Le Grand Jeu - Forum RPG Hentai

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May be. [Reservé]

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Saïl Ursoë

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Re : May be. [Reservé]

Réponse 15 mardi 07 septembre 2010, 17:53:31

Ô combien délicieuse était la paix dans laquelle ce home sweet home les immergeait, contrastant de manière si appréciable avec la fureur des éléments qui continuaient de rager dehors, frappant avec colère tout ce qui se trouvait à leur portée sans parvenir maintenant à les atteindre tous les deux, calfeutrés qu’ils étaient dans ce petit nid. Voir et entendre la pluie battre au dehors rendait en vérité l’asile encore plus chaleureux, et même si les atteintes de l’humidité et du froid se faisaient toujours durement sentir, la douceur de l’atmosphère commençait déjà à les envahir, rassérénant les sens et apaisant l’humeur.
Tout autant synonyme de soulagement était ce lieu en comparaison avec le bar dont ils s’étaient exilés, car non seulement ils bénéficiaient à présent d’un confort autrement plus douillet que celui qu’avait pu offrir le débit de boissons, mais en plus, ils étaient à l’abri de toute intrusion, quelle qu’elle pût être. Plus aucun regard pour les épier désormais, plus d’avis hypocritement défavorables qui ne pouvaient atteindre leurs oreilles, plus de cette espèce d’hostilité ambiante qui avait auparavant donné de quoi leur hérisser le poil et qui les avait fait fuir en hâte !

Non, à partir de ce moment, dans ce microcosme qui paraissait n’avoir été conçu que pour les abriter en cet instant, la soirée n’appartenait qu’à eux, leur laissant le champ libre pour profiter pleinement de la présence de l’autre. Le reste du monde n’avait plus aucune importance ; seule comptait pour Saïl la présence de cette jeune fille qu’il chérissait plus que tout au monde, qu’il voulait dépouiller de tous ses soucis pour ne plus lui offrir qu’un bonheur sans nuages dans lequel elle pourrait flotter.
Ce grand garçon, qui d’habitude aurait paniqué à la simple pensée de ramener une personne du beau sexe chez lui, se tenait devant Aya sans la moindre trace de honte, de confusion ou d’incertitude sur ses traits empreints d’une étrange sérénité captivée qui laissait voir toute la magie de cette nuit féerique. Bien sûr, il n’avait pas de château à lui offrir, humble chevalier qu’il était, mais pour sa princesse, il ferait en sorte que cette demeure aussi modeste qu’agréable pût égaler tous les palais afin de combler la dame qui avait si suavement conquis son cœur.

Plus que jamais désormais, elle pouvait s’assimiler à une merveilleuse dryade, son haut vert collant contre elle comme pour lui faire une seconde peau alors que ses cheveux d’écorce pure dégoulinaient en une petite cascade de feuilles mortes le long de son visage et s’achevaient contre ses épaules. Nimbée d’une chape de pluie, la senteur qu’elle dégageait n’en ressortait que plus fortement encore, semblant s’épanouir autour d’elle de la même manière que l’entêtant parfum d’une fleur, donnant à son protecteur l’envie de se coller contre elle pour humer son odeur à pleine force et s’en imprégner à jamais.
Et ses yeux, oh, ses yeux ! Il y avait là deux émeraudes à la valeur inestimable, deux portails vers une forêt pleine de mystères, d’exaltation, de joie, qui en cet instant paraissaient participer à ses traits avec plus d’ampleur qu’en temps normal, couvrant Saïl de leur champ ensorceleur. Là où d’autres ne se seraient pas fait une honte de permettre à leur regard de s’égarer pour profiter tout à leur aise de la vision des courbes de la jeune fille rendues plus évidentes par l’humidité, l’intéressé, lui, se contentait de se pâmer devant les iris si brillants de sa compagne.

Et en parlant de milieu végétal, ne pouvait-on pas avoir l’impression d’un tapis de gazon plutôt que d’une moquette, en voyant la fée se défaire de ses souliers pour laisser flotter dessus ses pieds maintenant nus ? Lui, en tout cas, en eut la sensation fugace lorsqu’il retira à son tour ses chaussures puis ses chaussettes, si bien qu’en fermant les paupières, peut-être aurait-il pu se croire transporté dans un tout autre univers, complètement empreint de cette magie qui les avait par hasard réunis pour les conduire jusqu’ici.
Toutefois, se rendre aveugle l’aurait privé du spectacle d’Aya qui, toute trempée, n’en était que plus mignonne encore, ayant dans son attitude quelque chose d’adorablement vulnérable et de farouchement vif qui aurait pu faire croire avoir devant soi quelque sublime créature à l’état sauvage capable de s’enfuir, de disparaître à tout moment. Mais elle n’avait manifestement nulle intention de le quitter après la période si courte mais si riche qu’ils avaient partagée, et il était pleinement conscient de la chance qu’il avait d’être avec elle, en cette nuit qu’il aurait voulu voir durer une éternité.

Mais plutôt que d’espérer du futur, il fallait profiter pleinement de l’instant, le cueillir dans toute sa fraîcheur comme cette main qu’elle lui tendait, cette menotte qu’il savait être à la fois si fragile d’aspect et si incroyablement tenace, et dont il se saisit avec autant d’égards qu’il en aurait mis à accepter l’invitation d’une reine à danser. Les mouvements qui suivirent n’eurent certes pas l’élégance leste et chaloupée d’un ballet, mais ils eurent en commun le même sens de l’harmonie qu’un tel spectacle, le maître des lieux menant son estimable invitée avec une parfaite certitude, même dans le noir quasi-complet qui les environnait. Depuis le temps, il connaissait chaque recoin de cet appartement comme sa poche, et aurait donc pu y circuler les yeux fermés, conduisant donc pour l’occasion sa belle à travers la pièce qui diffusait en cette heure un si étrange mélange de mystère et de relaxante intimité.

Quelques pas à peine, et déjà, ils se retrouvaient devant le lit de la maison, lit sur lequel une impulsion de passion bestiale l’aurait pu faire pousser Aya pour enchaîner en se précipitant goulûment sur elle. Ce fut comme on pouvait s’y attendre tout le contraire, Saïl escortant sans un mot sa demoiselle jusqu’au pied du confortable meuble à l’extrémité duquel il l’assit, s’éclipsant ensuite prestement avec un « Je reviens » comme assurance renouvelée de sa dévotion.
En effet, devant les paroles moitié requête, moitié invitation de la jeune fille, sa première inspiration avait été de la serrer fort dans ses bras pour lui transmettre corps à corps toute la chaleur dont elle aurait pu avoir besoin. Cependant, si le sens des réalités de l’attentionné garçon avait été mis en sourdine, tel n’était pas le cas de celui de la logique, et son bon sens lui avait donc indiqué que, certes, le geste aurait été des plus touchant, mais que d’un point de vue pratique, il n’était guère recommandé. Agissant ainsi avec autant de raison que d’égards, il s’absenta quelques secondes à peine dans la salle de bains dont il revint avec deux bonnes serviettes de coton bien épaisses et chaudes qui sauraient rapidement chasser le froid qui les harcelait.

Reparaissant de la sorte promptement auprès de la dame de ses pensées, il s’assit à ses côtés, déposant sur ses genoux tout mouillés les promesses d’un agréable séchage pour ensuite fixer l’adolescente droit dans les yeux, son propre regard mêlant douceur, adoration et un profond respect. De fait, pour qu’ils s’essuyassent tous les deux, les vêtements qu’ils portaient étaient de trop, aussi cherchait-il dans les ravissantes prunelles de sa chère et tendre l’autorisation de faire ce qu’il fallait pour prendre soin d’elle, la chouchouter de son mieux.
« Oui », parut dire mieux que mille discours son attitude toute entière, aussi se  mit-il à la tâche, tendant vers elle ses mains qui, si exercées qu’elles fussent dans la pratique de son métier, n’auraient pu lui paraître en cet instant assez délicates pour la tâche qui leur incombait.

Avec une affectueuse minutie qui n’excluait nullement l’expertise dont ils avaient toujours su faire preuve, ses doigts se saisirent précautionneusement du col du t-shirt d’Aya, par l’avant et par l’arrière, pour ensuite tirer lentement et retirer la gangue mouillée qui avait autrefois été un élégant habit. Au fur et à mesure de cette opération, le nombril pareil à un bouton de rose, l’abdomen souple, la poitrine rebondie, tout cela se révéla tour à tour. Chacun de ces éléments d’apparence si séduisante auraient été de nature à pousser à déchirer les effets de la demoiselle plutôt qu’à les effeuiller à la manière d’une fleur ainsi que Saïl le faisait.
Mais rien n’aurait pu le faire se départir de sa grande tendresse, et ce fut donc sans précipitation qu’il acheva de la dénuder, posant ensuite le haut de côté sans dire un mot, toute la passion la plus affectueuse du monde se lisant cependant dans ses iris bruns. Il marqua un instant de pause, comme pour immortaliser dans son esprit ce moment où il commençait à la découvrir dans le plus simple appareil, la vision s’avérant si magnifique que son cœur aurait pu en éclater de ravissement s’il n’avait pas battu avec tant de paix près d’elle.

Pour autant, ce n’était pas une raison pour la fixer bêtement sans rien faire, aussi reprit-il en passant cette fois-ci ses mains derrière son dos, cherchant les attaches du soutien-gorge de l’adolescente qu’il trouva sans difficultés. On aurait pu croire de quelqu’un d’aussi timoré que lui qu’il se débattrait avec les agrafes sans savoir quoi faire, mais il ne fallait pas oublier qu’il avait œuvré comme urgentiste, formation dans l’exercice de laquelle les premiers secours nécessitent de savoir ôter de tels sous-vêtements.
Par conséquent, la pièce de tissu partit à son tour, laissant à l’air libre les seins de la jeune fille ; ces deux globes de chair emplis d’une graisse qui les rendait fermes et doux au toucher. Encore une fois toutefois, il trouva mieux à faire que de s’attarder à baver stupidement devant ces attributs féminins, dépliant au lieu de cela une des serviettes d’un coup sec pour ensuite en recouvrir Aya de la tête jusqu’à la taille, l’y emmitouflant avec amour.

Poursuivant sur sa lancée, il la frictionna ensuite à travers l’étoffe de coton pour la sécher, mettant toute sa tendresse dans ces gestes protecteurs, ébouriffant avec attention cette pétulante broussaille de cheveux pour ensuite passer de haut en bas, ne se permettant pour l’heure, en bon gentleman, de ne mettre la main sur elle qu’à travers l’ustensile dont il se servait pour la choyer.
Lentement, pour ne pas brusquer le délicat charme du moment, il essuya aussi bien à l’avant qu’à l’arrière son cou, ses côtes, son ventre, s’abstenant néanmoins de s’affairer sur sa poitrine pour ne pas brûler les étapes. Une fois son œuvre achevée, il prit à nouveau un moment pour l’observer dans cette posture digne d’une intimité de boudoir, et en un soupir admiratif, des mots s’échappèrent alors de ses lèvres sans qu’il ne lui vînt pourtant à l’idée de faire quoi que ce fût pour les retenir, exprimant une vérité immensément évidente qu’il n’avait pourtant pas pris la peine de mentionner de vive voix jusqu’ici :

« Tu es si belle. »
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Aya Murakami

Humain(e)

Re : May be. [Reservé]

Réponse 16 mardi 07 septembre 2010, 20:32:14

Imaginons un seul instant, improbable, qu’Aya ne se soit pas trouvée en présence de Saïl ce soir. Elle ne serait très certainement pas allée dans l’habitat d’un inconnu si celui-ci ne lui avait pas inspiré autant de confiance et de respect. Elle n’aurait jamais embrassé un homme sous la pluie, elle n’aurait pas fait la douce insulte aux clients du bar d’assumer la situation. Elle n’aurait sans doute d’ailleurs même pas accepté le bol de soupe. En remontant un peu en arrière, sur cette étrange soirée totalement hors du temps, on se rend bien compte que si Aya est une grande romantique et s’entiche facilement des hommes qui l’abordent, rien ne se serait passé dans les mêmes circonstances. Cela aurait d’avantage ressemblé à un mauvais conte de fée, où le prince dévisage sa dame, où il disparait au petit matin et ne pense même pas à lui offrir la moindre promesse. A cette heure-ci de la nuit, eh bien qu’Aya et Saïl n’aient pas trainés leurs bottes au bar, la jeune fille serait très certainement seule dans son lit, après être passée entre les mains d’un énième goujat, en pleurant toutes ses larmes de son corps de petite fille.

C’était toujours le même schéma, avec ces pseudos gentlemen qui ne savaient s’y prendre que pour séduire au premier regard. L’adolescente tombait facilement dans leurs filets, en état de faiblesse. Et elle y replongeait juste après leurs bras, juste après avoir espéré en vain, se faisant femme l’espace d’une seconde seulement, redevant bien rapidement la gamine qui serrait son oreiller en geignant de ses malheurs. Alors que là, Aya ne se sentait plus adolescente. Ses dix sept ans semblaient s’être envolés, alors que le livre de sa rencontre avec Saïl s’écrivait au fur et à mesure, sans un « Il était une fois » aussi évident, ni un « et il la quitta, la laissant désespérément seule » de prévu. D’ailleurs, la jeune femme n’avait plus que faire de ses idées enfantines et puériles. Elle se contentait de vivre, au lieu de penser, et c’est très certainement cela qui lui donnait cette assurance, cette confiance et ce charme mature dont elle n’était habituellement pas longtemps dotée. En d’autres circonstances, elle aurait gardé la mutinerie dont elle avait fait la démonstration plus avant dans la soirée, restant taquine et rougissante. Alors que là, elle se sentait sur la même longueur d’ondes que Saïl, ayant l’impression fugace de se fondre dans le décor et de faire partie d’une évidence le concernant.

Qu’il était bon, alors, de se sentir observée avec respect. Aya ne connaissait pas moult jeunes gens capables de la fixer avec honnêteté et assurance dans les yeux, alors que sa poitrine était dans une démonstration flagrante de ses charmes, sans qu’elle y soit pour quelque chose en particulier. Sentir une telle adéquation dans les attitudes sereines d’Aya et de son compagnon rendait tout beaucoup plus beau, sans la gêne de la découverte ou la honte de soi. Tous deux étaient là, postés tel un axiome, une vérité inattaquable et authentique. Après que lui aussi ait eut la bonne idée de se débarrasser des loques dégoulinantes que ne pouvaient qu’être des chaussures après un tel traitement, Aya sentit sa main se faire saisir avec une force comme toujours teintée de dilection. Et, bien que ce soit exactement ce qu’elle espérât, l’adolescente fut fortement surprise de ne pas sentir tout d’un coup l’agression pressante d’un corps contre le sien. Elle osa même se demander si Saïl se retenait ou s’il était naturellement aussi protecteur. Mais cette question qui n’en était pas une s’illustrait comme le comble de l’ineptie, tant le contrecoup de la réponse était manifeste. De même, tandis qu’il l’accompagnait jusqu’à son lit et qu’Aya se demandait ce qui allait suivre, elle le vit s’éloigner avec une petite déchirure au niveau du cœur, même s’il était plus que criant qu’il allait revenir.

S'écoulant une durée qui pourrait s’estimer à un claquement de doigt, la jeune femme alla jusqu'à se demander si leurs intentions étaient les même. Certes, Saïl ne pouvait ignorer l’immense invitation qu’elle lui avait tendue en même temps que sa paume, mais comme elle s’était elle-même laissée dans l’expectative d’une réponse, il était encore possible que son hôte n’ait pas les mêmes desseins. Et qu’elle reste là, penaude et ridicule. Seulement, Aya avait ce soir décidé de confier son cœur à Saïl, et il y résidait également ses doutes et autres angoisses, dont elle se départait volontiers, convaincue que son compagnon saurait les faire disparaitre sans efforts ni difficultés. D’ailleurs, comme il le lui souffla, Saïl revint. Avec entre ses mains deux promesses d’idyllique réconfort, de quoi soulager ses frissons, tout du moins ceux causés par le glacial vent de ce mois d’automne.

