Le tir de Mukuro te foutait déjà en rogne. Déjà parce qu'il te prenait tes victimes sous tes yeux, mais qu'en plus six des projectiles avaient failli te toucher. Fanfreluche s'écartait vers la gauche, estimant que l'un comme l'autre, vous pourriez vous gêner. Son épée longue et lourde appartenait autrefois à un proto-béhémoth, dont la cuirasse faisait maintenant office d'armure à ton cupide compagnon. Tu t'élançais dans un rugissement intimidant qui fit ralentir les hommes devant toi. Premières victimes. Ou pas.
Alors que tu levais au-dessus de ta tête ta grande masse de bataille noire, une fine langue de feu passa tout près de ton flanc et se faufila pour transpercer les crânes de tous tes ennemis proches, changeant leurs caboches en petits brasiers. Tu entendais le rire moqueur de Gurdielas plus loin derrière toi, cette pétasse d'elfe croisé nain qui semblait toute fière de t'avoir pourri l'existence. L'espace d'une seconde, tu te dis que la première tête que tu ferais tomber serait peut-être la sienne. Mais une seconde vague d'ennemis fondit sur toi et tu la balaya d'un revers, marteau en main. On pourrait résumer les secondes qui s'ensuivirent par des os qui se broyaient sous tes coups Crânes, sternums, plexus, côtes, bassins, et rotules, juste pour rigoler un peu. Tes ennemis imploraient ta pitié quand ils en avaient le temps, et l'un d'entre eux appela même sa mère avant que le lourd plomb de ton arme ne lui disloque la moitié de la boîte crânienne et n'éjecte sa mâchoire à quelques mètres.
Les ennemis en face était supposés être l'armée la plus grande et la plus puissante au monde. Mais le simple fait de te voir utiliser ton arme pour les écraser comme des blattes les horrifiait et les fascinait en même temps. Ils semblaient comprendre dans leurs derniers instants pourquoi une poignée de mercenaires et quelques fidèles cinglés avaient décidé de te suivre.
Une voix forte puissante à en faire vibrer ton arme se fit entendre, et se rapprochait à une vitesse terrifiante. Qui que ce soit, l'homme possédait une aura hostile, belliqueuse et terriblement impressionnante. D'abord excité de trouver un adversaire amusant, tu frissonnas lorsque tu croisais le regard de l'homme. Vos troupes vous avaient rattrapés sans même que tu t'en aperçoives, et les morts tombaient partout autour de toi. Le type fonçait droit sur toi, et laissait dans son sillage des cadavres, démembrés, décapités, taillés en pièces. Et cet homme hurlait après toi:
"RAEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE!"
Il avait une hache de bataille à la main. Elle n'était forgée dans aucun métal, ni aucun matériau. Ce n'était qu'un concentré pur d'énergie magique noire au creux de sa main, et son tranchant se rapprochait de ta tête en un arc-de-cercle horizontal. A peine remis de ta surprise, tu plaçais le manche de ton arme pour bloquer le coup, mais l'impact fut si puissant qu'il t'envoya valdinguer et te dérouler sur plusieurs mètres. C'était lui. L'homme qui était venu te trouver alors que tu étais aux portes de la mort, couvert de sang dans une pièce sombre, gisant sur le sol froid. Celui qui avait éveillé le pouvoir qui coulait dans tes veines. Ce même homme que tu étais allé trouver pour qu'il te rendre plus fort, et qui était devenu ton seul et unique mentor. Il savait que vous en arriveriez là, un jour. C'était votre Destin, à tous les deux. Il était ton unique père, et bien que tu n'aies passé qu'un mois avec lui, la personne la plus proche de toi. Il était le Dieu de la Guerre, Arès. Tes traits étaient les siens, tes cheveux étaient les siens. Seuls vos yeux étaient différents. Les siens étaient endurcis par l'expérience des centaines de batailles qu'il avait parcourues. Dans ton regard, il n'y avait que l'amusement, une soif de sang qui s'assouvissait ici et maintenant. Il était fort, très fort.
"C'est ta dernière chance. Pars. Ou rejoins-moi. Tu ne peux pas me battre. Tu ne peux pas défaire l'Olympe par la seule force de tes mains. Tu n'as rien à faire là. Tu ne peux pas changer le monde parce qu'un ramassis de Mortels veut y croire."
Tu ne pris pas la peine d'y réfléchir un seul instant. Ce n'étaient ni tes convictions, ni le soutien, ni l'espoir qui t'avaient conduit ici. Uniquement le désir, la puissance, l'adversité. Tu n'avais pas de vrais amis et tu t'en passais très bien. Tu ne voulais pas reculer. Si on t'appelait Bad Nose, c'est parce qu'on t'avait toujours attaqué de front. Tu ne craignais pas les assassins, et tu ne tournais jamais les talons face à l'ennemi. Ce n'était pas ton père, ni ton mentor que tu avais devant toi. C'était un adversaire puissant, un objectif de plus. Tu te campais solidement sur tes appuis, arme au poing, et lui rit au nez.
"Je ne fuirai pas, le vieux. Pour qui tu me prends, je suis le Fils du Dieu de la Guerre! Et quand je vous aurai tous envoyé croupir en Enfer, je me régalerai avec les plus belles femmes que ce monde a à offrir! Ton temps est révolu. Je vais t'étaler la gueule."
Personne n'osait se mettre entre vous deux. Plus loin, Fanfreluche s'amusait à déchiqueter la masse grouillante d'ennemis, à grands renforts de sphères de mana, et Gurdielas gaspillait bêtement ses sorts les plus dangereux contre du menu fretin. Ses réserves de magie étaient quasi illimitées, mais quand même...
"Je suis fier de toi. Tu es mon digne héritier. Dommage que ta vie ne s'achève de ma main, petit con présomptueux."
Le rictus de ton père était aussi sanguinaire que le tien. Vous finciez, l'un vers l'autre, arme en main, sourire aux lèvres. Tu étais sur le point de lui montrer que tu méritais le titre de Dieu de la Guerre.