A la recherche d'un scoop ! [Sentinel Prime]

♣ ♣ ♣

« - Aujourd’hui, c’est à toi de jouer Lolita », déclara la jeune fille à son reflet dans le miroir. C’était la première fois qu’elle cherchait du travail, et elle était nerveuse à l'idée de passer cet entretien d'embauche. Son curriculum vitae ainsi que sa lettre de motivation avaient apparemment retenu l’attention, elle souhaitait maintenant que sa prestation orale serait convaincante. 

Elle décida qu’elle ne boutonnerait pas sa chemise entièrement, laissant ainsi apparaître un léger décolleté mis en valeur par un soutien-gorge push-up en dentelle noire. Certains considéraient cela comme de la triche, elle pensait au contraire qu’il fallait savoir se mettre en valeur. Elle enfila des talons hauts assortis à son tailleur, ajusta sa coiffure et s’adressa un sourire satisfait. Cette tenue lui apportait une certaine maturité, contrastant agréablement avec les traits délicats et encore légèrement enfantins de son visage.
Lolita, comme toutes les adolescentes, se trouvait des défauts qu’elle n’avait pas nécessairement. Mais contrairement à celles-ci, elle possédait une telle confiance en elle-même qu’elle n’avait peur de rien ou presque. S’engager dans le monde du journalisme à son âge ne l’effrayait pas. Ce n’était de toute façon pas une question de physionomie. L’intelligence seule comptait.

Lolita saisit son sac à main et se mit en route.

Ce n’était pas tout à fait un hasard si elle avait choisi l’entreprise Kishida&co plutôt qu’une autre. Ginko Kishida était célèbre dans sa profession autant pour sa capacité surnaturelle à trouver des scoops que pour son caractère irascible. Pour avoir vu nombre de films dans lesquels les patrons de grosses boites étaient des personnes insupportables, Lolita se demanda si ce stéréotype devait toujours être fondé. C’était une boite qui marchait bien, et Lolita ne tenait pas à faire ses premiers pas de journaliste pour un journal de pacotille. Son père, éminent homme d’affaires, la lui avait conseillée. Il y avait de quoi flatter l’égo de la jeune Lolita.
Mais Kishida&co avait également retenu son attention pour une autre raison. Depuis quelques temps, Lolita s’intéressait à une étrange affaire de super-héros. Un homme vêtu d’une drôle de combinaison moulante combattait les bandits de Seikusu, comme dans les comics américains. Elle s’était demandé comment elle avait pu rester dans l’ignorance de ces faits aussi longtemps. Lolita avait appris que Ginko Kishida s’intéressait lui aussi fortement à cette affaire, et désirait à tout prix faire de ce super-héros la une de son journal, l’OVNI. Il voulait du sensationnel, Lolita allait le lui apporter.

Lolita frappa deux coups brefs contre la porte du bureau de Kishida avant d’entrer sans attendre la permission. Ce que l’homme ne manqua pas de lui reprocher par le biais d’une remarque désagréable qui n’était pas pour la mettre à l’aise. Elle s’excusa en espérant que cela apaiserait Kishida. Le discours de son nouveau patron fut bref et incisif. Il ne l’engageait que parce qu’il manquait de personnel en ce moment et parce qu’elle semblait motivée à faire le sale boulot.

« - Tout ce que je te demande petite, c’est de me le prendre en photo, ce foutu super-héros, et de rédiger un article croustillant sur lui. Pas un truc qui emmerdera les gens hein. Tu peux inventer si tu veux, mais prouve-moi qu’il existe ! »

Lolita restait coite. Son nouveau patron n’y allait pas par quatre chemins.
Vraisemblablement, l’entrevue était terminée. Kishida s’était levé et postillonnait sur un stagiaire qui lui avait, semblait-il, préparé un café imbuvable. La jeune fille se leva et alors qu’elle s’apprêtait à sortir, sentit une grosse paluche se poser sur ses fesses. Elle se tourna vivement, et s’aperçut, sa petite bouche rose formant un « o » de surprise, que Kishida venait de la tripoter comme s'il trouvait la situation parfaitement normale. Elle lui jeta un regard furieux, sortit comme une furie en regardant le sol tout en se disant qu’elle avait oublié l’appareil photo dans le bureau de ce vicelard de Kishida mais qu'elle n'y retournerait pas de sitôt.