Comment exprimer à chaque fois le plaisir qu’avait Aya de voir cet homme répondre à ses espérances, à ses attentes, à ses moindres pensées ? Elle ne voulait en effet pas s’arrêter à ces deux tissus moelleux, la serviette seule ne la réchaufferait pas suffisamment. Car le corps n’était pas tout, l’intérieur de son être avait tout autant besoin d’attention et de proximité. Aussi, quand il parut lui demander l’autorisation de prendre une initiative dont elle n’osait même pas rêver, elle faillit parler. Mais pour ne pas briser l’instant merveilleux d’une parfaite symbiose entre eux, Aya se tut et se contenta d’un faible sourire, laissant plutôt s'exprimer son cœur. Qui fut instantanément rassuré lorsque Saïl s’empara avec détermination de ce tissu verdoyant qui les gênait tant. En d’autres situations, on l’a évoqué plus haut, la donzelle aurait très certainement ressenti une grande honte d’être ainsi mise à nue, dans le sens littéral du terme. Mais là, l’aisance ne quittait pas ses traits apaisés et ravis. Ce simple défeuillage lui fit l’effet d’un feu de cheminée, tant cela la réchauffa rapidement et en profondeur. Le sang s’accéléra sous sa peau diaphane, et la jeune fille en eut presque incliné les paupières pour mieux profiter du glissement du tissu imbibé sur son épiderme hérissé, mais elle ne quittait pas Saïl du regard, le rassurant si besoin était de sa détermination, l’engageant à continuer, ce qu’il fit.

Quoi de plus sensuel que de se voir lentement déshabillée dans un silence religieux et admiratif, quoi de plus sensitif que de sentir l’admirable union d’un homme et d’une femme. Quoi de plus simple, également. Aya ne faisait pour l’instant rien, laissant le temps à son partenaire de s’habituer à elle, à ce corps qui n’aspirait qu’à lui plaire. Trop peu de mots pour décrire le silence, l’intime respect du temps et de la découverte, la lenteur de Saïl qui s’aventurait en terrain inconnu pour la première fois. L’un comme l’autre appréciaient ce laps de temps qui leur était offert pour se familiariser avec l’étranger, l’Autre. La parure émeraude d’Aya finit donc rapidement à côté d’eux, tout comme son premier sous-vêtement qui fut évincé sans mal par des mains manifestement experte -mais qu’importe ! Ce n’était ni le moment ni l’opportunité pour se relancer sur un discours maintes et maintes fois développé.

Une fois partiellement offerte au regard de Saïl, Aya dut retenir le réflexe de toute fille de cacher pudiquement son corps, ce qui ne fut pas bien dur tant le regard du jeune homme n’avait rien d’un inquisiteur ou d’un juge appréciateur. Libérant sa poitrine, qui reprit avec plaisir son galbe naturel, Saïl ne prit même pas le temps de s’attarder, et vint la couvrir avec diligence. La jeune fille laissa un soupir de satisfaction échapper de ses lèvres, tant pour l’attention dont elle était la cible que pour la chaleur du contact d’un tissu rugueux et bienfaiteur sur sa peau nue. Toujours immobile, Aya laissa patiemment son épiderme se réchauffer sous les caresses encore précautionneuses de Saïl. Délicieuse frustration de ne pas recueillir ses mains sur son corps, de ne les sentir que par un intermédiaire prévoyant et soigneux. Tandis qu’il finissait son œuvre, le prince charmant de cette dame se fendit d’un compliment aussi simple qu’il était sincère. Aya le saisit au vol, affichant un grand sourire qui ne souffrait pas de réponse inutile. Puis, se relevant lentement, la jeune fille fixa son regard dans celui de son compagnon et continua le travail qu’il avait entrepris. Déboutonnant son jean souillé de pluie et de boue, elle le fit glisser avec précaution sur ses jambes humides, l’abandonnant par terre tel un fardeau trop lourd à porter.

Gardant pour simple parure que son dernier vêtement, elle récupéra la serviette qui avait si bien accomplie son œuvre pour la passer sur des jambes qu’elle étendit une à une sur le rebord du lit sur lequel Saïl était toujours assis. Cela ne prit pas longtemps et, une fois sûre d’avoir suffisamment bien passé et repassé le morceau de tissu, elle abandonna la serviette sur le lit et répliqua, comme à la suite du compliment du jeune homme :

- Et bien égoïste.

Elle était en effet sèche et débarrassée de ces si embarrassants vêtements détrempés, mais Saïl était encore ruisselant. Revenant vers lui, en gravissant les infimes centimètres qui le séparaient d’elle, Aya se positionna juste devant lui, et lui vola la deuxième serviette, qui trônait encore sur ses genoux. Elle la déplia, et enjamba Saïl. Oui, elle l’enjamba. S’asseyant littéralement sur lui, elle posta ses jambes le long des siennes, les enroulant autour de ses mollets, ses rotules appuyant contre le cadre en bois du meuble sur lequel ils étaient installés. Toujours sans la moindre trace de honte ou de pudeur, alors même que sa poitrine s’étalait sans complexe, Aya reprit la douceur des gestes de son compagnon et la direction que ceux-ci avaient prise quelques instants plus tôt. Évinçant elle aussi ce haut qui l’empêchait de partager la chaleur qu’elle ressentait avec Saïl, Aya reproduit une pâle copie qui avait cependant le même atout de procurer un plaisir qu’elle espérait tout aussi intense. Ses petites mains marquaient la peau dévoilée de Saïl, tantôt effleurant, tantôt insistant, découvrant avec majesté ce corps si rayonnant, si exempt de la déchéance qu’on aurait pu prêter à ce drôle de couple trop vite formé.

Une fois le carcan ôté, Aya posa ses mains sur ce torse offert, pour sentir le contact d’une peau chaude malgré tout, aussi vivante que la sienne. Se saisissant de la serviette restante, elle la passa dans le dos de Saïl, couvrant le début de ses épaules. Résistant à l’envie de s’y blottir instantanément, elle commença par retrouver des lèvres qui lui avaient bien manquées, les cueillant avec un plaisir non dissimulé. Ce même baiser profond et superficiel à la fois se fit cependant plus insistant, et quand la jeune femme passa ses bras autour du cou de son compagnon, elle en profita pour laisser pointer timidement, comme une demande peu assurée, le bout d’une langue, celle-ci venant effleurer les deux minces lignes rosées qui trônaient sur le visage de Saïl. Plus entreprenante, avide de le sentir toujours plus proche, Aya restait néanmoins dans la simplicité et la lenteur, pour savourer chaque instant et apprécier la saveur de toutes ses décisions. Elle ne voulait surtout rien précipiter ni gâcher, vouant un culte au temps qui s’était étalé entre eux, en filant pourtant aussi vite qu’une étoile filante. Les doutes s’envolaient, seuls le plaisir et la tendresse demeuraient. Et bien qu'elle soit courtement vêtue, elle n'en avait que faire, se concentrant sur Saïl et rien que sur lui. Un baiser plein de sentiments et de tendresse, tandis que l'étreinte de ses jambes raffermissait inconsciemment sa prise.

Un soleil miniature avait élu domicile quelque part entre ses côtes, là où son cœur aurait du se trouver. Aya était heureuse, brûlant de ce sentiment exaltant et addictif.

Saïl Ursoë

Créature

Re : May be. [Reservé]

Réponse 17 mercredi 08 septembre 2010, 01:42:13

Parfois, la première fois est un instant magique, plein d’une espèce d’émerveillement issu de l’expérience à l’inexorable unicité qu’un homme et une femme partagent, chacun découvrant le corps d’un membre de l’autre sexe de manière inédite. Un tel charme est plus rare que les légendes veulent le laisser croire, tant de multiples choses peuvent gâcher ce moment, en entacher la pureté d’une telle manière que ce que l’on s’était représenté comme une sorte de nirvana n’en vient à consister en fait qu’en une triste caricature d’accouplement.
Car il arrive également, et hélas trop souvent, que la première fois vienne trop vite, qu’elle ait été mal préparée ou qu’elle se passe entre deux êtres qui ne vibrent pas à l’unisson des mêmes affects, ne résultant alors qu’en une terrible déception. C’est très généralement là le triste chant du cygne d’un couple qui, peu de temps après un tel flop, résout avec une affligeante facilité de ne plus se fréquenter, chacun n’emportant avec lui que d’amers regrets au lieu d’un souvenir à chérir.

Il faut bien le dire, le second scénario s’était produit en ce qui concernait Saïl, celui-ci de même que sa partenaire ne s’étant principalement laissés aller à un tel acte que par curiosité scientifique, ce qui avait donné une bien peu exaltante séance de sport de chambre dont chaque partie était ressortie déçue. Depuis ce jour, et jusqu’à relativement récemment, il en avait non pas conçu un dégoût des relations d’un tel ordre, mais une sorte de désabusement qui lui avait toujours fait trouver les prétentions à ce sujet bien exagérées.
Mais désormais, plus que jamais, les raisons de récits aussi mythiques lui apparaissaient comme le nez au milieu de la figure, alors que lui et Aya étaient si proches l’un de l’autre, autant physiquement que spirituellement, que la question de savoir si l’alchimie fonctionnait ne se posait même pas. Les émotions tremblantes et délicates, l’adoration respectueuse et sacrée, l’égarement doux et complice, l’ivresse totale des sens ; tout cela se manifestait de façon si surnaturellement puissante que ç’aurait pu en être effrayant sans la présence rassurante de sa dame. Telles les moitiés que la conception platonicienne de l’amour décrit, ils agissaient l’un envers l’autre avec une si grande douceur, une si belle harmonie, une si admirable symbiose qu’à les voir, on pouvait jurer que rien n’aurait pu les détacher.

Ah, voilà bien une image d’Epinal qui peut facilement agiter le visage des plus cyniques d’un sourire grinçant, mais le fait était qu’il aurait été impossible de nier qu’entre ces deux personnes,  tout fonctionnait avec une perfection absolument idyllique. La preuve en était que de lui à elle, le bonheur d’être en une telle compagnie se voyait sans cesse renvoyé comme par un effet de miroir, nourrissant de la sorte l’effet d’un cercle vertueux qui paraissait ne jamais devoir se briser. Respect et émerveillement existaient du côté du jeune homme, ce qui ne l’empêchait pas d’apprécier à leur juste valeur les charmes physiques de sa compagne qui le faisaient se sentir presque honteux en comparaison tant il se jugeait plat avec son corps de grand garçon aux longs bras que, dans ses mauvais jours, il aurait jugé difforme plutôt qu’original.
Ce fut donc avec un plaisir d’esthète certes pas platonique mais plein d’une admirative estime que Saïl la regarda continuer de se dévêtir, laissant glisser contre ses jambes son pantalon avec une adresse et une vivacité dignes d’une gazelle, exposant dans la pénombre intime le galbe à la juvénile délicatesse de ses cuisses. D’un mouvement leste, elle déposa sur le sol ce vêtement désormais superflu, s’exposant devant son galant dans le plus simple appareil, ne gardant comme trace de pudeur que le sous-vêtement qui lui restait et qui cachait ses parties intimes. Toujours ensorceleuse, toujours féerique elle était, s’exposant de la sorte dans toute sa magnificence dépourvue de réserve, privilège dont il avait en ce moment même l’exclusivité et dont il était bien conscient, le savourant avec une émotion qui lui étreignait la gorge de joie.

Se montrant aussi docile qu’elle l’avait été quand il s’était proposé de la sécher, il la laissa opérer lorsqu’elle prit possession de la seconde serviette, son tour étant venu de bénéficier des attentions de sa partenaire, de rester aussi tranquille qu’on peut l’être alors que la personne qui vous émeut tant vous met à nu. En venant à lui, Aya, dont la tristesse disparue lui avait toutefois laissée en vil souvenir une certaine mésestime d’elle-même, se fustigea à mi-voix, semblant se reprocher d’être à ses côtés en cette soirée.
Voulant la détromper, il ouvrit la bouche, mais la parole lui fut bien rapidement coupée quand elle s’installa littéralement sur lui, déposant sans façon sa croupe à peine vêtue sur ses genoux alors même que les parties de son corps nouvellement mises à découvert s’enroulaient autour de leurs semblables chez Saïl, tout comme l’aurait fait une dryade de lierre. S’il y avait eu le moindre motif de douter qu’il fût sous son emprise, leur posture présente aurait pu dissiper tout doute tant il était désormais plus que jamais le prisonnier consentant de l’envoûtante adolescente.
Voilà qui donna du fil à retordre au jeune homme par un effet qu’il va bien falloir expliquer, car si ce récit a pour intention d’être aussi joliment lyrique que possible, il a également pour prétention d’être sincère et fidèle. Ainsi, si prévenant, attentionné et doux que le gentil garçon pût être, il restait un représentant de la gent masculine, et donc, inutile de s’étendre sur la raison pour laquelle avoir une ravissante demoiselle en sous-vêtement tout contre lui le stimulait d’une manière qu’il s’efforçait en ce moment de contrecarrer de toute la force de sa volonté.

Difficile de rester de marbre alors que sa chemise se voyait défaite pour dévoiler son torse devant la belle brunette, laquelle s’affairait à sa tâche avec diligence, ses doigts fins et frais effleurant de temps à autre sa peau en une délicieuse torture. Néanmoins, se braquant obstinément afin de ne pas rompre le charme de leur situation, il parvint à ne rien laisser paraître de son trouble, ou tout du moins, à ne pas le laisser se manifester trop physiquement, pouvant par conséquent continuer d’apprécier la douceur de l’instant tandis que son sort suivait celui d’Aya.
C’est ainsi qu’il ne se retrouva plus qu’avec son pantalon toujours complètement trempé comme habit, le haut de son être se retrouvant pour sa part bichonné par sa compagne qui, contrairement à ce que son manque d’amour-propre l’avait fait crainte, ne parut nullement repoussée par ce qu’elle découvrit. Au contraire, avec une affectueuse précipitation, elle vint vers lui, posant ses mains sur le ventre de Saïl, la sensation des paumes tendres se faisant fortement agréable alors que sa respiration lui en faisant sans cesse découvrir le toucher sous un nouvel angle.

Mais à nouveau, l’adolescente ne s’embarrassa pas de cérémonies, et, lui passant la serviette autour du cou, elle fit venir ses lèvres contre les siennes, faisant ainsi à nouveau venir leurs deux corps à l’apex de la symbiose qui les unissait. Surpris dans un premier moment, il le fut encore plus lorsqu’il sentit un petit bout de chair moite venir se blottir contre sa bouche, invitation timide mais résolue à laquelle il eut bien heureusement vite le réflexe de répondre, faisant venir sa propre langue vers celle de celle de la jeune fille pour un contact plus rapproché que jamais.
Il a été empiriquement prouvé que les échanges salivaires renforcent la sensation de bien-être envers un couple, et même si celui concerné n’en avait de toute évidence pas besoin, cette manifestation de passion n’en fut pas moins d’une appréciabilité exaltante. Réagissant sans même avoir à réfléchir au comportement qu’il devait adopter, il ajouta alors l’étreinte de ses bras à celle des jambes d’Aya, enserrant avec toute son ardente dévotion son enveloppe charnelle si désirable.

Oh, il pouvait en être sûr, il n’avait jamais rien vécu de tel, cet instant où rien ne pourrait paraître être plus vrai, de plus estimable, de plus important que l’objet de ses sentiments, où la Terre a l’air de s’arrêter de tourner comme pour mieux laisser chacun profiter pleinement de la chimie qui opère à son plein régime. Et tandis qu’il la prenait fort contre lui, que leurs poitrines s’écrasaient tendrement l’une contre l’autre, que leurs cœurs désormais si étroitement liés semblaient battre à l’unisson, la situation se fit étonnamment proche d’une que Saïl s’était vue narrer.

Cette histoire n’était autre que celle de la déclaration de l’amour de ses parents, et s’était déroulée ainsi : c’était une soirée dansante, et rien dans l’atmosphère simple, dans le brouhaha ambiant ou même dans le gai enthousiasme présent n’aurait pu laisser présager de romantisme. Pourtant, c’était avec une douce complicité que les deux dansaient, chacun collé à son partenaire, et, comme lui était naturellement de fort haute taille, sa tête à elle lui arrivait au niveau de son torse, si bien que son oreille était collée contre sa poitrine. La chorégraphie se poursuivait paisiblement, et sans prévenir, alors que les pas s’enchaînaient avec harmonie, il se pencha vers elle et lui murmura : « Tu entends mon cœur ? C’est toi qui le fais battre. »

Ce souvenir ne manqua pas de repasser fugacement dans l’esprit du jeune homme, et l’échange de leurs baisers enfiévrés continuait, emplissant la petite pièce de légers bruits de succion, pendant que les pensées circulaient dans sa tête. Ce fut au beau milieu de la fougue pleine de passion réciproque de cet acte amoureux qu’il se rendit compte que de toute évidence, il l’était. La certitude pouvait paraître encore plus grotesque et saugrenue que ne l’avaient été leurs agissements jusqu’ici, et pourtant, elle s’imposait à lui avec une telle force qu’il ne lui serait pas venu à l’idée de la remettre en cause.
Après tout, si, envers et contre tout ce que les conventions dictaient, ils avaient pu faire connaissance, s’apprécier puis se sentir si pénétrés d’affection, n’était-ce pas un signe qu’ils étaient faits l’un pour l’autre, ainsi que le sentiment de complétude qui les unissait l’indiquait ? En vérité, en dehors de ce qui était scientifiquement prouvable, Saïl n’était pas sûr de grand-chose, mais en l’occurrence, en ce moment si incroyablement unique et parfait, toute trace de doute avait déserté son âme. Pour lui, même l’exaltation hormonale issue de tels actes ne pouvait suffire à expliquer n’eusse été qu’une parcelle de l’impression d’irréductible attachement qui avait commencé à s’emparer de lui depuis le début de cette soirée pour désormais gouverner son cœur.

