Fugue ( Pv )

- Je crois ... que je suis ... dans la merde.

Ludmilla se mordit violemment la lèvre inférieure, rabattant en arrière sa queue de cheval mal fichue qu'elle ne tarderait sans doute pas à enlever. Depuis environ 10 minutes, selon sa montre argentée, elle attendait sous un arbre que la pluie cesse. L'hiver se faisait malheureusement ressentir, et ce, partout. La neige allait devenir verglacée, elle glisserait sûrement, et le temps aurait raison d'elle et de sa santé. En bref, c'était assez mal parti pour le moment. La pluie, la nuit, les bruits louches, l'atmosphère pesante et le stress sensationnel lui retournait l'estomac.

Il était 19h00, dans ces eaux-là en tout cas. La nuit, rapide en hiver, tombait doucement, recouvrant les rues d'une ombre tendre. Le temps s'était dégradé dans la soirée. Soirée où, prise d'un excès de rage et de " J'en ai ma claque de cet internat " , Ludmilla avait décidée, vaillamment, de sauter du haut de sa fenêtre, et de disparaitre. Dans quel but ? Elle l'ignorait. Elle avait juste voulue déguerpir, aussi vite que possible. Elle avait enfilée son long manteau noir, dont le col rabattu tenait son menton au chaud, attrapée sa jolie robe qu'elle avait payée chére dans une boutique aux allures "Gothic Lolita", et ses ballerines vernies. Elle avait aussitôt disparue de la surface de sa chambre, pour venir galoper dans les rues.

Et là, dans ces rues, elle réalisait sa bêtise. Elle ne pouvait pas revenir taper à la porte de l'internat, elle serait punie. Elle ne pouvait pas s'abriter, elle ne connaissait personne dans ces alentours. Elle ne pouvait pas non plus se nourrir, elle n'avait plus d'argent, et ne disposait que de deux bouteilles de boissons énergisantes, et d'un sachet de M&N's. Plutôt frugal. Elle ouvrit une première bouteille, et but une gorgée. La boisson était gelée, ce qui arracha un frisson violent à la jeune fille.

- Ouais, non, je ne crois plus. Là, c'est sûr.

Dormir serait donc impossible cette nuit, il fallait qu'elle s'y fasse. Elle devrait trouver un remède, une solution rapide. Elle se frictionna les bras, s'appuyant contre l'arbre, écoutant la pluie tomber. Elle en avait vraiment assez ... Le destin ne l'aimait pas, voilà tout. Elle but une nouvelle gorgée, maudissant chaque être vivant heureux et au chaud en ce moment.

Depuis qu'elle a goûté au centre commercial, Abies est intriguée par la ville Japonaise dans laquelle elle se trouve. Elle n'est ni excitée par ses nouvelles expéditions, ni apeurée. Juste curieuse. Cela fait alors maintenant quelques jours que la magicienne traine dans les rues, prenant de plus en plus d'assurance. Elle commence maintenant à bien connaitre les lieux, rares sont les rues qu'elle n'a pas exploré.

Ketsu-chan sous son bras, elle se promène dans l'une des nombreuses rues qu'elle reconnait maintenant. Elle l'avait déjà visitée, pour sûr. Puis, elle voit un chat tout blanc lui passer sous le nez. Elle décide alors de le suivre, doucement, voulant devenir son amie. L'animal conduit l'homoncule dans une rue étroite dont elle n'a aucun souvenir. Le félin, attendant au pieds du mur d'en face, regarde Abies et miaule légèrement.

<< Tu es mignon. Viens, je veux te câliner... Je ne te ferai aucun mal tu sais... >>

La magicienne s'approche alors du chat, à petits pas. Puis, à quelques mètres, il se met à courir en direction du mur. Et à la plus grande stupeur de la lapine, le félin disparait. Elle croit d'abord halluciner, puis se ressaisit assez vite.

<< Ketsu-chan... Tu... Tu as vu ça ? Est-ce que ça serait une porte comme l'on avait prise avec papa... ? >>

La petite décide alors de passer tout d'abord la main dans le mur, puis se retrouve happée par ce qui est effectivement une porte menant tout droit à Terra. Elle arrive alors dans une ruelle de Nexus, ville dont elle a de rares et sombres souvenirs. La neige recouvre entièrement le sol, ainsi que les bâtiments bien différents de ceux du plan dont elle vient. Regardant au loin, elle voit une jeune fille adossée contre un arbre. Elle sort alors de la ruelle et se dirige doucement vers celle-ci. Une fois à côté, elle tend la main entre elle et l'autre jeune fille, la paume vers le haut, et fait jaillir une petite flamme, afin de réchauffer la personne contre l'arbre, qui à l'air complètement frigorifiée. Abies la regarde, sans dire un mot.

