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Elle est sûrement par là… »
Lentement, Nariko s’avançait, sa main sur la garde d’Heavenly Sword, rangée dans son fourreau, le long de son dos. Sa main gauche tenait l’arme, tandis que la droite attrapait le fourreau de sa seconde épée de combat. La guerrière se battait ainsi, avec ses deux lames, et elle sentait la cible proche... Elle se tenait dans un bâtiment abandonné depuis de nombreuses années, suite à un tremblement de terre. Ces ruines étaient le refuge idéal pour des brigands, des bandits, et d’autres individus peu recommandables... Mais il était aussi, d’après les informations des villageois, la tanière d’une redoutable strige. Les striges étaient des créatures redoutables, des monstres qui étaient réputés pour être le fruit de malédictions, et qui chassaient la nuit.
Nariko avait voyagé jusqu’à un village à quelques lieues de Nexus, où elle s’était illustrée auprès de villageois désemparés en tuant des bandits. Les villageois lui avaient expliqué que le village était au plus mal depuis qu’une strige avait été aperçue dans la région. A dire vrai, les villageois ignoraient à quelle créature ils avaient affaire, mais supposaient que c’était un animal de cette envergure... La strige avait massacré toute une famille d’honnêtes fermiers, et on pouvait l’entendre rugir la nuit, terrorisant les habitants... Nariko n’était pas une chasseresse de monstres, mais la promesse de récupérer un peu d‘or pour financer son voyage était toujours bonne à prendre. Elle envisageait de se rendre à Nexus pour négocier des affaires entre l’État et son clan, afin de bénéficier de la protection nexusienne contre la menace imminente d’une nouvelle invasion ashnardienne... Et, à Nexus, il fallait de l’or. Or, le voyage des montagnes enneigées jusqu’à Nexus lui avait coûté de l’argent. Ses finances étaient quasiment vides, et elle avait donc accepté cette mission.
Elle avait débuté sa traque en allant voir le suzerain local. L’homme vivait dans un manoir en bois, et toute la campagne était pauvre. Des maisons abandonnées se dressaient ici et là, ainsi que des animaux sauvages. En compagnie de Kaï, Nariko avait fait parler ses lames. Le seigneur du coin, Sire Arnaud, lui avait expliqué que la superstition des villageois était difficile à supporter.
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Toute cette histoire de strige... Il ne s’agit probablement que des Traque-Sang... » lui avait-il dit.
Les Traque-Sang étaient des bandits de grand chemin, une organisation criminelle qui imposait son diktat dans la région. Les bandits que Nariko avait tués au village étaient justement des Traque-Sang. D’après Sire Arnaud, ils étaient aidés par des agents ashnardiens.
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Notre domaine soutient Nexus, vous savez... Depuis la petite colline, vous pouvez même voir, au loin, les murs de la cité... Ashnard fait tout ce qu’il peut pour pousser Nexus à la guerre civile, et soutenir des groupes armés pour déclencher des révoltes paysannes en fait partie. »
Sire Arnaud avait demandé l’aide de son supérieur, un baron, et ce dernier avait promis de leur envoyer un détachement militaire sous peu pour ratisser la forêt. Arnaud soupçonnait que les Traque-Sang avaient un camp dans la forêt, mais l’atteindre n’était pas facile. Ce domaine-ci étant pauvre, il recevait peu d’aides. Sire Arnaud avait du, à défaut, demander l’aide de l’Ordre, et siégeait ainsi avec un moine envoyé de Nexus. Les paysans d’Arnaud étaient très pieux, et l’Ordre avait promis d’envoyer un détachement de frères armés afin de protéger le peuple. Pour Arnaud, ce serait toujours mieux que les miliciens. De tout ce laïus, Nariko avait retenu que la strige pouvait être une élucubration des paysans issue de l’imagination délirante d’un poivrot à l’auberge, et que le véritable ennemi pouvait être des bandits. En définitive, Arnaud lui avait conseillé de se rendre dans la «
Crevasse », un terme qui, dans la région, désignait une ancienne faille sismique qui avait jadis englouti un luxueux manoir, et provoqué la désertion progressive de cette région.
Nariko se trouvait justement dans cette Crevasse, à l’entrée du château. Il y avait de la végétation partout, et même un petit ruisseau. Elle s’avançait vers ce qui semblait être l’ancienne entrée du château, quand Kaï releva la tête, et fronça le ssourcils.
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Kaï sent une vilaine odeur... »
Les Traque-Sang ? La strige ? Nariko regarda autour d’elle. Il y avait des zones d’ombres nerveuses, des trous partout... Cet endroit était un véritable coupe-gorge. Qu’est-ce que Kaï avait senti ? Qui donc se terrait ici ? Nariko se mit en position de combat, sachant que la menace devait être proche...