Il devait lui dire là, pendant qu’ils n’avaient pas encore commis ce qui aurait pu être l’irréparable : s’il lui révélait cette précieuse vérité après coup, et qu’il s’avérait que pour elle, cela n’était pas réciproque, il regretterait de façon mortifiante de ne pas avoir osé avant. Mais dès à présent, il pouvait le lui dire, il pouvait risquer la présence de celle qu’il tenait dans ses bras avec de si suaves affects qui s’épanouissaient toujours en lui, il pouvait s’afficher dans toute la vérité de ce qu’il éprouvait à son égard.
S’il tenait vraiment à elle autant qu’il en était certain, alors oui, il était de son devoir de se confesser immédiatement ; il le sentait jusqu’au plus profond de ses entrailles, c’était en quelque sorte maintenant ou jamais. L’irrémédiable, l’irrévocable étreinte charnelle qui s’annonçait indéniablement allait venir, et s’il attendait lâchement la fin de leurs ébats pour se confier à elle, il s’aventurerait à les briser en mille morceaux tous les deux, ou en tout cas lui, tant il se sentirait lié à elle. Si tout devait s’achever avant d’avoir réellement débuté, alors lui s’efforcerait d’encaisser le choc comme l’imbécile émotif qu’il se serait avéré avoir été, et elle, du haut de sa jeunesse, pourrait passer à autre chose, l’oubliant pour son bien, pour ne pas être hanté par ce fantôme trop tendre.

Tandis même que ces réflexions défilaient en lui, ses baisers n’avaient pas cessé de répondre à ceux de sa partenaire pour continuer ensuite en ne quittant la bouche de l’adolescente que pour courir le long de sa gorge, apposant encore et encore ses lèvres avec passion sur cette chair chérie dont l’odeur le rendait à moitié extatique. Doucement, ne voulant jamais de la vie lui jeter ses sentiments au visage comme on jette un ballon à un enfant, il remonta au niveau de son oreille, se préparant aux mots qu’il allait prononcer.
Saïl, Saïl qui n’avait toujours jamais voulu que le bonheur des autres sans jamais rien demander en échange, sans jamais même exiger de reconnaissance pour toute la dévotion dont il avait su faire preuve, s’autorisa en cet instant à être égoïste. Prenant son courage à deux mains, il fit taire la boule d’appréhension qui lui nouait l’estomac, et, dans un souffle, il glissa à Aya ce qui était devenu en même temps son plus précieux secret et la plus criante des évidences :

« Je t’aime. »
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Aya Murakami

Humain(e)

Re : May be. [Reservé]

Réponse 18 mercredi 08 septembre 2010, 21:18:07

Si Aya, dans un moment comme celui-là, ne perdait pas toute capacité réflexive, elle n’en était pas moins très loin des considérations aussi simples que les réactions physiques dans ce genre de situation. Elle ne remarqua donc même pas les efforts de Saïl pour se contenir. Bien trop prise dans un enchevêtrement de jambes et de lèvres, elle ne prêtait guère attention à son propre désir qui montait pourtant en flèche, incendiant le moindre recoin de son corps lorsque le jeune homme lui rendit son baiser. On ne se rend pas suffisamment compte de la portée de deux bouches qui s’apprivoisent et s’accompagnent, de la sensualité qu’elles dégagent dans un naturel mais pourtant si complexe ballet d’émotions et de réflexes inconditionnés. Il est si facile, et pourtant si dur de s’embrasser. Le moment qui précède l’acte a toujours quelque chose de religieusement sacré, d’angoissant et de frustrant, tandis que la libération est souvent vécue comme un soulagement empli de passion non contrôlée, les pieds perdant quelque peu le contact du sol.

C’est dans ce schéma là que la jeune femme se trouvait à présent, complètement déroutée par la simple chaleur de la langue de Saïl contre la sienne. Sentir ce corps dans sa plus complète intimité -un baiser aussi lourd de sens ayant bien plus d'impact que de nombreux coups d’un soir-, caresser enfin l’objet de sa convoitise, tout en serrant dans ses bras ces épaules, ce cou, tout ce qui lui passait sous les doigts. La peau se rencontrait enfin, les cellules de leurs corps semblaient se fondre les unes dans les autres, recréant ainsi un nouveau eux, un nouveau tableau sensiblement similaire, mais totalement différent à la fois. Aya ressentait avec plus de force que jamais chaque geste de son compagnon, éprouvant une absence ou un rapprochement par un frisson ou un soupir, sentant leurs épidermes se froisser dans un contact impérieux et pressant. Voulant rester dans cette lenteur magique et irréelle, Aya sombrait pourtant de plus en plus vers la passion qui guidait ses gestes, en l’occurrence son baiser qui se faisait plus insistant à chaque seconde. Conserver une part de distance et de patience permettait de prendre du recul sur les évènements et les intellectualiser, afin de ne pas fléchir à la beauté du moment, ressentir la joie procurée par chaque instant passé en compagnie de Saïl. Et surtout, se convaincre de ne pas faire de bêtise, apprécier toujours plus sa présence éclairée en ces murs.

Pourtant, et en dépit de toute la tendresse qui naissait dans le cœur d’Aya, l’adolescente qu’elle était n’aurait jamais pu appréhender la suite, qui s’imposait pourtant de plus en plus dans l’esprit de son partenaire. Elle se contentait de vivre l’instant, le moment, en y mettant autant de vie et de sentiments qu’elle pouvait. Se concentrer sur ses lèvres qui se moulaient dans d’autres, épousant parfaitement les courbes d’un visage fait pour la recevoir. Sublimer la sensation d’une peau contre la sienne, la réchauffant définitivement, jouant avec sa poitrine et les creux qu’elle laissait derrière elle. Puis, se déchirer à la fin du baiser, et renaître sur le coup d’autres assauts tout aussi délicieux, dans un chemin d’ores et déjà connu de Saïl. Sa gorge fut ainsi aussitôt la cible de douces attaques, qui laissaient toutes une délicate marque invisible, qui s’imprimait d’avantage dans le cœur de la jeune fille que sur la peau délicate de son cou. Pour mieux offrir à Saïl le loisir de promener son visage dans les détours de la naissance de son buste, Aya inclina légèrement la tête en arrière, et se figea lorsque son compagnon prit la parole.

Elle crut tout d’abord avoir mal entendu, puis avoir rêvé. Mais toutes les réactions qui s’enchaînèrent sous son crâne le firent si rapidement, que très peu de temps ne s’écoula au final. Aya, encore une fois, eut presque envie de faire répéter à Saïl sa déclaration aussi soudaine qu’inattendue. Il l’avait pourtant apportée avec moult précautions, et l’on sentait bien que ces simples petits mots revêtaient pour lui une signification profonde et sincère. Mais comment exploser de joie quand on doute, à se demander s’il est normal, malgré leur profonde et entière cohésion évidente, d’avouer son amour à une fille trop jeune rencontrée dans un bar. S’il était sérieux, peut être s’attachait-il trop rapidement. S’il ne l’était pas, c’était une diversion bien cruelle. Et, malgré la communion intense et pénétrante qu’il existait entre elle et lui, la jeune fille était bien incapable de réaliser, de se décider pour l’un ou l’autre. Existait-il une troisième solution ? Un échappatoire, qui lui permettrait de ne pas juger Saïl, de ne pas lui coller une étiquette trop réductrice, sans chercher à comprendre ce qu’il avait voulu faire passer …

Elle-même étant sans doute trop perturbée en cet instant pour se rendre compte qu’elle était tombée sur un véritable partenaire particulier, et que le carcan de la norme et des convenances ou autres mauvaises habitudes de soirée s’effaçaient au contact de cet homme, encore imprévisible malgré le début de connaissances qu’Aya engrangeait sur lui. Certes, l’on peut aisément ne faire qu’un avec un inconnu, mais alors l’expression est mal choisie, et c’est d’avantage faire deux en cherchant maladroitement à s’atteindre. L’adolescente avait pourtant pensé ce soir être sur la même longueur d’ondes que Saïl, mais cette soudaine affirmation, qu’il portait comme un truisme aussi simple qu’abscons, atteignait difficilement les affres de son esprit. Comment était-elle supposée réagir ? Lui rendre la pareille ? Bien vaniteux et déplacé, alors qu’elle ne ressentait qu’une angoisse grandissante. Le stopper net, pour lui éviter une désillusion ? Plus sage. Sans doute aurait-elle du l’empêcher d’avoir à regretter ces mots en l’empêchant de s’impliquer plus avant. Aya aurait pu prendre les rênes de ses sentiments pour les brider, se rhabiller et s’excuser. Mais il n’en était pas question. Tout simplement parce qu’elle n’avait pas peur.

On tremble toujours un peu en entendant ces mots tant rêvés pour la première fois. Surtout ici, étant donné que la jeune fille qui reçut ce cadeau surprenant vivait dans un conte de fée où jamais le prince ne prononçait de telles paroles, alambiquant tout pour fuir une réalité qui n’était pas la sienne. N’ayant jamais eu le courage de le dire depuis l’incident de sa jeunesse plus reculée, Aya n’y songeait plus. Trouver quelqu’un qui la respecterait et se contenterait de sa présence voulait déjà signifier beaucoup pour elle. Elle ne demandait pas à ce qu’on l’aime, n’osait pas exiger une passion comme elle la souhaitait, et comme elle était en train de la vivre, peut être même de la gâcher. Cela relevait clairement du fantasme, pas d’une quelconque réalité, même avec un peu de chance pour parsemer le tout. Saïl était soit fou soit trop sensible, aucune autre solution ne venait à l’esprit de la jeune fille, qui n’avait toujours pas réagi, laissant ses émotions se heurter sous sa tignasse chocolat. Comment pouvait-elle répondre sans le froisser et sans employer ce mot aussi fort, qui pour elle était un mythe totalement inaccessible ? C’est avec bien peu d’assurance qu’elle se blottit contre lui, trouvant une place contre son cœur. Posant sa petite tête sur ce large point d’appui, elle y dressa une succession de petits baisers, pour se laisser le temps de remettre en place ce qu’elle ressentait réellement. Dur dur, quand on n’a que dix sept ans et aucune expérience dans le monde de l’amour comme le concevait Saïl.

- Merci.

Pause. Ça n’allait pas. Ce n’était pas ça, ce n’était pas du tout ça. Elle ne voulait pas le remercier, comme aurait pu le faire une fille gênée et embarrassée de ce si lourd fardeau. Elle voulait lui exprimer sa gratitude d’avoir osé, d’avoir prononcé les mots qu’elle avait toute sa vie espéré en secret d’entendre. Le couvrir de remerciements pour son attitude si touchante, pour les sentiments qu’il faisait naitre en elle sans qu’elle parvienne à les mettre en mots, pour les frissons que lui procurait une déclaration si belle et unique. L’ensevelir sous la tendresse qui fleurissait là où il posait le regard, lui faire comprendre. Lui transmettre qu’elle ne lui répondait pas, non pas par manque de sentiments ou par mécontentement. Tout simplement parce que ce genre d’idées ne pouvaient que s’épanouir dans sa tête, et qu’elles se désintégreraient dans sa bouche avant même d’avoir délivré leur message. Comme si la réalité était un puissant corrosif à ses rêves, tel le pesant réveil, au crépuscule d’un songe. Elle n’en était pas capable, mais ne voulait pas qu’il se trompe.

En mettant toute ses inclinations envers lui dans ses yeux brillants, Aya fixa ses prunelles dans les deux océans sombres de Saïl. Longuement, elle le prit en captivité, sans détourner le regard. Il fallait qu’il comprenne que cela n’était pas tout, que son cœur s’exprimait de manière autonome, en totale inadéquation de ses lèvres. Il l’avait jusque là surprise, magnifiée en répondant à ses moindres pensées, aussi devait-il absolument saisir ce soir, maintenant, l’impact de ce regard. Elle n’en pouvait pas plus. Puis, tout en gardant la dose pharamineuse d’émotions dans chacun de ses gestes, elle vint de nouveau placer un baiser sur les lèvres qui venaient de laisser échapper une partie de son cœur, qui avaient percées à jour une attente muette à laquelle Aya ne pouvait même pas se résoudre. Un unique claquement de lèvres, durant lequel la jeune femme positionna ses mains sur les lourdes épaules de son compagnon et, appuyant avec conviction, l’entraina dans une douce chute que le moelleux du lit amortit sans problème. Se penchant sur lui, elle couvrit son visage des plus tendres attentions en picorant chaque recoin de peau qui s’offrait à elle. Puis, affichant enfin ce grand sourire qui se devait d’apparaitre, elle compléta son petit manège d’une simple phrase.

- Tu comprends. Pas une question, une affirmation teintée d’une dose infime d’appréhension. Patience.

Seule recommandation possible, qui justifiait à la fois tout et rien, si Saïl décidait de ne pas comprendre et de s’échapper, blessé avec autant de justesse qu’il pouvait l’être. Un jour, peut être. Quand elle serait guérie de ces mots. Quand elle pourrait les lui dire autrement qu'avec les yeux.
« Modifié: mercredi 08 septembre 2010, 21:28:21 par Aya Murakami »

Saïl Ursoë

Créature

Re : May be. [Reservé]

Réponse 19 jeudi 09 septembre 2010, 04:24:40

Ces simples mots qu’il avait prononcés, cette petite phrase d’apparence si anodine et qui pourtant renferme certainement un sens plus grand et plus fort que n’importe quelle formule dans n’importe quelle langue… C’est qu’il ne faut pas en négliger le pouvoir : à l’énonciation de ces paroles, le meilleur comme le pire avait pu se produire, des couples se formant pour une fantastique éternité aussi bien que des royaumes entiers se livrant sous la jalousie de leurs monarques une guerre sans merci.
Oui, on ne badine pas avec l’amour, et ainsi, comme on manie avec précaution une arme à la puissance formidable, il convient de ne faire usage d’un « Je t’aime » que pour les cas les plus exceptionnels, tant ces trois syllabes sont à elles seules un trésor unique. Elles ont traversé les siècles sans perdre de leur immortelle vigueur, et encore maintenant, lorsqu’elles émanent de la bouche de quelqu’un, on pourrait croire à la résurrection de quelque incantation magique d’autant plus terrible qu’elle parait si innocente en prenant aussi peu de place.
Hélas, de nos jours, de la même manière que le glamour d’anciens rituels s’est terni, ces si doux phonèmes se sont vus tant et tant de fois bafoués dans leur caractère sacré qu’aujourd’hui, nombreux sont ceux qui ne veulent plus y croire. C’est que les portes qu’ils ouvrent béent sur une promesse si vertigineuse qu’elle peut bien facilement en paraître trop belle pour être vraie, forçant par conséquent plus d’un visage à détourner en hâte les yeux sous la crainte d’une infâme déception à venir.

Et pourtant, Saïl avait relâché cette entité éternelle de sa cage, prononçant l’irrévocable mot de passe qui en avait déverrouillé la cage ; et désormais, dardant son faciès léonin et battant de ses ailes de phénix, elle attendait, muette et redoutable. Sous le souffle de vent à couper le souffle qu’une telle manifestation suscita, le jeune homme en eut un instant de frémissement, mais vacillant sans se mettre à s’écrouler, il rallia à lui toute son honnêteté et se tint prêt à accuser le choc.
Il avait fait ce qu’il avait fait, en toute conscience de cause, et à présent, il ne lui restait plus qu’à affronter les conséquences de ses actes, quelles qu’elles fussent, en homme d’honneur. Peut-être avait-il commis une grosse erreur, mais il sentait au fond de lui que, malgré toute l’étourderie apparente de son initiative, c’était une de ces erreurs potentielles que l’on doit faire, de la même façon que si l’on veut se mettre à marcher, il faut bien commencer par se lever au risque de chuter. Le risque est grand, la souffrance possible immense, mais il y a tant à en espérer que même face à l’adversité la plus cruelle, il faut savoir ne pas hésiter et s’armer de tout son courage pour foncer ; aveuglement, tout comme l’amour l’est.