Ludmilla ne put s’empêcher, sur le coup, de reculer vivement. Une flamme sans allumettes ni briquet ? C’était inhabituel, anormal ! Mais la raison l’emporta sur la prudence, et elle revint tranquillement se poser prés de la jeune inconnue. Elle se mit, doucement, à la dévisager, sans se montrer trop violence dans ses actes de curiosité. Un petit être, une jeune enfant avec une peluche, semble t’il, qui semblait des plus incongrues. Elle ne s’attendait pas à croiser ici ce genre de personnes. Pour dire vrai, elle avait gardé un cutter rouillé pour faire la peau à la première personne qui lui voudrait du mal. Mais là … Elle eut un sourire timide à l’intention de la petite, se recoiffant pour rester présentable. Elle semblait étrange, surnaturelle, et dégageait une aura des plus tendres et angoissantes à la fois.

- Je … Merci … osa-t-elle timidement.

Elle plongea sa main dans son sac, pour extraire rapidement la bouteille qui n’était pas encore utilisée, et la présenta à l’inconnue, lui proposant de boire, avec toujours un sourire. Elle se recoiffa, sa timidité reprenant le dessus, puis se décida, avec une gêne dissimulée, à lui parler. Après tout, elle ne perdrait rien. Elle n’avait pas l’air de cacher des poignards sous son manteau, et même si elle restait étrange, Ludmilla n’avait pas tellement peur.

- Je m’appelle Ludmilla, dit-elle doucement, en lui adressant un grand sourire.

Elle se recoiffa à nouveau, ses cheveux lui collant à la nuque et aux joues.

Abies se rend compte qu'elle a été peut-être un peu trop directe. Elle tente alors de montrer tant bien que mal à la jeune fille qu'elle ne lui veut aucun mal. La lapine l'a trouve d'ailleurs tout à fait charmante, et quand celle-ci se recoiffe, la fillettes rougit sans savoir pourquoi. La jeune fille la remercie, ce qui fait plaisir à Aies, qui lui adresse alors un large sourire, accompagné d'un petit rire de contentement. Puis, son interlocutrice sort une bouteille de son sac, et la tend à l'homoncule, lui proposant sans doute d'en boire quelques gorgées.

Est-ce pour remercier Abies de la réchauffer ? Cette dernière rougit d'ailleurs à nouveau, n'étant pas habituée à ce qu'on lui propose un partage. Ne sachant pas comment réagir, elle balbutie maladroitement:

<< Non... Je... Merci, c'est gentil... Je peux vraiment en boire... ? >>

La jeune fille sourit, tout en se recoiffant à nouveau. Abies admire énormément la beauté et la grâce qui émane de sa compagnie. Puis, celle-ci donne son nom. Alors à son tour, la création alchimique donne le sien.

<< Moi, c'est Abies. Et elle, que je tiens par la main, c'est Ketsu-chan, ma petite soeur ! >>

- Et bien ... Bonjour Abies, et bonjour Ketsu-chan !répondit-elle t'elle en souriant.

Ludmilla resta interloquée par les paroles de la jeune fille. Non pas que le fait qu'elle considère sa peluche comme sa petite sœur l'intrigue, mais le fait qu'elle demande si elle peut vraiment en boire, et ce en rougissant ... C'était étrange. " Peut-être a t'elle eu une enfance difficile ? " Ludmilla soupira, avant de boire un coup. Elle préférait penser cela, plutôt que se poser milles et une questions angoissantes concernant ce petit être de chair. Elle se recoiffa à nouveau - geste qu'elle adoptait quand elle était un peu gênée, ou stressée - et lui adressa un grand et franc sourire.

- Oui, évidemment, tu peux en boire !

La pluie redoubla d'intensité, faisant frémir doucement Ludmilla. Quel temps ! Elle était habituée à mieux. Sûr, elle se casserait la figure sur le verglas, demain. Elle regarda les alentours, vérifiant qu'aucune créature malfaisante ne leur voulait du mal, traînant dans les rues. Elle fut rassurée par le vide de la rue, et ne put s'empêcher de sourire à Abies.

- Grâce à toi, j'ai moins peur, tu sais, avoua t'elle avec un sourire. Parce que toute seule, dans une rue, je t'avoue que ... c'est angoissant.

La jeune fille but une gorgée dans sa bouteille, refermant le col de son manteau, sentant un vent se lever. A cette allure là, elles allaient sûrement mourir de froid ... Brrr !

