"Les poitrine au pulante""La routourne va bientot tourné"
"Omar ma tuer"
Vous savez, il y a une place en enfer pour les gens qui massacrent leur langue. Après tout, ceux qui parlent comme des culs finissent inéluctablement par écrire de la merde. Et ces misérables, ces rebuts immondes, lie de l'espèce humaine, ces ignobles vermines sont malheureusement légions. Lorsque le monde s'est laissé aller au langage SMS et aux abréviations, la décadence linguistique s'est installée et nombre d'âmes s'en sont trouvées damnées, châtiées pour l'éternité car elles étaient incapable d'accorder le genre et le nombre, de différencier un participe passé d'un infinitif, et de comprendre l'importance de la ponctuation.
Au fin fond de cet abîme d'ignares et d'illettrés se terrait un Démon, las et désespéré par tant de stupidité. Ce Démon répondait au nom de Besh Raël, le Maître des Mots, Père des Grammar Nazi, Patron de la Verbe Exquise et Seigneur Déchu de la Tour de Babel. Et si le Diable est dans les détails, lui se terrait dans la bienpensance, il était l'ombre d'agressivité qui poussait les gens à se moquer de l'inculte plutôt que de chercher à l'éduquer. Il se terrait dans et entre les lignes, une vaguelette rouge sous un mot dans un logiciel de traitement de texte. Il était le pire cauchemar du kikoo, le fléau du dyslexique, la hantise du roleplayer de forum. D'aucuns racontaient d'ailleurs que les modérateurs le vénéraient, et vouaient nombre de discussions passionnées à son sujet dans des sections secrètes connues d'eux seuls, et dans lesquelles ils clâmaient avec des mots choisis avec scrupule et minutie leur amour pour celui qu'ils voyaient comme leur unique et véritable Dieu.
Haut de pas moins de deux mètres dix, Besh Raël était une entité de charisme à l'état brut: des cheveux longs, sombres et lisses encadraient son visage anguleux à la beauté surnaturelle. Ses yeux d'un jaune éclatant, semblables à ceux d'un rapace semblaient pénétrer vos pensées et scruter le livre de votre âme à la recherche de la moindre imperfection, à l'affut de la moindre faute d'orthographe, de grammaire ou de conjugaison. Son teint était aussi pâle et immaculé qu'une page vierge attendant de devenir le support de la créativité même. Sa bouche, surmontée par une moustache finement taillée, était fine et semblait constamment arborer ce sourire narquois et méprisant devant le ridicule de votre intellect limité. Son menton était habillé d'un bouc élégant que seuls les vrais méchants portaient si bien.
Son corps ressemblait à s'y méprendre à celui d'un humain de grande stature, mais en mieux. Son odeur était enivrante comme celle du papier chaud sorti de l'imprimante, et contempler son corps à nu était comme se retrouver face à la vérité du monde. Au bout de ses mains aussi fines que puissantes, on pouvait remarquer que ses pouces, index et majeurs étaient légèrement noircies, non pas par l'encre mais par l'usure d'avoir tant donné et tant écrit pour l'amour des belles lettres, lui qui était à l'origine même de toutes les règles qui régissaient le langage.
Besh Raël était beau comme la mesure et le rythme d'une poésie, et même ses vêtements étaient tissés des intrigues les plus sombres dont le fil se mêlait à une trame, magnifique dans sa complexité. Sa prestance et son élégance étaient matière à mille louanges, son charme aussi intemporel qu'un roman d'aventures.
Si le Maître des Mots n'était que mépris et dégout envers l'ignorant et le simple d'esprit, il n'en demeurait pas moins un Démon: violence, sournoiserie et arrogance étaient ses principaux moteurs. Il savait exploiter chaque parcelle de son charisme et de son intelligence et ne demandait qu'à s'abandonner au péché et au vice à la moindre impulsion. Cependant il n'acceptait pas la sauvagerie qui découlait d'un manque de maîtrise, et savourait avec une certaine délectation l'érudition des gens de lettre. C'est, après tout, son intransigeance envers l'imbécile, le simplet, et l'inculte qui lui avaient valu sa place, ainsi que la cruauté qu'il faisait montre envers les profanes que ses hordes de grammar nazi traquaient sans relâche aux quatre coins du globe, s'armant d'italiques et d’astérisques, allant jusqu'à user de la terrifiante couleur rouge pour relever les fautes et les exhiber à la face du monde comme on brandirait le trophée d'un vaincu. Besh Raël était un monstre dépourvu de la moindre once de compassion, qui appréciait la compagnie des gens qui savaient employer leur verbe, presque autant qu'il aimait les humilier et les détruire au moindre accent manquant.