Le sieur Ursoë n’avait peut-être pour lui ni terres, ni richesses, ni hauts faits, mais il restait en dépit de cette humilité de moyens une personne de parole, aussi se tint-il contre Aya sans trembler ni laisser paraître dans la moindre parcelle de son être quoi que ce fût qui aurait pu assimiler sa déclaration à un malheureux débordement de passion. Oh, bien sûr, il avait l’âme en ébullition dans l’attente de la réponse de l’adolescente, tant un simple mot trop dur de sa part aurait pu le briser, mais il devait plus qu’en une quelconque autre occasion se comporter avec bravoure.
Voilà un tableau : un chevalier, son cœur volé par une nymphe des bois, suit celle-ci jusqu’en sa demeure pour qu’ils aillent s’y ébattre, mais alors même que le gentilhomme se défait de son armure pour s’allonger aux côtés de sa belle, il ne peut résister au désir de lui faire part de la pureté de ses sentiments. La créature enchantée, pétrifiée par l’audace du mortel, se tient coite, ses yeux de jade fixant son galant avec une incrédule confusion, son esprit oscillant alors entre accepter le paladin comme son compagnon ou le renvoyer à jamais de sa forêt.

De son côté, le preux personnage reste sans courber l’échine, droit, digne et fier, ne pouvant concevoir de revenir sur la véracité de ses dires, se montrant à la hauteur de la tendre franchise qui gouverne es actes. Lorsque sa dame à la brune chevelure vient timidement à sa rencontre, ne sachant pour quel parti se décider, il la recueille affectueusement sans se faire prier, désireux non pas de la mettre dos au mur, mais de la rassurer autant que possible. Douce sensation que celle de cette bouche à la suave élasticité légère qui, quémandant de la sorte le temps de prendre sa décision, semble s’efforcer de relaxer un peu cette poitrine tendue sous l’expectative.
Et de ce même organe dont les louanges les plus galvanisantes comme les blasphèmes les plus horribles peuvent émaner, il sortit un petit son modeste et obligé, presque intimidé, dont la rumeur plongea momentanément Saïl dans la confusion. Merci ? « Merci, mais… » ? Merci de te révéler ainsi à moi, et de répondre par là à tout ce que j’aurais pu attendre de ta part ? Les différentes possibilités défilaient dans son esprit à la manière d’un cortège de diablotins harceleurs, la dryade ayant à ce point déstabilisé l’intrépide qu’elle paraissait lui avoir à dessein jeté quelque sort pour le neutraliser.

Mais rassure toi, noble garçon, et cesse de te tourmenter, car voilà ta princesse qui déjà, se fait plus loquace, ayant manifestement résolu de s’expliquer non pas par la voix, mais par le regard, ses yeux sylvestres plongeant dans les tiens pour divulguer un message avec plus d’éloquence qu’une oraison ne serait capable d’en faire montre. Ô vous, iris verdoyants, âme du monde capturée par les deux plus précieuses émeraudes qui soient, vos propos n’ont pas à être audibles pour être compris. Inutile par conséquent de chercher à rendre par écrit ce que les mots ne sont que trop impuissants à décrire ; plume trop rigide, repose toi un peu tandis que de regard à regard, le cœur communique, exprimant en un instant ce que des discours élaborés pendant des éons entiers ne sauraient balbutier.
Chevalier, apaise donc en ton être la tourmente qui l’habite, et ainsi que tu délaisses pour l’heure ton écusson, abandonne pour l’occasion les paroles, les déclarations, les serments. Ne vois-tu pas que par gestes, ton amante féerique tient un langage bien supérieur au tien ? Ne fais pas front, abandonne toi à l’ensorcelant charme ambiant, et si dans toute ta vie, tu ne dois passer l’éponge que sur une seule faiblesse, sois permissif envers celle-là, et celle-là uniquement. Les nymphes, ces entités immortelles dont le caractère est pourtant si juvénile, ne peuvent décemment pas prendre une décision en si peu de temps, alors sois patient, sois prévenant, sois galant, et le jour viendra où ce que tu as dit trouvera sa réponse.

Docilement, Saïl profita donc du baiser dont il lui était fait don, mettant de côté ses doutes pour savourer pleinement ce moment de voluptés charnelles ainsi qu’Aya l’avait muettement souhaité. Sans opposer de résistance, il se laissa renverser par cette adolescente à la carrure si moindre à la sienne que la vision en devenait d’une complicité presque cocasse, le jeune homme ayant alors l’air d’un ours grognon se faisant adoucir.
Et de part et d’autre, le remède fait d’une véritable infusion de bisous fonctionna manifestement de la plus efficace des façons, car si lui reprit cette gaieté et cette nonchalance propice aux ébats en couple, elle se fit à nouveau divinement mutine. Son sourire de lutine aurait pu avaler tout rond même les soucis les plus terribles, et en écho, le visage de son partenaire se nimba sans détour possible de la même expression joyeuse en une réplique qui, là aussi, se passait de mots.

Oui, il comprenait ; il comprenait qu’il avait sans doute été trop pressant, que ces choses là ne peuvent se faire d’un claquement de doigts, et que par conséquent, il lui faudrait faire preuve d’une durable fidélité qu’il se résolut irrévocablement à observer. Oui, il saurait être patient, contre vents et marées, et en attendant le jour où le sceau sur son cœur mal assuré se détacherait afin de le laisser parler sans détours, il serait toujours là pour elle, inconditionnellement.
Mais pour l’heure, l’occasion se prêtait à quelque chose d’autrement moins saint, tous les ingrédients s’étant désormais retrouvés réunis pour une soirée de la tendresse la plus étroitement rapprochée qui pût être. Après les initiatives si fougueuses de la demoiselle, c’était maintenant à son tour d’agir, et il commença par lui rendre la pareille, soudant ses lèvres aux siennes en un geste plus décidé que jamais ; un geste qui ne laissait entrer en compte nulle inquiétude, nulle rancœur, nulle insatisfaction. De la même manière que, plutôt que de paniquer, elle avait su garder la juste mesure des choses, il saurait se montrer parfaitement conscient de leur situation, ou plutôt en profiter pleinement, reprenant ainsi leurs attouchements interrompus en mettant dans ce baiser toute son affection pour elle.

Cependant, avant tout, pour que de telles manifestations reprissent comme elles le devaient, ils devaient d’abord être dans la même posture, aussi Saïl se déroba-t-il doucement à Aya pour se remettre debout à côté du lit. Sans avoir honte de son corps, il n’en avait jamais été fier, de là une certaine pudeur de laquelle il passa en cet instant outre, se débarrassant une bonne fois pour toutes de son pantalon détrempé pour ne plus être qu’en un caleçon vêtu duquel il revint au contact de sa partenaire. Pour dire la vérité en toute objectivité, de la même manière que son comportement en règle générale, l’acte n’avait pas eu l’intention d’être érotique ou même sensuel, reflétant simplement la confiance qu’il avait envers l’adolescente.
Toutefois, séance tenante, il ne tarda pas à se rattraper, se laissant glisser sur les draps du lit pour revenir tout contre sa belle qu’il embrassa à nouveau ; une fois, puis encore une, puis encore et encore sans compter, n’éprouvant à chaque fois aucune lassitude à renouveler cet exaltant ballet buccal. Probablement, un homme qui aurait eu la chance incommensurable de se retrouver en compagnie de cette jeune fille si désirable sur tant de points ne se serait à ce stade pas contenté de cela, mais en l’occurrence, puisqu’ils avaient toute la nuit devant eux, pourquoi se presser ?

Pour autant, il n’en resta pas à cela, voulant définitivement rassurer la demoiselle en lui montrant que les sentiments qu’il avait à son égard ne le feraient assurément pas s’arrêter aux baisers. Ainsi, comme pour la soutenir au cœur de leurs ébats amoureux et les rapprocher plus que jamais, il apposa sa paume sur le bas de son dos, le cajolant un moment du bout des doigts avant de remonter lentement vers le haut, parcourant de la sorte toute la cambrure de son échine d’une longue et tendre caresse. Quant à son autre main, ce fut délicatement, avec la même légèreté que s’il s’était affairé à cueillir un fruit précieux, qu’il la déposa sur le sein gauche de la brunette, sans rien de libidineux ou de pervers, son geste ne consistant qu’en une manifestation d’harmonie et de douceur. Leur intimité à tous les deux aurait tout le temps de se dévoiler fragment par fragment, alors inutile de risquer de brusquer les choses, retirer peu à peu les voiles de mystère qui environnaient Aya promettant d’être bien plus plaisant que de rechercher tout de suite la jouissance immédiate et brutale.
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Aya Murakami

Humain(e)

Re : May be. [Reservé]

Réponse 20 jeudi 09 septembre 2010, 18:34:45

Et la jeune fille s’insurgeait. Contre ces méandres qu’empruntait le fleuve de sa petite existence. Contre elle-même. Contre ces étreintes qui pourraient être plus belles. Contre elle-même. Contre cette assurance qu’elle n’avait pas, cette part d’elle qui s’ouvrait sur l’improbable. Contre elle-même. Une fin à cette colère s’imposait, évidemment. Qu’il s’agît d’une solution ou non, ils devaient tous deux aboutir à une conclusion saine et évidente, pour voir ce début de quelque chose d’un œil nouveau. Et s’il fallait que cela passât dans un mensonge, alors le dirait. Ça lui allait. Tant que rien ne se brisait, tout lui allait. Mais ce dénouement là, qu’Aya se proposait à l’instant, elle n’en voulait pas. L’imaginer, oui. Le mettre en œuvre, jamais. Elle le refusa instantanément, presque aussi vite que le cours filandreux que son esprit suivait. Parce qu’elle ne pouvait pas accepter de le voir prendre le large, de le laisser mettre les voiles pour un ailleurs. Et parce qu’elle ne pouvait pas non plus adhérer à ce faux consensus, qu’elle adopterait pourtant très certainement s’il ne comprenait pas. Elle avait besoin de faire partie de ce ici, de ce maintenant, mais en toute connaissance de cause.

Il fallait évidemment être totalement fou ou bien exceptionnel pour entrer dans le partage qu’Aya offrait à Saïl, pour saisir la portée des mots qui ne franchissaient pas ses lèvres, pour les entendre malgré le vacarme de son cœur. Eh bien, minute après minute, la jeune fille se rendait compte dans quelle dimension elle avait eu raison de suivre cet homme hors du bar. Au lieu de lui demander de s’occuper de ses affaires comme elle l’aurait très certainement suggéré en temps normal. Merci l’alcool, merci les idées noires. Sans cela, elle ne serait pas là, à saisir toute la magnificence de ce prince camouflé, de cette révélation occultée derrière une apparence un peu pataude et brave. Qui eut cru que tant de finesse et de délicatesse reposaient dans des yeux sobres, derrière un visage compatissant mais qui restait banal ? A présent, toute la particularité et le rayonnement de son partenaire éblouissaient Aya, qui ne pouvait rêver mieux. Il était là, il venait de lui murmurer religieusement une formule magique que toute petite fille exaltent d’entendre un jour, et comprenait même sa réponse étrange et peu appropriée.

Car, s’il parut légèrement déstabilisé par sa gratitude, il répondit merveilleusement à son baiser, et se laissa fondre sur le lit qui les recevait à présent tout deux, sans se formaliser d’une réponse aussi vague et peu assurée. Le reflet parfait de son propre sourire sur le visage du jeune homme finit de lui confirmer qu’il ne faisait pas semblant d’avoir intégré son message, afin de continuer la soirée en bonne et due forme. Le chevalier servant avait saisi la moindre pensée de sa dame, et s’y pliait sans négocier ou regretter. Malgré les difficultés et les contraignantes « égoïsteries », il était là, fidèle au poste. Ah, Saïl. Si tu savais … Si tu savais combien Aya te sent, te respire, te vit. Si tu savais comme elle t’aime, comme elle appréhende en cette nuit le coup de foudre tant romancé. Si tu savais tout ce qu’elle ne savait pas … Mais l’heure n’est pas aux suppositions, et pour l’instant Aya n’a toujours pas réalisé que cette chaleur inconnue, que cette tension délicieusement palpable était bien ce qu’elle pensait ne pas être. Les étoiles dans les yeux, le souffle court, l’admiration et la volonté d’être toujours plus proche. Mais c’était comme si la jeune fille croyait en une sorte d’état intermédiaire, qui n’aurait d’existence que pour elle, alors qu’elle camouflait le mot amour sous d’autres représentations factices. Naïve jeune fille ignorante.

Seulement, pour sa défense, l’on pourrait lui accorder le peu de possibilités de réflexion dans une telle ordonnance des faits. L’étreinte des bouches débordantes d’empressement ne lui accordaient pas un délai suffisant pour penser à autre chose qu’à une prochaine union. Et la suite ne lui en laissa pas plus le loisir. Saïl s’éloigna, bien que sa compagne ait du mal à le laisser filer entre ses doigts. Il le fit pourtant sans peine, tant leur différence de corpulence était évidente. Se relevant, il la subjugua sans le savoir, se dénudant comme elle l’avait fait auparavant : sans aucune volonté d’être autre chose que ce qu’il était, ce qui n’en était que plus beau. Sans artifice, sans tentative de paraitre aguichant. Nul n’en était besoin ici, puisque la simple présence du jeune homme dans la pièce étayait chaque sens d’Aya, qui ne se serait quant à elle rhabillée pour rien au monde. Elle posa un regard franc sur ce corps qui lui était offert avec tout autant de sobriété que possible, rendant l’instant encore plus apprécié.

Mais l’on est rien sans ce cœur qui vous manque, et Aya ne se sentit bien que lorsque Saïl revint, pour venir se coller à elle dans un ultime baiser, qui se répétait à l’infini. Elle sentait les désirs de deux êtres monter inexorablement, dans une même ascension délicieusement maîtrisée. Une main vint se glisser le long de sa peau, épousant la naissance d’une croupe somme toute suffisamment rebondie pour arrêter la descente du jeune homme, le faisant remonter prestement pour cajoler avec application son dos, totalement offert. Puis, c’est sans étonnement qu’Aya sentit une autre paume, plus délicate mais aussi plus aventureuse, sur sa poitrine. Elle devinait Saïl timide et peu enclin à ce genre de contact, pourtant ils étaient tous deux embarqués dans un tel ballet de simplicité et d’authenticité que la barrière de la gêne n’était plus qu’un lointain souvenir. C’est avec plaisir qu’elle accueilli donc l’aventurière en son sein, tel est le cas de le dire !

Mais ça, elle ne le saisissait toujours pas. Concevoir qu’il veuille d’elle et de la noirceur qu’elle lui avait laissé entrevoir là où lui irradiait de lumière … Aya n’intégrait pas, ne pouvait pas intégrer de telles réalités. Et chaque baiser de sa part était un éveil précoce qui surgissait selon elle sur une autre partie du mythe. Mais il l’embrassa tant de fois que son esprit ne put bien longtemps tenir la barrière la séparant de sa conscience. Tout lui passait tellement au dessus, et pourtant l’adolescente réalisait pas à pas que Saïl n’était pas là par hasard. D’autant plus qu’il était suffisamment posé pour ne pas succomber au simple délice de la chair. Et qu’il était impossible de mentir sur ces trois mots. Trois mots qu’elle ne cessait de ressasser, ce leitmotiv, cette ritournelle aux accents d’espoir. Aussi le répétait-elle encore, tandis qu’elle se plaquait contre lui à l’étouffer, qu’elle vouait à cette étreinte des forces qu’elle ne possédait pas. Il avait prononcé la formule magique pour combattre ce qui rongeait ses nuits et glaçait ses journées. Aya voulait qu’il l’écoutât, si elle avait eu le courage de parler. Entendre ne lui suffisait plus, elle voulait qu’il sache. Elle voulait qu’il lui réponde d’un baiser, encore et toujours. Tant qu’il savait ce qu’elle cachait en son cœur. S’approchant de son oreille, ce fut sur le même ton de confession qu’elle lui dit enfin :

- Fais-moi l’amour.

