Ce qui avait toujours été agaçant avec Casey, c'était son obstination et son aveuglement. Persuadé d'être un tombeur, il multipliait les dargues farfelues et lourdingues avec un sérieux que je m'étais pris à respecter une fois ou deux. Certes, personne ne croyait à ses conneries et les nanas finissaient généralement par lui foutre leur main en travers de la gueule quand lui envisageait de la poser sur leurs fesses, mais il y avait dans sa conviction quelque chose de fort. La technique pour se débarasser tout à fait de Casey du premier coup, c'était de ne lui accorder aucune espèce d'importance. De cette façon, l'engin binoclard se rabattait sur le premier prétexte venu pour filer à l'anglaise et généralement ne jamais revenir.
Malheureusement pour elle, Hitomi lui avait adressé la parole en gardant le sourire, ce qui n'avait fait que renforcer l'auto-persuasion de Casey quant à son charme d'Apollon. Pour lui, ce "premier pas" allait nécéssairement se terminer dans les toilettes les plus proches avant qu'il n'ait le temps de dire Capote, la jolie rouquine ne pouvant bien sûr pas résister à son charme aussi bestial que sexuellement parfait. En attendant qu'Hitomi ne lui propose d'ôter sa culotte pour la lui donner, Casey se contenta de rester fixé sur les rebonds agréables de sa jolie poitrine avant de tout simplement avaler bruyamment sa salive. Inutile de dire qu'il n'avait pas écouté un traître mot de ce qui lui avait dit la femme de ma vie et qu'il avait préféré l'imaginer en petite lingerie. En revanche, le petit rappel à l'ordre fît son effet et l'ado cradingue releva enfin les yeux, par-dessus ses immondes bésicles.
- Ve regardaiF voS VyeufFs ! PiF leF PlayFmatFf Ve les connaiF toutes : Ve FuiF FouVent invitéF au manoir, alors ! Il haussa les épaules le plus naturellement du monde avant de se gratter le torse. Macf ? ConnaiFf pas !
Alors qu'il s'accouda sur un empilement de caisses pour mettre son menton dans ses mains et fixer à nouveau le bonnet généreux de mon ex, le voilà qui encaissa le vol d'une petite bouteille d'eau qui lui arracha un petit cri avant de le faire tomber sous la surprise. Loin de se laisser démonter par les pleurs de Casey, Yukia s'avança vers lui pour se pencher et récupérer sa bouteille, le chassant en lui assénant un coup de son magazine qu'elle avait roulé sur lui-même dès qu'elle avait capté le petit manège de Quat'z'yeux. L'ayant chassé, la lycéenne offrit son plus beau sourire à Hitomi, avant de la saluer poliment.
- Yamagashi Senseï ! Je ne vous avais pas r'connue ! Vous avez une de ces têtes... Elle fit la grimace avant de tirer un peu la langue, par jeu. J'suis Yukia Hazama, de la 4-C ! Faut pas que vous parliez à Casey. On envisage de le revendre à un zoo. BREF ! Vous cherchez Mac ? Vous 'ttendez !
Yukia n'avait jamais été une élève très assidue, mais était plutôt sympathique dans son genre. Et si elle connaissait Hitomi sans pour autant l'avoir eu en prof (ou alors pas souvent), c'était parce qu'ignorer la seule européene rousse de l'établissement scolaire revenait à être enfermé dans une des caves sans jamais en être sorti.
La petite blonde attrapa sa fidèle bouteille et celle çi atterit après un nouveau lancer sur la tronche de Jet, qui l'insulta copieusement avant de tousser et de marmonner des excuses, ayant vu qu'une cliente potentielle restait plantée tout à côté de sa petite amie qui lui fît signe d'approcher. Docile, Jet arriva vers les deux femmes, saluant Hitomi d'un clin d'oeil séducteur.
- Ouaip ?
- Elle cherche Mac, mon coeur. Il est parti manger ?
- Mac ? Bouffer alors que le stand Playboy compte Novembre et Juillet 2011 ? On dirait que tu ne le connais pas... Là, je te parie ta prochaine culotte qu'il menace de mort tout ceux qui auraient l'idée de lui passer devant. Il va pas revenir avant d'avoir tenté de tâter du nichon. Il regarda Hitomi d'un petit air désolé. Revenez dans deux bonnes heures, on peut rien faire pour vous.
Alors que Jet saluait vaguement de la tête avant de tourner les talons, Yukia lui asséna quelques mots qui le firent se retourner d'un bond.
- Elle s'appelle Hitomi.
- "LA" Hitomi ?
- Elle même.