Lolita finit par heurter quelque chose. Furibonde, elle leva les yeux sur celui qui avait osé se mettre en travers de son chemin dans de telles circonstances.

Je vais le tuer, je crois.
Si ce n'était pas encore fait, c'est parce que j'hésitais entre la défenestration et la dissipation au niveau atomique. Le dissiper après qu'il soit passé par la vitre, peut-être... Hm. C'est à voir. Qui ça ? Ah, oui. Que je vous dise. J'ai enfin décroché un boulot, grâce aux cours de langues d'Hitomi ! Mon japonais est bien plus correct qu'avant et les heures passées dans la petite salle de la bibliothèque à reluquer ma petite amie de prof' m'ont été profitables puisque j'ai fais la connaissance d'un père de famille plutôt sympathique qui m'a pistonné pour un petit travail dans une rédaction de magazine. Rien de bien extravagant, mais j'avais au moins une paye décente et une place dans la société des travailleurs. De plus, ça concordait pas mal avec mes propres ambitions même si j'étais loin du journalisme international auquel j'aspirais. Je me retrouvais vaillant petit photocopieur (ET pousse-café, s'il vous plait !) dans les locaux de l'OVNI, feuille de chou à sensations qui aimait servir du croustillant, de l'épicé et du clinquant.
Le plus drôle, c'était que quelques fois, leurs articles évoquaient quelques un des faits d'arme de Sentinel Prime et que j'avais pû moi-même juger de leur talent pour enrober leurs colonnes de grand n'importe quoi assez joliment romancé.

Le moins amusant, c'était ma potentielle future victime, Casey. Fils du concierge, il avait lui aussi eu le job que j'avais obtenu et se considérait comme mon senseï. Un peu comme si le photocopiage était une technique millénaire réservée à une poignée d'élite qu'il était -heureusement pour moi, pauvre petit scarabée trop con pour appuyer sur un bouton- à même de m'enseigner. Quant au café, c'était là un art secret qu'il gardait jalousement, persuadé qu'un bon arabica était une porte comme une autre vers la grand'messe du Vingt-heure.
Toujours était il qu'il me bassinait avec ses histoires invraisembables et sa manie de m'espionner quand j'étais au téléphone avec Hitomi. Une chance pour moi, nos appels se faisaient toujours en anglais et Casey n'y entendait rien, n'ayant jamais eu envie d'apprendre sa langue maternelle. Le plus amusant, c'était d'avoir l'occassion de parler de lui et de jouer la langue de vipère en lui calant de graaaaaaaands sourires hypocrites. Heureusement qu'Hitomi était là, tiens. Entre ça et nos petits sms un tantinet coquins, elle était mon rayon de soleil dans le ciel noir d'orage des recommandations de Casey sur la quantité de papier à mettre dans la machine et ses discussions très sérieuses sur les femmes, la drogue et les super-héros.
D'ailleurs, il me révéla très sérieusement qu'il était Sentinel Prime et que si parfois il s'absentait, c'était au minimum pour sauver le Japon, au mieux le reste du monde. COMME SI JE NE SAVAIS PAS QU'IL ALLAIT SE PIGNOLER DANS LES CHIOTTES !

Ce jour là, Casey "tronche-en-biais" avait vu arriver la petite nana en chemisier et tailleur pendant que nous étions occupés prendre la commande des cafés de l'étage. Il avait suivi du regard le superbe popotin que la demoiselle se traînait et avait remonté très solenellement ses énormes lunettes pour me dire quelques mots qui me laissèrent sur le cul tellement c'était con, pendant que la miss disparaissait dans le bureau de Kishida.

- Mate ma nana, Macroff. Elle vient me ferfer, j'penfe. Elle ne m'a pas vu, f'est tout ! J'vais aller la voir, f'en profffiterais pour gliffer un mot ou deux au boff à ton fufet.
- Fympa.