Un « Faisons » plutôt qu’un « Fais-moi », mais ces termes n’étaient pas impérieusement catégoriques, même s’ils ne souffraient d’aucune répartie. Ils ne revêtaient pas non plus une connotation réductrice, bien au contraire. C’était les plus beaux mots qu’auraient pu prononcer Aya. Et surtout, ils étaient avant tout une réponse à ses mots d’avenir, une promesse. Elle qui n’avait jamais fait l’amour avec un homme, se contentant de partager leur couche. Partager. Un mot qui engageait forcément deux personnes. Or, en cette soirée si particulière, Aya ne se dissociait pas de Saïl. Du moins pas émotionnellement parlant. Et physiquement, elle tentait d’y remédier. Écrasant avec douceur sous l’oreille de son partenaire les lèvres qui venaient de lancer tout son cœur en trois autres mots, bien différents et pourtant si semblables à ceux de Saïl, la jeune fille passa ses bras sous les épaules de son partenaire, pour l’attirer à lui toujours plus. Passant une jambe par-dessus les sienne, venant caresser de sa menue cheville toute la peau qui lui était donné d’atteindre, remontant le long de cette chair enfin mise à nue. Pendant ce temps, ses menottes le découvraient avec une grande application et quelques touches de maladresse, celle-là même qui rime avec passion, lorsqu’elle se fait trop forte. C’est presque en tremblant de retenue qu’elle s’aventura à parcourir toute la face antérieure de ce corps contre le sien, promenant sa paume sans s’arrêter véritablement nulle part, et sans rebrousser chemin au bas du dos. Glissante, insistante, Aya se faisait d’ores et déjà plus impatiente, moins romantique. Que voulez vous, il y a des choses qui n’attendent pas, et comme elles sont tout aussi belles que les sentiments qui les accompagnent, pourquoi s’en cacher ?

Saïl Ursoë

Créature

Re : May be. [Reservé]

Réponse 21 vendredi 10 septembre 2010, 17:26:22

A la manière d’un rituel minutieux et pourtant évident dont les débuts s’étaient produits dans le bar pour se parachever dans cet appartement, les gestes et les mots qu’ils avaient partagés avaient tissé sans cesse de nouveaux fils d’une magie puissante et unique. Rares sont les pratiquants d’un tel sortilège dont les mérites sont bien souvent chantés ou narrés, mais tous deux en étaient les bénéficiaires, baignant dans les trames bienheureuses de cette chape enchantée. Encore à présent, toute leur gestuelle se déroulait dans l’esprit d’une symbiose si parfaite, si instinctivement coordonnée, que l’on aurait pu croire à la concrétisation de quelque chimère rêvée par beaucoup et réalisée uniquement dans une secrète intimité, de façon complètement retranchée au monde extérieur qui, en l’occurrence, n’importait définitivement plus.
Pour un moment d’idyllique harmonie charnelle délicieuse, ils n’avaient plus à se soucier de qui ils étaient, de ce qu’ils avaient pu faire dans leur vie et de ce qu’ils en feraient. Il n’y avait plus ni profession, ni origine, ni allégeances ; tout cela leur avait lentement été retiré pour qu’ils ne constituassent désormais plus qu’en Lui et Elle, chacun se donnant à l’autre dans la plus entière complétude de son être. « Demain », « hier » ou même simplement « plus tard » n’étaient devenus que des concepts abstraits dont la notion s’était faite de plus en plus floue pour finir par ne se réduire qu’à un « ici et maintenant ».

Bien sûr, une partie de Saïl était bien consciente qu’il faudrait tôt ou tard envisager leur futur de manière plus réaliste, mais celle-ci, sous la mélodie rayonnante de confiance de son cœur, avait été doucement bercée et dormait paisiblement pour laisser aux deux tourtereaux la pleine jouissance de leur compagnie. Il y aurait bien le temps de se faire du mouron pour l’avenir ; dans l’immédiat, la seule chose dont il voulait et devait se préoccuper était du plaisir d’Aya, ainsi que le prouvaient ses mouvements tendres à l’égard de cette demoiselle qu’il traitait comme si le moindre geste trop brusque de sa part avait pu la blesser ou la faire s’envoler en fumée.
Mais de toute évidence, la belle ne s’en contenterait pas indéfiniment, car déjà, alors même que l’ardeur suave de leurs baisers ne diminuait pas, elle le serrait si fort contre elle qu’il pouvait sentir jusqu’à la moindre parcelle de sa peau s’imprimer contre la sienne. Promesse muette mais bien éloquente que jamais il ne l’abandonnerait, il se laissa aller dans ce câlin hardi et l’accompagna même en l’étreignant plus étroitement encore, savourant cette embrassade passionnée si acharnée qu’elle en était presque merveilleusement douloureuse.

Oui, il ne cesserait jamais d’être son chevalier, son compagnon, son amant, répondant à ces attributions avec toute la dévotion qui conviendrait, toujours prêt à répondre à la moindre de ses envies, au moindre de ses besoins, quels qu’ils dussent être. Si elle avait froid, il la réchaufferait, si elle se blessait, il la soignerait, si elle pleurait, il essuierait ses larmes ; et même s’il n’en avait pas encore conscience tant de tels sentiments étaient nouveaux et désorganisés, il serait prêt à risquer de périr pour elle. Quoi qu’il faudrait faire pour la rendre heureuse, il le ferait.
Mais pour l’heure, il ne s’agissait nullement de réfléchir à la mort, mais bien au contraire de célébrer la vie, comme l’indiquait son cœur qui battait sans doute avec plus de force qu’il ne l’avait jamais fait, tant la présence d’Aya l’exaltait à un point presque étourdissant. Et il manqua d’ailleurs un battement lorsque l’adolescente, interrompant leurs baisers, se rapprocha doucement de son oreille, prenant le ton d’un complice et langoureux secret pour lui murmurer trois mots décisifs, presque foudroyants.

Un instant, il se demanda s’il avait bien entendu, mais les yeux presque vitreux de désir de sa partenaire lui assurèrent bien vite qu’il ne se trompait pas, celle-ci se faisant même plus entreprenante, répondant elle-même à sa propre demande pour l’inciter à en faire autant avec d’autant plus de fougue. De fait, il ne se rebiffa nullement lorsqu’elle le ligota littéralement de son corps, s’enserrant contre lui sans cesser ses caresses dont la tendresse libidineuse le décida rapidement à agir. Non pas qu’il eût réellement le choix, car sous un tel apport de prodigalité charnelle, il eut l’impression que s’il ne faisait pas quelque chose pour décharger l’ardeur qui l’envahissait, il finirait vite par éclater !

Ainsi, délicatement, il interrompit les gestes de l’adolescente, lui prenant les deux mains pour les embrasser avec une affection débordante. Certes, l’attention n’était pas des plus sensuelle, mais elle reflétait toute la dévotion qu’il lui vouait, à quel point il la respectait ; comme une assurance de plus avant que les dernières barrières qui dissimulaient leur chair ne tombassent. Un moment, un dernier moment de tranquillité avant de s’abandonner définitivement à la passion, il la regarda dans les yeux, ces yeux dont la lueur couleur d’espérance s’était faite si vive, si brillante, si inextinguible, qu’il aurait cru pouvoir finir évaporé sous leur rayonnement, et ce, sans regrets. Quelques secondes accompagnées du ruminement léger de la pluie s’écoulèrent, puis il articula comme de lui-même des mots enfiévrés d’amour en un chuchotis adorateur :

« Tu es magnifique. »

Puis il s’approcha d’elle, posant ses lèvres contre les siennes, à la fois pour sceller à jamais ces paroles, et à la fois pour commencer à répondre à la demande qu’elle venait de lui faire. Langoureusement, avec une diligence instinctive et affriolée, il se mit alors à descendre peu à peu, passant sous le menton pour glisser son visage entre la poitrine d’Aya dont il baisa le centre, s’émerveillant sans cesse de la texture et du goût de cette peau juvénile dont le délice ne faisait que le rendre plus pressant encore. Les lèvres papillonnaient, de haut en bas, suivant la courbe abdominale du corps de la jeune fille, finissant par se nicher au creux de son nombril qu’elles tétèrent un instant consciencieusement avant de reprendre leur course lascive.
Ce fut ainsi qu’elles parvinrent à l’ultime obstacle qui restait entre lui et elle, obstacle dont il se saisit sans précipitation, faisant glisser le fin morceau de tissu le long des jambes de sa partenaire dans un bruissement feutré qui s’acheva lorsqu’elle s’en vit définitivement débarrassée, se révélant ainsi dans toute sa splendide nudité. Ne s’interrompant pas en si bonne voie, Saïl, enveloppant les hanches de l’adolescente de ses grandes mains chaleureuses, vint à la rencontre de ce creux de chair élastique humide doucement rosé environné d’une légère toison brune et surmonté d’une petite perle qui s’offrait à lui.

Ce fut sur cette dernière qu’il s’affaira, y déposant un tendre baiser longuement prolongé dans un bruit de succion aigu avant d’en administrer d’autres, les entrecoupant de coups de langue d’abord rapides et légers, et ensuite plus prolongés, jouant avec adresse de ce bouton de chair. Oui, l’allure de leur passion n’était désormais guère platonique, mais elle n’était que la concrétisation des sentiments d’immense attachement qu’ils ressentaient l’un pour l’autre. Ils se désiraient sans l’ombre d’un doute et tiraient tous deux une grande joie de ces manifestations d’affection, alors pourquoi ressentir désormais quoi que ce fût tel que de la honte, de l’embarras ou de la timidité tandis que ce qu’ils faisaient n’était que la conséquence logique de ce qu’ils éprouvaient ?
N’étant pas quelqu’un avec une expérience considérable du sexe, il ne pouvait pas être rigoureusement certain que ses attouchements étaient les plus efficaces en la matière, mais il se consacrait néanmoins avec toute son application à susciter le plaisir d’Aya. Descendant d’ailleurs un peu plus bas, il lapa par à-coups les lèvres de la demoiselle, s’attardant progressivement de plus en plus sur ces mouvements, dardant entièrement son muscle lingual qu’il utilisa pour parcourir les parois mouillées qu’il rencontrait. Puis il insinua carrément sa bouche aventureuse à l’intérieur de cette cavité amoureuse, en explorant le contenu consciencieusement, faisant en sorte de n’en laisser aucune parcelle inexplorée de manière à ne pas priver se partenaire de la moindre once de jouissance.

Mais encore une fois, il mit ses prévenantes pattes à contribution, celles-ci flattant de bas en haut le ventre de l’adolescente avec la douceur, la fermeté et l’habileté d’un masseur professionnel pleinement dévoué à connaître jusqu’au moindre recoin de ce corps voluptueux. S’il l’avait pu, il l’aurait ainsi embrassée tout entière d’une unique caresse, explorant son être de fond en comble pour y laisser partout sa tendre marque, mais devant l’impossibilité d’une telle manœuvre, il prenait son temps pour découvrir en toute délicatesse celle qui était pour lui la plus belle.
Pour le moment, donc, il remonta le long de son torse, de ses mains si grandes que ses doigts se touchaient presque, éprouvant sur leur passage le contact de ces côtes presque tristement trop apparentes, parvenant de la sorte jusqu’à une poitrine souple et ferme. Englobant ces appétissantes protubérances mammaires de ses larges paumes, il les laissa reposer là un petit instant, communiquant leur chaleur aux seins de la jeune fille. Puis, d’abord lentement puis avec une insistance langoureuse grandissante, il dessina des cercles sur ces rotondités féminines, pressant avec finesse la chair nue de façon à maximiser les sensations de plaisir ressenties.
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Aya Murakami

Humain(e)

Re : May be. [Reservé]

Réponse 22 mardi 14 septembre 2010, 18:08:00

Quand on demande à une adolescente de dix sept ans à peine ce qu’elle veut faire plus tard, la plupart des curieux auront droit à une grimace d’excuse à peine polie. Dans le genre, on s’en fiche, la jeunesse est faite pour être vécue et l’avenir attendra. Aya n’était pas de ceux là. Mais elle ne faisait pas non plus partie du groupe restreint et Ô combien chanceux des lycéens à répondre d’un ton assuré, en étalant toute la programmation minutieusement orchestrée de leur vie. Si on lui demandait ce qu’elle comptait faire, la jeune fille n’en savait strictement rien. Après cette démonstration flagrante de son manque de maturité, envers et contre les apparences, il devient évident de conclure que ce qu’elle faisait n’avait pour l’instant qu’une portée à court terme. S’il lui été indispensable de s’arrêter dans l’instant pour y réfléchir plus avant, sans doute aurait-elle émis le souhait de revoir Saïl dans l’avenir, mais il est à peu près certain que ses projections mentales s’arrêteront là. Sauf que dans cette partie reculée de l’esprit que l’on appelle inconscient, parfois autrement, il se passait bien plus de choses que quiconque aurait pu le soupçonner.

Ainsi, Aya était en cet instant précis dans la dynamique de formuler le désir encore inconnu de faire de Saïl la personne la plus importante pour elle. Quelqu’un qui pourrait supplanter la déception de Toya. Quelqu’un capable de la supporter au quotidien, de la choyer, de la réprimander, de l’embrasser chaque minute que Dieu fait … Une personne aussi formidable qu’un prince charmant, dans l’état d’esprit chevaleresque de tout accomplir pour sa promise. Le portrait craché de l’homme qui se tenait tout contre elle. Mais cela, elle n’en avait pour l’instant que vaguement conscience. Car si Aya se rendait compte de la chance qu’elle avait, elle ne réalisait pas encore que la déclaration qu’elle avait reçue n’était que le « il était une fois » de leur histoire, et que de nombreuses autres auraient l’occasion de fleurir sur les lèvres qu’elle n’osait plus quitter. Et même qu’elle les dirait, ces trois mots sacrés si porteurs de sens et de symboles. Tout ça, tout ce processus de pensée obscur restait camouflé dans les affres de son crâne, et seul son désir filtrait, prenant ainsi toute la place qui lui était offerte.

Mon premier c'est désir, mon deuxième du plaisir. Toutes les histoires racontent la même histoire. Il y a toujours une fille, et un garçon. Un garçon, et une fille. Ceux-là même qui pensaient actuellement leur situation comme unique, particulière. Combien d’autres jeunes naïfs avaient pu, avant Aya, voir d’un œil émerveillé leur partenaire se révéler être totalement différent. Combien d’adolescentes avaient également pu se tromper, devant cette constatation teintée d’idéalisme. Mais qu’importe. Il en suffisait d’une, une qui ne se trompe pas. Et pourtant, par le passé elle était souvent tombée dans le piège, croyant toujours à un demeurant différent. Évidemment, elle nourrissait chaque fois l’espoir insensé de tomber juste, et chaque essai s’était soldé par un échec critique. Refusant toutefois de penser de façon pessimiste et rétrograde, la belle s’abandonnait pour l’heure à la vive et intrépide réponse de Saïl quant à sa propre prise d’initiative. Elle rougissait encore intérieurement en repensant aux mots qui venaient de franchir de ses lèvres. S’ignorant séductrice et sensuelle, Aya s’imaginait d’avantage sombrant dans le ridicule et l’autorité. Ah, les femmes !

Mais ce n’était évidemment pas tout. Car bien malin celui qui peut stopper le cours du temps, ou les intentions de deux amants se préparant à consommer leur première nuit d’amour passionnel. Et l’injonction de la demoiselle avait très certainement fait sauter le dernier verrou de monsieur, qui n’avait à présent plus aucune raison de se retenir ou de vouloir la préserver. Étrange contraste alors, que l’impatience d’Aya qui côtoyait non sans mal les délices du temps. Comme si elle avait voulu accélérer les choses et atteindre immédiatement le point de non retour, tout en savourant chaque minute de frustration et d’attente. Et Saïl se plaça à l’exacte réunion de deux impossibles, prenant un temps mesuré pour chaque progression avancée. Respectant tout aussi bien les désirs de sa dame que son besoin constant de réassurance, il l’empêcha tout à coup de toucher ce corps qu’elle aurait aimé étreindre au point de l’assimiler, et se posa en gentleman. Comme le garçon timide qui viendrait chercher sa cavalière avant d’aller au bal, comme l’amant rassurerait une compagne en plein doute, comme un mari dévoué déclarerait pour la centième fois une évidence des plus éclatantes.

