouerf, moi à part me préparer un ou deux plats rapidement, je suis pas très doué je vais l'avouer, bien que j'essaye. Le reste je passe plus de temps à faire des corvées pour tenir en ordre ma cabine au navire ou ma baraque."

Finalement, je me levais de ma chaise, faisant face à la jeune demi-succube, lui tendant à mon tour la main.

-"Je suppose donc qu'on peut dire marché conclu? Ah oui j'ai pas prévenu mais pour ta place ici la nuit, elle sera gratuite, sinan j'aurai pas pris la peine de te donner un acompte si c'était pour te le reprendre de suite."

Maelie prit la bourse avec hésitation ; elle n'était pas vraiment sure de l'avoir méritée. Est-ce que Ruse était aussi généreux avec tous ses "employés" ? Ça devait être le cas, puisqu'il continuait de se montrer de marbre alors même qu'elle lui avait sans prendre garde laissé une occasion de l'entrainer chez lui. Elle aurait du être heureuse de croiser un pareil gentleman, surtout dans sa situation, mais la succube en elle était contrariée.

"Si ça peut te rassurer, après faut que tu me fasse confiance, j'suis pas du tout le genre de mec à sauter sur toutes les filles qui me passent sous le nez."

Victoire par KO de Ruse Artell contre la succube. Dépitée d'être remise à sa place de "n'importe quelle fille", Maelie laissa tomber son sourire pour arborer une expression d'une inexpressivité parfaite, répondant seulement "Hm hm", en hochant la tête, à tout ce que Ruse racontait.

"Marché conclut." dit-elle en lui serrant la main, arborant un sourire légèrement forcé. Elle aurait du le remercier, il le méritait mille fois. Elle ajouta un peu platement ;

"C'est très généreux de votre part.", marqua une temps d'arrêt puis reprit avec un nouveau sourire de politesse "Je suppose qu'on peut se dire "à demain" ?"

Le marché était ainsi conclus, et la discussion close. Du moins, la conversation concernant la mission, l'était, mais sur le coup, ma curiosité fut éveillée par cette personne. Je ne comptais pas non plus la suivre toute la journée mais je pouvais toujours essayer d'en apprendre un peu plus. Seulement, j'avais remarqué à sa dernière phrase un ton... plus banal qu'avant. L'avais-je vexé?

-"Si j'ai dis un truc qui te plait pas, dis le de suite, ça m'évitera de trop y penser."

Oué, j'étais pas très délicat, mais ce changement de ton, tout en passant du tutoiement au vouvoiement sans raison, fallait être dupe pour croire que tout allait bien. Bien qu'au final ça me dérangeait pas tant que ça, j'allais pas non plus m'inquiéter de chacune des réactions de mon interlocutrice et pensait déjà la suite. Je pris une mine pensive, avant de pointer d'un doigt divers éléments un peu au hasard.

-"Mmm... Si t'es occupée, oué, si pas, je peux te faire visiter un peu la ville, et on pourrait un peu discuter. Je sais que j'ai dis qu'on parlerait demain durant le voyage mais si on peut déjà commencer aujourd'hui, ça me dérangerait pas."

De nouveau, j'avais repris un air plutôt sérieux. La collecte d'informations faisait partie des us et coutumes du métier et en apprendre plus sur ces failles, sur cet autre monde ou simplement sur une partenaire de mission n'en serait que plus avantageux. Après, je n'étais pas associable non plus et simplement discuter me ferait du bien.