Et je le regardais avancer d'un pas conquérant vers l'office du boss, un peu d'ailleurs comme toutes les personnes qui l'avaient entendues parler. Quelque part, on voulait touf -pardon, tous- savoir si :
1) Casey allait vraiment aller au bout de sa bêtise sans se débiner
2) Casey avait seulement une chance de poser un doigt sur une petite mignonne de ce calibre.
Les paris allaient bon train et au moment où je relançais de trente yens, la porte s'ouvrit pour laisser ressortir l'agréable gamine qui percuta ce grand niais de Casey, qui avait dans l'entrefait attrapé un café pour se donner l'air cool. BADABOUM ! Le chemisier à l'ouverture parfaitement ajustée s'auréola d'une tâche brune qui laissait paraître le noir d'une belle dentelle alors que la chemisette informe de Casey subissait le même sort pour révéler un justeaucorps ultramoulant taggué du logo de... Sentinel Prime.

Me cachant une main dans le visage en bougonnant un "C'est pas vraiiiiiii...." lassé, j'entendais Casey se confondre en excuses diverses tout en proposant le plus simplement du monde de tapoter le café et de lui demander finalement d'ôter son chemisier pour le passer sous l'eau.
Avant qu'elle ne puisse lui en coller une -j'aurais voulu qu'elle lui décolle une molaire, j'aurais eu un prétexte pour lui rouler un patin venu du fond du coeur pour avoir fait ça- la voix du boss tonna dans l'étage.

- Petit ! Non, pas toi, le machin à lunettes, l'autre comme toi mais mieux ! OH, PETIT !

Je me désignais en le regardant et il acquiésa en me désignant la demoiselle.

- Tu l'emmènes dans le bureau 16 et tu l'installes. Tu lui fais découvrir la boîte et t'hésite pas à lui filer un coup de main en attendant que je passe m'occuper d'elle, okay ?
- Oui, boss. Mademoiselle, si vous voulez bien...

Je tentais un sourire pour éviter qu'elle ne s'en prenne à moi et l'invitait à m'emboîter le pas vers le bureau 16. A la rédaction, tout le monde savait ce qu'était ce fameux bureau : un local très réduit avec un minimum de confort, mais qui avait l'avantage d'être à l'écart et un peu insonorisé. Kishida y faisait passer toutes les nouvelles recrues qui lui plaisaient pour un "test en profondeur des capacités et connaissances". En gros, il s'était pas mal foutu de sa gueule et je doutais qu'il l'ait prise au sérieux. Devais-je lui dire ? Elle était la première que j'avais la possibilité d'accompagner et de guider et puis... Je ne pouvais pas la laisser se faire avoir. Tandis que nous nous éloignions de l'agitation des bureaux communs, je lui proposais ma main en guise de salut et entamais les banalités d'usage tout en la menant à travers les couloirs.

- Kyle Macross. Si je peux aider, n'hésitez pas !
- Et moi, f'est Cafey !
- Elle doit le savoir, tu m'as dis que c'était ta nana, je te rappelle.

Il ne m'écoutait plus et maintenant que nous nous tenions devant le 16, Casey laissait son regard se perdre sur la poitrine dévoilée en demie-teinte. Un point pour lui, c'était assez érotique. Dix mauvais points, il faisait ça sans aucune finesse en déglutissant comme un gros dégueulasse.

- Ve te laiffe un peu avec elle, ve vais...tu fais... il se tapota la poitrine, rouge comme un cul de babouin.
- ...Sauver le monde, je sais. Va, cours, vole !

Le niais bomba le torse avant de filer en courant, faisant craquer les boutons de sa chemise durant sa course pour dévoiler son justeaucorps. Levant les yeux au ciel, j'expliquais rapidement à la nouvelle venue.

- En fait, c'est Sentinel Prime et là, il va certainement se tripoter dans les toilettes. Bienvenue à l'OVNI, au fait !

Ouvrant la porte de son bureau, je lui proposais poliment d'y entrer avant moi et la laissait découvrir l'austérité des lieux : un meuble et un vieux fauteuil, un PC daté et un siège supplémentaire pour les éventuelles visites. Sur le mur du fond s'ouvrait une petite fenêtre qui donnait sur l'arrière d'un autre bâtiment, qui bouchait complètement la vue. J'aurais été prêt à parier que l'un des tiroirs était plein à craquer de capotes, mais je me serais bien abstenu d'aller vérifier.

- Ce serait indiscret de vous demander ce qu'il vous a confié comme "reportage" ? Je veux, plus c'est creux, plus c'est une excellente excuse pour profiter de votre échec pour vous apprendre lui-même les bases du métier. Surtout pour les nanas.