Sauf que son compliment ne se situait dans aucune image proposée ci-dessus, aussi ressortait-il avec bien plus de force qu’une banale affirmation. Le regard de Saïl parla avant que ses dires ne viennent appuyer son admiration, et avant que la jeune fille ne puisse dire un mot, leurs lèvres se rejoignirent une fois de plus. Ce n’était pas la première fois qu’on lui disait ce genre de chose. Mais dans un tel contexte, avant de se précipiter sur son corps qu’elle savait suffisamment attirant pour un homme assez peu regardant -selon elle-, la chose était inédite. Déconcertante. Déconcertée, Aya qui ne reprit ses esprits que lorsque son compagnon de soirée reprit ses délicates attention ! Un grand souffle de satisfaction se répandit dans son cœur, tandis que sa peau goûtait la délicieuse empreinte de la bouche de Saïl.

Menton, carotide, poitrine. Premier frisson de la part de la jeune femme. Abdominaux, ventre, nombril. Deuxième frisson. Aya aurait pu à ce jour réciter tous les précis d’anatomie que son amant découvrait en aveugle, sans garantie ni assurance. Du moins pour l’instant. Car, lorsqu’il continua son indolent périple, l’adolescente ne répondait plus de grand-chose. Les parties de jambes en l’air, elle connaissait. Elle avait déjà expérimenté les bases. Mais n’ayant jamais fait l’amour, Aya n’aurait pu imaginer que ce qui était en train de se produire dans la partie inférieure de son corps allait lui procurer autant de plaisir. D’ordinaire, elle le voyait avant tout comme un préliminaire presque obligatoire, prérequis pour que la mécanique de la nature se fasse sans grippage … Mais, sous les délicieuses explorations de Saïl, Aya prenait conscience d’une toute autre dimension. Se laissant tour à tour dénuder puis découvrir, la jeune fille ne pouvait plus faire grand-chose à part faire jouer de ses doigts le drap du lit sur lequel ils étaient allongés. Et c’est sur un sursaut de surprise et de plaisir partagés qu’elle referma sa prise sur le couvre-lit, serrant de ses petits poings le tissu délicat.

Elle ne savait plus bien exactement quelles parties de son corps étaient sollicités par Saïl, tant tout son être se mettait à contribution, se réchauffant puis frissonnant au contact de l’air toujours trop frais, ou sous l’impulsion d’une attention particulièrement bien maitrisée de son compagnon. Il est assez superflu de tenter de décrire le plaisir charnel en mots, aussi me contenterais-je de le suggérer fortement, dans une telle situation. Pendant quelques minutes, le manège s’éternisa. C’est quand Aya ne put retenir un son évocateur, gênant et timidement lancé dans le silence de la pièce que l’on pourra comprendre. Elle n’en ressortit d’ailleurs pas vraiment de honte, désireuse qu’elle était de témoigner son plaisir à son partenaire. Laissant donc sa voix s’exprimer pour elle, Aya relâcha la pression qu’elle apposait sur un drap dès lors froissé pour délier une de ses mains et la faire rejoindre une de celles de Saïl, caressant la peau qui s’occupait déjà d’elle, aux alentours de sa poitrine. Et ce fut à la deuxième expression de son bien être qu’elle vint à la rencontre de l’épaule du jeune homme, exerçant une pression significative sur ses muscles. Ses lèvres s’asséchaient de l’absence de leurs conjointes, tout comme son corps réclamait à grands cris la présence de celui de Saïl.

Plaisir égoïste, non merci. Il était temps pour elle de faire passer ses propres sentiments dans la dévotion qu’elle affichait déjà sur le visage. Obligeant son compagnon à revenir vers elle, Aya l’embrassa avec plus de fougue qu’auparavant, l’haleine un peu saccadée et les joues rouges. Puis elle balada ses mains à l’aveuglette, cherchant sa cible tout en continuant de répandre ses émotions sur sa langue qui caressait celle de Saïl. Enfin, Aya saisit de ses doigts les extrémités d’un sous vêtement récalcitrant, et l’enleva sans autre forme de procès. Encore une fois, ce geste n’avait rien de sensuel, mais le devenait dans un tel contexte. Tout était plus beau, tout allait à présent plus vite. Après tout, le temps ou la quantité ne comptaient pas. Seul comptait l’instant présent, le plaisir qui naissait et s’épanouissait. De ses mains, Aya saisit avec précaution l’objet de son attention et lui rendit toute la douceur que son partenaire avait pu mettre dans chacun de ses gestes depuis le début de la soirée. Elle était là, emplie d’un désir qui s’échappait en diverses manifestations, ses cheveux collants son front transpirant, son corps collé contre celui de Saïl, ses lèvres soudées au siennes. Désireuse, désirante, et totalement attentive au bien être de son partenaire. Amoureuse, oui. Sans le savoir.

Saïl Ursoë

Créature

Re : May be. [Reservé]

Réponse 23 mercredi 15 septembre 2010, 02:48:19

Saïl était fondamentalement un être de raison, quelqu’un qui ne se laissait pas tromper par les impressions premières et faisait toujours en sorte de tirer ses conclusions non pas d’intuitions trompeuses mais bien de computations logiques et objectives. De la sorte, il aurait pu paraître pour le moins incongru qu’il s’entichât si précipitamment d’une jeune fille dont il venait de faire la connaissance, situation d’autant plus surprenante qu’elle n’avait a priori pas grand nombre de points communs avec lui, à commencer par leur âge qui différait sensiblement et de façon potentiellement scandaleuse.
Et pourtant, il n’avait pas le moins du monde essayé de réfréner cette impulsion, pour la simple et bonne raison qu’il ne lui avait en toute honnêteté paru y avoir aucune réelle objection possible à ce que lui et Aya se rapprochassent ainsi qu’ils l’avaient fait. Après tout, il n’y avait nulle contrainte, nulle violence, nulle contradiction dans ce à quoi ils s’adonnaient, alors pourquoi chercher à aller à l’encontre de ce qui, à chaque seconde, se concrétisait de manière toujours plus belle ? Ils s’étaient rencontrés, s’étaient plus le plus fortement et sincèrement du monde, et à présent, ils ne voulaient plus se séparer, chacun s’abreuvant de la présence de l’autre comme à une fontaine enchantée tout juste découverte.

Pour autant, s’il avait dû donner son avis sur ce qui allait pouvoir se passer ensuite, n’eusse été que pour le lendemain de leurs ébats, il aurait été bien en peine de pouvoir se prononcer sur la question. C’est que si intelligent que le garçon fût, il n’avait jamais eu grand-chose d’un planificateur hors pair, étant plutôt du genre à prendre pas à pas les choses comme elles venaient et à y réagir selon ce que lui dictait son jugement. Il raisonnait qu’il n’y avait pas d’intérêt à se faire de la bile pour l’avenir, et que du moment qu’il prenait ses décisions en son âme et conscience, il n’aurait jamais à regretter ses agissements.
C’est ainsi que, sans une once d’incertitude, il avait dressé un infranchissable bouclier contre les regrets, les hésitations, les scrupules, rempart encore dressé alors même que lui et sa dulcinée s’adonnaient à l’expression de leur passion mutuelle. En fait, il était vrai qu’avec une bonne dose de prévoyance, de circonspection et de cynisme, il aurait pu être envisagé que sa partenaire ne faisait rien d’autre que l’entraîner dans un jeu malsain dont elle était la meneuse et dont elle se réservait le droit de l’interrompre à tout instant pour son amusement, rien que pour la joie perverse de voir Saïl tomber de haut.
Beaucoup y auraient songé, et certainement avec sagesse tant on ne peut savoir à qui se fier, mais en ce qui le concernait, l’idée ne l’avait même pas effleuré, ou si elle l’avait fait, ç’avait été de manière si éphémère qu’il n’avait même pas pu avoir le temps de la prendre en considération. Au lieu de cet esprit de doute qui aurait empoisonné la communion qu’ils partageaient, une confiance aussi rayonnante que son attachement envers Aya baignait son cœur, chassant toute trace de méfiance pour ne plus laisser qu’une affection sans égale.

C’était une telle dévotion que l’on pouvait lire dans les gestes du jeune homme, et les manifestations autant verbales que physiques du plaisir de sa belle ne faisaient que renforcer encore l’application qu’il mettait à la satisfaire, l’honnête amant ne pouvant concevoir qu’il y eût quoi que ce fût d’assez doux pour elle. Heureusement, elle ne semblait nullement se sentir insatisfaite, et ainsi ne faisait-il pas de façons pour plonger toujours plus avant dans cette pratique de gamahuchage, se concentrant soigneusement et voluptueusement sur ce tendre puits de féminité, cela d’une telle manière qu’au bout d’un moment, il aurait pu lui paraître n’y avoir rien d’autre de perceptible au monde que cet organe délicat et humide, véritable joyau charnel.
Il fut cependant ramené à la réalité lorsque une main se posa contre une des siennes, ravivant ainsi la conscience dans ces appendices pris dans leur automatique rotation massante. Ce fut ensuite lors d’un second toucher de la part d’Aya, sur son épaule et de manière plus pressante cette fois-ci, qu’il leva la tête, ayant juste l’occasion d’apercevoir son visage transfiguré de jouissance avant qu’elle ne l’attirât à elle.

N’ayant garde de lui résister, Saïl ne s’y opposa pas, autant à cause de la soudaineté de l’acte et de la force que donnait la passion à la demoiselle que parce qu’il n’avait de son côté pas la moindre envie d’éviter tout contact avec les lèvres de sa partenaire sur lesquelles les siennes se plaquèrent goulûment. De façon aussi rapide et aisée que sous l’effet d’une puissante aimantation, leurs bouches se collèrent l’une à l’autre avec fougue, chacune ayant l’air de n’avoir été formée que pour s’adapter à celle qu’elle rencontrait en ce moment même. Toujours, sans cesse et sans que les effets d’une telle union s’amoindrissent, c’était la mise en accord des pôles négatif et positif, du yin et du yang, de l’homme et de la femme ; la complétude réalisée en toute merveilleuse simplicité et en toute magnifique évidence.

Mais déjà, l’adolescente profitait de ce qu’il eût pour ainsi dire baissé sa garde, le mettant dans la même situation qu’elle en empoignant les bords du dernier vêtement qu’il lui restait pour le faire partir et le mettre ainsi aussi à découvert qu’elle. Sur le coup, il tressaillit très légèrement sous un geste aussi inattendu, mais quelle pudeur insensée aurait-il dû avoir face à celle pour qui il ne voulait avoir aucun secret ?
Ne faisant pas le difficile, il la laissa donc le dévêtir, son ultime habit glissant ainsi de lui pour le laisser aussi nu qu’à la naissance, aussi rouge d’ardeur et de chaleur que l’était Aya. Oh, à la voir ainsi, aussi échevelée, débridée et suante qu’une bacchante, des sots l’aurait traitée de dévergondée avant de détourner le visage, mais pour Saïl, il n’aurait pas pu exister de plus ravissant spectacle dans tout l’univers que celui de cette jeune femme en proie aux flots envahissants de la lascivité.

Et encore une fois, captivée qu’il était par elle et par l’étreinte délicieusement incessante de ses lèvres, il ne fut capable de voir venir son mouvement suivant, ne pouvant contenir un gémissement étouffé lorsque les doigts de son amante se saisirent de la partie la plus à vif de son corps en cet instant même. Il n’aurait su dire si ce fut une vague de fraîcheur ou une bouffée de chaleur qui l’envahit à ce contact aussi hardi qu’appréciable, mais le fait est qu’il fut pénétré d’un plaisir et d’une excitation si incroyables qu’il en referma ses bras autour de sa chérie, l’embrassant à nouveau avec une passion littéralement dévorante, dégustant avec gourmandise sa bouche sans réserve aucune.
Ce faisant, ils se retrouvèrent tous les deux plus étroitement rapprochés que jamais, leurs chairs se pétrissant l’une contre l’autre sans retenue, la température paraissant vouer à ne jamais diminuer tant ils formaient à eux deux une fournaise d’affection mutuelle intarissable. Plus que jamais, il la désirait, son cœur empli de l’envie d’incruster le bonheur de la dame de ses pensées dans la volupté. Il voulait être aussi proche d’elle qu’il le leur était possible, l’honorer pleinement et lui consacrer la pleine mesure de ses sentiments pour elle, atteindre les plus hauts cieux de cette indéfinissable expérience sans commune mesure qu’ils partageaient.

Ainsi, ce fut en la mise en œuvre d’une pareille volonté que ce fut à son tour de la renverser ainsi qu’elle l’avait fait plus tôt, Saïl la conduisant doucement à plat dos en direction de la surface confortable du lit pour ensuite se positionner au-dessus d’elle, ses bras de part et d’autres d’elle de manière à éviter absolument de l’incommoder en pressant son poids contre elle. Un autre baiser devenu au fil du moment moins ardent mais non moins attentionné, et il recula son visage du sien, l’observant tandis que tout son être formulait une question muette.
Au stade où ils en étaient, et étant donné la position dans laquelle ils se trouvaient désormais, il n’était pas difficile de deviner la nature de celle-ci, et la quasi-immobilité précautionneuse et attentive du jeune homme révélait toute l’importance qu’il y accordait. Au vu de la passion qui les animait et de l’harmonie qui régnait entre eux, la réponse faisait probablement peu de doute, mais cela n’empêchait qu’il ne se serait jamais permis de présumer de l’accord d’Aya, auquel cas il se serait selon lui-même davantage assimilé à un vulgaire profiteur insensible qu’à un véritable amant.
Oui, ses prunelles brunes brûlaient, mais ce n’était pas de ce feu lubrique et presque dément que l’on peut voir dans les yeux d’hommes dont les envies peuvent si aisément être comparées à celles d’un animal en rut. Non, dans ces iris qui n’avaient rien à cacher, il y avait un désir certes profond et considérable, mais sincère, et il faisait partie de ces émotions qui ne peuvent s’entretenir que si elles rencontrent leur pareille chez autrui. Et dans les étendues sylvestres du regard de sa compagne, il guettait l’étincelle qui lui dirait oui ou l’assombrissement qui lui dirait non.
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Aya Murakami

Humain(e)

Re : May be. [Reservé]

Réponse 24 dimanche 19 septembre 2010, 10:43:14

On dit souvent que les femmes, pudiques, préfèrent se livrer à de telles démonstrations d’affection dans une ambiance très intime, sombre et effaçant presque le plaisir des yeux. Aya était d’ordinaire partisane de ce genre de situations, où elle ne pouvait voir distinctement le corps qu’elle offrait aux caresses hardies d’un amant quelconque. Comme toute adolescente, et comme bon nombre de femmes, Aya craignait son corps. Elle s’imaginait toujours que sa finesse la desservait, que ses formes manquant d’ampleur et de maturité, que son ossature cassante et frêle pouvaient en faire fuit plus d’un. Évidemment, cela n’était jamais arrivé. Mais la fantasmagorie féminine est insondable, et la jeune fille redoutait souvent le moment de se mettre à nu. Pire, la plupart du temps elle aurait refusé, de honte, le délicieux traitement que Saïl avait entrepris. Ses pensées anxieuses pouvaient cavaler, imaginant que d’autant pouvaient voir cela comme une obligation, un pré requis. Et cela lui avait souvent fait monter le rouge aux joues, non pas de plaisir mais de gêne. Ses mains cachant son visage au lieu de s’étendre de part et d’autre de son buste, ses cuisses se crispant de malaise. Et tout le bénéfice de cet honneur disparaissait bien vite.

Pourtant, ce soir, Aya se sentait tellement rassurée, entourée et aimée qu’elle en venait à apprécier la clarté impressionnante de lueur de la Lune. Elle pouvait ainsi se voir offrir son corps à l’homme qu’elle voulait plus que tout auprès d’elle, se sentir désirable. Se sentant rayonner de charme, elle était fière d’elle et de ce qu’elle voulait partager avec Saïl. De plus, la luminosité éclatante de cette soirée avait pour second avantage de lui permettre d’apprécier tous les reliefs de la peau de son amant. Les creux, les bosses, chaque ligne de muscle, chaque palpitation de veine, tout ressortait dans un véritable tableau vivant de contrastes, chaque détail dansant sous la lumière feutrée qui rendait tout plus beau. Cet épiderme tour à tour éclairé ou plongé dans l’obscurité la fascinait, et tandis que ses lèvres se soudaient à celles de Saïl, l’adolescente contemplait avec une envie non dissimulée l’anatomie à présent familière de son compagnon. Comme ces œuvres d’art en noir et blanc que l’on projetait parfois, représentant avec goût et sans aucune vulgarité le corps à son origine la plus sommaire, inaltérée. Comme ces courbes qui semblent onduler sous le jeu des lumières, sous les caprices du modèle. Et bien c’est exactement comme cela qu’Aya se représentait la scène. Sans grivoiserie, sans représentation bassement simpliste de la nudité. Un ballet artistique, dont la dimension rêvée est conservée précieusement.