- On va vous le trouver TOUT DE SUITE ! N'bougez surtout pas ! Vous voulez un truc à manger ? Vous asseoir ? Un café ? Mettez vous à l'aise ! CASEYYYYYYYYYYYYY ! CAFEEEEEEEEE !
Et tandis que Jet s'agitait, Yukia secouait la tête avant de faire entrer Hitomi dans le stand, qui était à l'intérieur bien à l'image de l'équipe qui le tenait : un joyeux bordel qu'ils devaient être les seuls à pouvoir qualifier de rangement. Tirant doucement le bras de la prof', Yukia lui expliquait rapidement.
- Vous comptez énormément pour Kyle, Yamagashi-Senseï. On sait tout ce qu'il a bien voulu nous dire, mais on sait surtout qu'il est complètement dingue de vous. Alors puisque vous êtes là, on vous laisse pas r'partir ! Je me doutais pas que c'était vous Brigit....Ca m'a fait drôle. C'est bien vous, hein ? Je le dirais pas, c'est juré ! Kyle me tuerait si je parlais trop mais vous savez, je ne suis pas une bavarde ! Jet et Mac se sont décarcassés pour vous avoir Dark Ages ! Il a la pression le Kyle, ohlalala ! Il n'a même pas maté mes seins, ce matin !
Les deux femmes arrivèrent à l'arrière du stand et Hitomi pût s'apercevoir que l'interview était pris au sérieux : la petite table et les deux chaises étaient relativement loin du bruit ambiant et à l'abri des regards indiscrets. Sur la table reposaient mon calepin et mon stylo, ainsi que mon magnéto. Tout à côté, l'appareil photo dormait silencieusement. Tout était prêt depuis un moment à vrai dire et ce fût sur la chaise prévue pour elle qu'Hitomi fût invitée à s'asseoir.
Et pendant que Yukia commençait à parler des potins divers du lycée - bien qu'elle n'était soi-disant pas bavarde - je revenais au bercail avec un sourire plus radieux que celui qu'aurait eu Casey une fois son coup tiré.
- Et c'est qui qui a eu le topless dédicacé de Novembre ? C'est moaaaaaaaaa ! Regarde ça, Jet ! "Pour Kyle-chou, avec toute ma sensualité". Uhuh. J'y retour-
- NO WAY ! Tu reste ICI !
- Hein ? Mais... Il me reste dix minutes de pause, je peux tenter d'avoir le... Jet ? Ca va ?
- Oui...NON ! Y'a...euh... Y'a Casey qui a fouillé dans ton sac à dos pour te tirer le dernier le calendrier Playboy.
- T'es aussi excité pour... ça ? Le stand est plein de calendriers, c'est pas un drame. Et puis, j'avais un ticket avec Juillet. Donc j'y retourne, à moins que l'armée des ténèbres ne décide de s'arrêter à la buvette.
Si Jet voulait ménager son effet, il était incapble d'être crédible. Il avait voulu m'empêcher de repartir sans me dire pourquoi, mais savait qu'il fallait du lourd pour me séparer des plus beaux seins de cette partie du Japon. Et puisque rien ne marchait, il m'arracha purement et simplement la photo topless dédicacée pour la jeter à l'arrière, dans la salle d'interview dont nous étions séparés par une bâche blanche.
- JET !
- MAC !
- NON MAIS T'ES COMPLETEMENT CON, OU MERDE ? Je retrouve ma dédicace et je reviens de refaire la gueule !
Agitant mon poing devant lui, je passais d'un coup sec la bâche tout en pestant pendant que Jet priait tout les dieux qu'il connaissait. Et alors que je relevais les yeux après quelques pas impérieux, je les posais sur une personne dont je crû d'abord qu'elle n'avait rien à faire ici, avant que mon cerveau ne daigne la détailler pour mettre un prénom sur ce corps ciselé avec soin, ces traits délicats, ces yeux profonds et sa chevelure de feu.
Hitomi.
Je m'arrêtais net, droit comme un piquet, les yeux grands ouverts et tout les mouvements stoppés. Mon coeur m'avait semblé s'arrêter de battre et le monde s'était évanoui autour de nous, se résumant à un grand écran noir qui ne laissait dessinées que ses formes, ses traits. Le film d'une vie, d'un sens.
J'en avais même oublié de respirer, tant je ne m'étais pas attendu à la voir. Pas comme ça, pas de cette façon. Hitomi...
- .....Coucou, toi....
C'était bien mince, mais je ne pouvais rien faire de plus, trop occupé que j'étais à la dévorer du regard pour nourrir mon cerveau de chaque détail qu'elle présentait.
Même fatiguée, elle restait magnifique.
J'avais hâte de savoir si je pourrais finir par l'appeler à nouveau "mon" Hitomi. En attendant, il fallait espérer qu'elle serait un peu plus causante que moi.