La boisson que Ludmilla lui proposa était tout simplement délicieuse. Ne voulant pas abuser de la gentillesse de se compagnie, elle rend très vite la bouteille. Quand Abies se rend compte qu'elle rassure Ludmilla, elle rougit comme jamais. Il est vrai qu'elle n'a jamais protégé personne d'autre que sa propre personne et sa petite soeur.

<< Les personnes gentilles comme toi méritent protection. Si tu as des problèmes, tu sais, je peux t'aider. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour te rendre heureuse. >>

Abies remarquait au début de leur conversation que son interlocutrice n'était pas sereine d'esprit, que quelque chose la tracassait. Et puis, rester dehors de ce temps là, ce n'est pas anodin. La fillette hésite à lui demande ce qu'il se passe, ne voulant pas non plus lui paraitre trop pesante. Elle n'y fait donc pas allusion. Ludmilla tremble de plus en plus, le temps se faisant de plus en plus glacial. Alors, la lapine pose lentement ses mains sur les épaules de la jeune fille, en étant la moins brusque possible pour ne pas l'effrayer. A partir de là, elle libère à l'aide de ses mains une source de chaleur qui se diffuse dans tout le corps de la brune. Cette technique est très efficace, malgré le fait qu'elle ne réchauffe qu'une seule personne à la fois.

<< Tu vas mieux ? C'est assez chaud ou tu veux plus ? >>

Ludmilla eut un nouveau sourire, sentant ses joues rosir, en entendant les paroles de la jeune inconnue. C'était un amour, cet être. Elle ne pouvait pas - elle en était persuadée ! - rencontrer une meilleure personne en cet instant même. Même si elle ne connaissait pas vraiment Abies, même pas du tout jusqu’à ce jour, elle ne pouvait s’empêcher de ressentir de la sympathie envers une personne aussi tendre. Même son aura était d’une tendresse exquise, d’une douceur mielleuse.

Quand Abies toucha la jeune fille avant même qu’elle puisse répondre à sa gentille remarque, celle-ci frissonna de plaisir, en sentant la chaleur lécher son corps et réchauffer chacuns de ses membres. Elle eut un grand sourire, heureuse. Elle se frotta la joue, gênée, et d’une voix douce :

-   Oh, tu es adorable, Abies …Je ne sais pas d’où tu tiens de pareils pouvoirs, mais c’est très agréable !

Ludmilla se recoiffa doucement, à nouveau, puis se tourna vers la petite inconnue.

-   Mais tu vas mourir de froid, si tu ne t’occupes que de moi !

S’inquiéta t’elle un instant, fixant Abies. C’était vrai ! Il ne fallait pas, en cet instant, faire preuve d’égoïsme. Il faisait froid, et … Ludmilla eut une idée. Elle attrapa son sac, en sortit le paquet de M&N’s, et le tendit à Abies, souriante, lui en proposant.

La petite aimerait tellement raconter sa propre naissance, afin de répondre aux questions de Ludmilla en ce qui concerne sa magie. Mais Abies se demande si c'est réellement une bonne idée d'en parler maintenant, dans une situation si inconfortable pour son interlocutrice. Appréciant déjà beaucoup celle-ci, la lapine s'en voudrait de la faire fuir. Et puis, est-ce si important que ça ? Elle préfère alors garder le silence à ce sujet, ce qui vaut un blanc de quelques secondes dans la conversation.

Ludmilla, à son tour, s'inquiète pour l'homoncule, qui commence effectivement à ressentir une fraicheur l'envahir, n'étant cependant pas insupportable. Elle continue alors de réchauffer sa sympathique compagnie, en lui disant:

<< Je ne mourrai pas de froid, mon corps peut supporter des températures plus basses que ça. Tu ne dois pas t'inquiéter pour moi, Ludmilla. >>

Puis, cette dernière lui propose un paquet de "M&N's", sortes de petites billes aux couleurs vives et différentes. Abies renifle discrètement à quelques centimètre du paquet, ce qui lui donne tout de suite l'eau à la bouche. Il y a en ce billes du chocolat, elle en est certaine ! Et la fillette en raffole. Ayant malheureusement les mains occupées, la petite rougit et balbutie:

<< Je... Est-ce que... Tu peux m'en donner un directement... Dans ma bouche..... ? >>

Quelle situation délicate, et même si Abies sait qu'elle n'a pas à paniquer de la sorte, elle ne peut se contrôler et à l'impression qu'elle va fondre d'un instant à l'autre.