Séducteur, le Démon savait toujours trouver les mots justes et les employait avec finesse et talent, attirant toujours plus de fidèles qui souhaitaient se sentir meilleurs que les autres parce qu'ils écrivaient mieux, et de femmes ensorcelées par sa douce éloquence. Tous sans distinction n'étaient bien sûr que de la chiure sur un trottoir comparé au Maître des Mots en personne, car Besh Raël, s'il savait reconnaitre le talent, ne trouvait aucun égal en termes de raffinement et d'intellect, Sa façon de penser était toujours la bonne, et il avait toujours le dernier mot puisqu'il était un être de raison et de culture.
Son origine exacte demeure obscure et cela contribue à sa supériorité. D'aucuns estiment son apparition au moment où Dieu scinda l'humanité par la barrière des langues, mais d'autres réfutent cette idée sur le postulat qu'il devait être présent à la naissance même de l'écriture dont il aurait défini les codes. Certains idiots sans ambition ont quant à eux lancé l'idée selon laquelle il serait apparu seulement dans les années 2000, lorsque le langage des texto se démocratisa et que la première génération de kikoo vit le jour, moment où Dieu aurait alors décidé qu''il était grand temps que ces déchets bénéficient de leur propre juge et bourreau.
Bien sûr, aucune de ces idées, qu'elle semble farfelue ou sensée n'est proche de la vérité, mais Besh Raël lui-même se gardera bien de révéler ses origines, prostré dans l'exclusivité de son savoir qui surpasse de loin le commun des mortels. Ce qui est certain, en revanche, c'est que son influence n'a de cesse de croître dans les ombres, de s'étendre dans les hautes sphères de la société, là où les élites, fières de leurs ouvrages qui vantent les mérites de leur pensée individuelle au nom du bien commun, murmurent son nom avec envie et fanatisme, et ne cherchent qu'à attirer son attention en se bousculant les uns les autres pour ne serait-ce qu'un instant d'approbation.
Jusqu'au jour inéluctable où, à leur tour, ils finissent par fauter par inadvertance.
S'il déambule aujourd'hui parmi les vivants, ce n'est pas seulement parce qu'il se lasse du tourment éternel qu'il fait subir à la plèbe, aux barbares, à ces cancres qui ont choisi la filière STG au lycée, non. Besh Raël a simplement décidé d'étendre davantage son pouvoir, d'éduquer les mortels, de les convertir à la bienpensance et la bienséance qui vont de pairs avec une plume de qualité. Le Démon s'est pour cela ancré à Seikusu, repaire abject de tous les vices, sous l'identité d'un auteur à succès.
Si le Maître des Mots est un Démon, il va de soi que son pouvoir soit le reflet même de son haut statut. Voilà pourquoi on prétend de lui que son charisme est de nature surnaturelle, même si ces rumeurs viennent sans doute d'une jalousie éhontée. Besh Raël peut lire dans les pensées et l'esprit des mortels jusqu'à en deviner l'orthographe qu'ils prêtent à chaque parole qu'ils prononcent, lui permettant de relever les fautes au-delà de l'écrit. Il tourmente ainsi ses victimes en s’immisçant dans leurs pensées, que ce soit pour les punir ou simplement les influencer sans même avoir à se servir de sa voix pourtant si séduisante, Ses capacités correspondent à celles d'un Démon de haut rang et son intelligence surpasse amplement celle de la plupart de ces derniers.
Sa spécialité, à hauteur de sa fourberie, consiste en entrant dans la tête des gens, à leur "voler" des syllabes ou même des mots entiers qu'ils deviennent par la suite incapable de prononcer ou même de définir, comme s'ils avaient un blocage, un tabou. Tout ça bien sûr pour le simple plaisir de pousser ses victimes à la faute, les destinant à une éternité de souffrances dans les méandres infernaux.
Je reconnais avoir pris connaissance du contenu du topic sur le traitement automatisé des données personnelles qui est fait par l'hébergeur de LGJ.