C’était impatiente et un brin excitée que Soledad avait traversé les couloirs et descendu en trombe les escaliers de l’établissement. Du haut de ses vingt-et-un ans, la belle demoiselle faisait davantage penser à une adolescente pensant son premier amour qu’à une adulte. Un air guilleret se lisait sur son visage alors qu’elle pressait le pas dans la cour. Ses yeux sombres scrutaient un tee-shirt noir avec quelques écritures, du groupe de rock ACDC. Il s’agissait bien sûr de celui de Mitsukane, et non pas d’un autre lycéen. Tiens, d’ailleurs, cela ne lui avait pas fait tilt au moment de rentrer dans la classe, ou bien même dans le bâtiment, mais il n’y avait pas d’uniforme obligatoire ici. L’hispanique aurait pensé voir des jeunes filles en petites jupes et hautes chaussettes, et les garçons dans un ensemble bleu ou noir. Mais non. Rien de tout. Mais ce n’était qu’un détail. Le regard de Soledad vagabondait sur les côtés et devant elle, pensant trouver le jeune homme à la sortie.
Petit pas par petit pas, l’andalouse s’approchait de la sortie, arrivant près des grilles qui encerclent l’ensemble de l’établissement. Ses petites joues légèrement rougies perdirent leur couleur lorsque, enfin à l’entrée du lycée, elle ne trouva pas Mitsukane. Mais avant même de penser qu’il lui avait posé un lapin, une voix masculine tinta à ses oreilles. On lui demanda de suivre cette personne. Un simple coup d’œil, et la belle danseuse put remarquer qu’il s’agissait de l’homme qu’elle attendait. Un sourire rassuré se lisait sur son visage, alors qu’elle entama de nouveau le pas juste derrière le lycéen, tout en gardant une certaine distance entre eux. Les autres étudiants auraient trouvé la scène assez louche s’ils se baladaient ensemble, ou bien même, en tant que danseuse mondialement connue, on pouvait se demander s’il n’y avait pas des paparazzis dans le coin, à l’affût pour prendre un cliché compromettant. Enfin, les photographes n’étaient pas vraiment après la señorita Castejón, puisqu’elle n’était pas du genre à faire des scandales pour faire parler d’elle. Elle avait une certaine notoriété, et ne voulait pas l’entacher.
Mais ce petit jeu l’amusait. Toujours derrière le jeune homme, elle longea une rue, marchant sur le trottoir avant qu’il ne s’arrête devant un scooter, ou plutôt devant une Vespa. Ce deux-roues était facile à reconnaître. Un franc sourire éclaira son visage quand elle vit deux casques sur le véhicule. Alors, comme ça, il allait l’emmener faire une balade en vespa ? Intéressant. Mitsukane se retourna subitement, le casque à la main, pour l’y déposer sur le crâne de la demoiselle. Il fallut forcer un peu pour le mettre correctement, le chignon de la jeune femme gênant un peu. Alors que Soledad relevait les mains à son menton pour attacher le casque solidement, elle sursauta alors que le lycéen était tout proche d’elle. Une simple et seule seconde suffit pour comprendre ce qu’il comptait faire. Le contact de ses lèvres sur les siennes, furtif mais tout aussi bon que tout à l’heure, la fit frissonner et fermer les yeux un instant. Se retirant enfin d’elle aussi vite qu’il s’était approché, il pouvait voir les petites joues de l’espagnole rougirent un peu. Gênée, elle l’était. Elle ne s’y attendait pas vraiment, surtout comme ça, en pleine rue, mais ce n’est pas pour autant qu’elle n’avait pas apprécié. Mitsukane poussa un peu sur le casque de Soledad pour qu’il soit bien mis. Bien évidemment, il fit de même pour lui.
Le jeune homme s’installa alors sur la Vespa rouge. L’andalouse le suivit, enjambant le deux-roues, obligée de relever sa jupe noire pour le faire, dévoilant ainsi la peau claire de ses jambes. Hésitante, elle finit par poser ses mains sur les hanches du jeune homme. Quand il démarra enfin son véhicule, ses petites mains graciles s’agrippèrent au tee-shirt ACDC de son compagnon de voyage. Elle se demandait bien où il allait l’emmener, mais se laissait guider finalement. Se sentant un peu ridicule dans son dos, toujours bien plus grand qu’elle bien qu’assis tous les deux, elle penchait un peu le visage parfois, caché dans le casque, pour observer Mitsukane dans les rétroviseurs du scooter. Sous le casque, elle ne pouvait pas voir grand-chose, et lui ne pouvait admirer ce sourire qui illuminait le visage de l’espagnole. Alors qu’il grimpait une côte, la belle demoiselle, ayant peur de partir en arrière, enroula alors le corps du lycéen de ses bras fins. Ses joues prirent un peu plus de couleur, car elle se demandait si, malgré sa petite poitrine, le lycéen pouvait la sentir à travers les vêtements, dans son dos.
Ils arrivèrent alors en haut de la fameuse côte, Mitsukane s’arrêta sur un bord de route assez large, comme un petit parking, entouré d’arbres. Enfin stoppés, Soledad se détacha un peu du jeune homme, descendant de la Vespa rouge et mettre pieds au sol. Tirant sur le tissu de sa jupe, elle la remit correctement en place pour cacher ses jambes. Elle avança doucement vers les arbres, voguant entre eux, sans faire attention au jeune homme pour le moment. L’andalouse défit l’attache du casque et le retira enfin, libérant son visage rougi. Son chignon était tout défait et donnait l’impression qu’elle avait fait une sieste. Légèrement blasée, elle tira sur l’élastique qui retenait sa chevelure de jais. Enfin libérée, on pouvait en voir toute sa longueur, qui tombait dans le creux de ses reins, ainsi que les ondulations qui les caractérisaient comme s’ils dansaient eux aussi. Le casque sous le coude, elle regarda le tableau qui se dévoilait à ses yeux. La ville de Seikusu dans toute sa splendeur. C’était magnifique, vraiment. Un sourire aux lèvres, elle se retourna vers Mitsukane, qui s’était sûrement débarrassé de son casque aussi.
- Monsieur serait du genre romantique ? On se croirait dans un film à l’eau de rose. Le beau jeune homme qui kidnappe sa belle pour l’emmener dans un endroit au calme et hors du commun.
Cela faisait un peu cliché, mais Soledad ne se moquait pas du tout du lycéen. À vrai dire, elle appréciait grandement.