Il n'y a pas cinq minutes avant l'arrivée de Raven Miller sur Terra, descendant directement de l'Olympe après avoir recu son ordre de mission, le soleil était pétant, éclairant des lieux et des lieux de son intense luminescence, mais dès que la Prêtresse toucha le sol des Terres Sauvages, la pluie tomba subitement, et le ciel se couvrit de nuages.
De la pluie. Enfin quelque chose qui lui ressemblait. Quelque chose qui donnait la vie, comme la mort. Elle pouvait attraper une mauvaise grippe et elle pourrait en mourir. Pour une fois que quelque chose viendrait à bout d'elle et qu'elle puisse enfin se reposer. Elle dont les nuits n'étaient qu'une longue séance de cauchemars, elle qui n'avait personne contre qui se blottir quand les fantômes revenaient la hanter, qui n'avait personne à chérir, puisque tout lui avait été enlevé, pourquoi ne pouvait-elle pas mourir aussi simplement que sous une belle pluie?
Simplement, voilà; Raven était protégée par la magie des Dieux. Maladies, noyades, chutes brutales, tous la laissaient indemnes. Dans sa situation de lassitude aussi profonde, ce n'était là qu'un supplice supplémentaire à vivre, chaque jour. Les gens malheureux pour des peccadilles croient vivre un véritable enfer, alors qu'ils ont une famille, un bon boulot, quelqu'un en qui ils peuvent toujours avoir confiance. "L'enfer, c'est quand tu te lèves chaque jour, le matin, et que tu te demandes ce que tu fous dans cette vie." C'était ce que disait la Pythie, parfois, quand elle et Raven discutaient ensemble. La Pythie était la seule personne sympathique à Raven, même si elles n'avaient aucun point en commun. La Pythie était une femme sage, intelligente, dont les attaches n'étaient qu'un petit bonus de la vie desquels il faut apprendre à se séparer. "Si j'avais eu cette sagesse, je ne serais pas devenue qui je suis." pensait Raven, en constatant qu'elle était devenue l'Arme qu'elle aurait dû être au départ. Elle de comprenait qu'à peine qui elle était, ce qu'elle faisait dans ce monde, ce qu'elle représentait pour l'Univers. Une crise d'adolescence extrapolée, mais à peine exagérée.
Pour revenir au sujet du jour, la Prêtresse décida de passer la nuit à l'abri, plutôt que de passer les trois prochains mois au lit à rien faire de sa vie. Elle regarda ses mains puis elle sonda les alentours. Elle scanna mentalement le relief du terrain qui l'entourait. À quelques kilomètres, elle repéra une grotte. Si elle manquait de confort à cet endroit, elle se servirait de la pierre pour se fabriquer un lit moyennement confortable. Elle s'y dirigea sans vraiment se préoccuper de ce qui risquait de lui arriver, mais peut-être aurait-elle mieux fait de le faire, car l'avenir était plutôt désagréable à son endroit depuis des années.
Concentrant ses pouvoirs magiques sur ses pieds, qu'elle chargea d'énergie motrice, elle se précipita vers l'endroit qu'elle avait repérer, aussi rapide qu'un guépard mais aussi silencieuse qu'une souris, sauf son épée bâtarde qui claquait contre ses jambières à chaque pas. Elle passa même sous le nez de brigands sans que ceux-ci ne puissent lui mettre la main dessus. Elle courut encore un bon moment, inlassable, aussi indomptable qu'une furie et aussi habile à éviter les trous dans le sol qu'une gazelle gambadant joyeusement dans les prés africains.
Elle atteint sa destination au bout d'une dizaine de minutes, sans faute. S'arrêtant avant de faire un face à face désagréable avec un mur rocailleux, elle ne put qu'admettre que cela était un fort joli endroit naturel.
Elle entendit alors, de ses oreilles à l'ouïe surdéveloppée, des phrases assez désagréables à entendre, mais charmeuses pour les coeurs avides.
-Je suis la réponse des tékhanes à la fourmilière. Elles voulaient combattre le feu par le feu, créer une armée à peu de frais pour supporter leurs troupes, voilà à quoi je devais servir... Mais je ne veux pas être leur esclave, je veux posséder MA colonie, et personne ne viendra la contrôler à ma place! Je serais leur seul reine! Enfin, avec vous, évidemment. J’ai besoin de vous, pour nos soldats… je ne peux avoir que des ouvrières, qui nous servirons, et combleront tous nos désires, ainsi que d’aménager la colonie, mais vous, vous nous donneriez nos soldats, pour nous protéger. Alors, intéressée à devenir une véritable reine? Vous êtes également une esclave créée par ces tekhanes, à voir votre réaction… déjouez-vous de leur emprise, et rejoignez-moi!
Il ne manquait plus que ça. Une mégalomane en puissance. Raven poussa un soupir presque désabusé, mais sa curiosité était bien plus forte que ce qu'elle pouvait bien avoir cru auparavant. Elle tenait à savoir pourquoi cette demoiselle voulait tant s'emparer d'un pouvoir qui lui échapperait dans la semaine qui suit. "C'est vraiment une mode; viser plus haut que permis pour voir ensuite tous ses rêves s'effondrer. Ils devraient apprendre la modération dans les écoles plutôt que les maths, franchement..." grommela-t-elle intérieurement.
Elle entra alors dans la grotte, sans même avoir la moindre crainte de tomber devant une grande bande de criminelles qui se la jouaient puissantes et cruelles, probablement sujettes à la misandrie, en plus, en. "Bon, et en plus, pas question d'installer un système d'éclairage, bien sûr. Pas de torches, pas d'huile à feu, rien." Vous aurez deviner que maintenant, elle pense bien plus qu'elle ne parle, ou même agissait, et probablement que cela était un plus pour elle. Elle aperçut aux tréfonds de la grotte deux femmes, dont l'une était nue, et deux autres armées. Elle soupira alors en voyant des pistolets.
-Les femmes visent toujours trop haut... soupira-t-elle, ne s'excluant même pas de cette définition.