Me calant contre un mur les mains dans les poches de mon jean délavé sur lequel était jeté mon tee-shirt noir aux couleurs d'un quelconque groupe de rock, je relevais mes lunettes factices pour lui lancer un regard entendu.
J'espérais que l'avertissement amical quant à son sort serait assez clair.

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(Casey :3)

♥ ♪ ♥

Pour un premier jour de travail, on ne pouvait pas dire qu’il commençait dans la gloire. Lolita venait de heurter un jeune homme à l’air abruti, et comme si ça ne suffisait pas, il lui avait renversé la moitié de sa tasse de café sur le décolleté. Reluquant comme si sa vie en dépendait, on aurait pu croire qu’il l’avait fait exprès. Les envies de meurtre qui lui venaient à l’esprit furent brusquement interrompues par la vision grotesque qui s’offrait à elle. Quel était ce costume que l’imbécile dénommé Casey portait sous ses vêtements ? Lolita fit les gros yeux en se demandant si Casey n’était pas le sujet de son reportage, en personne. Elle ne quittait pas du regard le « S » qui transparaissait sous la chemise. Super-héros, Superman, Spiderman, Sale gnome ?
« - Quelle horreur, pensa-t-elle, tout un mythe gâché. » A la fois déçue et dégoûtée, Lolita résista à l’envie de le précipiter par la fenêtre et tourna les yeux en direction de son patron, dont la voix tonitruante n’était pas sans lui rappeler le barrissement d’un éléphant. Décidément, elle ne comprenait plus vraiment pourquoi son père l’avait orientée vers cette boite. Peut-être pour que tout ne lui tombe pas tout cuit dans la bouche.
Au moins allait-elle avoir un bureau. Elle suivit docilement la seule personne qui lui semblait à peu près saine d’esprit, tout en se demandant si elle allait rester toute la journée avec cette tâche de café sur la poitrine.

Lolita haussa un sourcil avant d’esquisser un demi-sourire, tout en observant le Sale-Gnome filer en direction des toilettes. Si elle avait pensé à l’appareil photo, elle aurait pu prendre d’amusants et humiliants clichés. Si toutefois ce genre d’individu pouvait avoir conscience du ridicule. La situation était irréelle. Elle poussa un soupir avant de se présenter tout en serrant la main de Kyle Macross - un charmant jeune homme au demeurant - :

« - Lolita Besolie, enchantée. »

Elle le remercia de sa sympathie et tandis qu’il s’appuyait contre le mur, l’air cool, elle posa ses fesses sur le bureau tout en espérant qu’il ne s’écroule pas sous son poids. Le mobilier n’était plus de la première jeunesse, et Lolita avait assez d’une catastrophe par jour. Le bureau, qui avait tout du placard à balai, était vraiment déprimant. Elle se demandait finalement si elle tiendrait le coup.
Elle expliqua en quelques mots à Kyle qu’elle devait faire un reportage sur le super-héros qui officiait en ville ces derniers-temps. Elle devait prendre des photos et écrire un article.

« - Mais finalement, quand je vois l’autre énergumène, fit-elle en montrant du pouce la porte du bureau, désignant le Casey parti aux toilettes, je me demande si on ne m’a pas roulée dans la farine. »

Lolita pensait avoir compris le sous-entendu au sujet du patron et des jeunes filles en fleur. Elle se demandait cependant de quelle manière elle pourrait échapper aux mains baladeuses de Kishida. Elle ne pourrait sûrement pas se permettre de lui mettre une gifle. Il serait capable de la virer puis de porter plainte. Elle ne tenait pas déjà à entacher sa réputation. Le seul moyen était sans doute de réussir ce reportage, d’empocher l’argent puis de démissionner rapidement. Et encore, elle se doutait que Kishida trouverait quelque chose à lui reprocher. D’après le peu qu’elle avait vu et ce que lui avait dit le jeune homme, elle ne se faisait plus d’illusion. Elle n’était plus très sûre de pouvoir trouver la renommée grâce à l’OVNI.
A présent, Lolita se posait un nombre incalculable de questions, et décida d’en faire profiter Kyle. Après tout, peut-être pourrait-il l’aider. Il avait l’air plutôt amical et pas mauvais bougre. Il avait aussi l’air habitué à cet endroit, et pour cela, Lolita admirait son courage. Espérant qu’il ne voit pas d’inconvénient à ce qu’elle le tutoie, elle demanda avec un sourire mi-figue, mi-raisin : 

