Musique d'ambiance29 Juillet 1941 – 14h27 / Au abord de Smolensk :Vladislav était accroupi derrière des hautes herbes aux abords de la ville. Ses mains moites tenaient une caisse métallique d’une vingtaine de kilo, contenant des dizaines de bandes de cartouches pour le fusil mitrailleur sur pied : le gorjunov SG-43. C’était Youri au tir cette fois ci. Il avait un don pour cela, anticipant souvent les sorties allemandes et tirant toujours un coup à l’avance.
La mitrailleuse était armée et pointée sur les masses noires se dessinant à l’horizon. Le combat allait bientôt commencer et l’avantage n’était clairement pas de leur côté. Des tranchées de fortune avaient été creusées à la hâte et une ribambelle de soldats disposés n’importe comment, avaient ordre de tenir les positions. L’armée rouge était mal entraînée, avec de l’armement obsolètes et en quantité insuffisante. La garnison en présence était souvent quatre fois inférieure en nombre et leurs canons ne rivalisaient pas avec ceux de la Wehrmacht. Heureusement pour eux, leurs nouveaux chars d’assaut, les T34, avaient surpris leur adversaire dans les assauts menés dans les steppes avoisinantes. Mais la Wehrmacht avançait inexorablement. Comme un flux de cafard sans fin…
Depuis tôt ce matin, l’artillerie allemande avait ouvert le feu en masse, cherchant à éventrer leur défense déjà branlante. Les katyushas avaient profité des lignes de défense extérieure pour se mettre en terrain découvert, crachant sans s’arrêter des murs de missile qui semblaient geindre de douleur à chaque départ.
Démonstration en imageLes orgues de Staline. Un cauchemar pour les allemands qui avaient vite appris à les craindre. Elles étaient capable d’envoyer un tir de barrage de 18 missiles chacune… disposé généralement en ligne, elles faisaient étinceler le ciel avant de noyer leur ennemi sous un nuage de fumé.
Mais la fumée ne stoppait pas les panzers… il fallait dans ce cas compter sur les blindés soviétiques. Ou dans ce cas, sur de l’infanterie pas du tout préparé.
Aussi, grande fut la stupeur lorsqu’une ligne de panzer jaillirent de la purée de pois.
La troupe ouvrit le feu sans attendre… Youri les imita, tirant sur ce blindage bien trop fort pour eux. Mais derrière ces blindés, il y avait autant de groupe armé nazi qui n’étaient pas à l’épreuve des balles.
- Putain, les panzers n’attaquaient pas par le sud ?
- On dirait que non… mais nos chars y croyaient dur comme fer… Un premier coup de feu, et un katyusha qui explose dans une violente colonne de feu. Les officiers s’affolent, ordonnent le repli des orgues si précieuses. Et l’infanterie en couverture…
Les grenades fusent vers les chars que rien ne semblent arrêter. La piétaille planqué derrière reste bien à l’abri des balles et les quelques canons russe encore déployés son rapidement pris pour cible.
Du sud, comme pour démentir les affirmations de Youri quelque instant plus tôt, un T34 surgit de la colline. Un violent tir de panzer le fit exploser par-dessous alors qu’il exposait le dessous de son blindage en escaladant la colline.
Des autres surgirent sur ses flancs, et furent accueillis de la même manière mais sans être anéantis. Ils purent riposter, trouant le blindage allemand avec plus d’aisance. L’espace d’une seconde, l’avantage retomba entre les mains des soviétiques qui mitraillèrent les groupes de combat du reich sans couverture.
La mitrailleuse cracha dans le vide, plus de munition… Youri frappa sur le casque de Vladislav jusque-là accroupi. Il se dépêcha, arrachant la bandoulière vide et en glissant une autre.
- Feu ! Youri balança la sauce. Et cette fois ci, Vladislav le soutiens, voyant le nombre croissant d’ennemi s’approcher.
La deuxième vague de panzer sort de la fumée qui se dissipe, et leurs canons n’arrivent qu’à endiguer certain d’entre eux. Les allemands sont assez proches, mais les katyushas sont rentrées en ville et une deuxième défense se prépare. L’officier sonne la retraite…
La journée promettait d’être longue. Et l’assaut allemand, lui, promettait d’être implacable et violent.
29 Juillet 1941 – 22h13Youri et Vladislav avaient pris position avec le reste de leur groupe de combat dans un entrepôt désaffecté. Tous le flanc du bâtiment éventré, était exposé au force d’assaut allemande. Et les décombres étaient autant de cachette qui faisait qu’un affrontement urbain par définition, s’enlisait quasi irrémédiablement.