Et, quand le peintre ajouta sa dernière touche de peinture, où quand Aya découvrit entièrement le corps de Saïl, un frisson parcourut les deux jeunes gens. L’un, peut être de surprise. L’autre, d’une impatience raisonnée mêlée à une douce satisfaction. Ils étaient ainsi, totalement offert au regard de l’autre, sans complexe ni gêne, comme si leurs corps se connaissaient déjà depuis des lustres. Comme si, une fois la première découverte passée, plus rien n’avait de secret pour eux. Un jardin secret n’en est un que si la clé de votre âme se dissimule habilement quelque part où personne ne peut l’atteindre … Eh bien Aya venait de perdre cette petite barrière de verdure, qui s’ouvrait non seulement sur son intimité mais également sur ses sentiments, qui se déversaient peu à peu, au contact de Saïl, dans un esprit qui n’en avait pas l’habitude. Comme un preux chevalier vient tirer sa belle d’un danger, celui-ci pouvait également s’avancer prudemment dans le refuge de la donzelle, et lui offrir son cœur en attendant une réponse. C’est à peu près ce genre de tableau illusoire qui prenait place dans cette pièce baignée par la Lune et bercée du vacarme de la pluie. Un échange aussi fragile que résistant, qui se concluait entre deux êtres en parfait accord l’un avec l’autre.

Aya, pendant un instant, ne sut dire quel plus beau cadeau lui avait été donné jusque là de recevoir, durant la soirée. Elle positionnait auparavant en tête les trois mots de Saïl qui avaient touchés son âme et son cœur glacé, volontairement protégé. Mais le simple petit bruit qui émana de ses lèvres fut pour elle une claque de satisfaction. Hasardeuse, elle avait peur de ne pas savoir rendre ce qu’on lui offrait avec tant de diligence. C’était donc un véritable soulagement, doublé d’allégresse que ce simple son, lancé d’une voix grave dans la clameur de leurs existences. D’autant plus que le jeune homme le fit savoir en étreignant de plus belle le petit corps fragile de sa partenaire, qui se laissa couler avec délice dans un baiser effréné qui ne souffrait plus d’aucune retenue, d’aucun souci de bienséance. Et dans cette passion, il y avait une douceur incroyable. Encore un paradoxe propre à Saïl et à la magie de ses embrassades. Aya, sans relâcher l’infime pression que ses doigts exerçaient le long du corps de Saïl, savoura pleinement ce rapprochement, toujours plus conséquent.

Ce fut d’ailleurs l’amorce du point de retour, si on peut l’appeler comme ça, et bien qu’il soit gravi depuis longtemps dans l’esprit d’Aya. La jeune fille se sentit basculer sur le lit, tout en ayant l’immense plaisir de garder son partenaire à portée de mains et de bouche, se sentant totalement protégée par les muscles tendus qui encadraient ses épaules, soutenant Saïl encore trop loin d’elle. Il sembla lire dans ses pensées, et vint lui offrir un énième baiser, bien plus apaisé et modéré que le précédent, mais non moins agréable. Puis il se sépara à nouveau d’elle, pour la fixer avec attention. Aya pouvait deviner dans les iris sombres de Saïl une lueur encore atténuée jusque là. Un mélange d’envie, de questionnement mais surtout un grand respect, une attention que l’on ne pouvait même plus accorder à un prince tant ceux-ci ne pouvaient parfois pas résister à une trop grande tentation. Pas un seul instant Aya ne se demanda si elle était la cause de cette réserve, dans la mesure où elle n’aurait pas suffisamment stimulé le désir de Saïl. La Aya d’avant l’aurait fait, mais dans ses bras elle ne doutait de rien, et savait pertinemment que cette attente, ce répit frustrant et perceptible était pour Saïl une évidence, tant il la préservait de ses pulsions, lui donnant toujours une échappatoire, une solution de repli.

Mais hors de question pour la jeune fille de s’arrêter en si bon chemin. C’eut été un autre, un de ses nombreux autres, sans doute aurait-elle à ce moment là un peu trop réfléchi sur la différence d’âge, sur son statut de lycéenne, sur son désir qui était d’avantage forcé que réel. Et elle aurait fui. Mais pas avec Saïl. Pas pour la première fois où elle aurait donné tout ce qu’elle avait, et même ce qu’elle n’avait pas, pour ne pas se dérober à cet instant, à ce lieu. Ne sachant comment lui faire comprendre que la question muette, si elle était magnifiquement posée, n’était là que pour la forme. Comment lui faire comprendre qu’elle ne désirait plus que lui, qu’elle était prête à s’offrir corps et âme à sa douceur, sa prévenance et son désir. Devenir une partie de lui, toucher son cœur, atteindre le plus profond de son être, voilà ce qu’Aya désirait en cet instant même.

Passant ses paumes de chaque côté de son visage, elle caressa un instant la peau brûlante, les boucles brunes qui s’échappaient. Comme pour apprendre, dans ce silence, le visage tant aimé. Puis elle repassa, comme plus avant dans la soirée, ses jambes autour des siennes, rapprochant leurs bassins et faisant se frôler les parties de leurs corps respectifs qui brûlaient de s’étreindre, de se découvrir. Les seules qui ne connaissaient pas encore la chaleur de l’autre. Enfin, elle redressa un instant son buste, écrasant sa poitrine contre son buste, pour lui offrir un mot un seul, dans lequel elle mit toute la tendresse du monde, l’envie qui l’habitait et le rayonnement d’un sourire bienheureux.

- Viens.

Un seul mot qui répondait à sa question tout en allant bien plus loin, lui exprimant tout ce qui s’était passé dans sa tête auparavant. Le désir, la sensation d’être à sa place, l’envie de n’être qu’ici et maintenant, la passion, l’amour. Elle souhaitait lui laisser l’initiative de pénétrer son âme, lui laisser la possibilité d’avoir une réponse à sa demande formulée par ses yeux, la résolution d’accomplir ce qu’eux deux attendaient trop. Il avait son plein et entier consentement, tout l’arrangement de ses émotions, et il devait maintenant les étreindre, l’enserrer complètement, sans rien omettre. Embrasser ses sentiments en même temps que ses lèvres, posséder son âme dans le même temps que son corps. Venir à elle, littéralement.


[Enfin, enfin enfin ! Pardon du retard, j'espère au moins que la lecture t'aura satisfait]


Saïl Ursoë

Créature

Re : May be. [Reservé]

Réponse 25 lundi 20 septembre 2010, 18:35:24

L’amour se fait souvent exaltant parce qu’il est plein d’inconnues, d’imprévisibilités, de surprises, qui font ainsi que découvrir l’autre est une aventure permanente, peuplée de découvertes excitantes. Une cavalcade effrénée s’engage alors, pareille à la course d’un train incapable de ralentir, et consumant ainsi toujours plus de carburant pour continuer sa course folle, n’admettant nul obstacle sur son passage rugissant et aveugle. Hélas, bien souvent, de tels parcours se muent rapidement en une sorte de fuite en avant qui ne peut que mener à une chute d’autant plus précoce que l’ardeur est forte : la passion se consume à un rythme inconsidéré, si bien qu’au bout d’un moment trop court, elle ne consiste plus qu’en une couche de cendres froides là où les flammes brûlaient autrefois sans mesure. C’est là le parcours d’une étoile filante dont la beauté n’a d’égale que sa brièveté, et dont l’achèvement s(accomplit dans une incandescence destructrice.

A contrariori, dans la relation qu’Aya et Saïl partageaient en ce moment même, il n’y avait rien de cette frénésie étourdie qui peut caractériser les relations dératées ci-dessus évoquées. Certes, ils étaient allés bien vite en besogne comparé au cheminement ordinaire d’un couple, mais pour autant, il restait étonnamment certain que ce qu’ils nourrissaient l’un envers l’autre n’avait ni la trop grande envergure ni la fougue incontrôlée d’un amour en feu de paille.
Plutôt qu’une fournaise avide, leurs cœurs émettaient à l’unisson de douces flammèches dont les langues chaleureuses et attentionnées s’enroulaient autour d’eux, les baignant dans une atmosphère de complète sérénité et de fantastique assurance où de hâtives ruades n’avaient pas leur place. Ces vifs brandons ne dureraient peut-être pas toujours, mais quand bien même ils devraient disparaître, ils ne le feraient que pour se mettre à l’abri d’un lit de braises éternellement chaudes dont la couverture pourrait garantir la permanence de leur flamboiement.

Mais pour l’heure, le temps du parachèvement de leur affectueux ballet se rapprochait de plus en plus, et chaque seconde qui passait était pour le jeune homme un instant d’un bonheur qu’il n’aurait pu auparavant concevoir ; un fragment de magnifique rêve éveillé dont l’ensemble formait un joyau d’indescriptible félicité. Les baisers, les caresses, les étreintes, avaient été autant de promesses d’attachement, et désormais, l’acte qu’ils se trouvaient sur le point d’accomplir allait apposer sur eux l’ultime sceau qui marquerait définitivement l’immortelle vérité des doux affects qui les animaient.
Il restait cependant à obtenir le consentement d’Aya, laquelle détenait encore sur le bout de ses lèvres le pouvoir d’interrompre la danse qu’ils exécutaient, d’annuler l’accomplissement du rituel qu’ils formaient. En vérité, quiconque aurait-il pu croire qu’à ce stade, elle pourrait tout à coup retourner sa veste et tourner le dos à tout ce pour quoi ils s’étaient tous les deux engagés ? La réponse est évidente, mais cela n’empêchait que parfois, pour leur donner vie, même les lapalissades les plus criantes devaient être énoncées : de la même manière qu’on apprécie d’autant plus une journée ensoleillée en s’exclamant « Il fait beau ! », les amants seraient définitivement assurés de la réalité de leurs sentiments en énonçant la réciprocité de leur désir.

Et il se trouva qu’avant même qu’elle eût articulé le moindre mot, toute trace de ridicule incertitude qui aurait pu subsister s’envola en éclats devant la tendresse avec laquelle elle s’empara du visage de son plus dévoué serviteur, avant que ses jambes ne s’enroulassent autour de son corps. Le moment qui suivit, durant lequel ils s’admirèrent l’un l’autre, aurait tout aussi bien pu durer une seconde qu’une éternité ; il subsista que cet instant laissa passer d’un regard à l’autre, d’un être à l’autre, d’une âme à l’autre, toute la plus considérable et suave affection du monde.
Contrastant avec un portrait aussi joliment délicat de la situation, leur passion lascive s’exprimait plus que jamais dans les parties intimes de leurs corps collées l’une à l’autre, chacune s’échauffant d’une indéniable envie de passer à l’acte. Voilà bien quelque chose de cru qui aurait pu être une ombre au charmant tableau qu’ils formaient, mais d’un autre côté, pourquoi aurait-il fallu pudiquement masquer de telles manifestations ? Ils flottaient certes sur un nuage de béatitude, mais pour autant, cela ne faisait pas d’eux des anges, et ils étaient par conséquent tous les deux prêts à assumer leurs envies mutuelles jusque dans ses aspects les plus intimes et les plus pragmatiquement charnels.

Un mot, un seul, qui serait de toute évidence le dernier avant la consécration de cette soirée, avant la mise en scène d’ébats qui ne laisseraient plus de place aux paroles. Deux syllabes d’une simplicité enfantine, et au sens presque incongrûment vague, et qui ne pouvaient ainsi qu’envelopper d’autant mieux tout ce qu’ils partageaient de par les multiples sens que ces phonèmes pouvaient contenir. Cette infime phrase résonna dans la petite pièce battue par les sons de pluie à la façon du grincement d’une clé dans une serrure, ouvrant ainsi la porte vers un saint des saints de suprême joie.

La faisant venir encore plus près de lui, il se positionna à genoux sur le matelas, et, la recueillant en une étreinte aussi digne que possible de la perle qu’elle était, il déposa ses lèvres contre les siennes, sans chercher à ce que le geste fût particulièrement érotique ; simplement en une garantie de plus de sa dévotion envers elle. Puis, doucement, il la souleva, et, guidant son corps contre le sien, les fit entrer en un contact plus rapproché que jamais, en une symbiose physique délicieuse qui, au fur et à mesure qu’elle se concrétisait, charriait avec elle son lot d’inimitables plaisirs. Sans aucun doute, il existe des positions bien plus efficaces que cela en ce qui concerne l’art délicat du coït, mais en l’occurrence, l’idée de performance importait peu, la seule chose qui comptait étant qu’il pouvait avoir sa chère et tendre face à lui, cœur contre cœur, et ainsi ne pas sacrifier l’attachement à la jouissance.

La sexualité est quelque chose de si primal, de si instinctif, de si profondément puissant, qu’elle porte en elle une redoutable ardeur, laquelle peut facilement et à juste raison pousser aux agissements les plus fougueux, voire les plus brutaux. Rien ne peut davantage pousser à l’impétuosité que le désir libidineux, et c’est ainsi que très facilement, l’acte amoureux peut s’avérer d’une rare violence, que ce soit pour le contentement des deux partenaires pleins d’une énergie qu’ils sont avides de dépenser ou pour le tragique malheur de l’un subissant les hardiesses de l’autre.
Dans le cas de Saïl et d’Aya, le moment de leur union charnelle se fit au contraire tendrement, lentement, sans heurts, l’un se glissant délicatement à l’intérieur de l’autre, la précipitation n’ayant pas cours en cet instant où il n’y avait qu’à savourer l’exaltation de la situation. Telle une sève infiniment délectable, la sensation de l’intimité de l’adolescente contre la sienne se répandit dans tout son être en un bienfaisant torrent dont les flots l’emplirent tout entier en de merveilleuses vagues, lesquelles s’installèrent en lui pour ensuite y pulser et le marquer jusqu’à l’âme de cette extase.

Et pendant ce temps, pendant la période indénombrable que dura ce qu’il faudra bien tôt ou tard appeler par son nom de pénétration, le jeune homme garda les bras autour de sa chérie, ne faisant presque aucun geste comme pour mieux se concentrer sur l’immense joie de ces secondes d’unique fusion. Centimètre par centimètre, leurs bassins venaient à la rencontre l’un de l’autre, et à chaque fraction de l’avancée qui se poursuivait continuellement, c’étaient de nouveaux plaisirs qui se manifestaient, leurs corps paraissant avoir été conçus pour être aussi en harmonie que possible. C’étaient deux moitiés qui s’imbriquaient l’une dans l’autre, avec un tel naturel qu’elles semblaient se retrouver plus que se découvrir, et exprimaient leur bonheur par des élans sans cesse renouvelés de voluptés transcendantes.
Haletant doucement sous ces sensations certes familières mais ô combien suprêmement exceptionnelles, Saïl entrecoupait sa respiration de baisers enfiévrés pleinement dédiés à sa douce, chacun ponctué d’une expiration qui se nichait à l’intérieur de la bouche de sa partenaire pour résonner sourdement et presque imperceptiblement en des soupirs de ravissement. Il l’embrassa d’abord délicatement, puis, au fur et à mesure de la progression de leur rapprochement, il se fit graduellement plus profond, plus appuyé, plus ponctué alors que sa langue venait virevolter avec celle d’Aya, leurs lèvres restant elles soudées sous l’effet d’une attraction qui n’était plus à prouver.

Enfin et déjà, le mouvement coïtal arriva à son terme, les amants étant ainsi noués l’un à l’autre, ses jambes à elle autour de ses hanches à lui, l’agrippant fermement, et ses bras à lui autour de son dos à elle, la maintenant étroitement. Un ange passa le temps de savourer ce moment d’immobilité silencieuse où ils ne faisaient qu’un, donnant ainsi aux deux protagonistes de cette scène secrète tout le loisir d’imprimer dans leur esprit cet instant de sublime accord… cela bien sûr afin de marquer également l’étape avant de passer à toujours davantage de cette fabuleuse communion.
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.