« - J’ai l’impression que Casey n’est pas vraiment un … super-héros, je me trompe ? Parce que là, j’avoue être un peu perdue. En fait, ce Super-Man - ou Sentinel Prime puisque c’est ainsi que tu l’appelles - n’existe pas ? »

Si ce n’était dans la tête de Casey, évidemment. Et ce dernier aurait sûrement eu besoin de l’aide du Dr. Barclay. Lolita continua sur sa lancée, sans afficher une grande conviction, affirmant qu’elle tenterait d’enquêter, même si elle devait se résoudre à produire un article factice, ou encore un article absurde sur Casey assorti d’une photo de cet étrange spécimen. Elle n’était pas certaine que ce travail serait amusant, et encore moins si elle devait le réaliser toute seule. Raison pour laquelle elle tenta le tout pour le tout en proposant à Kyle de l’aider.

« - Je sais que tu as déjà un travail ici, mais peut-être que ce serait plus amusant si tu m'apportais ton aide plutôt que de supporter Casey toute la journée, non ? »

Lolita venait de balancer son argument de choc. Assorti d’un petit mouvement en avant qui dévoilait son décolleté humide.

Lolita, elle s'appelait Lolita. Croyant me souvenir vaguement que ce prénom était connu pour une histoire à moitié pédophile couchée sur roman, j'haussais un sourcil. Comment pouvait on donner ce genre de nom à une gamine sans avoir une idée derrière la tête ? Il fallait bien le reconnaître, toutefois : malgré son âge, la demoiselle avait de quoi faire tourner pas mal de tête. Je n'étais pas tout à fait sûr qu'elle ait seulement atteint la majorité et pourtant ses vêtements et son allure la désignaient comme une femme à part entière dont le côté enfantin devait attiser pas mal d'esprit, surtout au Japon. Le Lolicon personnifié devait compter les prétendants comme moi les cinglés que j'avais foutu derrière les barreaux et je me soulageais de la taille de sa poitrine, qui n'était pas faite pour m'attirer. Tant mieux.
La gosse ne releva pas spécialement ma mise en garde sous-entendue à propos de Kishida et me dévoila sa mission d'intégration : pondre un papier sur Sentinel Prime en personne ! Je partais malgré moi d'un rire franchement amusé en réhaussant mes lunettes. Devais-je m'en sentir flatté -qu'on me courre après était plutôt une bonne nouvelle pour mon égo- ou devais-je davantage m'en inquiéter maintenant que j'avais une vie privée ? Fixant Lolita qui évoquait Casey, je décidais que ce serait elle qui finirait par trancher la réponse à cette épineuse question.

- Ne faîtes pas attention à Casey. C'est un doux dingue un peu siphonné, mais il n'est pas méchant. Juste... envahissant !

Merde, voilà que je défendais la cause de ce rat boutonneux ? Secouant la tête pour moi-même, je fis claquer ma langue contre mon palais en signe de désapprobation. J'étais décidément bien trop gentil et me trouvais foutrement hypocrite vu le sucre que je cassais sur le dos de mon Sempaï photocopieur dès que je racontais mes journées à Hitomi. En tout cas, une chose était sûre pour cet après-midi. Ce bon vieux Casey avait grillé toutes ses cartouches face à la demoiselle Besolie et ne risquait pas de pouvoir lui mettre la paluche dessus au risque de prendre la sienne dans la gueule. Me déplacant, je vins me poser à côté de Lolita, les fesses sur le bureau. Ses questions me laissèrent un moment perplexe, voire même un peu vexé. Bien sûr que si, SP existait ! Et puisqu'elle brisait la barrière du vouvoiement, je l'imitais le plus naturellement du monde.

- Bien vu, Sherlock ! Casey pense que se faire passer pour un héros lui donne du...euh...style. Il paraît que ça plait aux filles, le coup du mec cachant son terriiiiiiible secret sous ses vêtements, tu vois le truc ? Je lui souriais largement avant de lui faire un petit clin d'oeil complice. Mes pensées s'attardèrent sur Hitomi dont je n'avais pas oublié la tête lorsqu'elle m'avait trouvé en costume et je n'en souriais que de plus belle. H-hm. Sentinel Prime. Et je peux t'assurer qu'il existe.

