Arrivée d’une ombre (PV. Kalinka/Malinka)

Ly avait marché une bonne partie de la nuit, et elle sentait la fatigue envahir ses membres. Etant à l’abri des regards, elle n’avait pas gardé de forme bien définie et avançait telle une ombre sous la lune qui l’éclairait de sa faible lueur bleuté. Quand elle arriva en vue de Seikusu, elle eut une sorte de soupir de soulagement. Elle détestait les lieux désert et désolé, sans personne. Elle avait besoin de monde pour pouvoir s’épanouir. Et une nouvelle ville allait lui permettre de nouvelles folies et jeux qui l’excitaient tant.

Afin d’éviter tout risque d’être remarqué par une âme promeneuse, Ly se concentra un bref instant, et, dans un nuage de fumée noire, pris la forme d’une jeune fille rousse de 17 ans, vêtu d’une courte robe blanche. Elle regarda son corps d’un air satisfait,  la lumière de la lune rendant sa peau pâle presque lumineuse. Elle reprit sa route vers la ville où elle chercha un endroit où se reposer. Il fallait prendre des forces pour pouvoir faire connaissance avec les gens de cet endroit, et leur faire découvrir les joies du vice. Cette idée la réjouissait d’avance.

Après une courte déambulation dans les rues quasiment désertes, Ly tomba sur une grille entourant ce qui semblait être un parc plein d’arbres. L’endroit parfait ! Elle sauta gracieusement par-dessus la grille et atterrit sans difficulté de l’autre côté. Elle s’avança dans l’ombre des arbres, lentement, vérifiant que l’endroit était bien désert. Elle s’enfonça en peu plus dans le bois et découvrit un petit étang à l’eau verdâtre, rependant une légère odeur de vase. Trouvant l’endroit à son goût, elle choisit un arbre proche de cette source de fraicheur, et s’allongea contre en ajustant sa robe courte ses jambes.

« Voilà le défaut d’être humaine, » pensa t’elle, «  c’est que le corps a besoin de repos pour rester en forme… chose dont je n’avais pas besoin sous ma forme originelle ! »

 Après avoir vérifié que son coutelât était bien en place, ainsi que son brassard en cuir sur l’épaule droite, Ly ferma les yeux et se laissa emporter dans un sommeil léger et rêveur, sans plus prêter attention aux bruit de la nature qui l’entourait. De la nature…. Ou autre !

Le repos donnait au corps ses fonctionnalités pleines. Mais il existait d'autres options pour se donner un semblant de vie, quand on atteignait le stade de zombie. Des options que les jumelles connaissaient bien. Des options qui coûtaient cher, aussi. Mais dans leur cas, ça n'était pas le plus important.

Le concert battait son plein et était à entrée libre, permettant à n'importe qui d'y passer et de faire un pogo sur un bon morceau de punk traditionnel. Kali et Mali étaient passés d'une Rave Party à ce bar d'où la musique sortait. Les oreilles et la gorges explosés, ça ne les empêchait pas de faire marcher leur cloison nasale à grand coups de paille et de ce que la petite vendeuse de la soirée avait appelé avec humour des "œufs de fées". Ce qui n'était rien d'autre que de la cocaïne un peu coupée avec dieu savait quoi était quand même assez efficace sans toutefois les amener au stade de larve décomposé : la preuve en était qu'elles avaient très bien entendu les flics s'arrêter en haut de cette rue du centre-ville avec leur fourgon et indiquer que la fête était finie. Le voisinage n'était apparemment, pas très content.

S'en était suivi une sorte de stéréotype bizarre que tout le monde démentirait dés le lendemain. Un nouveau pogo, avec en son centre, des policiers qui sortaient les matraques pour calmer ces jeunes dégénérés, bourrés, drogués. Les clochardes multicolores avaient été les premières à se lancer dans la bataille. Compteur : quatorze bosses causées par la batte de traviole de Mali, et un évanouissement dont Kali était la cause, à force d'avoir frappé comme une bourrine sur le visage de sa victime.
Cet évanouissement, c'était le policier numéro trois qui en avait été victime.

"... Ça faisait un de trop, je crois."
"Ouaip."

Après coup (sans mauvais jeux de mots), elles avaient été forcés de s'échapper en grimpant à la gouttière et en se baladant sur les toits pour éviter que les flics ne les rattrapent. La prison, elles savaient vaguement ce que c'était -leur premier et dernier séjour en taule avait été accompagné de prises d’héroïne et elles ne se souvenaient que vaguement de ce que ça avait impliqué... mais la sensation désagréable était resté.
Puis, mince, c'était les criminels qui allaient en prison. Elles avaient l'air d'être des criminelles ?

"Bien sûr que non !"

L'adolescente aux cheveux longs avait lâché cette phrase au hasard du détour qu'elles prenaient toutes les deux pour aller se cacher dans la forêt. Sa sœur la regarda d'un drôle d'air. Enfin, derrière la vase qui envahissait ses yeux et causée par la drogue, ça avait l'air d'un regard perplexe.