Aya Murakami

Humain(e)

Re : May be. [Reservé]

Réponse 26 mercredi 03 novembre 2010, 20:00:30

D’aucun diront que si la femme est plus difficile à satisfaire que l’homme, son plaisir peut se trouver bien plus dévastateur. En ce soir où Aya aurait pu clairement jurer sur son expérience que ce plaisir, soit disant plus fort, était une rumeur insidieuse pour réconforter les femmes, cette déclaration aurait pu la faire rire. Elle était prêtre à soutenir avec véhémence que cette affirmation n’avait pas de fondement, et que dans un couple quel qu’il soit l’homme atteignait le nirvana seul. De son trou de souris, elle voyait le monde comme un gigantesque stéréotype, personne ne lui ayant permis de changer de point de vue. L’amour, sentiment étrange et inutile était réservé aux romantiques esseulées tentant de se raccrocher à quelque chose. Le plaisir, réalité éphémère mais néanmoins présente, était l’apanage des hommes qui jouissaient de leur facilité à ressentir ces vagues de chaleur indescriptibles. Chacun son rôle, chacun sa place, et si elle-même se prêtait volontiers aux caresses désireuses de ses partenaires, cela n’avait jamais été que pour combler leurs envies pressantes et insatiables. Elle qui tentait pourtant de se positionner quelque part entre les deux, jamais encore elle n’avait réussi à véritablement sentir d’une caresse les portes du paradis s’ouvrir devant ses yeux. Comme si tout ce qu’elle avait toujours ignoré, persuadée de n’y avoir pas droit, se trouvait à présent à portée de main.

Imaginez un peu qu’un rêve, qu’un fantasme s’offre à vous. Pas seulement une idée sensuelle ou qui nécessiterait une proximité superflue, non. Juste un souhait, un mirage qui vous aurait toujours été refusé. Comme ce camion rouge de pompier quand vous étiez enfant, comme cette poupée aux cheveux longs qui coutait trop cher. Trouver ce genre de cadeau au hasard d’un soir de pluie, sans que personne ne vous prévienne, même plus tard … Quoi de plus magnifique ? La concrétisation finale d’un mythe qui aurait pour vous toujours existé uniquement dans l’esprit des autres. C’est à peu près ce qu’Aya ressentit lorsqu’elle sentit avant même qu’il ne le fasse son compagnon se rapprocher. Ses mains sur son corps, délicats artifices qui ornaient sa peau tremblante la rassurait. Son visage serein et désireux à la fois faisant sans aucun doute écho au sien, et les yeux prometteurs de Saïl apaisaient toute l’appréhension de la jeune femme. Aya craignait la déception, de retomber de son nuage de soie. Elle était terrifiée à l’idée que même lui, même cet homme exceptionnel, confirme ses peurs sur ses capacités, ses limites. En entendant parler les filles de sa classe, Aya était presque persuadée de n’avoir aucune disposition à l’amour, qu’il soit physique ou non.

Tout ce qu'elle n'avait jamais ressenti ... Les frissons qui vous prennent à bras le corps, le rouge qui monte aux joues. Le regard qui se voile, comme si des visions plus lointaines le captivait. Les tympans qui sifflent de mots doux susurrés à l’oreille, ou de leurs équivalents soupirés, les mains qui se déplacent seules sous la seule impulsion de l’instinct. Les muscles qui se tendent, la peau qui se hérisse, les articulations qui se figent en une délicieuse crispation.

Tout cela, tout ce que le corps humain est capable d’exprimer dans sa grande communion avec l’esprit, les manifestations qui possédaient le temps d’une caresse une jeune fille qui s’éveille à l’amour, doucement. Tout cela à chaque contact de Saïl. Un ballet impressionnant de diverses réactions charnelles et incontrôlables qui se remarquaient à peine tant elles officiaient à chaque seconde. Lorsque son partenaire la prit contre lui, Aya accepta son baiser avec une délicatesse qui cachait ses tremblements d’impatience. Lorsqu’il la souleva de ses grands bras, elle si menue et ridiculement fragile face à lui, Aya ne quitta pas son regard une seule seconde. Lorsqu’il la fit descendre dans une extrême lenteur, Aya se colla contre lui, passant ses bras autour de son cou et se pressant sur son corps offert, comme si elle avait voulu entrer en lui. Ses mains se crispèrent dans son dos, et elle agrippa le peu de peau disponible alors qu’elle cherchait désespérément un moyen d’accentuer la sensation incroyable qui l’envahissait alors que Saïl pénétrait son corps, son âme, et tout ce qui voulait bien rester. Indescriptible émotion, indescriptible frisson.

Certaines le décrivent comme un feu d’artifice sur un coucher de soleil, avec les petits angelots derrière. La plus belle image qui leur était donnée d’imaginer. Pour Aya, ce fut simplement un regard empli de tant de choses qu’elle y aurait succombé une seconde fois avec plaisir et sans aucune réticence. Le plus beau paysage, c’était cet océan chocolat qui la fixait tandis que leurs corps se retrouvaient plutôt que se découvrir. Elle y vit des vagues de plaisir, sensiblement pareilles à celles qui agitaient légèrement son corps de soubresauts à peine perceptibles. Leurs cœurs battaient à l’unisson, jusqu’à ce qu’ils n’aient plus l’impression de faire qu’un. Tout le reste n’était que foutaises et détails, seules comptaient les délicieuses sensations qui les habitaient. Aya restait là, ses doigts enserrant la peau du dos de Saïl et ne paraissant pas vouloir se retirer tandis que la respiration de son partenaire laissait l’adolescente dans un autre monde.

Reprenant peu à peu la maitrise de son corps, elle répondit avec ferveur aux énièmes baisers échangés avec l’homme en face d’elle, tentant à chaque instant de lui transmettre un peu d’elle par de simples caresses buccales. Et lorsque ses lèvres se détachaient de celles de son amant, c’était pour vagabonder dans son cou, se nicher sous une oreille, repartir à l’exploration d’un menton, d’une épaule. Inconsciemment, une fois qu’elle eut suffisamment apprécié à sa juste valeur le contact très intime qu’elle venait de partager avec Saïl, Aya remua le bassin lentement d’abord, sentant de délicieux appuis s’écarter pour lui permettre de mieux accueillir Saïl. Sa respiration s’emballa quelque peu, et de petits gémissements commencèrent à s’échapper de sa bouche sans qu’elle ne puisse les retenir, bien que l’envie n’en soit pas présente.

Dans cette position, les deux jeunes gens goûtaient aux joies de la proximité, partageaient alors quelque chose que peu de couples avaient l’occasion de saisir. Leurs mouvements étaient cependant limités, et Aya ne pouvait même pas se laisser aller aux balancements instinctifs de son corps, limitée qu’elle était avec bras et jambes enroulés autour d’un autre corps que le sien, et fermement liés autour de Saïl. Aussi, dans une tentative un peu trop brusque peut être de sentir de nouveau la lente mais profonde communion de leurs mois le plus intimes, Aya appuya trop fortement de son corps et fit tomber Saïl à la renverse. Qu’à cela ne tienne, la jeune femme n’allait pas s’arrêter pour autant. Se collant de plus belle à ce corps qu’elle ne voulait quitter pour rien au monde, l’adolescente reprit ses baisers, qu’elle pouvait alors faire plus audacieux, plus aventureux, tandis que ses hanches se mirent automatiquement en mouvement, lui arrachant un visage crispé par un désir encore inassouvi. Bien qu'elle ait envie de se redresser pour le contempler dans toute sa splendeur, Aya se retenait en restant auprès de lui, ce désir surpassant tous les autres. Avant, une autre excuse aurait sans doute été la honte d'exhiber entièrement son corps à son amant, affirmant ses courbes dans une chevauchée audacieuse. Maintenant, le désir de posséder sa bouche était sa seule barrière. Tout le reste était parti en cendres, fière qu'elle était de ne faire qu'un avec lui.

Qui a dit que le plaisir féminin était bien moindre ou plus compliqué à obtenir ?

Saïl Ursoë

Créature

Re : May be. [Reservé]

Réponse 27 vendredi 05 novembre 2010, 00:56:33

Deux arbres, deux arbres sous une coupole, un abri, une petite serre, protégés des rudesses du monde extérieur par une agréable chaleur, des remparts fidèles et un agréable terreau revitalisant. Leurs racines sont enfoncées dans l’environnement qui les recueille comme s’ils ne devaient jamais le quitter, comme si le duo de plantes était voué à conserver éternellement cette posture de douillette immobilité empreinte d’une douce perfection. C’est une véritable peinture canonique que l’on voit là présentée à ses yeux, lesquels paraissent escamoter à travers un judas un fragment de sagesse sacrée ; c’est un tableau exemplaire pareil à ceux dont étaient ornées les villas romaines pour donner aux jeunes esprits de quoi s’édifier.
A y regarder de plus près, on distingue d’une part un chêne, paisible et sobre mais robuste et honnête, et d’autre part un roseau, délicat, frais, capricieux et vivace. Ce sont deux végétaux aux traits bien distincts, mais malgré ces évidentes différences, on aurait bien du mal à voir où commence l’un et où finit l’autre : leurs troncs accolés, leurs tiges enlacées, leurs feuilles enchevêtrées, ils s’entremêlent avec une telle harmonie qu’on les estimerait en vérité ne faire qu’un.

Leur écorce luisant sous la transpiration qui mouchetait la surface de leurs corps, tous deux étaient voués à l’autre, aussi pleinement qu’un être doué de conscience peut l’être, leur essence à chacun s’étant transmuée, altérée, sublimée au contact de celle de l’autre. Comme en une merveilleuse opération alchimique dont le secret pourrait receler jusqu’aux plus profonds secrets des affects humains, ils avaient uni leurs êtres, s’éveillant à une gamme inouïe de sensations et d’émotions. Un spectre de couleurs ravissantes rayonnait en Saïl, une symphonie indicible chantait dans son esprit, et un troupeau de flocons béatifiants cavalcadait jusque dans les moindres recoins de ses chairs.
Et alors même que tout cela s’apaisait à la manière d’une nuée d’oiseaux exubérants s’accordant quelque repos, voilà que l’envol reprenait, le couple se remettant en branle sous l’élan des baisers d’Aya. C’était une sarabande spontanée, sans méthode, sans technique, mais cela n’en emplissait pas moins le jeune homme d’une fougue qui lui faisait rendre non moins ardemment les piques buccales dont elle le gratifiait. S’entrecroisant, se rencontrant puis s’écartant au petit bonheur la chance, leurs lèvres parsemaient sans mesure le buste qu’elles avaient offert à elles, cela dans un concert de soupirs, de gémissements et de respirations hachées par le rythme précipité des bises.

La tête à la chevelure de ramages des deux arbres s’était donc mise à bouger sous l’influence des vents de la passion qui, après un instant d’accalmie, s’étaient remis à souffler avec une force croissante. C’est alors que, mû d’une nouvelle impulsion de désir, le roseau agita ses racines enroulées autour du tronc du chêne, et, remuant à son contact à la manière d’une dextre araignée avide, se mit à venir à son encontre avec une vigueur et une insistance renouvelées. Prodige stupéfiant, le chêne que l’on aurait pu voir affronter sans faillir des ouragans pour protéger sa chère et tendre belle plante, se mit alors à s’affaisser lentement sous l’impression de celle-ci, tombant à la renverse dans un grondement froufroutant de feuilles. Poursuivant sur sa lancée, l’adolescente se repositionna sur son plus dévoué serviteur, renouvelant son assise en une posture d’allure dominatrice apte à en frustrer certains autant qu’à en exciter d’autres.

Pourtant, ni l’une ni l’autre de ces émotions ne l’envahit, car après tout, quelle bizarrerie, quelle incohérence pourrait-il y avoir à ce que le sol fût sous la coupe de la nue ? En contre-plongée de celle qui le complète, il peut la contempler dans toute sa majesté, en embrasser jusqu’aux plus infimes détails en tout confort, son être tout entier vibrant contre elle. Abaissant sa voûte céleste, l’azur déjà se fait à nouveau la moitié parfaite de la terre, tendant ses lippes en croissant de lune vers des montagnes lointaines, et lorsque l’astre nocturne disparaît au loin en paraissant frôler l’arête des cimes, il semble s’unir avec elles.
Pour les deux amants, les fondements même du monde donnaient l’impression d’être compromis, remis en question, bousculés, les étoiles ayant l’air de défiler en une gigue frénétique au-dessus de leurs chefs alors que les draps sous eux se dissolvaient pour laisser place à une spirale confuse et chaotique, l’univers dansant follement autour d’eux. Le ciel se zébrait d’étincelles fortes comme des orages qui jetaient des lueurs sur les plaques géologiques en contrebas, lesquelles se fendillent sous l’effet d’une forte chaleur et laissent apercevoir ça et là des coulées de magma fumantes et luisantes. Tout ce qui peut exister n’existe plus que pour eux, les composantes les plus infimes de la réalité se retrouvant dans ce couple en plein dans un acte pareil à une célébration des plus anciennes primordialités. En vérité, tout autour d’eux aurait pu s’effondrer que Saïl n’y aurait pas fait attention, tant que le moment qu’ils partageaient pouvait se poursuivre, tant qu’ils pouvaient être ensemble sans avoir à s’inquiéter, n’eusse été que pour cette nuit.

Mais déjà, la situation progressait vers les manifestations d’affection les plus directes et les plus impulsives, le duo ayant laissé le désir prendre corps en eux pour se laisser aller pleinement aux plaisirs de la communion physique. Parcourant de ses paumes l’échine de sa partenaire jusqu’à arriver au sommet de son crâne, étreignant amoureusement la chair chaude et élastique sur son passage, il ébouriffa les cheveux de l’adolescente, certes pas ainsi qu’il aurait pu le faire vis-à-vis d’un enfant pour le rassurer, mais simplement comme pour sentir jusqu’aux moindres parties de cette enveloppe charnelle dont il chérissait tous les aspects, sans cesser de se laisse enivrer par les baisers qu’il recevait autant qu’il rendait. Ensuite, refaisant leur parcours dans l’autre sens, ses grandes mains revinrent sur le dos d’Aya pour aller ensuite plus bas et s’apposer sur les hanches de la demoiselle, leur imprimant alors sans autre forme de procès un ample mouvement répété de bas en haut et de haut en bas.
La manœuvre était cavalière, c’était là le moins que l’on pouvait dire, mais il n’y aurait eu lieu de la reprocher que si elle avait été déplacée. Or, en la circonstance, à en juger par son expression faciale autant que par les symptômes physiologiques dont son être irradiait ou encore par les sons qu’elle laissait échapper, elle n’eût été guère encline à ce que les choses en restassent là. De braises à flammèches puis à flammes, les sentiments qu’ils partageaient étaient maintenant devenus un véritable feu de joie, irradiant d’une chaleur d’autant plus invincible que les combustibles qui l’alimentaient n’étaient pas prêts de faire défaut.

Ce fut donc une gestuelle effrénée qui s’engagea, chacun des amants paraissant se mouvoir selon les notes d’un boléro orgiaque dont la partition s’improvisait au fur et à mesure de la progression de leur chorégraphie luxurieuse. Ce fut une succession de chocs sourds entre deux corps qui ne se séparaient que l’espace d’un instant pour revenir l’un vers l’autre avec d’autant plus de force. Il y avait là une chevauchée brûlante et dératée ; un parcours sauvage sous un soleil torride dont les rayons affolants ne faisaient qu’abreuver cette soif de délice tout en l’entretenant ; une ascension dopante vers des sommets vertigineux et qui s’achèverait par une chute extatique. Et cela -dans une atmosphère cajolante d’intimité sereine baignée de la lumière pâle d’un clair de lune- s’accompagnait de force expressions de joie et de plaisir, lesquelles s’élevaient à chaque fois pour résonner successivement un instant en toute modestie contente dans la pièce. Sarabande diaboliquement prenante à laquelle Saïl s’adonnait sans remords ni incertitudes, baignant de baisers dévorants sa princesse dont l’allure d’amazone échevelée ravie le captivait et l’incitait toujours à poursuivre ses mouvements hardis. Les jouissances que l’activité procurait à Aya redoublaient celles qu’il éprouvait lui-même, et l’encourageaient à aller plus loin dans cette voie en un formidable cercle vertueux ; ou plutôt, en une spirale dont la pointe s’annonçait comme une délectable consécration.
Dites, en me voyant, que voyez-vous ?                             En vérité, je suis partagé
Est-ce un monstre, un cauchemar, un loup fou ?                  Entre Khral, ce fougueux loup emporté
Est-ce un fort centaure qui brame et mord ?                       Et Saïl ce timide humain gêné,
Est-ce une bête de poils au coeur d'or ?                            Mais ça, jamais mal intentionné !
Est-ce Elephant Man qui crie, mis à mal :                          Certes, je grogne, je bondis je rue,
« Non, je ne suis pas un animal ! » ?                               Mais jamais je ne griffe ni ne tue.
                                                                               Aussi, approchez donc, n'ayez pas peur.
                                                                               C'est promis, je vous recevrai sans heurt.




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