Oh que oui, je pouvais l'assurer ! Je lui racontais que j'avais eu l'occassion de le voir filer dans le ciel et qu'après tout, il existait quelques rares photos (certes floues) de ses passages sur des lieux de sinistres. Malgré tout, Lolita m'avoua être prête à tout faire pour porter cette mission à bien, quitte à mentir et à écrire quelque chose de complètement bidon. A l'instant où ces mots passèrent ses jolies lèvres, je réalisais nettement que je n'avais qu'à l'encourager pour avoir l'esprit tranquille et que SP ne risquait rien. Pourtant, je décidais de jouer le jeu. Peut-être parce que j'étais assez sûr de moi pour ne rien craindre, peut-être parce que cette partie de cache-cache pouvait m'amuser à sa façon. C'était un sorte de rôleplay qui se mettait en place tandis que nous parlions et je ne pûs m'empêcher de me demander si je parviendrais à être un bon scénariste.
Sa proposition ne m'étonna pas plus que la très joliment coordonnée mise en avant de sa poitrine, que je regardais pour ne pas la froisser. Et parce que mine de rien, ça avait l'air joli même à ce bonnet là.

- J'hésite, j'hésite. Qui dois-je choisir entre le collègue masturbateur et la ravissante petite nouvelle ? Je tapotais ma bouche de l'index, les yeux levé vers le plafond. Le choix est cornélien... Mais je ne peux sûrement pas abandonner une jeune femme en détresse, même si son chemisier est tout tâché. Et transparent. Joli soutien-gorge, au passage.

Là, je m'étonnais moi-même. Voilà que j'étais assuré face à une nana ? Que je ne bafouillais pas et que je lui faisais l'air de rien du rentre-dedans certes grossier mais direct ? Avoir une petite amie devait avoir sa part de responsabilité là dedans, surtout qu'Hitomi était du genre à vous apprendre à être un homme, un vrai de vrai.
Ou peut-être que la taille des nichons de Lolita était proportionellement inverse à tout ce qui m'excitait en temps normal et que je ne ressentais pas spécialement une tension de séduction, tout simplement.

- D'accord, partenaire. Je vais te filer un coup de main, parce que tu as l'air plutôt sympa et que je ne voudrais pas que Kishida te donne des cours particuliers. A deux conditions ! Je levais l'index face à elle, la regardant alors que j'énumérais. Je veux que tu mette un fond de vérité dans ce que tu écriras, parce que des gens aiment Prime et qu'il ne serait pas correct de se foutre de leurs gueule. Mon majeur se leva à la suite. La seconde, que tu trouve un autre haut, parce qu'on va sortir. La vérité, tu ne la trouvera pas dans les dossiers d'OVNI. Je le sais, j'ai passé la semaine passée à les photocopier. J'ai un tee-shirt propre au vestiaire, si ça peut faire l'affaire. Bon, ça n'ira pas avec le reste, mais...

J'haussais les épaules en prenant une petite moue compatissante avant de lui présenter ma main ouverte dans un sourire.

- Si ça te va, on s'arrache avant que Casey n'ait fini sa petite affaire aux chiottes. Sinon, on devra lui expliquer qu'on se barre sans lui et ça pourrait finir en crise de jalousie.

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Un sourire amusé éclairait le visage de Lolita, sans doute le reflet de celui de son nouveau collègue. Ce jeune homme lui plaisait bien, il avait l’air drôle et symapthique, et elle se dit qu’il serait plaisant de travailler avec lui. Enfin, travailler n’était peut-être pas le terme approprié, en tout cas pas dans l’esprit de Lolita. S’amuser, jouer aux détectives, enquêter, voilà ce qu’ils allaient faire ! Lolita espérait que l’aventure se révèlerait aussi palpitante qu’elle l’imaginait. Elle se voyait parfaitement surprendre puis photographier Sentinel Prime se changeant au fond d’une ruelle. Ce serait un véritable scoop, d’autant plus qu’elle saurait enfin qui était ce super-héros. Ça ferait aussi voyeur, mais Lolita s’en fichait éperdument pour l’instant. Et puis elle n’était pas contre l’idée de regarder un homme musclé à moitié nu.