Leur camarade officié, le sergent Gostrosky, était légèrement en retrait. Un genou au sol et le fusil comme un appui, penché sur un officier radio.
Il semblait contrarié. L’état-major venait probablement de lui évoquer le sacrifice soviétique pour la sainte Russie. Il grogna et s’approcha d’un muret encore debout.
Un allemand courrait dans le viseur de Vladislav. Il était accroupi et posait sa main sur son casque, comme pour y enfoncer sa tête le plus possible.
Le coup de feu résonna et se noya dans les autres… l’allemand tomba ! Un coup de chance… La journée promettait d’être longue, car un autre allemand se mit dans le viseur de Vladislav qui soupira en changeant de chargeur.
30 Juillet 1941 – 07h58 Pas une seconde de sommeil ou de repos… une tension maximale alors que Youri courrait d’un muret à l’autre. Il fallait reculer en se battant… toujours plus loin, toujours avec plus d’ardeur. Et l’effectif russe qui décroissait sans cesse, alors que les allemands arrivaient toujours plus nombreux.
Voilà à quoi ressemblaient la guerre patriotique et l’effort de guerre soviétique. Un engagement systématique de centaine de millier d’individu, lancé dans un affrontement mal étudié et mal organisé. Enrôlant à tour de bras dans chaque village ou chaque ville, les russes partaient à la guerre au matin pour être enterrés au soir.
- YOURI PLANQUE TOI ! Une succession de détonations firent s’écrouler le camarade qui venait de traverser la rue. Vladislav et quatre autres coco étaient planqués dans un immeuble relativement solide, leur nouveau chez eux comme hurlait très souvent leur sergent. Jusqu’à ce que l’ennemi en surnombre les pousses à reculer. Cela pouvait être dans trois heures, ou dans trois jours…
De l’autre côté de la rue, le reste de leur groupe de combat. Leur division avait été repliée au cœur de la ville afin de permettre un redéploiement des unités blindées sur le flanc sud.
Visiblement les allemands ne l’entendaient pas de cette oreille… mais le sergent Gostrosky, avec son tact habituel était là pour leur rappeler qu’on n’était pas là pour faire plaisir au bosch.
- Strabwosky, tu vas me flinguer ses bosch’s ou je te fous mon casque dans le cul !!!! Sorti de sa contemplation macabre, Vladislav acquiesça et escalada rapidement les escaliers en ruine de la maison, laissant son compagnon d’arme, gisant sur les pavés de Smolensk.
Arrivé à une fenêtre, il se positionna et ouvrit le feu. Mais sa hâte vu très rapidement stoppée par la triste réalitée… il tirait dans le vide.
- MUNITION !!! Vassili trifouilla dans sa sacoche et jeta un chargeur à Vladislav qui le rattrapa d’une main.
Ils étaient confinés dans ce premier étage délabré, tentant de couvrir l’arrivée du reste de leur groupe de combat.
Joseph arma une grenade qu’il jeta derrière une chariote qui servait de couverture. Les allemands se mirent à courir et la vaillante défense soviétique parvient à en abattre deux sur cinq.
- Schnell, schnell !La grenade explosa, faisant voler la chariote en éclat.
- Ca veut dire quoi schnell ? - Cours !- Sérieux ? - Ben ouais… dé que tu balances une grande ils hurlent ça et courent… donc… - Ah ouais…L’explication de Vassili à son camarade Joseph semblait tenir parfaitement la route. Ou du moins, ils s’en contenteraient tous pour l’instant.
Les échanges de feu poursuivirent un long moment encore et leur sergent déboula dans la petite pièce percée de trou… Il avait le visage des mauvaises fois ! Encore ce sacrifice à la con sans doute…
8 Aout 1941Smolensk tomba entre les mains du troisième reich… la 20eme et la 16eme armées encerclées et sur le point de capituler, n’eurent d’autre choix que de tenter une percée pour sortir de la ville. Et c’est grâce aux armées commandé par Rokossovski qui parvient à ouvrir un corridor, que Vladislav et de nombreux autres purent s’extirper de ce cimetière
Plus de 40 000 soviétiques perdirent la vie dans Smolensk et dans ses environs, en l’espace de trois malheureuses petites semaines. Et c’était sans compter les diverses affrontements qui c’étaient déroulés dans les champs… mais rien n’arrêta la marche allemande et les russes, rentrèrent vers Vyasma, l’un des derniers remparts entre la puissance nazi et Moscou.