"Tu parles à qui, là ?"
"... Et toi, tu parles à qui, là ?"
"... Bah..."

C'était définitivement un trip étrange. Les évènements de la soirée avaient dû bousculer leurs cerveaux abîmés plus qu'elles ne le pensaient.

"... Bah, je parle à elle, là ! Ça se voit pas ? Putain !"

Un doigt ganté de cuir se pointa immédiatement vers le bout de cheveu flamboyant qui suintait de derrière le tronc d'arbre, comme la flamme d'un volcan. L'habituel sourire du Cheshire étira les lèvres sur les deux visages. Leurs dents semblèrent briller dans la nuit, reflétant la lumière des lampadaires proches, leur donnant un air carnassier. En réalité, elles étaient juste heureuses à l'idée d'avoir trouvé un compagnon pour la fin de cette soirée. Elles n'avaient pas forcément de mauvaises intentions, mais qui sait ce qu'un esprit embrumé par la drogue pouvait contenir... quoique. Dans leur cas, l'habitude reprenait surtout le dessus.
Mali éclata de rire en poussant son coude dans les côtes de sa sœur, transformant dans sa conscience la phrase de sa jumelle comme une bonne blague très fine.

"Qu'est-ce que t'es con, Kali ! Elle t'as même pas parlé, tu crois que je l'ai pas vu ?"
"... Bah, ça va pas tarder. Attends, je l'appelle."

La bouche de l'ado aux cheveux verts s'ouvrit comme le bec d'un oiseau, elle inspira de l'air...
Avant de se rendre compte qu'elle ne connaissait pas le prénom de cette gamine.
Elle resta dans cette position, tandis que sa moitié s'esclaffait de nouveau en se tenant les côtes. Leurs paroles, leurs rires étaient audibles, très audibles même. Ly ne pouvait plus espérer la moindre once de tranquillité tant qu'elles seraient dans les parages, c'était sûr.

Cela faisait maintenant une bonne demi-heure que l’on pouvait admirer une adorable jeune fille endormie seule au pied d’un arbre en bordure d’une petite mare, sa longue chevelure rousse ondulant au rythme de la faible brise qui adoucissait l’atmosphère. La lumière lunaire lui donnait un air brillant, ses cheveux flamboyant d’ordinaire à la lumière du soleil semblant briller doucement comme un bijou.

Ly dormait paisiblement, explorant l’univers sombre de ses rêves démoniaque. Mais ce moment paisible ne dura pas plus longtemps quand des cris et des rires se firent entendre a quelques pas d’elle. La démone se réveilla de fort méchante humeur. Elle venait de marcher pendant des heures et avait besoin de reposer son corps humain. Elle se redressa et chercha du regard l’origine du bazar qui l’avait tiré du sommeil. Il n’y avait rien autour d’elle. Elle se pencha alors et jeta un œil derrière son arbre et scuta l’obscurité du sous-bois. Il semblait que le bruit venait de là. Elle se leva et s’approcha doucement de la source du bruit. Dans un nuage de fumée noir, elle changea sa courte robe blanche contre une tenue moulante et noire qui lui permettrait de rester à l’abri des regards et elle raccourci sa chevelure pour pouvoir la cacher sous une capuche. Elle tomba rapidement sur un couple de jeunes filles qui riaient aux éclats. Ly n’avait aucune idée de ce qu’elles faisaient là mais elle s’en fichait royalement, elle était juste décidé a les virer d’ici pour qu’elle puisse reprendre sa nuit pour être en forme le lendemain et ainsi commencer a jouer avec les humain qui habitaient ici. Elle s’approcha doucement d’elle, attrapa l’une des deux et lui mit son coutelât sous la gorge en la ceinturant de son autre bras. Elle reprit aussitôt son apparence habituelle et dit d’une voix bizarrement grave :

« On ne vous a jamais dit qu’il était déconseillé de réveiller un démon ? Parce que c’est exactement ce que vous avez fait ! Et a moins que vous ne puissiez lui donner ce qu’il souhaite, en général il tue ceux qui l’ont réveillé. »

Elle arrêta de parler et regarda sa capture d’un regard gourmand. Elle était très tentée de faire couler un peu de sang tout de suite. Ça lui donnera de la satisfaction et elle serait sûre d’avoir la paix pour finir sa nuit. Elle baissa le regard pour s’adresser à la deuxième humaine :

« Bien que je sois très tenté de vous tuer toutes les deux, si vous vous mettez toutes les deux à genou devant moi pour m’embrasser la culotte et que vous reconnaissez votre erreur face à moi en vous excusant et promettant de quitter cette endroit… disons que j’accepterai de me passer de ce plaisir. »

Elle eut un éclair malveillant dans le regard et se mit a sourire. Un sourire froid, mauvais et connotant des idées malsaines et vicieuse.