Quoiqu’il en soit, Sentinel Prime existait réellement. Lolita ne savait pas encore s’il s’agissait d’un héros dans le genre de Batman, c’est-à-dire sans pouvoirs mais avec beaucoup de gadgets, de courage et de sens moral, ou un héros comme Superman, avec des pouvoirs et un sens moral. Elle optait pour la première solution. De toute façon, les pouvoirs, ça n’existait pas et c’était bon pour les comics.

« - Bon, allons-y alors ! » s’exclama Lolita l’air ravi. Kyle l’enjoignit à le suivre afin de lui prêter l’un de ses t-shirts. Par chance, le jeune homme n’était pas trop gros ni trop grand, et avait des goûts assez classiques en matière de vêtement. Il sortit de son casier un t-shirt blanc. Lolita lui tourna le dos et entreprit de quitter veste et chemise tâchée. Elle enfila le haut un peu grand qu’elle rentra dans sa jupe afin de se donner un style à la garçonne plutôt qu’un style juste moche et débraillé. Veste et sac-à-main à nouveau sur les épaules, elle remercia son collègue pour son amabilité et lui expliqua qu’il fallait maintenant qu’elle récupère ce fichu appareil photo laissé dans le bureau de son patron.
Une mission très risquée, donc. Surtout qu’il valait mieux éviter Casey dans l’idéal.

« - Tu fais le guet pendant que je récupère l’appareil. Si le patron ou l’autre énergumène se pointent, retiens-les ! » chuchota Lolita d’un air conspirateur.

En effet, Kishida n’était actuellement pas dans son bureau, et un bref instant Lolita s’interrogea sur la vraisemblance du rencard dans les toilettes entre le patron et Casey. Hum, quelle horreur.
Le moment était propice à une intrusion en règle. Par chance, le bureau n’était pas fermé à clé, ce qui signifiait sûrement que Kishida n’en avait pas pour longtemps, quelque soit la chose à laquelle il était occupé. Lolita allait devoir fouiller un peu car l’appareil photo ne se trouvait pas à la place où elle l’avait vu auparavant. Elle ouvrit plusieurs tiroirs et posa de grands yeux étonnés puis dégoûtés sur leur contenu. Imaginer le patron utilisant de tels ustensiles ne suscitait pas des visions spécialement ragoutantes.

« - C’est cela que vous cherchez, mademoiselle ? »

Une jeune femme blonde à forte poitrine se tenait derrière elle, un appareil photo dans la main. Lolita ressentit une pointe de jalousie à la vue de cette bimbo blonde, et espéra qu’au moins son QI soit inversement proportionnel à la taille de ses gros seins. Elle avait envie de ricaner à cette pensée mais à la place récupéra l’appareil photo, partit sans une explication mais avec un remerciement. Lolita était mécontente d’avoir été surprise en fragrant délit. Elle sortit de la pièce les sourcils froncés, une moue contrariée sur le visage et fit signe à Kyle de la suivre. Elle voulait sortir rapidement, souhaitant que la bonasse ne raconterait rien et que Casey ne surgirait pas au détour d’un couloir.   

Enfin sortis des locaux de l’OVNI, Lolita poussa un profond soupir. Ce premier jour de travail n’était décidément pas de tout repos, et malheureusement empli de contrariété. Elle souhaitait que la suite se passe mieux, et que, par exemple, Sentinel Prime surgisse juste devant elle, et décide de l’embrasser fougueusement et plus si affinités. Sinon, réussir cet article, tout simplement, ce serait déjà très fort.

« - Hm, tu sais où le trouver toi, ce Sentinel Prime ? » demanda-t-elle à Kyle tout en réfléchissant à la suite des évènements. Il fallait trouver le moyen d’amener ce super-héros dans le coin. Lolita tenta une suggestion, espérant qu’elle ne soit pas totalement idiote :

« - Peut-être qu’on pourrait créer une situation qui amènerait Sentinel Prime à nous. Par exemple, tu pourrais faire semblant de me kidnapper ou quelque chose dans ce goût, non ? »

Elle adressa un petit sourire timide à Kyle, puis se reprit et son visage devint la volonté personnifiée. Lolita voulait de l’action.