Dans les mois qui suivirent Vladislav fut promu au rang de Sergent, non pas pour ses talents, mais par simple manque d’hommes expérimentés. En effet, l’armée soviétique se préparait à la défense de leur capitale, s’enterrant dans Vyasma comme ils l’avaient fait. Et comme elle l’avait fait, après des jours d’affrontement et des pertes considérables, elle fut forcée de reculer… laissant l’armée allemande à moins de 200 Km de Moscou.
Vladislav était un homme tout à fait banal. Fils d’ouvrier, il avait suivi la vocation de son père avec son frère et vivait avec sa famille à Stalingrad. Au début des affrontements, il fut envoyé dans les usines d’armements, contraint à fabriquer une quantité d’obus considérable pour l’armée rouge encore désorganisée qui se devait d’accélérer la refonte des ses armées.
Un petit accident de travail lui avait fait perdre deux phalanges à la main gauche et il resta quelque temps dans un hôpital militaire.
Lorsqu’on vient le chercher, ce n’était plus pour fabriquer de l’armement mais pour l’enrôler dans la 16eme armée, au sein de la 14eme division d’infanterie. Costaud comme il était, il formerait un fantassin soviétique excellent et prompt à être sacrifié.
De nature calme et agréable, Vladislav est un parfait travailleur communiste. Le genre à se lever le matin sans se poser de question et à casser des cailloux pour la sainte Russie.
La mère partie lui évoque d’ailleurs une profonde fierté et il s’en inspire chaque jour que dieu fait. Un enfant né et produit par la propagande soviétique.
Lors du début de la guerre, son amour pour sa mère partie grandi, et avec elle une rage et une haine contre l’envahisseur. Possédant de la famille aux frontières de la Pologne, c’est tout naturellement qu’il accepte de travailler 11 heures par jours dans les usines d’armements. Son frère était parti sur le front et disparu dans la bataille de Brest… Au lieu de s’en émouvoir, Vladislav nourrit l’espoir qu’il c’était battu jusqu’à la mort afin de préserver la grandeur de la Russie.
Lorsque son tour vient à être enrôlé, il accepta avec un fanatisme aveuglé et parada fièrement avec ses voisins ou amis d’enfance dans sa nouvelle division. Grande fut sa déception lorsqu’il tomba nez à nez avec les nazis, mieux commandés, mieux équipés et mieux préparés. Un ennemi trop fort, contre qui leurs supérieurs les envoyaient comme de la chair à canon. Son amour de la Russie ne perdit pas de fougue mais il commença à méfier de ses officiers qu’il jugea rapidement incompétent ou dépassés par les évènements.
Dans son uniforme soviétique, Vladislav est l’une des millions d’âmes dont la Russie est fier et sur qui elle compte pour se défaire de l’ennemi allemand.
Il est de nature assez grande, dépassant le mètre quatre-vingt et musclé par la force des choses. Son métier et la guerre ont renforcé son ossature et développé sa musculature. Et même si le manque de nutrition a parfois tendance à lui donner un aspect misérable, il est à ce qu’on dit, assez beau garçon.
Il n’est pas rare de la voir barbue comme un ours, mais son nouveau grade d’officier le force à se raser assez souvent. Pour bien paraître aux yeux de la haute dirigeante.
Son visage est recouvert de cicatrice, autant de signe de sa lutte que de sa résistance. Et sa main gauche ne présente que trois doigts et demi.
Son groupe de combat est régulièrement affublé de nouvelles recrues, mais parmi les 14 hommes dont il est le meneur, trois d’entre eux semblent ne pas vouloir se laisser abattre et l’accompagne depuis Smolensk.
Joseph, un juif ukrainien ayant réussi à fuir son pays pour rejoindre les rangs de l’armée rouge. Bien décidé à se venger, il fait preuve d’une férocité exemplaire et c’est de nombreuse fois distingué par sa bravoure.
Dimitri, une énorme armoire à glace en provenance d’Oural. Il est assez désagréable avec ses camarades et ne manque pas une occasion de s’imposer comme le caïd. Ancien criminel, il a une plus grande expérience des armes à feu et du combat rapproché.
Vassili, un jeune homme tendre et calme. Enrôlé par la force des choses et trop souvent paralysé par la sauvagerie des combats. Il reste dans les pattes du sergent pour ne pas trop se faire emmerder par ses camarades bien plus rude que lui.